Monnaie commune de 14 pays africains, le franc CFA a un lien très étroit avec la France et l'euro. Si son objectif premier paraît être de donner plus de stabilité monétaire, il apparaît aux yeux de certains comme un instrument de maintien des pays africains dans une situation de dépendance économique à contresens de l'indépendance politique officiellement proclamée au début des années 1960. Une situation qui conduit à des débats passionnés et qui interroge sur sa pérennité dans sa forme actuelle. Pour rappel, dans sa dernière actualité, le franc CFA devrait voir les réserves la garantissant quitter le Trésor français pour d'autres cieux au gré de la volonté des banques centrales, notamment celle de l'Afrique de l'Ouest : la BCEAO. En résumé, voici cinq informations à retenir.
Le franc CFA est la monnaie commune de 14 pays
Le franc CFA est la monnaie commune de 14 pays d'Afrique de l'Ouest et centrale, comptant au total 155 millions d'habitants. Il a été créé le 26 décembre 1945, une quinzaine d'années avant l'indépendance des colonies françaises. Il s'appelle alors « franc des colonies françaises d'Afrique ». Il prendra par la suite la dénomination de « franc de la Communauté financière africaine » pour l'Afrique de l'Ouest et « franc de la Coopération financière en Afrique centrale » pour l'Afrique centrale.
Les pays utilisant le FCFA sont répartis en deux zones, huit en Afrique de l'Ouest, six en Afrique centrale, constituant deux unions monétaires distinctes :
- Le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo constituent l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), dont l'Institut d'émission est la Banque centrale des États d'Afrique de l'Ouest (BCEAO), créée en 1962 et dont le siège est à Dakar.
- le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad constituent la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (Cemac), dont l'institut d'émission est la Banque des États de l'Afrique centrale (BEAC), créée en 1972 et dont le siège est à Yaoundé.
Un lien étroit avec la France et l'euro
La valeur du FCFA, auparavant indexée sur le franc français, est indexée sur l'euro, avec une parité fixe. 1 euro = 655,96 francs CFA. La moitié des réserves de change des pays utilisant le franc CFA sont déposées auprès de la Banque de France.
La France ne gagne pas d'argent avec ces dépôts. La Banque de France rémunère actuellement ces dépôts au taux plancher de 0,75 % par an. Les intérêts sont reversés aux pays africains chaque année. Ce dépôt garantit une convertibilité illimitée du FCFA avec l'euro. Il existe une liberté totale des transferts entre les pays de chaque Zone Franc. Les pièces et les billets en FCFA sont frappés dans une imprimerie de la Banque de France à Chamalières, en banlieue de Clermont-Ferrand, dans le centre de la France.
Objectif officiel : la stabilité
« L'objectif prioritaire de la politique monétaire de la BCEAO est d'assurer la stabilité des prix » (source BCEAO).
« L'objectif final de la politique monétaire de la BEAC est de garantir la stabilité monétaire » (source BEAC).
Le débat engagé entre les « pour » et les « contre »
Depuis des décennies, le franc CFA nourrit un débat virulent entre ses détracteurs, qui le dénoncent comme une monnaie « post-coloniale » qui perpétue l'influence de la France en Afrique, et ses défenseurs qui louent la stabilité monétaire qu'il apporte. Les appels à une réforme du franc CFA se font de plus en plus pressants et la France s'y est dite ouverte. Outre le changement de nom, à forte valeur symbolique, des économistes plaident pour l'indexation du FCFA sur un panier de devises incluant l'euro, le dollar et le yuan chinois, correspondant aux principaux partenaires économiques de l'Afrique. Des économistes et polémistes africains plus radicaux exigent le transfert des réserves de change vers d'autres institutions, et la fin de la politique monétaire rigoriste au profit d'une priorité au développement économique et à l'emploi.
Va-t-on vers la fin du franc CFA avec notamment l'eco prévu par la Cedeao ?
Les 15 États de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao, Ecowas en anglais, incluant les 8 États de l'UEMOA) se sont mis d'accord pour adopter en 2020 une monnaie unique, baptisée « eco ». Celle-ci sonnerait le glas du franc CFA. Cela dit, de nombreux analystes sont sceptiques sur un lancement aussi proche de l'eco, soulignant les grandes disparités économiques, monétaires et budgétaires entre les pays de la zone, ainsi que les difficultés techniques inhérentes à la naissance d'une nouvelle monnaie.
AMINATA MBENGUE NDIAYE RACONTÉE PAR ABDOU DIOUF
Fille de socialiste, la patronne du HCCT avait fini par impressionner l'ancien président qui, dans son livre « Abdou Diouf : Mémoires » racontait comment Professeur Ndioro Ndiaye voulait la liquider !
Dans ses mémoires, l’ancien président de la République a raconté la manière dont le Pr Nioro Ndiaye avait voulu liquider l’actuelle patronne du PS.
Aminata Mbengue Ndiaye, nommée ce 02 novembre présidente du Haut Conseil des collectivités territoriales, gère désormais le legs socialiste. Elle suit les traces de leaders socialistes et d’hommes politiques aussi prestigieux que Léopold Sédar Senghor, Abdou Diouf et Ousmane Tanor Dieng. Nul doute que cette grande dame, au propre comme au figuré, a les épaules assez larges pour perpétuer l’héritage socialiste. Fille de socialiste, elle avait fini par impressionner le président Abdou Diouf. Lequel, dans son livre « Abdou Diouf : Mémoires » paru aux éditions Seuil en 2014, racontait comment il est tombé sous le charme de Aminata Mbengue Ndiaye. Mais surtout comment l’ancienne ministre rufisquoise Pr Ndioro Ndiaye voulait liquider la nouvelle patronne du Parti socialiste !
