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4 mai 2025
Sports
SADIO MANÉ COMPRENDRAIT QUE LIVERPOOL NE SOIT PAS SACRÉ CHAMPION D'ANGLETERRE
"Certaines personnes ont perdu des membres de leur famille et c'est la situation la plus compliquée. En ce qui me concerne, (gagner le titre) est mon rêve et je veux le gagner cette année. Si ce n'est pas le cas, je l'accepterai, c'est la vie"
L'attaquant sénégalais comprendrait que la pandémie de Covid-19 entraîne l'annulation de la saison, privant ainsi les Reds d'un premier titre depuis 1990.
« Je veux gagner les matches (qu'il reste à jouer) et je veux remporter le trophée, c'est ce que j'aimerais. Mais avec cette situation, quoi qu'il arrive, je comprendrais », a raconté Sadio Mané mercredi à la radio Talksport.
Avec 25 points d'avance sur Manchester City quand le Championnat a été interrompu, Liverpool était pratiquement assuré de décrocher son premier titre national depuis 1990. Mais l'interruption de la saison à cause de la pandémie laisse son épilogue en suspens.
Cette période « a été difficile pour Liverpool, mais elle a été bien plus dure pour des millions de gens dans le monde », a ajouté le Sénégalais. « Certaines personnes ont perdu des membres de leur famille et c'est la situation la plus compliquée. En ce qui me concerne, (gagner le titre) est mon rêve et je veux le gagner cette année. Si ce n'est pas le cas, je l'accepterai, c'est la vie. Espérons qu'on le gagne l'an prochain. »
ARRET DEFINITIF OU SUSPENSION DU CHAMPIONNAT, QUELLE OPTION ?
Amsata Fall, directeur exécutif de la Ligue sénégalaise de football professionnel, Amadou Kane, président du mouvement Navetane ou encore le journaliste sportif Salif Diallo, se prononcent
Alors que le débat sur l’arrêt définitif des championnats est plus que jamais agité dans certains pays d’Europe comme l’Italie où la Gazzetta Dello Sport informait de la sérieuse option d’arrêter et/ou de suspendre la saison, au Sénégal, l’idée n’est pas à l’ordre du jour. En attendant une réponse tranchée sur la question, le monde du football est dans l’expectative. Les observateurs et responsables du football national n’en esquissent pas moins quelques pistes à explorer en cas d’arrêt ou de suspension. Chacun à son niveau, Amsata Fall, directeur exécutif de la Ligue sénégalaise de football professionnel, Amadou Kane, président du mouvement Navetane ou encore le journaliste sportif Salif Diallo, se prononcent
AMSATOU FALL, DIRECTEUR EXECUTIF DE LA LIGUE PRO : «La suite du championnat est essentiellement liée à l’évolution de la pandémie»
Quel sera le sort réservé au championnat de football et aux compétitions nationales après la pause imposée par la pandémie du Coranavirus ? La question se pose et attend réponse. Plusieurs semaines après la suspension des compétitions, la discussion est lancée pour anticiper sur les éventuelles décisions à prendre avec l’évolution du Covid-19. Va-ton vers un arrêt définitif des compétitions de la Ligue1 nationale ? Une réponse appropriée à cette question semble inexistante, du moins pour le moment. En standby à cause de la pandémie du Covid-19 depuis le 14 mars passé, la ligue sénégalaise de football professionnel (Lsfp) comme bon nombre de compétitions est dans l’expectative de reprendre ses droits et terminer la saison. Interrogé sur la question, Amsatou Fall, directeur exécutif de la ligue pro, pense que l’heure n’est pas de se pencher sur la fin à accorder à la saison. «A l’heure actuelle, le seul combat qui vaille est celui de la lutte contre le Covid-19», soutient-il. Convaincu que la suite du championnat est essentiellement liée à l’évolution de la pandémie, il appelle tous les Sénégalais «à œuvrer ensemble pour stopper le plus rapidement possible le Covid19». Toutefois, il assure que le Conseil d’administration de la Ligue1 sera en mesure de trancher sur la suite réservée au championnat en cas d’arrêt définitif, rappelant la «prouesse» que la commission disciplinaire de la ligue pro avait réussie en 2018 lors de la réintégration de l’US Ouakam en Ligue 1 après 10 journées de retard (sur décision du TAS). Ce, en réajustant avec succès le calendrier des compétitions.
