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29 avril 2025
Politique
LE MIRAGE DE LA FOULE DES PRÉTENDANTS
Plus de 230 candidats potentiels s'étaient manifestés mais seul un tiers a confirmé sa candidature. Derrière cet enthousiasme déclaratif se cache finalement peu de détermination
Plus de 230 candidats déclarés avaient récupéré des fiches de collecte de parrainage à l’ouverture des opérations en septembre dernier. un engouement qui avait impressionné les observateurs de la scène politique sénégalaise. Mais à quelques heures de la clôture des dépôts de candidatures prévue aujourd’hui à minuit, juste une trentaine de dossiers de candidature a été déposée.
Le scrutin du 25 février 2024 est inédit dans l’histoire politique sénégalaise. Le Président sortant ne sera pas sur la ligne de départ. Macky Sall a renoncé à une troisième candidature préférant envoyer son dauphin Amadou Ba au charbon. En effet, cette compétition électorale sera l’une des plus ouvertes et des plus disputées. D’ailleurs, l’engouement autour du retrait des fiches de collecte de parrainage était assez révélateur. Plus de 230 mandataires étaient venus récupérer des fiches de parrainage en septembre dernier. Cette ferveur a été également constatée dans les opérations de collecte de signatures qui ont jeté les Sénégalais dans une atmosphère de campagne avant l’heure. Il faut relever également l’engouement créé par la désignation de Bassirou Diomaye Faye comme candidat de l’ex-Pastef et la tension créée par le refus de la Direction générale des élections (DGE) de remettre au candidat Ousmane Sonko des fiches de collecte de parrainage. Ces opérations de parrainage ont permis aussi de relever le manque de sérieux de la plupart des acteurs politiques qui, inconnus du public, sont sortis de l’anonymat pour prétendre à la magistrature suprême. D’ailleurs, à ce jour et à quelques heures de la clôture des dépôts de candidatures, juste une trentaine de dossiers de candidature a été déposée. Tous les candidats sérieux ou presque ont déjà déposé leurs dossiers. Il en est ainsi du candidat du régime sortant, Amadou Ba dont le dossier a été déposé hier au Conseil constitutionnel par le mandataire de BBY, le Ministre Benoît SAMBOU, le député Abdoulaye DIAGNE et de Oumar Abdoulaye BA, Dg de la grande muraille verte. Ses principaux rivaux en l'occurrence Ousmane Sonko, Bassirou Diomaye Faye, Aminata Touré, Aliou Mamadou Dia du PUR, Dr Abdourahmane Diouf, Anta Babacar Ngom, entre autres, ont également déposé leurs candidatures hier. Auparavant, le 23 décembre 2024, Karim Wade avait déposé sa candidature. Le vendredi 22 décembre 2023, Déthié Fall et Pape Djibril Fall avaient ouvert le bal.
Au total, une trentaine de dossiers de candidatures ont été soumis pour le moment au Conseil constitutionnel. Il est évident que ce nombre sera réduit encore une fois après la publication de la liste définitive des candidats par la juridiction constitutionnelle au plus tard le samedi 20 janvier 2024. On se rappelle qu’à l’élection présidentielle de 2019, seules cinq candidatures avaient été validées par le Conseil constitutionnel sur les 27 dossiers soumis à son examen.
Vérification des parrainages
Il faut relever par ailleurs qu’à l’expiration du délai de dépôt des dossiers de déclaration de candidature, la Commission de Contrôle des parrainages installée au siège du Conseil constitutionnel procède à la vérification des listes de parrainages suivant un ordre de passage déterminé par un tirage au sort. A en croire, le guide pratique confectionné par la DGE pour le scrutin du 25 février prochain, lorsque le dossier d’un candidat est vérifié, son représentant est admis à assister aux opérations de contrôle des parrainages de ce candidat. Toujours, selon le document, les dossiers incomplets pour absence de l'une des pièces exigées à l'article L. 121 du Code électoral et les dossiers n'ayant pas obtenu le minimum de parrains requis ne sont pas pris en compte dans les opérations de contrôle des parrainages.“ A l'issue de l'instruction des dossiers de parrainage, le Conseil constitutionnel procède au plus tard quarante-trois (43) jours avant le premier tour du scrutin, soit au plus tard le vendredi 12 janvier 2024, à la notification écrite, au mandataire ou au représentant du candidat indépendant, de l'invalidité de son dossier pour cause de présence de parrains sur plus d'une liste (doublons externes), si ce fait a entraîné la non-obtention du minimum de 44 231 électeurs inscrits au fichier général des électeurs et/ou du minimum de deux mille (2000) électeurs au moins par région, et dans au moins sept (7) régions, ou de treize (13) députés ou de cent vingt (120) chefs d'exécutif territorial”, lit-on dans le guide publié par la DGE. En définitive, il indique que la notification écrite indique au mandataire ou au représentant du candidat que ce dernier dispose d'un délai de quarante-huit (48) heures pour régulariser son dossier par le remplacement des parrainages invalidés pour cause de présence de parrains sur plus d'une liste.
L’EX-DEPUTEE FATOU THIAM INVALIDE LA CANDIDATURE DE KARIM WADE
Aux yeux de la loi, Karim Wade est disqualifié de la prochaine élection prochaine. C’est l’avis de l’ex-députée Fatou Thiam dans une note parvenue à L’As dans laquelle elle descend le fils de l’ex-chef de l’État Abdoulaye Wade en flammes.
Convaincue que Karim Wade «ne peut pas être candidat» à la prochaine élection présidentielle, l’ex-députée Fatou thiam est sortie de sa réserve pour foncer à vive allure sur le fils du pape du sopi. Avec des arguments à l’appui, la présidente du Mouvement ALur et conseillère municipale à saint-Louis semble déclarer que si le droit est appliqué, la candidature de l’ancien ministre du ciel et de la terre sera invalidée par le Conseil constitutionnel.
Aux yeux de la loi, Karim Wade est disqualifié de la prochaine élection prochaine. C’est l’avis de l’ex-députée Fatou Thiam dans une note parvenue à L’As dans laquelle elle descend le fils de l’ex-chef de l’État Abdoulaye Wade en flammes. «Condamné à payer une amende après avoir gravement secoué nos deniers publics, il est dans la diversion et ne doit aucunement oublier qu’il doit impérativement être en règle avec le trésor public.
Pour rappel, Karim WADE a été épinglé pour enrichissement illicite et condamné à payer une amende de 138 milliards. Une éventuelle candidature passerait forcément par un règlement de ce montant qui appartient au peuple sénégalais, et aucune concession ne peut être faite sur cette question», estime la présidente du Mouvement ALUR et conseillère municipale à SaintLouis, qui a été sur tous les fronts lorsque l’ancien ministre du ciel et de la terre a été arrêté dans le cadre de la traque des biens mal acquis.
Pour Fatou Thiam, la justice doit faire son travail et elle invite Karim Wade à payer l’amende, à la suite de sa condamnation par la Cour de Répression de l’Enrichissement illicite (CREI). « Après le dialogue national, il a été certes amnistié par l’Assemblée nationale, mais les combinaisons politiques ne doivent pas et ne peuvent pas empêcher la justice de faire convenablement son travail. Et que faire de la déclaration sur l’honneur ? Nous lui demandons simplement de prendre le chéquier et passer à la caisse. Toutefois, s’il s’acquitte de cette forte amende, les Sénégalais sauront qu’il est en réalité un grand criminel financier. Par conséquent, nous lançons un appel solennel aux autorités compétentes pour exiger le paiement intégral de cette amende jusqu’au dernier centime, comme l’a fait Monsieur Khalifa Ababacar Sall, avant la validation de sa candidature», a signalé Fatou Thiam.
Qui plus est, souligne-t-elle, «Monsieur Karim WADE a la double nationalité (française et sénégalaise), et d’après la Constitution, tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise». «D’après nos lois en vigueur, le candidat qui a la double nationalité doit renoncer à sa nationalité étrangère six mois avant l’élection présidentielle. Et à quelques encablures de l’élection présidentielle, nous ne sommes au courant d’une quelconque renonciation de sa part. Sa réticence serait due à un désir ardent de sauvegarder ses intérêts dans certaines sociétés étrangères acquis sous sa nationalité française qu’il pourrait perdre en cas de renonciation. Cela prouve, à bien des égards, que ses intérêts personnels ont largement pris le dessus sur ceux de la nation sénégalaise», a-t-elle indiqué. Il faut souligner que Karim Wade constitue une menace pour le régime en ce sens que des sondages le classerait deuxième en l’absence de Ousmane Sonko dontla candidature est plus que jamais hypothétique compte tenu de ses déboires judiciaires. Karim Wade va-t-il revenir ? En tout cas, selon ses proches, il ne foulera le sol du Sénégal que lorsqu’il sera sûr que sa candidature a été validée par le Conseil constitutionnel.