« …Fatoumata Ka est certainement bien plus vertueuse que bien d’autres qui la contestaient. Au demeurant, la suite a bien montré qu’on ne peut pas avoir une confiance totale en Léna Diagne. L’opération « une femme, un gramme d’or’ » l’illustre bien. Même quand on revient par exemple à l’idée du Président Chirac qui propose de mettre une petite taxe indolore sur les billets d’avion, on constate que l’ensemble fait une masse considérable et on arrive ainsi à avoir une somme d’argent consistante pour réaliser une action d’envergure dans un secteur donné. Ma femme s’était habituée à demander à toutes les femmes sénégalaises de donner chacune au moins 1g d’or et celles qui peuvent plus, peuvent donner plus, mais ça se faisait de façon méthodique avec un encadrement sérieux et de façon sérieuse: 3.000.000 de femmes qui donnent chacune 1g d’or, ça fait 3 000 kg d’or ça fait 3 tonnes d’or et s’il y en a qui donnent plus on peut aller jusqu’à 4, 5 tonnes ; vous voyez ce qu’on peut faire avec ça et ma femme qui avait beaucoup d’amitié pour Léna, lui a demandé de s’occuper de cela mais elle en a fait une histoire de « bamboula », de cérémonie grandiose à Daniel Sorano ».
Ainsi, on voyait des femmes qui jetaient leurs bracelets, leurs colliers… En fait, c’était complètement perverti et finalement, (je n’entre pas dans les responsabilités financières, ce n’est pas mon propos car je ne peux le savoir parce que je n’ai pas suivi l’opération,) mais ce que je sais, c’est que l’opération a été tellement pervertie que ça ne valait plus la peine de continuer. Or Léna, je la connais depuis le lycée. On a eu toujours d‘excellents rapports, elle m’a soutenu, elle m’a beaucoup soutenu mais les derniers temps elle était un peu dépitée, elle était député, elle a été membre du bureau de l’Assemblée Nationale mais je n’en ai jamais fait un ministre et beaucoup de gens se sont demandé pourquoi elle n’a pas été ministre alors qu’elle était bien. Les derniers temps, quand j’ai créé le Sénat, elle m’a écrit pour me dire qu’il faut que je la nomme présidente du Sénat et moi je dis « je ne peux pas le faire parce que vous n’avez pas la représentativité pour être Présidente du Sénat, ». Là aussi, ça été un élément de frustration chez elle. Ensuite l’Alternance est arrivée et on a vu comment elle s’est comportée, les choses qu’elle a dites, les choses qu’elle a faites; en somme tout l’opposée d’une Aminata Mbengue Ndiaye par exemple », écrit le président Abdou Diouf.
Abdou Diouf : Je considère Aminata Mbengue Ndiaye comme ma sœur…
Parlant de l’actuelle présidente du HCCT, voici ce que Abdou Diouf en disait. « Cette dernière, nos familles étant très liées, je la considère comme ma sœur. C’est une femme qui ne s’activait pas dans la politique, mais s’occupait beaucoup de promotion féminine. Elle avait d’ailleurs reçu une formation de maîtresse d’enseignement familial, et ne remplissait donc pas les conditions pour exercer des responsabilités à un certain niveau. Aussi lorsque Mantoulaye Guène, qui était une très bonne ministre, a voulu la nommer à la tête de la Direction de la promotion féminine, elle m’a d’abord demandé mon autorisation. Aminata Mbengue y a fait un travail considérable. Sous son impulsion, tous les groupements féminins ont été des points d’appui extraordinaires pour le développement local. Avec beaucoup d’inspiration, elle a monté aussi le micro crédit, l’épargne. Pour tout dire, elle a été vraiment formidable. Lorsque Mantoulaye a quitté le gouvernement, Ndioro Ndiaye qui l’a remplacée a voulu liquider Aminata. Je l’ai dissuadé de le faire, en lui signalant l’erreur qu’elle commettrait, Aminata étant performante à son poste. Ndioro essaya de me convaincre, en me sortant pour argument qu’Aminata Mbengue n’était pas de la hiérarchie A. Je lui répondis qu’elle ne m’apprenait rien, parce que moi-même étant informé de ce fait depuis longtemps, mais j’avais fait de la nomination d’Aminata une exception, parce que je trouvais qu’elle était la femme de la situation. En dépit de tout, Ndioro décida de nommer une autre personne au poste, en me rassurant qu’elle allait donner un projet à Aminata. Comme quoi parfois les gens creusent leur propre tombe ; elle ne lui a rien donné à faire, et Aminata est restée à tourner en rond. A chaque fois que j’interpellai Ndioro sur le projet, elle me répondait : Oui, oui, je suis en train de le préparer, je cherche le financement. Vraiment, M. le Président, faites-moi confiance. Quand j’ai attendu, de guerre lasse, j’ai nommé Aminata Mbengue chargée de mission à la Présidence. Par la suite, Ndioro a fait une faute très grave. Le Sénégal devait abriter une très grande rencontre, la Conférence des femmes africaines pour préparer Pékin, à laquelle devaient prendre part les Premières Dames. En Conseil des Ministres, j’ai demandé à Ndioro de s’appuyer sur l’ensemble des Ministres, et je lui dis que j’allais mettre tout le monde à sa disposition pour les accueils, le protocole.
