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29 avril 2025
Politique
LES ACTEURS DES MÉDIAS TOUJOURS EXCLUS DE LA GESTION DE LA MAISON DE LA PRESSE
Si le président de la République en nomme le Directeur Général du fait du statut d'Epic de l'édifice, il est incompréhensible que le Conseil d'Administration, organe de gouvernance ne soit pas dirigé par les acteurs - COMMUNIQUÉ DE LA CAP
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué de la Coordination des Associations de Presse (CAP), daté du 5 juin 2020 à propos de la gestion de la Maison de la presse par l'Etat.
"La Coordination des Associations de Presse (CAP) a appris, via le communiqué du Conseil des ministres du mercredi 3 juin, les nominations du doyen Alioune Dramé au poste de Président du Conseil d’Administration de la Maison de la Presse et de Bara Ndiaye, qui en est devenu le Directeur général. La CAP adresse ses félicitations à ces deux confrères.
Toutefois, la CAP s’indigne de la violation du "consensus" qui avait jusque-là prévalu entre les acteurs des médias et le ministre de la Culture et de la Communication, M. Abdoulaye Diop.
En effet, le mardi 11 juin 2019, lors d’une première audience avec la CAP ( SYNPICS, le CDEPS, le CORED, l’APPEL, la CJRS, l’UNPJS, le CTPAS et l’URAC) Abdoulaye Diop avait demandé aux organisations professionnelles des médias de surseoir au mot d’ordre de boycott de plusieurs années de la Maison de la Presse. Le ministre avait plaidé pour que les acteurs désignent les membres devant représenter le patronat et les travailleurs au Conseil d’administration, et avait beaucoup insisté sur la nécessité de donner vie à ce bel édifice. Il a même été retenu que d'autres acteurs puissent être cooptés pour "corriger" le décret qui ne prévoit que deux organisations (Synpics et Cdeps) comme membres du CA.
Faisant alors confiance au ministre, et dans un souci d’apaisement, les acteurs des médias avaient alors accepté de surseoir au mot d’ordre de boycott de la Maison de la Presse.
Le ministre avait ainsi pris l’engagement de proposer au président de la République que le poste de président du conseil d’administration soit dévolu aux acteurs. Des engagements fermes ont, dans la foulée, été pris pour une application effective du Code de la presse et le démarrage des travaux sur les autres projets du secteur des médias.
Depuis lors force est de constater qu'il n’y a aucune avancée notable dans le secteur et M. Abdoulaye DIOP joue au maître-boulanger qui a réussi du reste à enfariner toute la presse. L'exemple le plus patent est la répartition opaque et en toute violation des règles de transparence et de bonne gouvernance de l'aide à la presse.
Déjà avec Abdoulaye Bibi Baldé, alors ministre de la Culture et de la Communication, la CAP avait remis au ministère toute la documentation prouvant que le site est une propriété du SYNPICS. C’était la volonté du chef de l’État d’alors de donner aux acteurs des médias une maison de la presse, financée et équipée par l’État. Depuis, cet édifice a été confisqué en excluant les acteurs des médias qui en sont les propriétaires légitimes. Cela va à l’encontre de tous les exemples des maisons de la presse en Afrique de l’Ouest et ailleurs.
Aujourd’hui, face au refus du gouvernement de restituer la Maison de la Presse, la CAP se voit obligée de réaffirmer le boycott de cette institution qui n’est nullement conforme à l’esprit qui a motivé sa création.
La CAP a élaboré un plan d’actions pour la restitution de la Maison de la Presse aux acteurs des médias. D’autres actions seront menées pour atteindre cet objectif.
De tous les acteurs sociaux, la presse semble être le mal aimé du régime actuel. Sinon comment comprendre une rupture si bruyante du consensus qui a guidé à l'érection de la plus belle et imposante maison de la presse d'Afrique de l'ouest ? Une maison de la presse peut-elle ne pas être gérée par les acteurs à qui elle est dédiée ?
Si le Président de la République en nomme le Directeur Général du fait du statut d'Epic de l'édifice, il est incompréhensible que le Conseil d'Administration, organe de gouvernance ne soit pas dirigé par les acteurs. Pis, ce Conseil ne devrait compter que deux membres issus des acteurs pour 9 fonctionnaires ! Ne s'agit-il alors pas d'une maison des fonctionnaires ?
Avec une enveloppe de 5 milliards pour sa construction et des contributions financières de plus d'un milliard depuis 2012, la Maison de la presse ne devrait pas déroger à la règle induite qui veut que des structures du genre voient les acteurs et bénéficiaires inclus dans sa gestion. A l'image de l'IPRES, de la CSS, et même dans une moindre mesure de la Sodav, la maison de la presse devrait voir son Conseil d'administration constituée majoritairement d'acteurs des médias et au moins la présidence de celui-ci assuré par un candidat désigné par les mêmes acteurs."
par Siré Sy
ABDOULAYE WADE, AUDACE ET ORIGINALITÉ (3/3)
EXCLUSIF SENEPLUS - Il lui a manqué durant tout son magistère, un dispositif central de planification pour exécuter ses idées sans trop perturber le fonctionnement de l’Etat - PRÉSIDENT ET GESTION DE CRISE, ‘’QUAND L’HEURE EST GRAVE !’’
L'adage dit que c'est au pied du mur que l'on reconnaît le maître-maçon. Dans la même temporalité, c'est par et dans la gestion de crise (s) de magnitude ‘’secousse du régime’’ sur l'échelle d'une Nation-État, que l'on apprécie les choix, les décisions et le leadership d'un chef d'Etat dans sa fonction de président de la République. Le Think Tank Africa WorldWide Group vous propose Feuilleton managérial : Président et Gestion de crise, ‘’quand l'heure est grave!’’.
Pour cette troisième épisode de ''Président et Gestion de crise ‘’quand l'heure est grave’’, Style et Méthode de gestion de crise du président Ablaye Wade, ‘’Gorgui'', le Mao sénégalais.
Dans son style de gestion, on peut noter une volonté très poussée du président Wade à redonner aux Sénégalais, une capacité de rêver, d’échapper à l’adversité et à la dureté des contraintes économico-sociales, à travers un sens d’innovation et d'imagination extrêmement fertiles. Il a juste manqué au président Ablaye Wade durant tout son magistère, un dispositif central de planification, à même de mettre ses idées en ordre et de les exécuter, sans trop perturber le fonctionnement de l'Etat et de la chose publique.