NICOLAS NDIAYE EXHORTE BBY A TAIRE LES QUERELLES
Après l’Alliance des forces de Progrès (AFP), le Parti socialiste et l’Alliance pour la République (APR), c’est au tour de la Ligue démocratique (LD) d’investir le candidat Amadou Ba.
Membre de la coalition Benno Bokk Yaakaar, la Ligue démocratique (LD) a investi le candidat, Amadou Bâ pour la présidentielle de 2024. Dans son allocution, son secrétaire général Nicolas Ndiaye a exhorté ses camarades de la mouvance présidentielle à taire les querelles partisanes et à se concentrer sur l’essentiel.
Après l’Alliance des forces de Progrès (AFP), le Parti socialiste et l’Alliance pour la République (APR), c’est au tour de la Ligue démocratique (LD) d’investir le candidat Amadou Ba. C’était en présence de certains membres du gouvernement, des députés ainsi que des responsables de la coalition Benno Bokk Yaakaar. Conscient que les enjeux de cette élection présidentielle sont colossaux, le Secrétaire général du LD, Nicolas Ndiaye, a appelé ses camarades à faire preuve de solidarité pour relever les défis. «En nous unissant derrière notre candidat Amadou Ba, nous renforçons notre capacité collective à apporter des changements positifs et durables dans la vie de nos concitoyens», ajoute le député. Pour lui, l’unité de la mouvance présidentielle n’est pas simplement un principe, c’est une nécessité. «Nous devons montrer au peuple que malgré nos différences, nous sommes unis par un objectif commun : le progrès de notre nation. En travaillant ensemble, nous renforçons la crédibilité de notre coalition et démontrons notre engagement envers une gouvernance stable et efficace», indique le jallarbiste en chef.
Par conséquent, il appelle tous les leaders, toutes les entités, à mettre de côté les querelles partisanes et à se concentrer sur ce qui les unit. «Notre candidat incarne les aspirations de nos partis et des citoyens que nous représentons. En le soutenant d’une seule voix, nous envoyons un message puissant sur notre capacité à mettre de côté les intérêts personnels pour le bien collectif », ajoute le député. Il est d’avis que l’élection présidentielle est l’occasion pour leur coalition de montrer au peuple qu’ils sont unis, forts et prêts à assumer la responsabilité de guider notre nation vers un avenir plus prometteur. « En travaillant main dans la main, nous sommes non seulement plus forts, mais aussi capables de répondre aux attentes de ceux qui nous ont confié leurs voix», souligne Nicolas Ndiaye en appelant la coalition à renforcer l’unité, à cultiver la solidarité qui les lie et à marcher ensemble vers la victoire. «Nous pouvons réaliser des progrès significatifs et offrir au Sénégal un leadership fort et visionnaire», indique Nicolas Ndiaye. A cet effet, il engage ses camarades à travailler sans relâche pour assurer la victoire d’Amadou Ba au soir du 24 février 2024.
AMADOU BA : «NOUS NOUS ENGAGEONS A DONNER PLUS D’EMPLOIS ET PLUS D’EQUITE»
Se réjouissant de cette forte mobilisation des jallarbistes, le candidat de BBY s’engage pour sa part à poursuivre l’œuvre de construction du Sénégal. «Nous connaissons tous la LD. Un parti sérieux avec des gens rigoureux et engagés exclusivement pour la construction du Sénégal. Camarades, sachez qu’on va continuer l’aventure avec vous. On va continuer l’œuvre de construction entreprise par nos différents chefs d’Etat mais particulièrement par le Président Macky Sall pour faire du Sénégal un pays de prospérité et d'équité, c’est-à-dire plus de sécurité et de justice», affirme le candidat de la coalition Bby. Aussi, assure-t-il : «Nous allons surtout poursuivre la mise en œuvre du plan Sénégal émergent». A cet effet, Amadou Ba promet de mettre l’accent sur l’emploi. «Nous nous engageons à donner plus d’emplois et plus d’équité mais surtout à préserver la paix et la sécurité du pays parce que c’est notre première richesse», ajoute le Premier ministre. Il promet aussi de préserver la survie de la coalition Benno Bokk Yaakaar.
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MAURICE SOUDIECK DIONE ETALE SES CRAINTES
Invité de l’émission «Objection» sur Sud Fm, dimanche 24 décembre, le Professeur Maurice Soudieck Dione, n’a pas manqué de lister les dysfonctionnements qui compromettent l’indépendance des organes chargés de l’organisation et du contrôle des élections
Maurice Soudieck Dione, Professeur agrégé en sciences politiques à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, est formel. La décision de la Direction générale des élections (DGE) qui a refusé, une nouvelle fois, d’exécuter la décision du juge du tribunal hors classe de Dakar favorable à Ousmane Sonko est une énième défiance qui dévoile les failles d’une administration électorale aux ordres du pouvoir en place. Invité de l’émission Objection de Sud Fm, dimanche 34 décembre, il a posé son regard crique sur l’indépendance des organes en charge de l’organisation et du contrôle des élections. Non sans manquer de s’inquiéter de l’avenir de la démocratie sénégalaise.
Invité de l’émission «Objection» sur Sud Fm avant-hier, dimanche24décembre, le Professeur Maurice Soudieck Dione, agrégé en sciences politiques à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, n’a pas manqué de lister les dysfonctionnements qui compromettent l’indépendance des organes chargés de l’organisation et du contrôle des élections. « Les organes de régulation en réalité, ce sont des autorités administratives indépendantes. C’est-à-dire une catégorie sui generis qui est un peu sortie des dispositifs hiérarchiques de l’administration classique comme la CENA et le CNRA. Elles devraient avoir une autorité, une indépendance qui devrait leur permettre de réguler efficacement les secteurs à eux confiés. Malheureusement, on se rend compte qu’il y a des tentatives de contrôle du pouvoir en place qui posent naturellement problème », analyse t-il d’emblée.
S’agissant spécifiquement de la CENA, le premier obstacle, à en croire le Pr Dione, c’est que « son budget est rattaché au ministère de l’Intérieur qu’elle est censée contrôler ». Ce qui pose « un problème », estime-t-il. Les garanties d’indépendance au sein de cette commission autonome sont dévoyées par les conditions de nomination de ses membres et leur mandat. « On laisse des retraités en place - dont le mandat est arrivé à échéance, on les maintient illégalement. Comment voulez-vous qu’ils soient indépendants ? Ce sont des manœuvres et manipulations politiciennes qui remettent en cause l’autorité et l’efficacité des organes de régulation », a relevé Maurice Soudieck Dione. Quid de la DGE ?
Le Professeur Dione a tenu à faire remarquer que son rôle n’est pas de fausser l’expression de la souveraineté populaire en favorisant le rejet des listes de l’opposition. Tout en évoquant dans la foulée les difficultés au sein de cette administration et tout en soulignant la création de l’Onel en 2005 pour résoudre une connivence problématique entre l’administration et le parti au pouvoir, Maurice Soudieck Dione a tenu à exprimer son incompréhension face aux efforts déployés par l’administration pour faire rejeter des candidatures, y compris en se pourvoyant en cassation.
L’avenir incertain de la démocratie sénégalaise a été aussi au centre de la réflexion du Pr Dione. Pour lui, le modèle démocratique sénégalais semble traverser des moments difficiles sous la présidence de Macky Sall. Aussi a-t-il pointé du doigt le recul des libertés individuelles, sacrifiées sur l’autel d’un développement économique à marche forcée. Qui plus est, selon lui, le parrainage citoyen pour filtrer les candidatures à la présidentielle est décrié, tant dans son principe que dans ses modalités actuelles. Le politologue s’est inquiété également de la primauté du politique sur le juridique, illustrée par les récentes décisions sur l’éligibilité des opposants lors du dialogue national, A son avis, seule une multiplication de fortes candidatures au sein de l’opposition pourrait mener à une alternance démocratique en 2024, d’où les manœuvres du pouvoir pour affaiblir ses rivaux potentiels. Le Pr Dione n’a pas manqué pour finir de déplorer le processus de déconstruction de l’héritage socialiste par la mouvance libérale actuelle. A la longue, la rigueur, l’exemplarité des gouvernants et un idéal d’État s’éloignent de plus en plus, ce qui suscite de fortes inquiétudes pour l’avenir de la démocratie sénégalaise.