Elle a voulu faire la championne en organisant toute seule dans son département cette manifestation d’envergure, qui devait préparer Pékin pour les femmes africaines. Elle a voulu tout organiser seule, et ce fut un fiasco total. Madame Abasha était là, tout comme Madame Rawlings. Il y avait d’autres Premières Dames mais ma femme n’était pas là. Pourtant, j’avais demandé à Ndioro de mettre à contribution tout le monde. La suite prouve qu’elle l’a fait exprès. En effet, à la sortie du gala à Sorano, le griot chargé de l’animation n’a fait que chanter Ndioro. Il l’enfonça d’ailleurs en disant «Ah ! Nous venons pour la première fois de voir un ministre organiser seul un évènement, sans l’aide de personne, et le réussir». Et dire que j’avais demandé qu’on lui apporte toute l’assistance nécessaire. Quand le lendemain j’ai reçu à déjeuner la Reine Fabiola, connaissant mon état d’esprit, elle me dit « Monsieur le Président, pardonnez à votre Ministre ». Je lui répondis, Majesté, je vous ai comprise ».
ABDOU DIOUF : « Celle qui connait le mieux la femme, c’est Aminata Mbengue Ndiaye »
« On ne peut pas diriger un pays s’il n’y a pas de sanctions contre les fautes graves comme celle-là. Surtout, on ne peut pas essayer de promouvoir son image personnelle au détriment de celle du pays, et, en fin de compte, briser sa propre image et l’image du pays. C’est alors que je me suis dit que celle qui connaît le mieux la femme c’est Aminata, la chargée de mission, parce que si Ndioro l’avait eue comme directrice de la Promotion féminine, elle n’aurait pas commis ces erreurs. A la surprise générale, elle a fait un excellent travail auprès des groupements des femmes à Louga, au niveau de la région et dans le Sénégal » a conclu le président Abdou Diouf sur le chapitre consacré à Mme Aminata Mbengue Ndiaye. Dont la promotion comme secrétaire générale par intérim du Parti socialiste et, surtout, présidente du haut Conseil des collectivités territoriales est donc parfaitement méritée !
par El Malick Ndiaye
AU TRAVAIL MONSIEUR LE MINISTRE !
Monsieur Diouf sarr, il n’y a pire violence que d’encourager votre mentor à s'endetter pour ses projets poussiéreux plutôt que de construire des centaines d’hôpitaux
Monsieur Diouf Sarr, vous devriez être l’un des derniers à parler injustement du président Ousmane Sonko. Ce n'est pas parce qu'il empêche le « lion qui dort » de trouver le sommeil que vous devez vous sentir obligé de jeter le discrédit sur sa personne à chacune de vos sorties.
Ne pensez-vous pas que vous avez assez à faire avec votre secteur en lambeaux plutôt que de vous prononcer sur le discours politique de qui que ce soit ?
Selon quelle réalité les Sénégalais vont-ils choisir leur leader d'après vous ? Certainement pas selon le spectacle des toilettes honteuses des hôpitaux publics. Encore moins vos salles d'hospitalisation ou de consultation tout droit sortis d'un film d'horreur. Quel diagnostic avez-vous établi des Sénégalais pour penser qu’ils vont choisir selon cette réalité qui est la vôtre à coup de corruption et de trafic d’influence ?
On se rappelle encore de la campagne web lancée par les ressortissants du Sud pour doter leur région d’appareils de radiothérapie. Où trouvez-vous donc le courage et l’outrecuidance de regarder les Sénégalais en face, eux dont la réalité consiste désormais à faire des quêtes sur le web pour évacuer leurs malades et maintenant leur personnel soignant ?
Pour rappel, l’« épiphénomène » est bien une réalité définitive qui a été choisi par 687 000 de vos compatriotes. Un taux de 15 % pour une première participation.
Où se trouve la violence dans le comportement ou le discours du président Ousmane Sonko selon vous ? Dans la quête de la vérité ? Dans la défense du peuple contre les sangsues ? Dans le fait de réclamer une justice fiscale ?
Il n’y a pire violence que de s’asseoir sur nos deniers publics et de nous empêcher d’avoir des services sanitaires de base. Il n’y a pire violence que d’encourager votre mentor à s'endetter pour ses projets poussiéreux plutôt que de construire des centaines d’hôpitaux. Il n’y a pire violence que de laisser nos filles sœurs et mères donner le jour à notre descendance sur des charrettes et y laisser souvent la vie. Il n’y a pire violence que le mode de gouvernance du régime actuel : tenter de réduire l’opposition à néant, exiler les uns, emprisonner les autres, limoger les téméraires, protéger et amnistier les collaborateurs,…
Selon vous, notre culture consiste à se murer dans un silence complice face à ces exactions et siroter tranquillement notre part de la sueur du peuple en jouant les beaux parleurs ? La posture « populiste » du président Ousmane Sonko est bien au contraire du patriotisme qui s’est matérialisé à travers un engagement sans failles aux côtés du peuple et la proposition de « solutions » réelles.
Vous voulez que nous parlions vérité Diouf Sarr ? Pourquoi pas ? Merci de dire la vérité alors aux Sénégalais sur quelques points :
les cigarettes vendues au Sénégal présentent des taux de particules de nicotine et de monoxyde de carbone plus élevés que celles destinées aux marchés suisse et européen ;
une dizaine de centres de santé situés dans la région de Dakar disposent chacun d’un bloc opératoire non fonctionnel ?
dans toute l’étendue du territoire national, seul l’appareil d’imagerie par résonance magnétique de l’hôpital principal de Dakar fonctionne ;
le plan sésame n'existe plus au Sénégal ;
la chimiothérapie est gratuite pour les cancers gynécologiques mais pas le bilan pré-chimio encore moins les médicaments ;
Macky Sall a libéré des trafiquants de faux médicaments à《 l'insu de son plein gré ».