AMADOU KANE, PRESIDENT DE L’ONCAV : «Il y a des aléas que nous ne maitrisons»
Même son de cloche à la fédération sénégalaise de football. Amadou Kane, 4ème vice-président de la FSF et par ailleurs président de l’organisme national de coordination des activités de vacances (ONCAV) soutient que le moment n’est pas encore propice pour s’avancer sur une telle idée. Il soutient qu’à l’état actuel des choses, « il est difficile voire impossible d’avancer une date pour la reprise du championnat ou de signer son arrêt définitif». «Il y a des paramètres exclusivement liés à l’évolution du virus qu’il faut tenir en compte. Il y a des aléas que nous ne maitrisons pas et qui sont essentiels pour la suite à accorder au championnat», ajoutet-il. Il reste tout de même d’avis que le football doit continuer à vivre même si la manière reste à définir avec le nouveau contexte mondial dominé par la pandémie du Covid-19. Toutefois, il avoue que des réflexions sont en train d’être menées en interne et que suivant l’évolution de la pandémie des décisions appropriées seront prises au moment opportun. Pour l’heure dit-il, «les responsables sont en train de réfléchir sur la suite à accorder aux compétitions. Le moment venu nous allons externaliser tout ça». Pour le moment, poursuit-il, «souhaitons que le virus disparaisse et que la vie reprenne normalement son cours».
VERS UN CHEVAUCHEMENT CHAMPIONNAT ET COMPÉTITIONS DES «NAVÉTANES»
Ouvrant une fenêtre sur les «navétanes» qui se profilent à l’horizon, le président de ONCAV soutient qu’une annulation n’est pas envisagée pour l’heure. «On n’en est pas là encore et prions pour qu’on n’en arrive pas». Par contre, il ne craint pas un chevauchement entre les compétitions de Ligue pro et les activités des mouvements sportifs populaires communément appelés «navétanes». Ce qui selon lui, avait existé il y a de cela quelques années et ne peut constituer une entrave au bon déroulement des navétanes. Au cas échéant, note-t-il : «on va établir ensemble un calendrier par rapport au déroulement de ces compétitions Nous avons beaucoup de choses en commun tels les services d’ordre, les pelouses, les arbitres et quelque part même les dirigeants. Donc, ça ne pourra pas poser de problème» conclut-il.
SALIF DIALLO, JOURNALISTE SPORTIF : «J’imagine que des lois et règlements sont prévues au niveau de la LSFP pour prendre une décision»
Journaliste sportif à l’APS, Salif Diallo, quant à lui, reste encore dubitatif quant à l’aboutissement de la saison. «Je souhaite que le championnat puisse se jouer comme il se doit sur le terrain mais rien n’est encore sûr parce que personne ne peut dire que la pandémie va s’arrêter d’ici peu», avance t-il. En cas d’arrêt définitif, il affirme ne pas être contre un éventuel sacre du leader actuel qui est Teunguèth FC : «ce serait vraiment mal que TeunguEth FC ferme la saison sans le titre de champion après avoir livré une phase aller exceptionnelle». Par ailleurs, il n’exclut pas la fermeture du championnat à la trêve de mai même s’il estime encore qu’une prise de décision à l’heure actuelle est prématurée. «On a encore le temps d’autant plus que les Jeux Olympiques ainsi que le CHAN ont été repoussés. On n’a aucune équipe engagée en compétition africaine et toutes nos équipes sont éliminées. L’un dans l’autre, la LSFP dans son règlement, doit prévoir des situations pareilles», estime-t-il. «J’imagine que des lois et règlements sont prévues au niveau de la LSFP pour prendre une décision. Soit on continue jusqu’à la fin ce qui est souhaitable ; soit un arrêt définitivement et la Ligue pro va trancher à partir de ses règles et règlements».
par Jean Pascal Corréa
LUTTE SÉNÉGALAISE : TEMPS DE RÉFLEXION ET DE PROJECTION
Il est possible de placer le curseur sur d’autres volets de la lutte. La danse, la chorégraphie, l’habillement… Toutes choses qui mettent en avant la dimension culturelle de la lutte, et qui peuvent tout autant être valorisées sur le plan économique
Dans divers domaines, les rythmes et niveaux d’engagement ont baissé. Chacun peut le ressentir à son échelle et dans ses rapports aux différents champs dans lesquels il s’investissait ou s’active encore. A défaut de s’employer pleinement dans des activités à caractère productif ou associatif que l’évitement des contacts physiques oblige à limiter, c’est peut-être le moment de se poser et d’engager des réflexions utiles, en termes d’évaluation, de recadrage et de projection vers un avenir désiré et censé nous ouvrir des opportunités de réalisation de soi et d’amélioration de nos conditions de vie et de travail. Cet exercice, chacun et chacune peut le mettre en œuvre suivant le ou les domaines qui l’intéressent.