Dans sa gestion de crise ‘’quand l'heure est grave’’, le président Wade n'aura jamais subi l’agenda d’une crise, ne s'est jamais laissé débordé par une crise, quitte même à créer une crise sur la crise. Wade, un illustre metteur en scène politique. L’autre trait de caractère si saisissant dans le style et la méthode Wade, c’est sa capacité de dépassement des adversités et de pardon aux Hommes. Wade se voyait presque comme un grand-père et/ou comme un père et les Sénégalais étaient ses petits-enfants voire ses enfants. Et en tant que tel, une issue heureuse est toujours trouvée. N’est-ce-pas ?
Une médaille a forcément un revers. Si dans son style et sa méthode, le président Senghor fut ‘’prestige et autorité’’, le président Ablaye Wade, dans son style et sa méthode, fut frappé par cette démesure que De Gaulle appelait ‘’la passion d’étendre coûte que coûte, sa puissance personnelle au mépris des limites tracées par l'expérience humaine, le bon sens et la loi.”
Le président Abdoulaye Wade, sous sa présidence (2000-2012), a eu à faire face à trois crises d’amplitude ‘’secousse du régime’’ sous l'échelle d'une Nation-État : une crise énergétique, une crise financière et une crise alimentaire. Le président Abdoulaye Wade, au chapitre de sa gestion de la crise énergétique (pétrole et électricité), n'a pas pu empêcher des émeutes de l'électricité, une saignée des finances publiques et du budget, à hauteur de plus de mille milliards de Francs CFA, sans résultat probant. S’il y a un goût d'inachevé dans le magistère du président Wade, c'est bien la gestion de cette crise énergétique, avec un prix du baril à 190 dollars et un rationnement dans la fourniture de l'électricité aux entreprises et aux ménages. Cette crise énergétique fera partie des causes qui vont emporter le président Wade et son régime.
Le président Wade va aussi faire face - de manière indirecte - à une crise financière, qui aura un fort impact dans le parachèvement de ses chantiers. Au point que le président Wade, pour s'en sortir et reprendre les choses en main, va s’ouvrir et ouvrir l'économie sénégalaise, aux capitaux du Moyen et Proche Orient et aux capitaux des pays d’Asie.
Et enfin, le président Wade va faire face à une crise alimentaire qu’il aura brillamment gérée. Car dans un contexte de crise alimentaire mondiale, au point de dégénérer vers des émeutes et des saccages un peu partout en Afrique, Wade a lancé l'opération Goana, en réhabilitant la production horticole, rizière et de contre-saison. L’une des prouesses qu’aura réussi le président Wade, dans la gestion de cette crise alimentaire, c'est de lancer le go d'une perspective vers une autosuffisance alimentaire qui reste à parachever.
Ablaye Wade, le ‘’Mao Sénégalais’’
Mao Zedong, est l'homme de la Longue marche (1934-1935) chinoise. Une marche qui posa les premiers pas de ce qui est le grand reclassement de la Chine, que Deng Xiaoping, a eu à parachever et que Xi Jinping est en train de consolider. La Chine, au centre du monde, précurseur et grand vainqueur de la mondialisation.
Ablaye Wade est celui qui a posé le Sénégal, sur des rails nouveaux, à partir de 2000, en permettant au Sénégal, d’emprunter une toute autre trajectoire historique dans sa marche vers le progrès. Ablaye Wade est pour le Sénégal et l'Afrique, ce que fut Mao Zedong pour la Chine et l'Asie. Une idée de la Politique et du Temps. Un temps appelé à survoler le temps, pour s'inscrire dans la durée imputrescible des époques sublimées, celles qui éclairent la marche d'un pays, le Sénégal ; la marche d'un continent, l'Afrique. Si pour Mao Zedong, ses écrits théoriques et sa pratique politique ont donné naissance à un courant marxiste-léniniste connu sous le nom de maoïsme ; les écrits théoriques et la praxis politique d’Ablaye Wade ont donné naissance à un courant du libéralisme à l’africaine qu'est le Wadisme, une doctrine économique et politique dite du Libéralisme-interventionnisme.
Durant ces deux mandats, Ablaye Wade, orateur doué et fin tacticien, fait passer le nombre de collèges de 220 en 2000 à 749, et celui des lycées, de 48 à 134. Sur la même période, le budget de l’Éducation nationale a quadruplé. Ablaye Wade lance de grands travaux pour moderniser le Sénégal, réaménage le port de Dakar, construit un nouvel aéroport international, une nouvelle autoroute et étend l’électricité dans les campagnes. Sur le plan de la santé, Ablaye Wade double le nombre de structures sanitaires (18 centres médicaux), améliore les conditions d'accès à l'eau potable et parvient à faire baisser la mortalité infantile. Ablaye Wade développe une grande politique agricole, la Grande offensive agricole pour la nourriture et l'abondance (Goana) qui va changer la carte agricole du Sénégal (riz, arachide et horticulture). Sur le plan économique, entre 2000 et 2010, Ablaye Wade relève la situation économique du Sénégal, avec un taux de croissance (+4%) supérieur à celui des années 1990, une inflation contenue et des ressources de l'État en constante augmentation. Sur le plan international, Ablaye Wade inaugure l’ère de nouveaux partenaires économiques avec le Moyen-Orient et l’Asie et promeut le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), projet panafricain visant à faire entrer l'Afrique dans le commerce mondial et à se libérer de l'assistanat.
A suivre, l'épisode consacré au président Macky Sall
La crise actuelle du coronavirus (Covid-19) a donné un nouvel élan à la nécessité, pour les pays africains, de créer des registres fonciers complets et à jour, selon le Centre africain sur les politiques foncières
La crise actuelle du coronavirus (Covid-19) a donné un nouvel élan à la nécessité, pour les pays africains, de créer des registres fonciers complets et à jour, selon le Centre africain sur les politiques foncières. Ceci pour protéger les droits fonciers des citoyens ordinaires, en particulier dans les zones rurales. ‘’EnQuête’’ a saisi l’occasion pour s’entretenir avec l’expert foncier Alla Kane, par ailleurs Inspecteur des impôts à la retraite, de la situation de la réforme du foncier au Sénégal.
Le Centre africain sur les politiques foncières plaide pour la numérisation des registres fonciers en Afrique. Au niveau national, où en est le Sénégal ?
Je suis pour une réforme foncière radicale, contrairement à ce qui se passe actuellement qui est plus informel. Parce que le Sénégal continue de vivre sous deux régimes de gestion des terres. Il y a le régime de l’immatriculation et le régime de droit coutumier. Là, la propriété est bien marquée, notée et, enfin, elle est en général définitive. Dès que vous avez un titre foncier, vous devenez le propriétaire définitif. Vous êtes inattaquable. Tout est publié dans des fichiers administratifs qu’on appelle la conservation foncière. Le second régime est celui du domaine national. Il régit la majorité des terres du Sénégal. Plus 80 à 85 % des terres sont sous le régime du domaine national. C’est une façon de formaliser l’informel. Parce que toutes les terres qui ne sont pas immatriculées tombent dans le domaine national et les terres immatriculées sont seulement 10 à 15 % de l’ensemble de la superficie de notre pays. C’est seulement ces terres qui sont gérées de manière claire, précise, car concernant des terres immatriculées, bien définies et bien gérées par des services qui sont là.