SONKO FORCLOS SUR LE PARRAINAGE, SCÉNARIOS D’UNE CANDIDATURE IMPROBABLE
Le dépôt de candidatures a pris fin hier. Le Conseil constitutionnel va procéder au tirage pour le passage de la vérification des parrainages d’abord. Une chose est sûre : Ousmane Sonko est forclos sur le parrainage parce que sans fiches.
Le dépôt de candidatures a pris fin hier. Le Conseil constitutionnel va procéder au tirage pour le passage de la vérification des parrainages d’abord. Une chose est sûre : Ousmane Sonko est forclos sur le parrainage parce que sans fiches. Mais s’il a déposé son dossier de candidature comme il se susurre, les scénarios qui se dressent devant lui sont nombreux.
Le scénario du dossier incomplet
Le dépôt des dossiers de candidatures a été clôturé hier. Pas de bousculade comme en 2019 puisque cette fois-ci c’est le tirage au sort qui remplace l’ordre d’arrivée. Mais la curiosité était du côté du leader de l’ex-Pastef. Ousmane Sonko a été forclos donc, hier, sur ce parrainage puisqu’il n’a pas pu retirer sa fiche de parrainage, citoyen ou parlementaire. La Cour suprême n’ayant pas encore statué sur le pourvoi annoncé par l’Etat. Le scénario était là : Déposer son dossier de candidature, sans le parrainage. C’est apparemment ce qu’a fait son mandataire, qui compte sur les constats d’huissier pour le refus de la Dge de lui remettre les fiches et de la Cdc de lui délivrer l’attestation de la quittance de sa caution. Deux pièces du dossier qui pourrait, sur la forme, être déclaré incomplet par le Conseil constitutionnel. En attendant le fond avec la condamnation par contumace qui fait débat.
Le scénario d’une victoire à la Cour suprême
Alors, les 7 «sages» vont examiner le dossier de l’op- posant en prison on en sait quand. Dans ce bras de fer, Sonko ne rêve pas trop, mais entend jouer la carte du jusqu’au-boutisme judiciaire. Il fonderait ses maigres espoirs sur la jurisprudence Insa Sankharé aux Législatives de 1998 lorsque le Conseil a déclaré recevable la liste de candidature du Rassemblement pour le progrès, la justice et le socialisme (Rpjs), estimant que «nonobstant l’absence du Trésorier général au moment du dépôt de candidatures, il y a lieu de constater que la preuve est établie que le cautionnement était disponible et a été présenté au ministère de l’Intérieur avant l’heure de clôture». Sauf qu’ici, Sonko n’a pu faire constater par l’huissier pour convaincre le juge constitutionnel. Des constitutionnalistes estiment que le Conseil ne peut aller plus loin dans cette interprétation. Il reste que le suspense est encore là tant que la décision du Conseil n’est pas disponible. Ousmane Sonko compte aussi sur une éventuelle victoire devant les chambres réunies de la Cour suprême, après le pourvoi de l’Etat contre la décision du juge du Tribunal d’instance de Dakar ordonnant sa réintégration dans les listes électorales. Non pas forcément parce que cela pourrait changer le processus, mais ce serait une victoire qui pourrait compter dans l’opinion.
Le scénario du Plan B
Parallèlement à ces nombreux fronts judiciaires, Sonko mise aussi sur son ou ses plans B. Bassirou Diomaye Faye, lui aussi en prison, est le plan du parrainage citoyen avec des risques de doublons, même s’ils peuvent compter sur une masse de militants inégalable parmi les formations de l’opposition. Mais le parrainage parlementaire reste un autre mystère. Il se dit qu’il est réservé à Sonko lui-même, mais il faudra bien scruter ailleurs aussi puisque Guy Marius, Abass Fall, Birame Souleye Diop, El Malick Ndiaye avaient eux aussi retiré leur fiche de parrainage.
PRÉSIDENTIELLE 2024, LA LISTE DES CANDIDATURES DÉPOSÉES S’ALLONGE
Les dossiers de candidature à l’élection présidentielle du 25 février prochain de plusieurs candidats de l’opposition, dont Bassirou Diomaye Faye, Anta Babacar Ngom, Mary Teuw Niane et Ousmane Sonko, ont été déposés au greffe du Conseil constitutionnel
Dakar, 25 déc (APS) – Les dossiers de candidature à l’élection présidentielle du 25 février prochain de plusieurs candidats de l’opposition, dont Bassirou Diomaye Faye, Anta Babacar Ngom, Mary Teuw Niane et Ousmane Sonko, ont été déposés au greffe du Conseil constitutionnel, a appris l’APS, lundi, de mandataires et proches des concernés.
Les dossiers de MM. Sonko et Faye, le leader et le numéro 2 de Pastef-Les patriotes, un parti d’opposition dissous par le président de la République, ont été déposés auprès de ladite institution, a déclaré à l’APS un proche des deux opposants, sous le sceau de l’anonymat.
Tabouré Agne, le mandataire de la coalition MTN2024, a déclaré avoir remis au greffe du Conseil constitutionnel le dossier de candidature de l’ancien ministre Mary Teuw Niane.
‘’Ce sont les milliers d’étudiants et des centaines de doctorants formés par le professeur Mary Teuw Niane qui se sont cotisés pour payer sa caution’’, a dit aux journalistes son mandataire, Tabouré Agne, à sa sortie des bureaux du Conseil constitutionnel.
Youssouph Diallo, le mandataire de la coalition ayant investi Thione Niang, a déclaré avoir déposé le dossier candidature de l’entrepreneur et conférencier international.
‘’Nous avons déposé notre candidature, avec plus de 52.000 parrains. Avec 2.000 signatures au moins dans neuf régions, plus que le minimum requis, donc’’, a assuré M. Diallo.
‘’Ce matin, le Conseil constitutionnel a officiellement reçu et enregistré son dossier, lequel a été accueilli sans aucune objection, ce qui témoigne de l’excellence et de la rigueur de notre démarche’’, affirme un communiqué du dimanche 24 décembre de la direction de la communication de l’ARC, l’Alternative pour la relève citoyenne, le mouvement ayant investi l’entrepreneure Anta Babacar Ngom.
L’ancienne Première ministre Aminata Touré aussi a annoncé le dépôt de sa candidature. ‘’Notre candidature a été déposée ce matin au Conseil Constitutionnel. Je félicite notre mandataire national, nos délégués régionaux, tous les responsables et militants de #Mimi2024. Je remercie tous les Sénégalais, qui ont accepté de nous parrainer. La lutte pour une élection inclusive et transparente continue. Vive un Sénégal de paix, de justice et de prospérité partagée’’, a-t-elle écrit sur le réseau social X.
par Sidy Alpha Nidaye
RÉHABILITER LE DROIT ET REPENSER UN ÉTAT DE JUSTICE INDÉPENDANTE
EXCLUSIF SENEPLUS - Priver un candidat de sa candidature alors qu'il peut se prévaloir d'une décision de justice exécutoire constituerait une atteinte aux Lois et aux droits fondamentaux, dont la protection ultime revient au Conseil constitutionnel
Lettre ouverte au Conseil constitutionnel du Sénégal
La temporalité politique au Sénégal est rythmée par la manipulation administrative du droit électoral afin d’annihiler la libre participation à l’élection présidentielle du 25 février 2024. Cette fraude à la démocratie et à l’Etat de droit s’organise par l’installation, dans les représentations populaires, de l’idée selon laquelle la recevabilité des candidatures dépendrait de conditions extérieures à la Loi. En droit électoral, tout électeur est éligible lorsque les prérequis légaux sont remplis (âge, nationalité, parrainages…). Le législateur sénégalais a, en 2018, consacré la liaison entre l’éligibilité et la qualité d’électeur pour toutes les élections. En somme, il faut d’abord être électeur avant d'être éligible. En ce sens, l’article L. 57 al.1 du Code électoral ne laisse place à aucune interprétation prétorienne en disposant très clairement que « tout Sénégalais électeur peut faire acte de candidature et être éligible, sous réserve des conditions d'âge et des cas d’incapacité ou d’inéligibilité prévus par la loi ».
A cette aune, les candidatures de Messieurs Ousmane Sonko et de Bassirou Diomaye Faye remplissent toutes les exigences légales. En validant ces candidatures, le Conseil constitutionnel démontrera, par sa fonction de régulation, qu’il est pleinement investi dans un constitutionnalisme promouvant la démocratie pluraliste et l’Etat de droit.