En conclusion, sachez, Monsieur Abdoulaye Diouf Sarr, le président Ousmane Sonko est payé par le contribuable sénégalais pour vérifier que vous, qui êtes grassement payés par le même contribuable ainsi que vos semblables, vous acquittiez bien de vos tâches. Et vous conviendrez qu'il remplit fort bien son mandat.
Vous-mêmes êtes payés pour améliorer la Santé et le bien-être des Sénégalais ou au moins maintenir ces derniers en état. Merci d'essayer de mériter votre salaire afin de pouvoir revenir nous regarder en face et nous parler de vraies réalisations !
El Malick Ndiaye est Secrétaire National à la communication de PASTEF LES PATRIOTES
LE VIVRE-ENSEMBLE DISSÉQUÉ AU GINGEMBRE LITTÉRAIRE
Quels défis supposent la cohabitation harmonieuse dans la société ? Quels en sont les contours ? Quid de la culture dans un contexte globalement marqué par le repli sur soi ? Éléments de réponse avec Penda Mbow, El Hadji Hamidou Kassé et Al Amine Kébé
« Vivre ensemble », c’est sur ce thème qu’ont débattu le Professeur Penda Mbow, l’ancien chargé de communica- tion de la présidence de la République, El hadji Hamidou Kassé et l’économiste Al Amine Kébé. Chacun de ces panélistes a eu 15mn pour apporter sa contribution par rapport à ce thème qui a semé la controverse entre certains des intervenants. C’était hier lors de la ren- contre du « Gingembre littéraire » de Dakar tenue hier dans un établissement d’enseignement privé de la place.
Après Rufisque et Saint-Louis, Dakar a abrité hier son « Gingembre littéraire » dans un institut d’enseignement supérieur de la place. Une rencontre qui a réuni les panelistes Pr Penda Mbow, l’économiste Al Amine Kébé sur le thème du « Vivre ensemble ». D’après la présidente du « Mouvement Citoyen », prenant en premier la parole, ce thème vient à son heure parce que nous sommes dans une société où on a tendance à perdre le sens du bien-être. En effet l’historienne a, lors de son exposé, mis l’accent sur la cohabitation harmonieuse des différentes religions qui, selon elle, constitue un des piliers du vivre ensemble. « Je vais traiter d’abord de la cohabitation entre les différentes religions monothéistes mais aussi entre les religions monothéistes et les religions traditionnelles. L’Islam est entré au Sénégal depuis le 8ième siècle, mais au 11ième siècle s’étendait l’existence des mosquées. Et même plus loin, j’estime que ce que nous avons connu comme étant l’Islam civil au Sénégal est une cohabitation harmonieuse entres les conceptions traditionnelles et la religion musulmane pendant toute cette période qui a précédé la traite négrière. Mais aussi au- delà avec l’effondrement des pouvoir « Thiédo ». Ça veut dire simplement que nous avons un fond culturel aux identités multiples où chacun est respecté » a souligné le Pr. Penda Mbow. A l’en croire, le Sénégal est une exception car, malgré les crises politiques qu’il a connues, son peuple a toujours su garder sa maturité et un esprit de dépassement face à des situations difficiles. Ce qui constitue un acquis du vivre-ensemble dans notre pays sur ce plan malgré les mutations profondes qu’il a subies.
« Parmi les multiples crises que nous avons connues depuis l’indépendance du Sénégal, il y a eu l’éclatement de la Fédération du Mali mais aussi les évènements de 1962 marquant la séparation entre Mamadou Dia et Senghor ; 1968 et ses conséquences. 1967 l’année où fut assassiné Demba Diop. On a eu des difficultés sur l’assassinat de Me Babacar Sèye qu’on a réglées politiquement, qui pouvait déboucher sur une crise institutionnelle sans précédent. Pour le mouvement du 23 juin, à partir du moment où on avait retiré le projet de loi, tous les Sénégalais sont rentrés chez eux en attendant les élections. Dans un autre pays, ce ne serait pas été évident. Ça allait certainement dégénérer. Tous cela montre que la société a ses propres ressorts qui lui permettent justement de régler toutes les crises et d’avoir un dépassement quelle que soit la difficulté de cette crise », a ajouté la représentante du président de la République au Conseil permanent de la Francophonie.
Selon toujours l’enseignante chercheur au département d’histoire à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, pour qu’il y ait une pérennisation du vivre-ensemble, il faudra réfléchir sur des défis énormes. Le premier est le défi de la démocratie dans un pays où presque 65 % des jeunes n’ont pas encore atteint la majorité. Et cette jeunesse a besoin d’être éduquée, d’être formée, qu’on lui offre des emplois, etc. Le deuxième défi est constitué par l’urbanisation qui va dans tous les sens avec comme conséquence la question de la terre.