Le régime du domaine national date de 1964, avec la loi 64-46 du 17 juillet 1964 qui a instauré le domaine national. Car il fallait régler la gestion après l’indépendance. Quand on accédait à l’indépendance, il y avait deux régimes fonciers au Sénégal : l’immatriculation et le droit coutumier. Les terres qui n’étaient pas immatriculées étaient relevées de la gestion coutumière. Ce sont les chefs qui détenaient les terres et qui les géraient au nom de la communauté.
Quand on a eu la loi 1964, on a dit qu’il fallait faire une réforme foncière qui a donné la loi 64-46. Cette loi stipule que toutes les terres qui relevaient du droit coutumier devenaient propriétés de la nation. Ceux qui détenaient les terres sous le régime de l’immatriculation continuaient de détenir leurs propriétés. Et c’est ce qui continue jusqu’à présent. Pour moi, il faut immatriculer toutes les terres. Comme nous avons des institutions ici, il y a le pouvoir central et celui local, il faut essayer d’immatriculer les terres qui relèvent du domaine national dans les communes, au nom des communes d’abord qui vont les gérer. Et quand on aura immatriculé les terres, il y aura un second choix qui va intervenir : c’est la phase de la codification.
Quelle est la pertinence de cette codification ?
Il faudra codifier pour dire que ces terres qui sont immatriculées, comment on doit les gérer ; s’il faut y accéder, comment il faut faire. Quand on s’inspire du domaine de l’Etat, il y a un code qui définit le contenu, la nature de ce domaine, comment l’Etat gère ce domaine, comment le céder. Si on peut accéder à une terre immatriculée au nom de l’Etat, on introduit une demande que l’Administration instruit pour, en fin de compte, qu’on accède à notre demande. C’est ce qui manque au domaine national. On a laissé cela aux mains de collectivités locales qui font des délibérations qui ne sont pas gérées. C’est de l’informel. De mon point de vue, c’est de manière informelle qu’on gère les terres. Je me bats depuis longtemps pour qu'on immatricule toutes les terres du Sénégal, en nous basant sur l’expérience et en créant les conditions d’une gestion claire de ces terres. Quand on aura immatriculé les terres, l’autre phase sera la codification.
On a le code routier, le code forestier, celui de la pêche, etc. Les codes, c’est pour définir les modalités d’accès à une chose. Donc, il faut immatriculer. Les terres qui sont en milieu rural, on les immatricule au nom des collectivités locales qui vont avoir un patrimoine foncier. Mais, après, il ne faudra pas les laisser comme cela avec ces terres. Il faudra un code de gestion de ces terres pour dégager les voies claires par lesquelles ces collectivités doivent passer pour gérer. Ce sera l’occasion maintenant quand les jeunes auront des projets de déposer leur demande pour qu’on puisse leur affecter des terres, de même que les femmes rurales pour exploitations agricoles.
Mais je constate qu’avec le régime présidentiel, le régime politique qui est le nôtre, le pouvoir central n’est pas prêt à céder cette prérogative dans la gestion de toutes terres aussi bien celles du domaine de l’Etat que celles du domaine national. Il faut franchir le pas pour que le pouvoir local puisse avoir son domaine foncier qui est immatriculé à son nom, qui dégage également les modalités de gestion qu’on appelle le Code du domaine immobilier des collectivités locales.
Donc, on peut en déduire que l’immatriculation des terres est différente de la codification et la numération ?
La numérisation, c’est pour les pays qui n’ont pas de régime clair et précis. Il faut respecter le processus historique ; à savoir comment l’histoire s’est déroulée dans nos pays. Avant la colonisation, c’était le droit coutumier. La propriété était communautaire, collective. Il y avait les patriarches qui géraient les terres au nom de la communauté. Quand la colonisation est intervenue, la puissance coloniale a introduit un territoire foncier au Sénégal et dans les pays de l’ancienne AOF (Afrique occidentale française). Ils ont introduit l’immatriculation. On immatricule une surface au nom de l’Etat ou d’une famille sous le régime du droit coutumier et on dit que cette terre d’une superficie de tant d’hectares, appartient à telle personne. Et on l’enregistre dans un registre qu’on appelle le livre foncier. C’est ça la vraie numérisation. Cela porte un numéro. Donc, tous les titres fonciers sont numérisés et chaque région a son livre foncier. Quand tu vois DG, c’est Dakar-Gorée ; NGA, c’est Ngor-Almadies ; SS, c’est Sine-Saloum ; TH, c’est Thiès. Chaque région a son livre et quand on donne un titre foncier, on donne également un numéro. Ce qui est définitif et inattaquable. Parce qu’il y a un service qui est là et qui le gère.
Le titre foncier a également une vie. Quand on le vend, on va devant un notaire qui va, à son tour, à la Conservation foncière pour déposer l’acte de vente pour permettre au conservateur de pouvoir changer, pour mettre que M. X a vendu à M. Y telle terre à qui revient la propriété. Et si demain M. X mourrait, ses héritiers vont chercher un jugement d’héritier qu’ils vont déposer à la Conservation foncière et le conservateur va corriger le nom des héritiers qui se trouvaient le jugement d’héritier. Désormais, la propriété passe du défunt à ses héritiers. Et quand on le vend, la propriété passe de vendeur à l’acheteur.
Le droit coutumier a résisté à la colonisation, mais les terres immatriculées ne couvraient que 2 % de la superficie nationale. Donc, les 98 % relevaient encore du droit coutumier, quand on accédait encore à l’indépendance en 1960. Les gouvernants qui sont venus ont étudié la situation se sont rendu compte qu’il fallait évoluer. Parce qu’on avait une nation indépendante. Ainsi, ils ont versé les 98 % des terres qui relevaient du droit coutumier dans le régime du domaine national. C’est l’Etat qui va surveiller la gestion de ces terres. Le Sénégal a tellement évolué qu’il faut faire le pas nécessaire qui est la réforme foncière intégrale qui va immatriculer toutes les terres. Celles rurales, on les immatricule au nom des communes rurales et les terres des communes urbaines, au nom des communes urbaines. Et dans la définition des terres du domaine national, il y a la zone des terroirs, les zones pionnières, forestières et les zones urbaines.