De quelques observations sur l’éligibilité incontestable de Monsieur Ousmane Sonko
L’annulation de la radiation de Monsieur Ousmane Sonko par le Tribunal d’Instance Hors Classe de Dakar, le 14 décembre 2023, a pour conséquence sa réintégration immédiate dans le fichier électoral. Le Tribunal d’instance a considéré, en vertu de l’article 307 CPC, que l’arrestation de Monsieur Ousmane Sonko anéantit de plein droit le jugement de la Chambre criminelle du Tribunal de Grande Instance de Dakar du 1er juin 2023 condamnant celui-ci pour délit de corruption de la jeunesse. La décision de la Chambre criminelle étant sortie de l’ordonnancement juridique, la situation de contumax, déjà juridiquement absconse, ne peut plus prospérer et, par conséquent, aucune décision de radiation ne pourrait se fonder sur une décision judiciaire devenue inexistante. Il s’ensuit que l’éligibilité de Monsieur Ousmane Sonko ne saurait être discutée tant il est vrai que l’ordonnance rendue par le Tribunal d’Instance en date du 14 décembre 2023 est d’application immédiate par toutes les autorités administratives en charge de la matière électorale, la Direction Générale des Elections et la Direction de l’Autonomisation du Fichier en l’occurrence. L’article L. 47 al. 4 du Code électoral et les articles 36 et 74-2 de la loi organique relative à la Cour suprême prévoient explicitement le caractère non-suspensif d’un éventuel pourvoi en cassation devant ladite Cour. Autrement dit, l’introduction d’un pourvoi n’aurait aucune incidence sur l’obligation pour les autorités administratives de se conformer, sans délai, à l’autorité de la chose jugée. L’urgence et la célérité exigent, en matière électorale, qu’une action contentieuse ne puisse préjudicier au droit fondamental d’un candidat, Monsieur Ousmane Sonko, de se présenter au suffrage des Sénégalais. L’atypisme juridique de la matière électorale, pensée dans une logique de protection et de sauvegarde des droits fondamentaux, celui de concourir au suffrage universel notamment, commande qu’aucune manœuvre dilatoire n’entrave la pleine réalisation des ressources normatives dédiées aux citoyens-électeurs. Pour preuve, cette matière échappe aux hypothèses limitatives dans lesquelles un recours suspensif est prévu.
Toujours est-il que le refus opposé par les services administratifs du ministère de l’Intérieur, la DGE principalement, d’exécuter une décision de justice, deux mois après le premier refus d’exécution de l’ordonnance du Tribunal d’Instance de Ziguinchor rendue le 12 octobre 2023, viole l’article L. 47 al. 4 du Code électoral et les articles 36 et 74-2 de la loi organique susmentionnée. Ces refus répétés, si le Conseil constitutionnel ne remplit pas la plénitude de son office, sont de nature à préjudicier la candidature de Monsieur Ousmane Sonko alors même que les dispositions pertinentes précitées lui restituent l’intégralité de ses droits civils et politiques. Priver un candidat de sa liberté de candidature, alors même qu’il peut se prévaloir d’une décision de justice immédiatement exécutoire, serait une atteinte grave aux Lois de la République ainsi qu’aux droits fondamentaux dont le gardiennage appartient ultimement au Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel serait responsable de cette violation de la loi électorale s’il ne déclarait pas recevable la candidature de Monsieur Ousmane Sonko qui bénéficie d’une ordonnance de réintégration immédiate dans le fichier électoral et qui, par ricochet, retrouve sa qualité d’électeur. Face aux refus persistants de la DGE de remettre au mandataire de Monsieur Ousmane Sonko ses fiches de parrainages, il appartient au Conseil constitutionnel, sous le prisme du droit et de sa propre jurisprudence, de recevoir favorablement le dossier du candidat lésé complété par des exploits d’huissier constatant que les pièces manquantes relèvent de la responsabilité intégrale de l’Administration électorale qui a, de manière caractérisée, violé l’article L. 47 al. 4 du Code électoral et les articles 36 et 74-2 de la loi organique relative à la Cour suprême. Il ne saurait être reproché à Monsieur Ousmane Sonko une faute de l’Administration. La violation de la loi électorale et de la loi organique sur la Cour suprême, par le refus d’appliquer une décision de justice, celle du Tribunal d’Instance de Dakar, ne peut être supportée par un citoyen-électeur dont les droits électoraux sont intacts. Ce fait du prince acterait le primat de l’Administration sur la justice et mettrait définitivement fin à l’idéal de la séparation des pouvoirs et à l’ordre républicain au Sénégal. Le Conseil constitutionnel a pour mission d’empêcher que l’Administration décide impunément de ne pas exécuter des décisions de justice défavorables au pouvoir politique. Cet arbitraire, s’il devait prospérer, anéantirait notre Etat républicain.
Le Conseil constitutionnel doit nécessairement se prononcer sur l’imputabilité du manquement lorsque les dossiers de candidature lui seront adressés. Il ne peut pas se contenter d’un contrôle notarial minimal des pièces du dossier de candidature sans questionner l’imputabilité du manquement et en tirer les conséquences juridiques appropriées. Sa jurisprudence antérieure l’y oblige. Il est utile de rappeler, que dans une décision du 15 avril 1998, le Conseil constitutionnel du Sénégal avait déclaré recevable une liste de candidats aux élections législatives au motif que l’absence dans son dossier du récépissé du trésorier général attestant du dépôt du cautionnement électoral était imputable à l’Administration faute de permanence au trésor public et d’acceptation par le ministère de l’Intérieur de la somme exigible présentée avant la limite de dépôt des candidatures. En l’espèce le requérant excipait « une défaillance de l'administration pour laquelle son parti ne doit pas être pénalisé ». Il argue « avoir fait preuve de diligence en présentant avant l’heure limite de dépôt la somme de trois millions de francs au Ministère de l'Intérieur mais que le dépôt lui en a été refusé ». Le juge constitutionnel, après avoir insisté sur la corroboration par écrit des prétentions du requérant, décide qu’« il y a lieu de constater que la preuve est établie que le cautionnement était disponible et a été présenté au Ministère de l’Intérieur avant l'heure légale de clôture » (Conseil Constitutionnel, Décision n°/E/3/98 du 15 avril 1998, affaire Insa Sangare). Il n’eut d’autre choix que d’accepter la recevabilité de la liste de candidatures. A l’aune de cette jurisprudence sans équivoque, le refus de la DGE de délivrer ses fiches de parrainage au mandataire de Monsieur Ousmane Sonko et celui de la Caisse des dépôts et consignations de fournir une attestation de dépôt, dès lors qu’ils sont corroborés par des écrits, les exploits d’huissier, sont imputables non pas au candidat Ousmane Sonko mais à l’Administration qui engage, seule, sa responsabilité. L’accomplissement de toutes les diligences par le mandataire désigné par Monsieur Ousmane Sonko n’est plus à démontrer. Dans une décision très récente, en date du 14 décembre 2023, le Conseil constitutionnel a rappelé, dans un raisonnement clair, qu’un procès-verbal d’huissier remplace en bonne et due forme un document administratif manquant lorsque le requérant a accompli les diligences utiles : « considérant que, pour justifier cette carence, les requérants ont joint à leur requête un procès-verbal de constat interpellatif d’huissier du 6 décembre 2023, dressé à la requête du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi (…), représenté par son président Birame Souleye Diop, qui déclare qu’il a mandaté Madame Daba Wagnane, député, laquelle « s’est présentée au Secrétaire général de l’institution parlementaire pour obtenir une copie de la loi votée, en vain » ; que le huissier instrumentaire ayant interrogé Madame Daba Wagnane, cette dernière déclare ceci « Secrétaire général m’a répondu : la loi n’est pas encore promulguAe » ; Considérant qu’il ressort de cet acte que le groupe parlementaire Yewwi Askan Wi, représenté par son président Birame Souleye Diop, n’a pas interpellé les personnes habilitées à délivrer les textes de loi et notamment le SG de l’institution parlementaire, mais plutôt Madame Daba Wagnane ; que les seules déclarations de cette dernière, consignées dans le procès-verbal d’huissier, ne peuvent établir que les requérants ont accompli les diligences utiles ». En l’espèce, il a été reproché au groupe parlementaire Yewwi Askan Wi de n’avoir pas interpellé l’autorité administrative compétente, le Secrétaire général parlementaire notamment. Par ricochet, le Conseil constitutionnel estime que si l’autorité habilitée avait été saisie, le procès-verbal d’huissier rendrait nécessairement la requête recevable. Dire le droit, c’est pour le Conseil constitutionnel ne pas se dédire abruptement sur l’imputabilité du manquement. Selon la jurisprudence récurrente du Conseil constitutionnel, les refus peuvent être valablement suppléés par des exploits d’huissier pouvant techniquement intégrés le dossier de candidature dont l’incomplétude relève d’une violation de la loi par l’agissement ultra-vires de la DGE, de la DAF et de la Caisse des dépôts et consignations. La garantie juridictionnelle des droits fondamentaux exercée ultimement par le Conseil constitutionnel exige la recherche minimale de la causalité du manquement. Le Conseil constitutionnel du Sénégal serait inspiré, outre sa propre jurisprudence, de convoquer le droit jurisprudentiel comparé. La Cour constitutionnelle du Bénin a retenu, en 1998, la candidature d’un opposant rejetée par la Commission nationale électorale pour dossier incomplet en soutenant que « pour des raisons indépendantes de sa volonté, le requérant s’est trouvé dans l’impossibilitéde satisfaire aux exigences légales lui imposant d’avoir son dossier de candidature complet à la date du 22 octobre 1998 ». Le droit électoral, adjuvant des droits fondamentaux des citoyens, doit toujours être interprété en faveur de l’individu surtout lorsqu’il n’a pas perdu ses droits civils et politiques ou que ceux-ci les lui soient restitués par une décision judiciaire. Monsieur Ousmane Sonko réintégré dans les listes électorales par décision de justice ne peut aucunement souffrir d’une violation de la loi par l’Administration. Outre cet argumentaire technique, il n’est pas superfétatoire que le Conseil constitutionnel prenne en compte les circonstances très politiques qui caractérisent l’affaire Ousmane Sonko. Cette affaire a donné lieu à des situations inédites dans les annales judiciaires au Sénégal. Pour la première fois, le représentant de l’Etat, l’Agent judiciaire, introduisit un pourvoi en cassation sur une simple question de radiation sans que l’intérêt de la société soit démontré ou même postulé (pourvoi introduit après l’ordonnance de réintégration de Monsieur Ousmane Sonko sur les listes électorales rendue le 12 octobre 2023). En sus, pour la première fois, la DGE refuse obstinément d’appliquer une décision de justice mettant à mal les acquis républicains obtenus au prix d’une intériorisation très longue des linéaments de l’Etat de justice. Il ne s’agit donc pas seulement du cas isolé d’un candidat mais de l’Etat de droit qui est mis à l’épreuve par l’Administration et dont la préservation historique échoit au juge constitutionnel.