Sans langue du bois, l’économiste Al Amine Kébé a assené ses vérités à l’assistance sur le thème du jour. Selon lui, le concept de « vivre-ensemble » ne fait pas l’unanimité dans notre pays. Pour cause, estime le panéliste, tant qu’il y a des déficits sur les quatre besoins fondamentaux à savoir l’alimentation, l’accès à l’eau potable, le toit, l’utilisation de l’énergie, on ne peut pas parler de vivre-ensemble. « Aujourd’hui, je constate dans notre pays que toutes ces facettes-là connaissent des déficits. Et dans l’entendement humain, tant qu’il y a ces déficits sur ces besoins, vous ne pouvez pas parler de vivre-ensemble. Le vivre-ensemble, tel que enseigné par Dieu, disons délégué depuis le monde céleste dans notre univers, se fonde sur l’utilisation intelligente de la nature pour faire de sorte que nous ne souffrions ni de faim, ni de soif, ni de déficit d’habitat, ni déficit d’énergie », a martelé l’économiste Al Amine Kébé dans son intervention.
Selon El Hadj Hamidou Kassé, le mode de vivre-ensemble, c’est être indifférent à la différence. Pour le ministre conseiller à la présidence de la République, si chacun brandissait sa casquette de musulman, de chrétien, d’animiste, d’artiste, élèves et professeurs, ça allait entacher le concept de vivre-ensemble. « Vivre ensemble, c’est non seulement être indifférent à la différence, mais c’est également savoir écouter pour entendre. Le vivre- ensemble postule la reconnaissance de différences et leur acceptation, la banalisation, l’indifférence. C’est comme en philosophie, c’est une approche basée non pas sur la différence mais sur le même que circule le principe de vie en commun ou de l’an commun qui circule pour mieux fonder justement notre vivre ensemble », a indiqué le journaliste et philosophe El Hadj Kassé. A rappeler que le « Gingembre littéraire » est une sorte d’Agora littéraire lancé par notre confrère Gorgui Wade Ndoye qui est établi à Genève, en Suisse.
LÉGISLATION DE L’HOMOSEXUALITÉ AU SÉNÉGAL : LA POSITION DE LA RADDHO
La Rencontre africaine des droits de l’homme en coalition avec 10 autres organisations de la Société civile donne sa position concernant la légalisation de l’homosexualité au Sénégal. Ce, après que les Nations Unis ont demandé à l’Etat du Sénégal de revoir l’article 319 du code qui interdit les pratiques d’actes contre nature au Sénégal. La Raddho s’est prononcé en marge de la conférence de presse sur le rapport du comité des droits de l’homme sur l’affaire Karim Wade.
Le Secrétaire général de la Radhho a donné la position de leur organisation sur cette question. « Nous sommes contre la promotion de l’homosexualité. Il faut dépénaliser ce qui est pénalité. Au Sénégal, c’est l’acte contre nature qui est pénalisé », a précisé d’emblée Sadikh Niasse. Cependant, il défend les organisations qui luttent pour la protection des droits homosexuels ou celles qui luttent contre le Sida. A son avis, on ne devrait pas les stigmatiser. « Il ne faudrait pas qu’on stigmatise les organisations. Nous sommes pour la protection des personnes quel que soit leur orientation sexuelle, leur race, leur culture ou leur religion. Nous ne faisons pas de distinction lorsqu’il s’agit de protection des droits humains. Ces positions peuvent amener des amalgames mais nous ne nous battons pas pour la dépénalisation de l’homosexualité », a renseigné Sadikh Niasse qui n’a pas manqué d’interpeller Mame Matar Guèye de l’ONG Jamra en lui demandant de divulguer la liste des organisations qui ont des récépissés et qui soutiennent les homosexuels au Sénégal.
LA LEÇON DE MACKY À TANGER
Primé à la 12ème édition du «Davos africain», qui se tient au Maroc, le chef de l’Etat a cadré son discours sur le thématique de ces derniers Medays, en rappelant les fondements de la liberté, bases de la sécurité et du développement des pays
Primé à la 12ème édition du «Davos africain», qui se tient à Tanger au Maroc jusqu’au samedi prochain, le chef de l’Etat a cadré son discours sur le thématique de ces derniers Medays, en rappelant les fondements de la liberté, bases de la sécurité et du développement des pays. Il en a profité pour mettre en exergue les efforts de son gouvernement pour assurer l’inclusion sociale au Sénégal, et réaliser le Sénégal pour tous et l’émergence en 2035.
Le discours d’acceptation du Prix Medays 2019, qui lui a été décerné hier par l’Institut marocain Amadeus, a été pour Macky Sall, une occasion d’un fort plaidoyer pour la responsabilité de tous les citoyens, comme l’un des garants et des fondements de la liberté collective, et partant, de la démocratie et du développement, pour relever les défis posés par les incertitudes et la subversion, facteurs et causes de crises globales. En présence d’éminentes personnalités des mondes politique, économique et social, venues de différents horizons, le chef de l’Etat sénégalais a été honoré par le président de l’Institut Amadeus, M. Brahim Fassi Fihri, pour son travail à la tête du Sénégal.
Parmi les invités à la cérémonie d’ouverture du Forum Medays, qui doit prendre fin samedi prochain, on a noté la présence de Olusegun Obasanjo, ancien Président du Nigeria, de Diocounda Traoré, ancien dirigeant de la transition au Mali, du Premier ministre de Sao Tomé et Principe, sans compter des officiels marocains, ghanéens, tchadiens, palestiniens, croates, entre autres. Des intervenants, ou «speakers», sont même venus de Chine, ce qui donne une certaine indication de l’importance de cet évènement qui en est à sa douzième édition et qui se présente modestement comme le «Davos africain». Macky Sall a, en recevant le prix, déclaré : «J’y vois certes, la reconnaissance d’efforts déjà consentis, mais surtout, un encouragement à poursuivre ces efforts tant les défis sont encore nombreux dans nos pays et sur notre continent africain. A l’évidence, nous ne pourrons relever ces défis que dans un environnement de paix, de sécurité et de stabilité, qui offre la quiétude nécessaire à l’œuvre de développement économique et social».