Les zones pionnières qui ne relèvent d’aucune institution, on les immatricule au nom de l’Etat du Sénégal. Et chaque commune aura son domaine foncier immatriculé à son nom. On aura délimité toutes les communes et ce sera très bien. Pour assurer la réforme, il faudra codifier la gestion au code du domaine foncier national ou communal. Comme on a un code du domaine de l’Etat qui réunit tous les domaines de l’Etat, on aura un code du domaine immobilier communal.
Mais, aujourd’hui, on laisse cela entre les mains des maires qui font des délibérations qui ne sont pas encadrées. Il n’y a pas de code. C’est ce manque de code qui fait que les maires font ce qu’ils veulent. Ce qui amène les conflits fonciers récurrents qui secouent nos pays. Pour la numérisation, il y a déjà, avec l’immatriculation, des terres qui sont numérisées. Mais il faut faire la part des choses. A la place de numériser, il faut dire immatriculer. Sinon, cela va créer une confusion et cela va encore retarder la réforme foncière qui est vraiment arrivée à son heure.
Si je vous comprends bien, l’immatriculation des terres va renforcer la transparence dans la gestion foncière ?
Exactement ! Maintenant, il y a le pouvoir central qui est le président de la République, avec le présidentialisme qui caractérise le régime politique. Avec la boulimie du pouvoir que nous avons ici, le président, quand il a un mandat, il veut un deuxième et quand il a un deuxième mandat, il cherche à avoir un troisième. Et le foncier est devenu une arme de guerre. Donc, le pouvoir central n’est pas encore prêt à céder au pouvoir local cette prérogative. Pour moi, la numérisation est quelque chose de limite. Qu’est-ce qu’on numérise ? Il n’y a que les terres de manière générale qui sont là, qu’on gère de manière informelle. C’est le conseil municipal, les maires dans les communes qui font ce qu’ils veulent, parce que rien n’est défini. Il y a la loi et ses décrets d’application.
Il y a des terres qui sont immatriculées au nom de l’Etat, d’autres au nom de particuliers, celles qui sont au nom des sociétés. La Sonatel a des terres, les banques ont des titres fonciers, etc. Quand on a un titre foncier, cela veut dire qu’on est propriétaire d’une parcelle de terre qui a un numéro qui est déjà numérisé. Donc, il faut qu’il précise ce qu’ils appellent numérisation. Tous les conflits qui ont lieu maintenant ne portent pas sur des titres fonciers. Ils portent plutôt sur le domaine national. Donc, il faut régler ce domaine national, nous pousser vers l’immatriculation une fois pour tout. Il faut aller au-delà de la numérisation, en immatriculant et en codifiant les terres qui relèvent du domaine national, pour régler définitivement les litiges fonciers au Sénégal.
Quel est le lien entre une bonne gouvernance foncière et le développement agricole, surtout en milieu rural ?
Si on a des terres immatriculées au nom d’une commune, elles appartiennent à celle-ci. On a la superficie totale qu’on a délimitée. C’est pour la commune et non pour le maire, ni pour le conseil municipal. Il faut, après, codifier cette propriété et pour accéder à ces terres, quelles sont les procédures qu’il faut faire ? Au niveau de l’Etat, il y a la Commission de contrôle des opérations domaniales (CCOD) et toutes les demandes faites sur la propriété privée de l’Etat doivent être d’abord traitées au niveau local avant d’arriver à la CCOD qui a une composition définie par un décret, toujours dans le cadre du Code des domaines de l’Etat. Ses membres se réunissent et se prononcent sur les rapports de toutes les demandes qui sont faites à travers le Sénégal et donnent leur avis. La CCOD peut donner un avis favorable et qu’elle transmet au directeur des Domaines qui le retourne au niveau des régions. C’est ainsi qu’on fera un bail avec une redevance par an. Et c’est comme ça qu’il faut faire pour la commune de Sangalkam.
L’immatriculation va permettre de moderniser les campagnes. Quand on aura immatriculé les terres, au nom des communes rurales, tous les villages qui relèvent de la commune, on va leur soumettre un plan de lotissement. On va enfin lotir les villages sénégalais qui ne le sont pas jusqu’à présent. Nous sommes au XXIe siècle, les villages ont la même configuration qu’ils avaient au début du XXe siècle. Il faut à partir de là, lotir, attribuer à chaque habitant du village le numéro de sa parcelle et essayer même des recettes pour renflouer les caisses de la commune, en demandant, par exemple, que chaque propriété de terrain donne chaque année 2 000 à 5 000 F CFA pour le budget de la commune.
Enfin, les habitants du village sauront la délimitation exacte de leurs parcelles et ils vont, à partir de ce moment, ils vont pouvoir transformer leurs conditions d’habitation, construire. On fera également la même chose pour les champs qu’on va délimiter et les donner en bail à ceux qui le veulent. Maintenant, le reste, on en fait un capital foncier pour les investisseurs qui voudront venir investisseurs dans le village. Il faut également des baux qui vont permettre des rentrées d’argent dans les caisses de l’administrateur. Cela a beaucoup d’avantages. Mais, dans la situation actuelle, c’est dans l’informel.
MOUSSA SEYDI VANTE L’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT À BASE D’HYDROXYCHLOROQUINE
"Le traitement à base d’azithromycine-hydroxychloroquine est efficace pour réduire la charge virale. Parce que les patients ne sortent qu’après deux charges virales négatives"
Invité du JDD, dimanche dernier, Abdoulaye Diouf Sarr, le ministre de la Santé, annonçait le maintien, par le Sénégal, du traitement à l’hydroxychloroquine malgré la suspension (brève) par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) des essais cliniques de cette utilisation. Professeur Moussa Seydi, le chef du service des maladies infectieuses et tropicales du CHNU de Fann, revient à la charge, chiffres à l’appui, faisant le bilan des trois mois de la maladie au Sénégal, ce samedi, 6 juin.