Au surplus, le contentieux portant sur la diffamation devant la Cour suprême opposant Monsieur Ousmane Sonko au ministre Mame Mbaye Niang, le 4 janvier 2024, interpelle directement la compétence exclusive du Conseil constitutionnel en matière d’exception d’inconstitutionnalité. Le soulèvement de l’inconstitutionnalité de l’article 260 de la loi n° 65-60 du 21 juillet 1965 du Code pénal devant la Cour suprême entraîne une conséquence juridique immédiate. La juridiction suprême doit surseoir à statuer et renvoyer obligatoirement le contrôle de la loi contestée au Conseil constitutionnel. La disposition dont la constitutionnalité est querellée, à charge pour le Conseil constitutionnel d’opérer son contrôle de constitutionnalité, pose un problème de conformité à l’article 8 de la Constitution du Sénégal du 22 janvier 2001, l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’article 19-2 du Pacte international relatif aux Droits civils et politiques, l’article 9-2 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le paragraphe 1 de la Résolution 169 sur l’Abrogation des lois pénalisant la diffamation en Afrique par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples du 24 novembre 2010. Dans tous les Etats acquis à l’exigence démocratique, les dispositions sur la diffamation des autorités gouvernementales sont sorties de l’ordonnancement juridique en raison de la nature même de leurs fonctions. En droit positif sénégalais, la Cour suprême n’a pas le pouvoir d’apprécier du caractère sérieux ou opportun du renvoi. Elle est dans l’obligation de surseoir à statuer et, par conséquent, de ne pas tenir l’audience enrôlée le 4 janvier 2024. En effet, la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 abrogeant et remplaçant la loi organique n° 2008-35 du 08 août 2008 sur la Cour suprême en son article 91 dispose que : « Lorsque la solution d’un litige porté devant la Cour suprême est subordonnée à l’appréciation de la conformité d’une loi ou des stipulations d’un accord international à la Constitution, la Cour saisit obligatoirement le Conseil constitutionnel de l’exception d’inconstitutionnalité ainsi soulevée et sursoit à statuer jusqu’à ce que le Conseil constitutionnel se soit prononcé.Si le Conseil estime que la disposition dont il a été saisi n’est pas conforme à la Constitution, il ne peut plus en être fait application ». La loi organique n° 2016-23 du 14 juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel, en son article 22, précise que « Le Conseil se prononce dans le délai d’un mois à compter de la date de sa saisine ». Il n’est pas inutile de rappeler que la Cour suprême n’a jamais varié dans sa position principielle de renvoi lorsqu’une exception d’inconstitutionnalité est soulevée devant elle. Elle renvoie systématiquement au Conseil constitutionnel la loi devant être appliquée au justiciable (Cour suprême, 26 juillet 2012, Ndiaga Soumaré c/ État du Sénégal ; Cour suprême, 06 février 2014, Ai Aa Ab, c/ Procureur spécial près la CREI et Procureur général près la Cour d’Appel de Dakar ; Cour suprême, 10 mars 2022, Souleymane Téliko c/ État du Sénégal). Dans une décision du 28 septembre 2022, le Conseil constitutionnel a adopté d’ailleurs une position péremptoire qui ne laisse place à aucune manœuvre prétorienne. Il déclare « la Chambre d’Accusation de la Cour d’Appel de Dakar, saisie d’une exception d’inconstitutionnalité dirigée contre l’article 344 du Code des Douanes, a l’obligation de transmettre au Conseil constitutionnel l’exception ainsi soulevée et de surseoir à statuer jusqu’à ce que le Conseil constitutionnel se soit prononcé, conformément à l’article 22 de la loi organique relative au Conseil constitutionnel ».
Par rapport à tout ce qui précède, Monsieur Ousmane Sonko, jouissant de tous ses droits civils et politiques, dispose d’un dossier de candidature recevable et le droit exige sa participation à l’élection présidentielle du 25 février 2024.
Le caractère irréfutable de l’éligibilité de Monsieur Bassirou Diomaye Faye
La qualité d’électeur est posée par les articles 26 à 31 du Code électoral. Un individu est frappé d’une incapacité électorale que dans des conditions limitativement prévues par la loi, neutralisant ainsi la marge d’interprétation qu’aurait le juge constitutionnel qui se retrouve dans une situation étroite de compétence judiciaire liée. Il faudrait impérativement que l’individu perde momentanément ou définitivement la jouissance de ses droits civils ou politiques pour ne pas être éligible. Cette incapacité ne peut résulter que d'une décision ayant atteint l’autorité de la chose jugée. Il peut s’agir d'une incapacité intellectuelle ou d'une incapacité morale. Ce faisant, pour qu’un Sénégalais majeur soit privé de la qualité d’électeur, il faut obligatoirement une décision judiciaire définitive. Toute autre situation n’est pas privative de la qualité d’électeur. Le juge constitutionnel sénégalais, conformément à ses attributions textuelles, n’a aucun pouvoir discrétionnaire en matière de privation des droits susmentionnés d’un citoyen-électeur. D’ailleurs, la privation, par le juge ordinaire, de la qualité d’électeur d’un condamné doit résulter d’une peine supplémentaire qui doit être prononcée à la demande du procureur en ce qu’un préjudice est causé à la société. C'est généralement une peine complémentaire, c'est-à-dire qu'elle vient s’ajouter à une peine de prison ou d'amende prononcée à titre principal. En droit, il est de coutume que l’accessoire suive le principal, et non l’inverse ! Lorsqu’il s’agit de déchoir un citoyen de son droit fondamental d’être élu, l’objectif poursuivi doit être légitime et proportionné à la peine. On est très loin en l’espèce de la situation juridique du candidat Bassirou Diomaye Faye qui n’a fait l’objet d’aucune forme de condamnation, même en première instance, alors même que la loi exige une condamnation définitive. En dehors de toute hypothèse de condamnation, inexistante en réalité, Monsieur Bassirou Diomaye Faye n’a même jamais fait l’objet d’un procès. Discuter politiquement de l’éligibilité d’un candidat jamais attrait devant un juge renseigne à suffisance sur le mal-démocratique dont souffre le Sénégal ! La volonté politique ne préempte pas la décision du juge constitutionnel. Dire le droit est une opération technique qui est détachée des contingences d’appareils. Et en l’absence de tout procès, il ne peut naturellement y avoir une condamnation et une privation de droits. Monsieur Bassirou Diomaye Faye garde la totalité de ses droits civils et politiques.