S’épanchant sur le thème du forum, qui porte sur la «Crise globale de confiance : Faire face aux incertitudes et à la subversion», le chef de l’Etat a indiqué que «le cours de l’Histoire n’est pas rassurant, en ces temps d’antagonisme ouvert ou latent, de crise aiguë et de vulnérabilités multiples», crises qu’il s’est permis d’énumérer : environnementales, sécuritaires et humanitaires, économiques et sociales. Sur ce dernier point, il a indiqué : «Une étude récente révèle que seulement 8% de la population du monde détiendraient 86% de sa richesse. Malgré le recul de l’extrême pauvreté, plus de 850 millions de personnes vivent encore dans des conditions d’indigence absolue, ce qui rend peu probable la réalisation de l’Objectif de développement durable d’éradication de la pauvreté d’ici 2030.»
A côté de ces défis, d’autres sont également globalement inquiétants : «Je pense à la montée de l’extrémisme et du populisme, sous-tendus par les flots des fake-news et la manipulation des consciences à travers tous les continents.» Pourtant, rappelle-t-il, l’histoire a suffisamment démontré que le populisme et l’extrémisme mènent invariablement à l’impasse et à la désillusion.
Parmi ces défis inquiétants il y a toujours, selon Macky Sall, les velléités «d’hégémonisme civilisationnel. Car certains se croient investis du pouvoir et de la mission de prescrire aux autres la façon d’être et d’agir. Quelque chose que nous vivons quotidiennement dans nos Etats respectifs». Ce qui le pousse à mettre en garde : «Vouloir ériger des valeurs locales en mode de vie universelle, alors même que les sociétés humaines sont différentes par leur histoire et leur tradition, c’est méconnaître l’égale dignité des cultures et des civilisations. C’est ignorer le dialogue qui favorise le respect, la compréhension mutuelle et la coexistence pacifique des peuples.» Et pour ne rien gâter, Macky Sall convoquera l’universitaire Felwine Sarr au débat, en le citant en ces termes : «Il ne saurait y avoir de droit à l’injonction civilisationnelle.» En d’autres termes, «les pluralités sociétales ne sauraient se dissoudre dans un monolithisme réducteur. Elles doivent plutôt s’inviter au rendez-vous du donner et du recevoir.»
Le chef de l’Etat estime qu’il faudrait à tous les acteurs, politiques, Société civile, secteur privé, entretenir et rétablir les fondements du «vivre ensemble, c’est-à-dire, accepter les règles du contrat social qui donnent naissance à la liberté, à la responsabilité et à la solidarité». Il a rappelé que l’essence de l’idéal démocratique, c’est le droit reconnu au citoyen de manifester et de s’exprimer librement sans être inquiété. Pour ajouter juste après que «le droit va avec le devoir. Il n’y a pas de liberté sans responsabilité… Quelles que soient les opinions et les ambitions, il faut convenir que la subversion ne peut être une forme acceptable de contestation, parce qu’elle fragilise l’Etat, favorise l’instabilité et met en péril la paix, la sécurité, et finalement, la démocratie et le développement».
Macky Sall n’a pas manqué de mettre en avant ses efforts dans la volonté de réduire les fractures au Sénégal, dans le cadre de sa vision «d’Un Sénégal pour Tous». Il dit avoir mis en place «des politiques publiques d’inclusion sociale et d’équité territoriale» qu’il a largement détaillées. Ce qui lui a permis d’ajouter que les mêmes efforts sont accomplis aussi dans d’autres pays africains. Par conséquent, il a estimé que «dans sa grande majorité, et en dépit des défis devant nous, l’Afrique progresse».
LA VICTOIRE DES LIONS ET D’AUTRES SUJETS AU MENU DES QUOTIDIENS
"IL N’Y AURA PLUS DE CITOYENS AU-DESSUS DE LA LOI" EN RD CONGO
En visite à Paris, le président de République démocratique du Congo Félix Tshisekedi a accordé une interview à France 24 dans laquelle il affirme vouloir renforcer l'action de la justice
En visite à Paris, le président de République démocratique du Congo Félix Tshisekedi a accordé une interview à France 24 dans laquelle il affirme vouloir renforcer l'action de la justice. Il trouve normal que des "soubresauts" secouent parfois la coalition gouvernementale.
LES PAYS DU G5 SAHEL CHERCHENT FINANCEMENT… DESESPEREMENT
Les présidents tchadien et nigérien ont publiquement regretté mercredi un "manque de solidarité" de la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme dans la région du Sahel. Ils attendent toujours les financements promis.
Les présidents tchadien et nigérien ont publiquement regretté mercredi un "manque de solidarité" de la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme dans la région du Sahel. Ils attendent toujours les financements promis.
"On nous écoute avec politesse, avec un petit sourire entendu, mais à l’arrivée il n’y a pas grand-chose", a déploré Ibrahim Boubacar Keïta, le président malien, en marge du forum sur la paix, mardi 12 novembre, à Paris. Le dirigeant africain a profité de son passage en France pour expliquer que les financements annoncés par la communauté internationale destinés à lutter contre le terrorisme dans le Sahel n’étaient toujours pas parvenus dans les caisses de la force conjointe du G5 Sahel, cadre institutionnel formé en 2014 par la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad.