Pour ma part, je choisis ici d’aborder la lutte, comme activité sportive et comme niche économique (entreprises, emplois). Mais également la lutte dans sa dimension socioculturelle qui a habité la plupart des sociétés sénégalaises et au-delà. Car, derrière un lutteur se laissent entrevoir toute une tradition et des valeurs socioculturelles, ainsi qu’un ensemble de réseaux de relations et de logiques économiques affichées (marketing-communication, sponsoring, montage de combats, signature de contrats, cautionnement, imposition, taxes, sanctions financières, etc.) ou en filigrane (rétributions non formalisées des entraineurs, des managers, des partenaires d’entrainement, des marabouts, des batteurs de Tambours, entre autres intermédiaires, et redistribution aux voisins, parents et amis).
A l’heure des mesures sanitaires relatives au Covid-19, certaines écuries et beaucoup de lutteurs ont fortement réduit leurs activités sportives alors que, malgré la suspension des compétitions, une certaine réorganisation pourrait éviter aux uns et aux autres de prendre des risques dommageables pour la santé (physique et financière) des lutteurs et la santé (économique) des écuries. Pourtant, il est possible de placer le curseur sur d’autres volets de la lutte. La danse, la chorégraphie, l’habillement… Toutes choses qui mettent en avant la dimension culturelle de la lutte, et qui peuvent tout autant être valorisées sur le plan économique, en montrant ces facettes premières et particulièrement attractives de la lutte, y compris sur le plan touristique et du marketing de la destination sénégalaise, de même que sur le plan cinématographique et d’autres formes de production audiovisuelle.
Typiquement, tout en respectant la distanciation sociale et les autres mesures-barrières édictées, les parties prenantes de la mise en scène chorégraphique (danseurs, batteurs de Tam-tam, habilleurs, maquilleurs, etc.) peuvent se retrouver dans un espace approprié afin de produire des œuvres culturelles à valoriser sur le plan économique. Par exemple, en mettant l’accent sur le pagne, dans sa signification et sa place dans la lutte (symboliquement, et dans certaines ethnies, le pagne est un patrimoine de la femme), dans son jeu de couleurs suivant les ethnies, sa forme, sa taille, sa coupe en bandes, la manière de l’attacher, c’est tout un patrimoine qui est culturellement mis en exergue. S’y ajoute l’effet d’élégance recherché au travers du lutteur qui dispose déjà de la puissance physique. Dans la production commercialisable, l’anthropologue, l’historien, le sociologue, l’expert culturel, l’économiste, le communicateur (traditionnel ou moderne), l’artisan, la femme, l’homme, l’ancien, le jeune, etc., auraient des commentaires et observations extrêmement intéressants à mettre en lumière et à rendre accessibles aux générations futures, d’une société à l’autre (similarités et singularités). La lutte est clairement un patrimoine immatériel à transmettre, dans son essence, sa fonction sociale d’origine, et avec le moins de « fabrications » ou d’exagérations possibles.
Cette mise en scène offrirait ainsi au lutteur l’occasion de réviser ses gammes, d’innover dans les danses, dans les rythmes, dans les chorégraphies… L’occasion pour toutes les parties prenantes, de découvrir et de valoriser des talents qui débordent la dimension physique et musculaire de l’activité sportive. Les possibilités sont immenses, et elles ouvrent des pistes vers des opportunités à l’échelle individuelle comme aux niveaux méso (Collectivités territoriales) et macrosocial (État).
Combien de productions et de déclinaisons web et numériques (types et quantité) seraient envisageables ? N’est-ce pas le moment d’un dialogue interministériel (Sport-culture-tourisme-économie-etc.) pour évaluer l’échelle potentielle d’une attractivité de la destination Sénégal intégrant les disciplines sportives (et avec un agenda coordonné) ? Ne serait-il pas le lieu d’évaluer l’impact économique potentiel de cette création de chaines de valeur, dès l’instant que des métiers, des œuvres et symboles cultures prennent une dimension économique ?