Le Conseil constitutionnel ne peut pas juridiquement invalider la candidature d’un citoyen qui n’est frappé d’aucune condamnation emportant déchéance de ses dits droits. Le juge constitutionnel n’est que la simple bouche de la loi électorale et non l’organe judiciaire de réalisation d’une commande politique d’élimination arbitraire des opposants. Toute autre attitude contra-legem du juge constitutionnel participerait à un arbitraire judiciaire aux relents politiques. Selon la jurisprudence du même Conseil constitutionnel, le principe de la nécessité des peines, posé par l'article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, partie intégrante de la Constitution sénégalaise, implique que toute peine, fût-elle complémentaire, doit être expressément prononcée par le juge pour qu'il vérifie qu'elle correspond bien, dans ce cas particulier, à l'exigence de nécessité. C’est bien lorsque la déchéance des droits susvisés est prononcée par le juge que l'administration est autorisée à procéder à la radiation de l’électeur concerné. Une radiation factuelle selon la bonne volonté interprétative du juge constitutionnel n’existe pas dans un Etat de droit ! Le juge constitutionnel ne fait pas la loi électorale, il l’applique dans son entièreté et dans le respect de ses attributions normatives expressément codifiées.
La candidature à l’élection présidentielle, pour être recevable, doit, aux termes de l’article L 57 al.2, « être portée soit par un parti politique légalement constitué, soit par une coalition de partis politiques, soit par une entité regroupant des personnalités indépendantes ». La loi électorale prévoit ces trois possibilités à l'électeur sénégalais qui remplit les autres conditions (âge, parrainage, obligations fiscales) pour faire acte de candidature. Il en résulte que, même en situation de détention provisoire, la candidature de Monsieur Bassirou Diomaye Faye ne souffre d’aucun obstacle juridique si celle-ci est portée par un parti politique légalement constitué distinct de Pastef ou une coalition de partis politiques. En revanche, il ne peut pas être candidat indépendant. Il ne pourrait l’être qu’un an après la dissolution du parti. Juridiquement, la dissolution du parti Pastef n’a aucun effet sur les droits individuels autonomes des membres dudit parti. Si tel était le cas, tous les membres encartés du parti dissous, y compris naturellement les parlementaires et élus locaux dudit parti, devraient en conséquence perdre automatiquement leur mandat et n’auraient même pas eu le droit de voter aux différentes élections car ils seraient frappés de déchéance de leurs droits. Suivant ce raisonnement tendancieux, les députés du parti frappé de dissolution devraient être tous déchus de leurs droits. L’absurdité du raisonnement suffit à son invalidation ! Faudrait-il rappeler, qu’en droit, les partis politiques sont considérés comme des associations ordinaires, au même titre que tout groupement. C’est un truisme d’affirmer qu’un parti politique est doté d’une personnalité juridique différente de celle de ses membres. Affirmer qu’un parti politique est une entité autonome dont la dissolution n’emporte évidemment pas les droits individuels de ses membres est un lieu commun juridique qu’il appartiendra au Conseil constitutionnel de réaffirmer. L’article L. 57 al. 2 du Code électoral permet très clairement à Monsieur Bassirou Diomaye Faye d’être candidat au titre d’un parti politique légalement constitué ou d’une coalition de partis. En d’autres termes, la dissolution d’un parti n’a aucune incidence, même indirecte, sur la déchéance des droits civils et politiques d’un membre qui est libre d’adhérer à un autre parti politique ou même d’en créer. Il est sans ambiguïté dans la même situation juridique qu’un membre démissionnaire d’un parti politique.
En réalité, l’article L. 57 al. 2 ne donne lieu à aucune interprétation spécieuse en ce qu’il prévoit explicitement que la candidature est portée par un parti légalement constitué, une coalition de partis politiques ou selon qu’il s’agisse d’une candidature indépendante. En 2019, Maître Madické Niang était candidat à l’élection présidentielle alors qu’il venait de démissionner du PDS quelques mois auparavant. En l’espèce, le Conseil constitutionnel décida : « Considérant que le 11 décembre 2018, à quinze heures trente-huit minutes, Ibra Diouf, mandataire de la coalition « MADICKÉ 2019 », a déposé au greffe du Conseil constitutionnel une déclaration aux termes de laquelle Madické Niang, avocat, né le 26 septembre 1953 à Saint-Louis de Mademba et Khady Thioune, est candidat à l’élection présidentielle du 24 février 2019, a reçu l’investiture de la coalition « MADICKÉ 2019 », est de nationalité sénégalaise, jouit de ses droits civiques et politiques, est titulaire de la carte d’électeur n°100432104 (…) ;Considérant que la déclaration de candidature de Madické Niang est accompagnée des pièces énumérées à l’article L.116 du Code électoral, dont une liste de 65 078 électeurs l’ayant parrainé, présentée sur fichier électronique et en support papier ;Considérant qu’il résulte des vérifications auxquelles il a été procédé (…) ;Considérant que la candidature de Madické Niang est recevable ». L’orthodoxie judiciaire serait que le Conseil constitutionnel respecte scrupuleusement sa jurisprudence antérieure fondée sur la stricte application de la loi électorale sans tomber dans une jurisprudence politique. L’actuelle ministre de la justice, Maître Aissata Tall Sall, était elle-même candidate à l’élection présidentielle de 2019 avec la coalition « Oser l’avenir » après son exclusion du PS. Sa candidature était rejetée simplement pour insuffisance de parrainages. Le juge constitutionnel, dans sa décision du 13 janvier 2019, considère « qu’il résulte des vérifications auxquelles il a été procédé (…), qu’elle a obtenu le parrainage validé de 10 129 électeurs domiciliés, à raison de 2000 parrains par région au moins, dans deux régions ; qu’Aïssata Tall Sall n’ayant obtenu ni le nombre minimal de parrainages d’électeurs inscrits au fichier électoral général, ni le nombre minimal de parrains par région dans sept régions, il y a lieu de déclarer sa candidature irrecevable ». Dans toutes ces affaires jugées par le Conseil constitutionnel, il ne s’est agi, à juste titre, d’évoquer le statut d’ancien membre d’un parti politique du candidat déclaré. Dès lors qu’un candidat est investi par un parti politique ou par une coalition de partis politiques, le juge se conforme aux prescriptions du Code électoral. Il n’a, dans ce cas précis, aucune marge de manœuvre judiciaire. Dans sa décision n° 33/98/Affaires n° 1/E/98 et 2/E/98, s’opposant aux conclusions du ministère de l’intérieur déclarant irrecevables les candidatures aux élections législatives de 1998 des coalitions USD JEF JEL et Front pour la Démocratie et le Socialisme, le Conseil constitutionnel a estimé que « les règles relatives aux inéligibilités comme celles qui établissent les limitations à la candidature doivent toujours faire l’objet d’une interprétation restrictive, et ne doivent être étendues à des cas non expressément prévus »(Considérant 7 de la décision n° 33/98 du 8 avril 1998).
Lors des élections locales de 2022, Monsieur Mame Boye Diao, membre de l’APR, était candidat sous la bannière d’un autre parti. Sa candidature avait même été soutenue par le président de la République. Il en est ainsi de plusieurs membres de l’APR qui avaient présenté des listes parallèles, notamment Mame Mbaye Niang. A ce titre, il n’est pas superfétatoire de rappeler que l’article L. 57 ne fait aucune distinction selon qu’il s’agisse d’élections législatives, territoriales ou qu’il s’agisse d’une élection présidentielle. Il englobe toutes les élections politiques
La candidature de Monsieur Bassirou Diomaye Faye ne peut non plus être rejetée sur le fondement de l’article L. 125 du Code électoral. Les pouvoirs d’investigation que l’article L. 125 reconnait au Conseil constitutionnel pour s’assurer de la validité des candidatures lui permettent simplement de demander des compléments d’informations. Le pouvoir de vérification ne signifie nullement un pouvoir de création normative ex-nihilo. Le Conseil constitutionnel ne peut pas se substituer au juge pénal. La privation des droits civils et politiques est de la compétence du juge judiciaire qui ne s’est pas encore prononcé sur les chefs d’accusation à l’encontre de Monsieur Bassirou Diomaye Faye. En l’absence de décision judiciaire définitive, rien en droit ne peut empêcher sa candidature. S’il était condamné, le juge constitutionnel aurait pu, au titre de son pouvoir de vérification, demander son casier judiciaire même si son nom figure encore sur les listes comme ce fut le cas dans l’affaire Khalifa Sall. Le Conseil constitutionnel avait demandé la communication de la décision de condamnation de Monsieur Khalifa Sall malgré l’existence d’un casier judiciaire dans le dossier de candidature qui lui a été présenté. Toujours dans sa décision du 13 janvier 2019, le Conseil constitutionnel estima : « Considérant qu’il résulte de l’article L.57, alinéa 1er du Code électoral que, pour faire acte de candidature, il faut être électeur ; Considérant que la qualité d’électeur s’apprécie au regard de l’article L.27 du Code électoral (…) ; que lorsqu’un citoyen est condamné à une peine impliquant sa radiation des listes, il est frappé d’une incapacité électorale qui a pour effet de le priver de son droit de vote (…) ; Considérant que Khalifa Ababacar Sall ne peut plus se prévaloir de la qualité d’électeur au sens des articles L.27 et L.31 du Code électoral ; que, par suite, ne remplissant pas la condition prévue par l’alinéa 1er de l’article L.57 du Code électoral, il ne peut faire acte de candidature à l’élection présidentielle ». A rebours de ce cas d’espèce, Monsieur Bassirou Diomaye Faye n’a fait l’objet d’aucune condamnation et n’a jamais cessé d’être électeur.