Or "en face de nous, nous avons des gens déterminés qui ont des ressources dans une guerre asymétrique à laquelle nos forces ne sont pas préparées", a poursuivi le dirigeant africain. En quelques mots, "nous nous sentons comme esseulés."
"Aidez-nous à tenir la route"
Un message relayé par son homologue tchadien mercredi sur RFI. "Des amis, des donateurs, des partenaires techniques et financiers nous ont promis plus de 12 milliards de dollars pour développer cette zone sensible", a déclaré Idriss Déby, dans l’émission "Le débat africain". Nous avons fait nos projets mais jusqu'au jour où je parle, en ce qui concerne le Tchad, aucun de ces projets n'a été financé. On n'a pas les financements (...) qu'on nous donne cet argent", a-t-il dit.
Concrètement, la force conjointe du G5 Sahel réclame d'un côté 12 milliards de dollars, soit un peu plus de 10 milliards d’euros, pour le développement et de l'autre 400 millions de dollars (363 millions d’euros) pour équiper ses armées. Or "sur les 400 millions rien jusqu'à nos jours, sur les 12 milliards rien", a regretté le chef d’État, évoquant notamment l'Union européenne et ses promesses d'aides. […] Nous faisons notre part, aidez-nous à tenir la route", a-t-il conclu.
Mais la route des financements est parfois longue. Surtout en ce qui concerne l’Union européenne. "Le décaissement des financements de Bruxelles peut être extrêmement lent, estime un expert de la question du terrorisme dans le Sahel dans un entretien à France 24. La France a d’ailleurs fait appel à l’agence Expertise France, un sous-traitant sollicité pour tenter de réduire les délais d’attente, mais il s’avère que le processus est encore plus long qu’avant."
Réticences
Aux lenteurs administratives s’ajoutent les réticences de certains États membres de l’Union européenne qui rechignent notamment à alimenter le PIP, le programme d’investissement prioritaire destiné à financer des projets dans ces pays émergents. Par ce plan qui prévoit notamment la construction d’écoles, de centres de soins, des accès à l'eau, les gouvernements espèrent éloigner les populations les plus vulnérables des tentations jihadistes. "Mais si certaines capitales européennes sont prêtes à mettre la main à la poche pour financer les armées de la force G5 Sahel, ils considèrent en revanche que l’aide au développement de ces cinq pays ne les concernent plus", considère l'observateur du Sahel.
Pour fonctionner, la force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S) est pourtant obligée de se tourner vers des aides extérieures. Car les cinq pays qui la composent font aussi partie des nations les plus pauvres du monde. Chaque État du FC-G5S contribue à hauteur de 10 millions d’euros du budget du groupement.
Dans le détail, sur les 414 millions d'euros promis, l'Union européenne s’est engagée à hauteur de 100 millions, dont huit millions de la France. L'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont respectivement promis une aide de 100 et 30 millions d'euros. Il faut noter que ces chiffres ne concernent que le volet sécuritaire. Car 500 projets de développement - chiffrés à six milliards d'euros sur la période 2018-2022 - ont été présentés également à Bruxelles dans le cadre de l'Alliance pour le Sahel, une initiative portée par Paris.
En attendant que les promesses se concrétisent, les cinq pays africains engagés dans la lutte contre le jihadisme peuvent compter sur des aides indirectes. La France est pleinement engagée dans la lutte contre le terrorisme au Mali et au Sahel, à travers l’opération Barkhane, aux côtés de la force conjointe du G5 Sahel. Quelque 4 000 soldats français sont déployés dans la région, à la demande des pays du G5.
La MINUSMA au chevet du Sahel
L’ONU ne finance pas directement le FC-G5S mais agit également au Sahel par le biais de la MINUSMA. Si la force militaire onusienne n’a vocation à mener des opérations anti-terroristes, elle œuvre tout de même pour la paix sur une large zone qui comprend le Sahel.
Le groupement africain plaide d'ailleurs pour une aide directe de l’ONU. Le G5 Sahel a demandé à ce titre de placer la force sous chapitre VII de la charte de l'Onu qui permettrait un financement plus durable. En vain. Certaines puissances, à l’instar des États-Unis, s’y sont refusées, préférant limiter les dépenses extérieures.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres est pourtant favorable "à un financement des Nations unies avec des contributions obligatoires pour la force du G5 Sahel", a-t-il estimé dans un entretien à RFI. "Mais même ça aujourd'hui à mon avis ce n'est pas suffisant", a-t-il poursuivi, un brin défaitiste. "Je suis entièrement convaincu que nous ne sommes pas en train de gagner la guerre contre le terrorisme au Sahel, qu'il faut renforcer cette opération."
LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE INQUIÉTÉ A L'APPROCHE DE LA PRÉSIDENTIELLE
À moins de deux semaines de l'élection présidentielle, la Guinée-Bissau est plongée dans l’incertitude après que le président José Mario Vaz a limogé le Premier ministre chargé de conduire le processus électoral.
À moins de deux semaines de l'élection présidentielle, la Guinée-Bissau est plongée dans l’incertitude après que le président José Mario Vaz a limogé le Premier ministre chargé de conduire le processus électoral.
La Guinée-Bissau semblait avoir tourné la page des périodes d’instabilité politique faites de coups d’État avec l’élection en 2014 de José Mario Vaz à la tête du pays. Sept ans après le dernier putsch militaire, le pays risque de renouer avec ses vieux démons alors que se profile, le 24 novembre, l'élection présidentielle.