« Dans notre projet de recherches, nous avons pu analyser les données cette fois-ci de 559 patients et non de 162 comme la fois passée. Ces données sont issues des sites de Fann, de Dalal Jam et de Diamniadio, dit-il, en brandissant des chiffres. Parmi ces 559 patients, 498 étaient âgés de plus de douze ans. L’âge médian était de 33 ans mais tous les âges étaient représentés, les nourrissons aux sujets de 85 ans. Il y avait autant d’hommes que de femmes. Un patient sur cinq avait une comorbidité. 65% de nos patients hospitalisés dans ces sites étaient symptomatiques. A Fann, 89% des patients hospitalisés étaient symptomatiques du fait que nous avions choisi avec le SAMU d’orienter au niveau de l’hôpital Fann en priorité les malades graves et à risque. Donc, ce traitement à base d’hydroxychloroquine et d’azithromycine, que nous avons administré, nous a montré que l’efficacité était réelle. Parce que la durée médiane d’hospitalisation des patients qui avaient pris ce traitement était de 10,5 jours contre 13 jours chez les patients qui n’avaient pas pris ce traitement. Tous les patients qui avaient pris ce traitement au stade précoce c’est-à-dire avant l’apparition de complications sont guéris et aucun n’est décédé. Concernant la tolérance, jusqu’ici nous n’avons noté que douze effets secondaires soit dans environ 2% des cas. Les effets secondaires cardio-vasculaires se voyaient dans 0,8% des cas. Et tous les effets secondaires étaient bénins et réversibles à l’arrêt du traitement sans nécessité d’un traitement supplémentaire. C’est donc dire que le traitement à base d’azithromycine-hydroxychloroquine est efficace pour réduire la charge virale. Parce que les patients ne sortent qu’après deux charges virales négatives. Ce traitement est efficace dans la prévention des complications qui peuvent aboutir au décès, s’il est prêt précocement. C’est important de mentionner que compte tenu de cette polémique, nous ne nous baserons que sur nos résultats pour prendre des décisions. »
94 NOUVEAUX TESTS POSITIFS DONT 4 CAS IMPORTÉS
La Directrice générale de la Santé, Marie Khemesse Ngom Ndiaye, a annoncé ce samedi, 94 nouvelles contaminations au coronavirus sur 1166 tests réalisés dans les laboratoires, signalant 4 cas importés et 3 issus de la transmission communautaire.
Dakar, 6 juin (APS) - La Directrice générale de la Santé, Marie Khemesse Ngom Ndiaye, a annoncé ce samedi, 94 nouvelles contaminations au coronavirus sur 1166 tests réalisés dans les laboratoires, signalant 4 cas importés et 3 issus de la transmission communautaire.
Les 87 cas sont des contacts suivis par les services sanitaires tandis que les 4 cas importés sont notés chez des voyageurs de l’aéroport Blaise Diagne. Les 3 cas issus de la transmission communautaire sont répartis entre Dakar Plateau et Touba.
Dans les hôpitaux 236 patients ont été contrôles négatifs et guéris et 18 cas graves sont suivis dans les services de réanimation, a dit Dr Marie Khemesse Ngom Ndiaye dans le point de presse mensuel fait trois mois après le premier cas de coronavirus apparu au Sénégal, le 2 mars dernier.
A ce jour 4249 cas ont été déclarés positifs dont 2512 guéris, 47 décédés et 1689 sous traitement dans les 27 sites de traitement.
La directrice générale de la Santé a exhorté les populations à plus de vigilance en respectant les mesures barrières de protection individuelle et collective.
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WASHINGTON DANS LE CAMP DES MANIFESTANTS FACE À TRUMP
"Black Lives Matter" inscrits en lettres capitales, une place rebaptisée au nom de ce mouvement antiraciste devant la Maison Blanche : la mairie démocrate de la capitale a apporté vendredi un soutien appuyé aux manifestants contre les violences policières
Les mots "Black Lives Matter" inscrits en lettres capitales, une place rebaptisée au nom de ce mouvement antiraciste devant la Maison Blanche: la mairie démocrate de Washington a apporté vendredi un soutien appuyé aux manifestants qui protestent depuis une semaine contre les violences policières et Donald Trump.
Un collectif d'artistes urbains a peint sur l'une des artères menant à l'enceinte présidentielle le slogan dénonçant les brutalités policières à l'encontre de la minorité noire. Il est repris en boucle par les manifestants partout dans le pays depuis la mort de George Floyd, un Afro-Américain de 46 ans, aux mains de la police de Minneapolis le 25 mai.
L'initiative, commandée par la municipalité de Washington, a pour but de "reprendre les rues",a commenté à l'AFP Rose Jaffe, l'une des artistes du collectif Mural DC, tout en regrettant que ce soit "aussi un peu une opération de communication".
"Il faudra continuer quand la peinture aura disparu", a-t-elle ajouté, demandant notamment que "la police rende des comptesLes immenses lettres peintes en jaune, qui prennent toute la chaussée sur plus de 200 mètres, pointent vers la petite place faisant directement face à la Maison Blanche, renommée vendredi "Black Lives Matter Plaza", en présence de la maire de la capitale américaine, Muriel Bowser.
"Il y a un contentieux sur la juridiction de ces rues", situées près de la Maison Blanche, un territoire fédéral, a expliqué le chef de cabinet de la maire, John Falcicchio. "La maire voulait qu'il soit très clair que c'est une rue de la ville et que c'est en l'honneur des manifestants qui ont protesté pacifiquement lundi soir".
Eléments "non-identifiés"
Lundi, les forces protégeant la Maison Blanche ont repoussé violemment les manifestants rassemblés au nord de la Maison Blanche, sous la juridiction de la municipalité.
L'objectif était de libérer le passage pour que Donald Trump se rende à pied devant l'église Saint John, bâtiment emblématique tout proche qui avait été dégradé la veille au soir par des casseurs, pour qu'il puisse se faire photographier, bible à la main.
Donald Trump a assumé ce déploiement de force, estimant que les autorités devaient "dominer" les débordements.
Mais la présence de ces renforts exaspère Muriel Bowser, qui a demandé au milliardaire républicain de retirer ces forces fédérales et militaires supplémentaires, estimant que cela ne faisait qu'attiser la colère de manifestants "pacifiques".
La police locale, dit Mme Bowser, "est bien équipée pour gérer les grandes manifestations et les activités relevant du premier amendement" de la Constitution, qui garantit la liberté d'expression et de manifestation.
Elle a aussi dénoncé la présence d'éléments de forces de sécurité "non identifiés" dans la ville.
Outre le Secret Service, qui assure la protection de la Maison Blanche, le gouvernement a fait notamment appel aux soldats de la Garde nationale de plusieurs Etats, ainsi que la police militaire, la police fédérale (FBI), l'agence américaine anti-drogue (DEA), la police aux frontières (CBP), ainsi que la police des parcs nationaux et la police pénitentiaire.
Elle est même accusée par le sénateur républicain de l'Utah, Mike Lee, d'avoir ordonné que 1.200 soldats de la Garde nationale, qui dépendent du Pentagone, quittent les hôtels dans lesquels ils sont hébergés.
La nouvelle n'a pas laissé Donald Trump insensible. Si la maire de Washington "ne traite pas bien ces hommes et ces femmes, nous ferons appel à d'autres groupes", a-t-il répondu vendredi dans un tweet, en qualifiant la maire "d'incompétente".