Sous ce prisme, il appartiendra au Conseil constitutionnel du Sénégal de tirer toutes les conclusions juridiques qui s’imposent à la situation du candidat Bassirou Diomaye Faye. Non seulement le candidat Bassirou Diomaye Faye ne se présente pas sous la bannière de Pastef mais, mieux, il n’est frappé d’aucune peine d’inéligibilité et n’a fait l’objet d’aucune condamnation même en première instance. Le candidat Bassirou Diomaye Faye ne saurait pâtir d’une conception abusive du pouvoir de vérification fondamentalement restreint à la recherche de toute information visant la complétude des pièces du dossier de candidature qui lui sera soumis.
Dans toutes les communautés véritablement démocratiques, les juridictions constitutionnelles partagent des ressources dogmatiques communes : s’ériger en ultime rempart contre l’arbitraire, préserver le modèle social et, en définitive, la cohésion nationale. En appliquant simplement le droit, le juge constitutionnel au Sénégal se convertirait, en même temps, à l’utilitarisme et au conséquentialisme pour restaurer l’État de droit. Dire la pureté du droit électoral l’y incite et repenser un Etat de justice indépendante le contraint à lire sa société. Juger, c’est assurer la rencontre entre la normativité sociale et la normativité juridique pour recréer les fondations d’une nation.
Par conséquent, les sept sages sont invités, cultivant leur « devoir d’ingratitude » à l’égard de l’autorité politique de nomination, à raffermir le serment d’allégeance nationale remis en cause par un environnement politique et social anxiogène.
Pour l’histoire, le Conseil constitutionnel juge certes par le Droit mais surtout pour le peuple et la nation.
Pour le peuple et la nation, le Conseil constitutionnel doit réhabiliter le Droit.
LES QUESTIONS ÉLECTORALES RÉSOLUES À COURT TERME
RAPPORT SENEPLUS D’ANALYSE PRE-ÉLECTORALE – Un document destiné à repérer des germes de tension préélectorale tout en relevant les acquis en matière de paix sociale et de démocratie. Un diagnostic institutionnel et démocratique du pays (1/3)
Le présent rapport d’analyse a pour objet de présenter cette situation générale, et de formuler des recommandations en vue de prévenir les crises qui pourraient naître de la situation que le pays vit au moment où ces lignes sont écrites.
Mais il n’est pas seulement question de repérer des éléments de tension ou de conflit préélectoral ; l’analyse doit également faire état d’éléments positifs, d’acquis en termes de paix sociale et de démocratie puisqu’il s’agit de poser un diagnostic sur le système institutionnel, démocratique et électoral du pays.
Au terme de cet exercice composé d’une série de rapports d’analyse d’ici février 2024, des pistes de réflexion seront dégagées pour quelques transformations structurelles du système, l’objectif étant, en dernière analyse, de renforcer le système démocratique sénégalais.
Il s’agit en somme de traiter le relèvement des défis qui se posent au Sénégal aujourd’hui dans une double perspective : conjoncturelle – comment organiser une élection apaisée dans trois mois – et structurelle – sur quels points agir pour que le système démocratique et électoral du pays soit amélioré et ne soit plus soumis aux aléas et risques qu’il traverse actuellement.
Pour parvenir aux objectifs que voilà, l’approche méthodologique est la suivante :
Identifier les acquis, les questions résolues ou dépassées dans la perspective de l’élection de février 2024 :
Recenser les points qui posent problème, c’est-à-dire les sujets de désaccords entre les parties prenantes à l’élection (compétiteurs électoraux, administration électorale, organes de régulation, instances juridictionnelles) ;
Esquisser les scénarios possibles et proposer des solutions de sortie de crise.
– Les acquis : questions résolues à court terme -
L’élection de février 2023 est une élection capitale, pour la raison qu’il s’agit de choisir le président de la République, qui est l’organe constitutionnel le plus puissant dans le régime politique sénégalais. Le système institutionnel est en effet marqué par son caractère clairement présidentialiste, le choix du chef de l’État est l’élection-mère, celle qui polarise les attentions et influe assez fortement sur les autres scrutins.
A cette donnée qui touche l’essence même du système politique, et qui est donc permanente, il faut ajouter une donnée conjoncturelle, aujourd’hui au Sénégal : c’est la possibilité qu’à la suite de l’élection présidentielle, soient organisées des élections législatives dont l’enjeu serait de clarifier le jeu politique et de donner à un président nouvellement élu une majorité nette et confortable. L’organe législatif sénégalais – l’Assemblée nationale- est en effet caractérisée, aujourd’hui, par un équilibre presque parfait des forces, l’écart du nombre de sièges entre la majorité et l’opposition ne dépassant pas un ou deux. Tout président élu dans un tel contexte, soucieux de mettre en œuvre son programme, aurait probablement à cœur de solliciter du peuple une majorité moins aléatoire. S’agissant de l’actuelle opposition, une clarification par de nouvelles élections serait également nécessaire puisqu’elle a, depuis, perdu son unité. Cela signifie que dans tous les cas de figure, une dissolution de l’Assemblée pourrait avoir lieu.
Pour ces deux séries de raison, le prochain scrutin a très tôt suscité des débats.
Un premier point de débat a été la possibilité pour le président sortant de se représenter. C’est donc la fameuse question du « troisième mandat » qui s’est de nouveau posée. On rappelle qu’elle s’était déjà posée en 2011-2012 au Sénégal, sous la présidence d’Abdoulaye Wade. Ce débat a passablement dégradé l’atmosphère politique, jusqu’au 3 juillet 2023, date à laquelle le président Macky Sall a exclu de prétendre à un troisième mandat. Dans l’immédiat, la question est donc réglée, et il s’agit, à court terme, d’un acquis. Il ne faut cependant pas considérer que le débat autour de cette question est définitivement clos, le président sortant ayant lui-même déclaré qu’il a bien « le droit » de briguer un troisième mandat, et que sa renonciation ne tient absolument pas à une impossibilité juridique. Cela signifie que la controverse existe à l’état endémique et qu’il faut, dans la perspective de réformes ou d’ajustements ultérieurs, traiter cette question pour éviter qu’elle soit à nouveau source de problèmes ou de tensions.
Un consensus au moins provisoire semble également acquis relativement au parrainage. Il convient de rappeler qu’immédiatement après son instauration par la loi constitutionnelle du 11 mai 2018, cette règle a pu être perçue, par certaines formations d’opposition, comme entravant délibérément la liberté de candidature, et son abrogation a été en conséquence suggérée. Aujourd’hui, et cinq ans après son instauration, il semble que plus personne n’en conteste le principe même. Tous les prétendants à l’élection sont, au moment où ces lignes sont écrites, en campagne de moisson de « parrainages » dans le pays. On rappelle qu’il s’agit là d’une condition de recevabilité des candidatures à l’élection : obtenir le « parrainage », c’est-à-dire la signature d’électeurs représentant au minimum 0,8% et au maximum 1% du nombre des personnes inscrites sur le fichier électoral et répartis dans au moins sept régions à raison de deux mille au moins par région (art 29 de la constitution).
Au cours de la seconde phase (juin 2023) du dialogue politique national initié depuis 2019 par les autorités, et qui a vu la participation de diverses formations politiques (à l’exception notable de certains partis d’opposition, s’agissant de cette seconde phase), le parrainage a effectivement fait l’objet d’un large consensus puisque le rapport final mentionne au moins quatre (4) points d’accord sur le « parrainage citoyen » et deux (2) pour le « parrainage des élus »[1]. En tout état de cause, comme on l’a mentionné plus haut, le principe même de cette modalité d’écrémage des candidatures ne semble plus remis en question aujourd’hui.