Au-delà de ces aspects socioculturels et économiques, des observations faites sur cette activité et ses contours invitent par ailleurs à une réflexion plus structurante sur le secteur de la lutte. Dans cette optique, il importe de susciter une réflexion plus élargie, du côté des professionnels de la lutte, notamment. Cette discipline sportive traverse une zone de turbulence, certes. Mais tant mieux si les uns et les autres peuvent profiter de ce temps pour envisager les choses sous une perspective constructive et opportune pour toutes les parties prenantes, y compris les générations futures.
DERNIER VIRAGE DECISIF POUR SOCHAUX ET OMAR DAF !
La reprise de la Ligue 2 française s’annonce difficile pour le FC Sochaux, pas encore à l’abri d’une relégation, malgré sa 14ème place au classement.
La reprise de la Ligue 2 française s’annonce difficile pour le FC Sochaux, pas encore à l’abri d’une relégation, malgré sa 14ème place au classement. Avec seulement huit points sur le barragiste Niort, Omar DAF et ses hommes devront sortir le grand jeu pour sauver leur peau. Un énorme défi pour l’ancien international sénégalais.
Alors que le coronavirus continue de faire des ravages dans le monde, les différentes Ligues s’organisent pour reprendre les compétitions. En France, l’objectif est de terminer la saison au plus tard le 30 juin ou le 15 juillet prochain. Et aussi bien en Ligue 1 qu’en Ligue 2, la bataille sera rude pour les places européennes, mais également pour le maintien. Et en ce qui concerne Sochaux (Ligue 2), il n’y a plus de calculs. Il faudra à tout prix éviter la relégation.
BILAN COMPTABLE MITIGE !
Rester en Ligue 2 est aujourd’hui l’objectif premier de Sochaux. Au moment d’observer cette trêve « obligatoire », l’équipe coachée par le Sénégalais Omar Daf avait presque fait la moitié du chemin. En 28 journées disputées, Sochaux occupe la 14ème place, avec 34 points au compteur. En termes de chiffres, Sochaux a enregistré 8 victoires, contre 10 revers et 10 matchs nuls. Les Sochaliens ont trouvé le chemin des filets à 28 reprises, encaissant au passage 30 buts. Mais le club a réussi à se stabiliser à ce rang, il le doit sans doute à son bon début de saison. A la tête d’un groupe jeune, Omar Daf avait marqué les esprits dès l’entame de la saison. Au terme de la 10ème journée, Sochaux avait même réussi la prouesse de se hisser sur le podium, après une belle victoire (4-0) contre Clermont. Mais des contreperformances inattendues vont freiner la belle progression de Ousseynou Thioune et de ses coéquipiers. Entre la 12ème et la 15ème journée, Sochaux enregistre deux défaites, respectivement contre Ajaccio (0-2, match joué à domicile) et Lens (4-0). Deux revers qui feront des dégâts dans les rangs sochaliens. En plein doute, le club va enchaîner les matchs nuls et les défaites. Sur les 14 dernières rencontres disputées, les « Doubistes »n’enregistrent qu’une seule victoire, pour un total de 9 points sur 42 possibles. Une tache noire que le coach Daf et ses hommes tenteront de rayer lors de la reprise. Avec 8 points d’avance sur le barragiste Niort (18ème, 26 pts), Sochaux semble avoir son destin en main pour rester en Ligue 2.
LE REVEIL ATTENDU DU BUTEUR SANE
Les dernières sorties du FC Sochaux sont à l’image de l’attaquant Abdoulaye Sané. Buteur maison des « Doubistes » en début de saison, le Sénégalais portait presque à lui seul le club sur ses épaules. Lors de la 10ème journée, l’attaquant de 27 ans avait réussi un triplé contre Clermont, avant de remporter le titre de « joueur du mois » décerné par la Ligue de football professionnel (LFP). Mais une blessure viendra freiner l’ancien joueur de Brest, précipitant ainsi la dégringolade de son équipe. Et dans ce dernier virage, Sochaux aura besoin de son buteur au meilleur de sa forme. Avec 10 buts au compteur, Abdoulaye Sané a encore l’opportunité d’améliorer ses statistiques. Ce qui serait bénéfique pour son équipe, dans cette folle lutte pour le maintien.
UN CALENDRIER DEMENTIEL !