ENTRE IMPAIRS ET DÉNI
Le cadre de la riposte à la pandémie de Covid-19, a mis à nu en moins de deux mois et demi d’application de la Loi d’habilitation, de l’état d’urgence et du couvre-feu, les insuffisances et autres lacunes du pouvoir en place
Le cadre de la riposte à la pandémie de Covid-19, a mis à nu à moins de deux mois et demi d’application de la Loi d’habilitation, de l’état d’urgence et du couvre-feu, les insuffisances et autres lacunes du pouvoir en place. Soupçons de mal gouvernance, errements de la communication de crise, atermoiements et reculades dans les décisions et, en définitive, des manifestations spontanées de contestation de l’état d’urgence et de son corollaire, le couvre-feu, qui ont largement contribué à émietter l’autorité de l’Etat et le crédit du locataire du Palais présidentiel. Et au final, le pays retourna à la situation anté-Covid-19 que Macky Sall voulait éviter, en s’arrogeant tous les pouvoirs pour restreindre les libertés individuelles.
La pandémie de Covid-19 n’a pas seulement déclenché une véritable crise sanitaire et économique au Sénégal. Elle a aussi contribué fortement à ébranler la base d’autorité qui était celle du chef de l’Etat, Macky Sall, depuis sa réélection à la tête de l’Etat, le 25 février 2019. Particulièrement, pour ce qui concerne la gouvernance d’urgence consécutive à la situation de pandémie liée à la propagation du nouveau coronavirus. Laquelle a occasionné au Sénégal à la date d’hier, vendredi 05 juin, 4155 personnes positives, 45 décès et 1833 malades sous traitement.
Mise en œuvre, il y a juste deux mois et demi, la disposition exceptionnelle qu’est l’état d’urgence renforcée par la Loi d'habilitation qui confère au président de la République, en plus de ses pouvoirs exécutifs, certaines prérogatives de l’Assemblée nationale pour lui permettre de mieux diligenter la «guerre» contre la Covid-19 a été à la source d’un vaste mouvement de contestation qui a touché entre le lundi 1er et mardi 3 juin derniers plusieurs localités du pays. Alors que le virus continue sa propagation sur le territoire national (toutes les quatorze régions administratives du pays étant touchées), dans un contexte marqué par les restrictions imposées par les autorités dans le cadre de cet état d’urgence, on a noté de plus en plus de manifestations de populations qui demandaient la fin de cet état d’urgence. Cela a été ainsi le cas à Tamba, Touba, Ndiakhaté Ndiassane et Tambacounda pour la journée du 2 juin puis à Ziguinchor dans les quartiers Boucotte, Colobane, Lyndiane, Kaolack : Ndargoudaw, Médina Mbaba et dans certains quartiers de la capitale comme à Niary Tally, Grand-Dakar de Grand Yoff pour ne citer que ceux-là.
Partout, ce fut le même ras-le-bol et le même cri de colère : la fin de l’état d’urgence et de toutes les restrictions liées au confinement et au «Restez chez vous». Une preuve des peines vécues par le chef de l’Etat, Macky Sall, pour appliquer durablement la Loi d’habilitation, l’état d’urgence et son corollaire, le couvre-feu, sans heurts. D’autant qu’après plus de deux mois de gestion de l’Etat, en mode Covid19, l’élan d’unité et de solidarité constaté au début de cette pandémie s’était effrité sous le coup d’une mal gouvernance notoire de l’aide alimentaire d’urgence, avec le ministre Mansour Faye pointé du doigt dans l’attribution des marchés et le transport des vivres, voire de mesures restrictives ayant comprimé le faible pouvoir d’achat des «Gorgorlus», et plombé toutes les activités des acteurs de l’informel en quête permanente de dépense quotidienne.
COUVRE-FEU, UN MAL… NON NECESSAIRE
Interpellés sur les deux mois et demi de mise en œuvre de la gouvernance d’exception, laquelle permet au président de la République d’administrer par ordonnance et de prendre toutes les mesures restrictives liées à l’état d’urgence et au couvre-feu, Babacar Ba, président du Forum du justiciable et Me Assane Dioma Ndiaye, président de la Ligue sénégalaise des droits humains (Lsdh) ont posé un diagnostic sans complaisance. Se prononçant ainsi sur les contestations de ces derniers jours avec des manifestations dans certaines villes du Sénégal dont Dakar, ils ont tous pointé du doigt la mesure du couvre-feu comme étant le principal élément perturbateur. Pour le président du Forum du justiciable, cette mesure de couvre-feu adoptée par les autorités dans le cadre de cet état d’urgence n’a pas de sens en ce sens où, souligne-t-il, «la plupart des activités se font dans la journée». «Je ne vois pas la nécessité de cette mesure. À mon avis, il fallait juste fermer les boites de nuit et interdire les restaurants de fonctionner la nuit parce que les gens ne circulent pratiquement pas entre 20 heures et 06 heures du matin», a-t-il fait remarquer.
Confortant cette idée, le président de la Ligue sénégalaise des droits humains a souligné que «le couvre-feu est juste une modalité de l’état d’urgence dont le président de la République pouvait se passer sans porter atteinte au principe de gouvernance exceptionnelle qui caractérise cette période. « Le couvre-feu n’est qu’une des modalités de cet état d’urgence. Le président de la République peut donc décréter l’état d’urgence sans couvre-feu.», a-t-il indiqué tout en déplorant «l’absence de mesures d’accompagnement ou du moins de leur impact sur les populations, notamment les couches les plus vulnérables durement touchés par les restrictions prises dans le cadre de l’état d’urgence». «Les gens n’ont pas senti cette assistance compensatoire qui aurait pu venir de l’Exécutif pour apporter un équilibre aux restrictions imposées. Si les populations ont accepté pendant plus de deux mois les restrictions en renonçant à leurs libertés individuelles et à leurs activités économiques, c’est qu’en contrepartie, ils s’attendaient davantage à la présence de l’Etat à leurs côtés en termes d’assistance qui ne s’est jusquelà pas manifestée», s’est-il désolé.
ABSENCE ET/OU INADEQUATIONS DES MESURES D’ACCOMPAGNEMENT
Par ailleurs, soulignant que les manifestations de populations observées au niveau de certaines localités traduisaient l’état d’esprit dans lequel se trouvaient beaucoup de Sénégalais qui étaient fatigués de cette situation d’état d’urgence assortie de couvre-feu, Me Assane Dioma Ndiaye a prôné un assouplissement des restrictions, notamment le couvre-feu. Aurait-il été entendu par le Chef de l’Etat ? Dans une certaine mesure certainement, d’autant que les horaires ont été réaménagés avant-hier, mercredi, alors qu’en même temps, un déconfinement qui ne dit pas son nom se mettait en marche avec la mesure d’autorisation du transport interurbain.