Sur ces deux points qui ont cristallisé des tensions ou controverses, il convient donc de considérer que le débat est clos, au moins dans l’immédiat. Deux hypothèques qui étaient susceptibles de grever l’élection présidentielle sont donc écartées.
En dehors de ces points d’accord, il existe des points de désaccord. A l’heure actuelle, trois (3) gros points de désaccord obèrent le climat préélectoral au Sénégal.
[1]Rapport final de la Commission politique du Dialogue national, du 9 juin 2023 au 23 juin 2023, p. 7.
par Cheikh Tidiane Coly
L'IMMEUBLE NAL : VOYAGE AU COEUR DE DOUALA DES ANNÉES POST-INDÉPENDANCE
Le deuxième roman d'Ousseynou Nar Gueye, "Immeuble Nal, Douala" narre le périple d’un jeune garçon, lequel nous fait entrevoir une fresque de l’Afrique des années 70 – 80, et également toute la musicalité de cette époque faite d’humour
Le deuxième roman d'Ousseynou Nar Gueye est paru ce mercredi 20 décembre 2023 et est désormais en librairie au Sénégal. Ce second roman a pour co-éditeurs Les Éditions Presqu'île Lettrée (Sénégal) et Youscribe (France). "Immeuble Nal, Douala" est le fruit de la plume qui narre le périple d’un jeune garçon, lequel nous fait entrevoir une fresque de l’Afrique des années 70 – 80, et également toute la musicalité de cette époque faite d’humour et d’humeur parfois gracieuses, quelques fois hilarantes, rarement crasses et occasionnellement fauves…
Cet enfant – Fara est son nom – a ici décidé de narrer, que dis-je, a eu une envie impérieuse et précieuse de parler. Il n'a pas voulu rester seul dans son coin-souvenir, avec ses pensées, ses allégories fourmillantes de vies et de vivres, depuis l’école Saint Jean-Bosco – avec ses maîtres tous « aussi fieffés chicotteurs » abonnés à la bastonnade, surtout au fameux supplice du « tendre par quatre » - en passant par les Cours Sainte-Marie de Hann où le pater venait le prendre dans sa Renault 12 pour rentrer à Pikine Icotaf.
Il veut partager, mais généreusement, souvent sans prendre de gants ou encore refusant d’enfiler des chaussettes, et faire resurgir le royaume qui a construit son enfance - fait d’êtres qu’il a aimés et d’autres qu’il ne (re)verra jamais avec un rictus de requiem – où celle qu’on appelle affectueusement la Mamma tient le rôle de reine qui régit les affaires de la résidence, le pater, lui, tenant les rênes de l’envergure-chef de famille africaine élargie à tous les parents venus d’ici et d’ailleurs.
Et… d’ailleurs, entre les notes captivantes de kora ou de khalam que diffusait splendidement Radio Sénégal en ondes courtes, et les aubades d’André Marie Tala du Kamerun, la vitalité du récit a fait ressurgir, par endroit, le longiligne homme d’Etat Abdou Diouf, successeur du président Léopold Sédar Senghor qui nomma le père du narrateur Consul honoraire à Douala, chez le président Ahidjo qui, après services rendus à la nation et ou plutôt après sa retraite (pour cause de maladie ?), a élu domicile et «dernière demeure» au pays de la Teranga.
De ce pays que le pater a quitté - « perché sur des sacs de charbons », comme aime à chahuter la grand-mère maternelle -, mais en bon et éternel mouride pour le Kamerun, au point de donner le nom de sa bijouterie « Khadimou Rassoul » (surnom donné au vénéré Cheikh Ahmadou Bamba), la culture et les bonnes senteurs du thiouraye s’entêtent pour flatter, dans la complicité, l’humus verdoyant et vif du pays hôte.
Et dans la chaleur de cet immeuble Nal où toute la famille se retrouve dans un appartement, l’enfant-narrateur – lecteur-né qui adore dévorer les livres jusqu’aux romans qui sont au programme des classes de ses sœurs aînées - a tenté d’ériger son empire pour forger son emprise sur la vie, dans un déluge de chroniques fait de mots et maux, après s’être régalé, quelque soir, de «‘soya’, la viande grillée au feu de bois sur des fûts ouverts aux deux extrémités ».
Cet ouvrage est surtout une véritable immersion dans le royaume d’enfance de trois bonnes années durant lesquelles, Fara, ce jeune garçon à l’intelligence précoce, s’est aménagé une galerie de souvenirs vécus et/ou reconstitués dans une atmosphère familiale, entre le Sénégal et le Kamerun (plus particulièrement à Douala), avec ses frères Bada et Allou, ses sœurs Xuradia, Sagar et Soukeyna.
Il apprend à vivre dans un monde, en perpétuel mobilité, sans perdre les pédales. Même si, après que le pater s’imposa polygame en prenant une seconde épouse, Thioumbé, son nom, – presque de l’âge de son aînée – et qu’ensuite il se vit « expulser » de cette ‘monarchie infantile’ pour se retrouver – la Mamma, lui et les autres - encore au Sénégal, Fara a toujours gardé vivant la nostalgie et la magie du bon vieux temps. Qui font le don et formulent la pointure de ce roman aux allures autobiographiques.
"Immeuble Nal, Douala" fera l'objet d'une séance de présentation où l'auteur sera interviewé par la Docteure ès lettres Véronique Petetin, session suivie d'une séance de dédicace avec vente d'exemplaires du roman, le vendredi 29 décembre 2023 à Dakar.
Cheikh Tidiane Coly est Directeur de Publication du site d'info "Tract" et du tabloïd pdf "Tract Hebdo"; Directeur du label "Éditions Presqu'île Lettrée" chez Axes & Cibles Com.
SAFRA 2023, AMADOU BA SALUE LES VERTUS DE LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE
La coopération transfrontalière est un pilier fondamental pour favoriser la compréhension mutuelle, renforcer les liens entre les régions voisines et promouvoir la paix et la sécurité, a déclaré à Tambacounda le Premier ministre.
La coopération transfrontalière est un pilier fondamental pour favoriser la compréhension mutuelle, renforcer les liens entre les régions voisines et promouvoir la paix et la sécurité, a déclaré à Tambacounda le Premier ministre, Amadou Ba.
“La Semaine de l’amitié et de la fraternité (SAFRA) ouvre la voie à une intégration plus profonde et durable entre les nations’’, a dit Amadou Ba lors de la cérémonie de lancement de la 31ème édition de la Semaine de l’amitié et de la fraternité en Afrique de l’Ouest (SAFRA.AO).
“L’intégration sous-régionale est un concept clé pour le progrès économique et social (…) En unissant leurs forces, les pays membres peuvent créer des synergies, exploiter les avantages (…) dans le commerce, les infrastructures, la santé, l’éducation et bien d’autres domaines’’, a exposé le chef du gouvernement.
M. Ba a plaidé pour le renforcement de la collaboration entre les populations de localités frontalières pour favorise la croissance et le bien-être.
Le chef du gouvernement sénégalais a salué le travail de la SAFRA.AO qui, à ses yeux, “incarne l’esprit d’initiative et de coopération à la base qui implique les communautés locales dans la définition et la réalisation de projets qui servent l’intérêt commun’’.
“C’est par cette approche participative et inclusive que des résultats concrets et durables peuvent être obtenus pour l’avancement collectif des régions transfrontalières. Il est crucial de soutenir et de promouvoir de telles initiatives’’, a encore dit M. Ba devant un parterre de personnalités et d’invités.
La Semaine de l’amitié et de la fraternité est une initiative de coopération transfrontalière lancée il y a 38 années par des leaders de la jeunesse de Kayes au Mali et de Tambacounda au Sénégal, a rappelé le maire de la commune de Tambacounda, Papa Banda Dièye, par ailleurs président du réseau des maires des villes membres de la SAFRA.AO.
Cette initiative est portée par plusieurs acteurs des villes de Kayes (Mali), Selibaby (Mauritanie), Tambacounda (Sénégal) Bassé (Gambie), Gabou (Guinée Bissau) et Boké (Guinée Conakry).
Cette semaine de l’amitié consiste à organiser tous les ans, de façon tournante, dans l’une des villes membres une édition à travers diverses manifestations sportives, culturelles, socio-économiques et éducatives en vue de renforcer les liens d’amitié et de fraternité entre les populations dans l’espace transfrontalier, ont rappelé les initiateurs.
Depuis sa 18ème édition organisée en décembre 2004 à Tambacounda, la SAFRA a inscrit dans son agenda le volet politique et développement avec notamment l’organisation d’un symposium portant sur un thème fédérateur et facteur d’intégration, a souligné le maire de la commune de Tambacounda.