Le maintien n’est pas loin, mais Sochaux n’aura pas la tâche facile, avec un calendrier plus ou moins serré. Pour la reprise de la compétition (même si la date n’est pas encore fixée), Omar Daf et ses hommes joueront Chambly (10ème, 35 pts). Une formation difficile à jouer, surtout à pareil moment de la saison. Pour le compte de la 30ème journée, Sochaux sera à Ajaccio, avant de recevoir Niort (31ème journée). Des rencontres qui s’annoncent pénibles pour les Sochaliens, face à des concurrents directs pour le maintien. Sochaux va enchaîner avec trois matchs compliqués. Le Havre (6ème, 44 pts), Lens (2ème, 53 pts) et Troyes (4ème, 51 pts) seront d’un autre niveau pour la bande à Amadou Dia Ndiaye. Sur les quatre dernières journées, Sochaux aura la possibilité d’en jouer deux à domicile (Châteauroux et Orléans). Face à des équipes du bas du tableau, Sochaux part avec la faveur des pronostics. Des résultats positifs permettraient à l’équipe de bien finir la saison lors de l’ultime journée à Caen. Mais Omar Daf et ses hommes espèrent que le maintien sera déjà assuré avant cette ultime rencontre de la saison.
SE MAINTENIR ET PREPARER L’AVENIR !
Le maintien est l’objectif assigné à Omar Daf. Nommé en novembre 2018 à la tête de l’équipe première sochalienne suite au départ de José Manuel Aira, le Sénégalais avait par la suite prolongé son contrat jusqu’en juin 2021. Ayant sauvé le club d’une relégation, l’ancien latéral des « Lions » s’est inscrit dans la durée. Très respecté au club pour y avoir passé la grande partie de sa carrière de joueur, le technicien de 43 ans a aujourd’hui le soutien des anciens. Considéré comme une des légendes du club, Faruk Hadzibegic a marqué Sochaux en tant que joueur (1987-1994) et entraîneur. Dans les colonnes de l’Est Républicain, il a salué le travail de Omar Daf. «Sochaux, ce sont mes plus belles années de football. J’ai appris avec tristesse le décès de Silvio Croci, c’est un homme qui m’était cher. J’ai aussi dernièrement envoyé un message à Omar Daf pour lui faire part de mon soutien. J’espère que ce sera lui qui fera remonter le FCSM en L1 », a fait savoir l’actuel sélectionneur du Monténégro (nommé en 2019).
LA CHRONIQUE HEBDO DE PAAP SEEN
LE FRÈRE DES FOOTBALLEURS
EXCLUSIF SENEPLUS - La vie de Pape Diouf offre un exemple patent de la manière dont un homme parti de rien, échoué dans une ville de prime abord austère, peut s’élever à une existence supérieure - NOTES DE TERRAIN
“Footballeurs, mes frères. (...) Votre sport suscite l’enthousiasme parce que dans ses manifestations supérieures, il s’élève au niveau de l’art. (...) Synthèse attrayante, parce que naturelle, des « disciplines » physiques les plus diverses, elle est à la mesure de l'Homme.” François Thébaud
Lundi 30 mars 2020. Depuis près d’une heure, je suis entièrement absorbé par la lecture d’un recueil de nouvelles. Mémoires d’un chasseur, d’Ivan Tourguéniev. On m’appelle dans le salon. On parle de football à la télévision. Lorsque je me lève pour aller voir de quoi il retourne, je ne savais pas que j’allais passer le reste de la soirée devant l’écran. Je regarde rarement la télévision. Les chaînes sénégalaises encore moins. Le programme en question passe sur la TFM. Il s’agit d’un reportage sur le football sénégalais. Honnête mais terne. Qui relate le parcours de l’ancien sélectionneur national du Sénégal, Bruno Metsu. Un peu plus tôt, le matin, comme c’est le cas depuis l’apparition du premier cas confirmé de coronavirus dans notre pays, le ministère de la Santé a fait le point sur la situation de la maladie au Sénégal. Pour la première fois, deux cas graves ont été enregistrés. Un ami m’a appelé, juste après la déclaration des autorités sanitaires. Pour m’annoncer une mauvaise nouvelle. “Pape Diouf est l’un des deux cas graves”.