Les observateurs noteront que, même sous conditions, la levée de l’interdiction de la circulation routière entre les villes du Sénégal, alors que le virus progresse et même qu’un hypothétique pic épidémique est avancé par le ministère de la Santé, a été …imposée au Chef de l’Etat par le langage de la rue symbolisé par les manifestations ardues des transporteurs à travers certaines localités. Des manifs qui ont été à la base d’une centaine d’arrestations à Touba et Mbacké, à titre d’exemple.
C’est dire que la gouvernance d’urgence, à laquelle «Gorgorlu» n’est pas habitué et qu’elle n’a connue que rarement depuis les indépendances, n’a pas été de tout repos pour le président Macky Sall. Un président qui, en l’espace de deux mois et demi de gestion unilatérale pour ne pas dire solitaire de l’Etat, a dû passer par tous les états, son crédit et son autorité s’en trouvant largement altérés par des accusations de mal gouvernance, des manifestations rappelant bizarrement les émeutes de l’électricité en 2011, enfin des contestations drastiques de ses directives gouvernementales par des acteurs autres que ceux de…l’opposition.
DE LA NECESSITE DES LOIS D’EXCEPTION
Babacar Ba, président du Forum du justiciable et Me Assane Dioma Ndiaye, président de la Lsdh ont tenu tout de même à souligner tous deux l’importance de cette loi dans le contexte de la pandémie actuelle. «Vu qu’on était dans l’urgence, il fallait forcément cette loi d'habilitation pour permettre au président de la République de prendre certaines mesures d’ordre sanitaire et sécuritaire allant dans le sens de stopper la propagation de cette pandémie en contournant les procédures normales », a tout d’abord expliqué le président du Forum du justiciable. Non sans manquer de signifier au sujet de l’état d’urgence que «cette mesure a fait ses preuves». «L’état d’urgence qui a été décrété le 23 mars dernier nous a permis de ralentir la propagation du virus. Je pense qu’il faut avoir le courage de le dire puisque si, aujourd’hui, on est parvenu à avoir une maitrise partielle sur le mécanisme de propagation du virus, il faut reconnaitre que cela est lié quelque part à des mesures restrictives que l’autorité a prises dans le cadre de cet état d’urgence».
Abondant dans le même sens, le président de la Lsdh fera remarquer, à propos de l’habilitation, que «cette loi était nécessaire parce que dans un Etat de droit, le président de la République ne peut pas prendre certaines décisions qui lui permettent d’agir avec célérité. Alors que nous savons que quand vous avez une maladie de cette nature, la gestion implique nécessairement des mesures exceptionnelles». Poursuivant son explication, Me Assane Dioma Ndiaye ajoutera également toujours sur l’utilité de cette mesure d’exception : «au-delà des pouvoirs qui sont conférés au président de la République, la Loi d’habilitation permet également d’encadrer plus ou moins les actes que le président ou l’administration devront poser. Car même dans ce contexte d’exception, il est prévu pour certaines mesures l’aval de l’Assemblée nationale».
LA FACE HIDEUSE DE L'AMÉRIQUE
René Lake en débat sur VOA avec le républicain Herman Cohen, ancien ministre de Bush - La société américaine est structurellement raciste - L'affaire Floyd rappelle trop d'autres cas similaires - Donald Trump a fait preuve d'un leadership défaillant
René Lake en débat sur VOA avec trois autres invités, y compris le répubicain Herman Cohen, ancien ministre chargé des affaires africaines de George H. Bush. Le sujet : Le cas de George Floyd, la face visible de l'iceberg ? Comment réformer cette société américaine dans ses structures les plus discriminatoires à l'égard des minorités ? Quid de la posture de Donald Trump en ces moments troubles pour le pays ?
L'émission "L'Amérique et vous", remet au centre des débats, la question des discriminations raciales aux Etats-Unis, ravivée par le récent meurtre de George Floyd, Afro-américain, par un policier blanc.
LE CHEF D'AL QUAÏDA AU MAGHREB ISLAMIQUE TUÉ AU MALI PAR LES FORCES FRANÇAISES
Abdelmalek Droukdal, membre du comité directeur d’Al-Qaida, commandait l'ensemble des groupes qaïdistes d’Afrique du Nord et de la bande sahélienne, dont le JNIM, l’un des principaux groupes terroristes actifs au Sahel
Le leader d'Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), l'Algérien Abdelmalek Droukdal, a été tué par les forces françaises dans le nord du Mali, près de la frontière algérienne, a affirmé vendredi sur Twitter la ministre des Armées Florence Parly, confirmant des informations obtenues par l'AFP.
Ce chef historique du jihad au Maghreb, mentor de plusieurs groupes jihadistes sahéliens, a été tué jeudi au nord-ouest de la ville malienne de Tessalit, a appris l'AFP. "Plusieurs de ses proches collaborateurs" ont également été "neutralisés", a assuré Mme Parly sans plus de détails.
"Abdelmalek Droukdal, membre du comité directeur d’Al-Qaida, commandait l'ensemble des groupes qaïdistes d’Afrique du Nord et de la bande sahélienne, dont le JNIM, l’un des principaux groupes terroristes actifs au Sahel", selon la ministre française.
Le chef d'AQMI, dont le nom est parfois aussi orthographié Droukdel, a reçu l'allégeance de plusieurs groupes jihadistes actifs au Sahel, rassemblés depuis 2017 au sein du Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), dirigé par le touareg malien Iyad Ag Ghaly.
La France revendique également vendredi soir la capture d'un "cadre important de l'EIGS", le groupe jihadiste Etat islamique au Grand Sahara, rival du GSIM au Sahel et désigné ennemi numéro un par Paris.
"Les opérations contre l’Etat islamique au Grand Sahara, l'autre grande menace terroriste dans la région, se poursuivent également. Le 19 mai dernier, les forces armées françaises ont capturé Mohamed el Mrabat, vétéran du djihad au Sahel et cadre important de l’EIGS", annonce Mme Parly dans un autre tweet.
La force française antijihadiste Barkhane, forte de plus de 5.000 militaires, multiplie ces derniers mois les offensives au Sahel, pour tenter d'enrayer la spirale de violences qui, mêlées à des conflits intercommunautaires, ont fait 4.000 morts au Mali, au Niger et au Burkina Faso l'an dernier, cinq fois plus qu'en 2016 selon l'ONU.
par Omar Sy
RÉVEILLONS-NOUS
Ayons le courage de dénoncer les violences policières commises en France. Ne soyons plus spectateurs d’un système violent, qui enterre les mémoires de ces morts dans l’oubli, qui jette systématiquement leurs noms dans la fosse aux non-lieux
Réveillons-nous.