Douze candidats briguent la magistrature suprême lors de ce scrutin qui pourrait se transformer en un duel entre le président sortant José Mario Vaz et l'ancien Premier ministre Domingos Simões Pereira, dont l'inimitié alimente les tensions politiques dans le pays. La crise politique laisse surtout planer le spectre d'un énième coup d'État de l'armée, comme ce fut le cas en 2012. Des militaires avaient alors pris le pouvoir entre les deux tours de la présidentielle avant de le céder aux civils deux ans plus tard.
Préoccupé, le Conseil de sécurité de l’ONU a appelé lundi 11 novembre, l'armée à rester à l’écart de la crise politique qui couve depuis plusieurs mois dans le pays. De son côté, le président José Mario Vaz mène des consultations auprès des hauts gradés de l’armée pour s’assurer leur soutien.
En pleine campagne électorale, le chef de l'État s'est entretenu tour à tour avec le chef d'état-major général, Biagué Nam Tam et le vice-chef d'état-major, Mamadu Ture Kuruma. "L'armée a un véritable poids historique puisque la Guinée-Bissau est l'un des rares pays d'Afrique de l'Ouest à avoir obtenu son indépendance au terme d'une lutte armée contre le colonisateur. Elle a une légitimité. Mais depuis le dernier coup d'État en 2012, les militaires restent prudents sur la scène politique", analyse Vincent Foucher, chercheur au CNRS, contacté par France 24.
Guerre de leadership
José Mario Vaz essuie de vives critiques de la part de la communauté internationale depuis le limogeage fin octobre du Premier ministre Aristide Gomes, soutenu par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) et l’ONU. Il a été remplacé par Faustino Imbali qui a, quant à lui, été forcé à la démission seulement deux semaines après sa nomination sous la pression de l’institution régionale.
Nommé en avril 2018, Aristide Gomes était chargé de conduire le processus électoral selon les accords de sortie de crise conclus à Lomé lors d’un sommet extraordinaire de la Cédéao. “Mais José Mario Vaz tente d’instrumentaliser l’armée pour imposer Faustino Imbali et demande à l’armée de chasser le gouvernement d’Aristide Gomes [qui refuse de démissionner]", explique Vincent Foucher.
La crise politique qui menace encore une fois de déstabiliser cette ancienne colonie portugaise de près de deux millions d’habitants trouve ses origines dans la guerre de leadership qui oppose José Mario Vaz, élu en 2014 à la tête du pays sous la bannière du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) - le principal parti du pays - et l’ancien Premier ministre Domingos Simões Pereira, qui contrôle la formation politique et la majorité à l’Assemblée nationale. Les dissensions entre les deux personnalités éclatent au grand jour quand le premier démet en 2015 le gouvernement du second jugé trop influent au sein de l’ancien parti unique et accusé d'être corrompu.
“Il faut remonter un peu plus loin, à février 2014, pour comprendre la crise quand au congrès de Cacheu, Domingos Simões Pereira prend le contrôle du PAIGC. Mais certaines personnes mécontentes ont imposé comme candidat à la présidentielle José Mario Vaz pour faire une sorte de contrepoids à l’influence de Pereira dans le parti”, explique Vincent Foucher. “Mais à partir de 2015, José Mario Vaz déroule un programme de lutte contre son Premier ministre en le séparant de certains alliés et en le limogeant. Il y a eu toute une série de décisions politiques pour essayer de mettre en difficulté la majorité parlementaire de l’ancien Premier ministre”.
S’en est suivie une guerre larvée entre les deux hommes politiques qui a mené au départ de plusieurs figures du PAIGC et à l’exclusion du président élu, obligé de se représenter pour un nouveau mandat sans étiquette. Sans véritable base politique, José Mario Vaz nomme au rythme des alliances, pas moins de six chefs de gouvernement en cinq années.
Maintenir la stabilité du pays
Le chef d’État bissau-guinéen sort encore plus fragilisé des législatives de mars 2019 remportées par le PAIGC, désormais purgé des frondeurs et totalement contrôlé par Domingos Simões Pereira. Avec une majorité à l'Assemblée nationale, l’ancien Premier ministre fait ainsi figure de principal favori d’une présidentielle ouverte. Il fera tout de même face, en plus du président sortant, à quatre transfuges et ancien hauts responsables de l’ancien parti unique comme Carlos Gomes Junior, ancien Premier ministre entre 2009 et 2012, ou encore Umaro Sissoco Embaló porté par le Mouvement pour une Alternative démocratique (Madem G-15), fondé par un groupe de dissidents du PAIGC.
Pour la communauté internationale, il est primordial de maintenir la stabilité du pays, enjeu majeur du scrutin présidentiel. “Avoir un régime stable et légitime qui n’est pas soumis à des combinaisons et recombinaisons incessantes pourrait permettre de crédibiliser la Guinée-Bissau aux yeux des institutions internationales et des acteurs économiques”, explique Vincent Foucher, chercheur au CNRS.
Le 9 novembre, la Cédéao a condamné fermement les agissements jugés “illégaux” du président José Mario Vaz et a accordé son “plein soutien” au Premier ministre Aristide Gomes lors d’un sommet extraordinaire à Niamey. Pour prévenir d’éventuelles troubles dans une région déjà en proie à la menace jihadiste au Mali, au Burkina-Faso et au Nigéria, l’institution régionale a décidé de renforcer la force Ecomib, composée de centaines de soldats qui assurent la protection des bâtiments officiels et des personnalités. Une mission de chefs d’État et de gouvernement se rendra à Bissau, la capitale du pays, le 16 novembre.