George Floyd, alias « Big Floyd », un Afro-Américain âgé de 46 ans, père de deux enfants, est allé s’acheter le 25 mai un paquet de cigarettes à Minneapolis. Avec un billet de 20 dollars, que l’épicier a pris pour un faux. A terre, le cou écrasé dans le bitume par le genou d’un policier, étouffé, asphyxié, George Floyd est mort. Pour rien. Un élan d’indignation, naturel et évident, a saisi les foules aux quatre coins du monde. J’ai marché pour George Floyd aux Etats-Unis. Le nom de George Floyd en charriait bien d’autres en écho dans ma tête.
Celui d’Adama Traoré, en France.
Une marée humaine a envahi les alentours du tribunal judiciaire de Paris mardi, des rassemblements ont eu lieu dans plusieurs villes de l’Hexagone. La mort d’Adama Traoré est aussi injuste et indigne que celle de George Floyd. Je me réjouis qu’on en prenne conscience aujourd’hui, je me réjouis de voir des dizaines de milliers de personnes venues de tous horizons sociaux entourer de leurs forces les proches d’Adama Traoré, ses frères, sa sœur, Assa. D’entendre les soutiens leur venir du monde entier. Pendant quatre ans, cette famille a fait preuve d’une détermination sans relâche, quotidienne, qui n’a d’égale que sa peine infinie. Pendant quatre ans, cette famille a résisté dans une trop grande solitude, face à l’injustice, face à l’inertie de l’institution judiciaire, face à l’indifférence des pouvoirs publics. Elle a vaillamment tenu bon. Mais combien d’autres familles, moins nombreuses, moins épaulées, se sont écroulées sous les coups d’une justice sourde à leurs demandes, bafouant les droits qu’elle est censée représenter ? Rappelons-nous leurs noms : Malik Oussekine, Makomé, Lamine Dieng, Babacar Gueye, Gaye Camara, Ibrahima Bah, Rémi Fraisse, Angelo Garand, Sabri Choubi, Cédric Chouviat, Ali Ziri, Hakim Ajimi, Gabriel… la liste est tristement longue.
Réveillons-nous.
Adama Traoré, un habitant de Beaumont-sur-Oise, qui fêtait son 24e anniversaire le 19 juillet 2016. Il a roulé à vélo, bermuda, bob sur la tête, sourire aux lèvres, tranquille, dans les rues de sa ville, accompagné de son frère, Bagui. Gendarmes, contrôle. Adama Traoré n’avait pas ses papiers sur lui. Il a fui. Les forces de l’ordre l’ont rattrapé. Ecrasé, asphyxié, embarqué. Adama Traoré est mort quelques heures plus tard, sur le sol de la gendarmerie de Persan. Pour rien. A lui, comme à George Floyd, la justice a inventé « une cardiopathie », des cœurs défaillants. Mais je n’ai qu’une seule question, et c’est la seule qui compte : ces hommes seraient-ils morts s’ils n’avaient croisé la route des forces de l’ordre ?
Réveillons-nous.
Tenons bon à notre tour, armons-nous de courage, soyons vigilants, ne laissons plus passer quatre années pour demander des comptes. La mort d’un homme dans le cadre d’un usage disproportionné et abusif de la force doit être réprimée.
George Floyd et Adama Traoré avaient des points communs : ils étaient tous deux noirs, de grande carrure, leurs vies ont basculé dans l’horreur en quelques heures. Pour rien. Je mesure 1,92 m, je suis noir, je leur ressemble. Est-ce qu’il peut m’arriver la même chose qu’à eux demain ? Est-ce que cela risque d’arriver demain à mes enfants ? A vos enfants ? Cette peur sans nom, cette peur injustifiée qui enfle dans nos vies, doit disparaître. Je connais ce sentiment qui ronge de l’intérieur, j’ai vu dans ma vie des drames liés à l’intervention des forces de l’ordre, à l’époque où j’étais un anonyme. Comme Adama Traoré, comme Zyed et Bouna, morts à 17 et 15 ans à Clichy-sous-Bois en 2005, j’ai couru quand je croisais le chemin de la police. Je n’avais alors pas de micro ouvert pour dire combien cette peur est réelle. Celle de mourir entre les mains des forces de l’ordre. J’affirme aujourd’hui qu’elle existe depuis trop d’années, et cette peur se transmet de génération en génération. Qu’importent les menaces ou les pressions qui s’exercent en retour, il ne faut plus jamais se taire. Aucune parole ne doit être isolée quand elle porte un discours de justice. Il faut que nos dirigeants entendent, comprennent, agissent pour changer ce cours des choses. C’est une maladie qui ronge notre pays, et cela n’augure rien de bon pour nos avenirs.
Réveillons-nous.
Regardons devant nous, ayons le courage de dénoncer les violences policières qui sont commises en France. Engageons-nous à y remédier. Ne soyons plus spectateurs d’un système violent, qui enterre les mémoires de ces morts dans l’oubli, qui jette systématiquement leurs noms dans la fosse aux non-lieux. Nous devons profiter de cet élan suscité par l’affaire Floyd pour refuser ce grossier clivage, qui consiste à trier, parmi nous, les méchants et les gentils. Il n’y a qu’un seul et même camp, celui de la justice. Nous aspirons tous à une police digne de notre démocratie, une police qui protège sa population, sans distinction de couleur de peau ou de provenance sociale, la même pour tous, qu’on habite dans les centres-villes ou dans les quartiers populaires. Une police capable, comme on l’a vu ces derniers jours aux Etats-Unis, de se joindre aux manifestants, de poser le genou à terre pour dénoncer les violences qui salissent son uniforme. En France aussi, il m’apparaît évident que la majorité des policiers ne cautionnent pas ces actes violents. Je les invite à sortir du silence.
Réveillons-nous.
Le soutien massif apporté mardi à la famille d’Adama Traoré, quatre ans après les faits, est une nécessité. Il est le tremplin de nos engagements unis, déterminés, raisonnés, pour un combat qui ne souffre en réalité aucun débat : celui de nos droits à tous. La cause est juste, je vous garantis qu’y adhérer emplit de ferveur. On dormira tous mieux. J’appelle au changement, à la remise en cause d’un système qui ne peut prétendre à la justice sans mettre fin à l’impunité organisée qui sévit depuis des décennies. Cet ordre établi n’est plus tenable.
Pour soutenir l’appel d’Omar Sy contre les violences policières en France, signez la pétition sur Change.org et relayez l’appel sur les réseaux sociaux avec le #RéveillonsNous.