Quand j’arrive au salon, plusieurs personnes défilent sur l’écran. A ce moment-là, le reportage met en scène Abdoulaye Sarr, l’ancien sélectionneur national adjoint des “Lions”. Puis les journalistes Cheikh Tidiane Fall, Salif Diallo, et le footballeur Khalilou Fadiga. Ils évoquent la relation particulière de Bruno Metsu avec le Sénégal. Je suis transporté près de vingt ans en arrière. Mon esprit est à la nostalgie. Des souvenirs agréables sont ressuscités. Ce n’est pas seulement l’épopée des “Lions” en 2002 qui ressurgit. Un bonheur immense, et une tristesse refoulée me donnent un pincement au cœur. Soudain, Pape Diouf apparaît sur l’écran. Le plan est serré. Peu de lumière. Présence solaire. Il porte un boubou marron. Son regard est allumé. Tout de suite ce visage mystérieux et épais murmure des mots justes. Il ne cabotine pas. Sa voix rocailleuse et traînante retentit comme le tambourinement d’une anaphore. Impossible de décrocher. Il apparaîtra plusieurs fois encore dans le reportage. A chaque fois, je me mets à penser au combat qui doit être le sien, à cet instant.
Une voix singulière. Pape Diouf était un homme inspirant. Il avait une maîtrise souveraine du verbe. Lorsqu’il parlait, on pouvait sentir cet élan poétique, qui germe dans les esprits habités par la passion. Il avait un vrai sens littéraire. Jamais ses récits n’étaient fades ou aseptisés. Avec lui, le verbe était toujours très précis, haut et sublime. Ses réflexions et plaidoiries étaient toujours empreintes de dignité et d’éclat. Son charisme faisait le reste. Il avait toujours la répartie parfaite pour se faire comprendre et respecter. Comme lorsqu’il a voulu faire savoir à François Hollande qu’il n'était pas son obligé. Ce dernier le poussait à se présenter sous la bannière du Parti socialiste français, à Marseille, lors des élections municipales de 2014. “On me presse pour répondre mais décider ce n’est pas simplement dire oui ou non. Je dois évaluer la situation et voir ce que je peux apporter à une cause”, avait-il fait savoir. Exigence de liberté et indépendance d’esprit. C’était son principe.
La vocation. Pape Diouf, c’est surtout un homme du football. C’est quoi le football ? Il y a fort à parier que beaucoup répondront que c’est un jeu. D’autres diront : c’est un jeu avec un ballon. Et même certains vont suggérer que c’est le sport-roi. Les plus téméraires pourraient évoquer les différentes pratiques du football. A onze contre onze. Sur une surface délimitée. En salle. Sur un terrain vague. A la plage. Dans la rue. Dans un appartement. C’est vrai, le football est un jeu et ses variantes sont nombreuses. Mais c’est plus que tout cela. Ce qui est d’abord frappant dans ce sport, c’est qu’il n’est pas naturel. Ses pratiquants sont obligés d’utiliser leurs pieds et non leurs mains. Le football est un défi lancé à l’appareil locomoteur. Il faut un premier effort, qui paraît simple à première vue, mais qui est exigeant et malaisé. Qui demande l’éducation du corps. Une intelligence des muscles. Ensuite, le football est simple. Il faut un engin-outil plutôt rudimentaire, un ballon, et en avant pour le plaisir. Enfin, le football déchaîne les passions. Partout sur la planète des clubs et des joueurs sont vénérés. Des statues et monuments dressés. Le football, c’est aussi un ferment communautaire. A cause du football, une guerre a éclaté entre deux pays, une révolution s’est éteinte, des pays ont sombré dans la crise. C’est une économie. Un art. Un fait social total.
Pape Diouf fait partie de ces hommes qui ont fait du football une transcendance. Et ont confondu leur vie avec ce sport. Qui savent que le football est une réalité complexe. Un phénomène qui va au-delà du simple jeu. Il a passé sa vie à servir ce sport. En étant agent de joueurs, puis dirigeant. Un parcours glorieux, durant lequel il parviendra à se hisser à la tête d’un des plus grands clubs du monde. Il a fait des footballeurs ses “frères”. Il était affectivement proche d’eux. Il a conseillé, entre autres, Joseph-Antoine Bell, Abedi Pelé, Marcel Desailly, Basile Boli. Fort d’une culture remarquable et d’un sens de la responsabilité, il s’est hissé un chemin vers les sommets. Tout seul. Pape Diouf est une référence. Un homme d’avant-garde. Un homme du football et du verbe. Un homme de la fraternité. Sa vie offre un exemple patent de la manière dont un homme parti de rien, échoué dans une ville de prime abord austère, peut s’élever à une existence supérieure. Jusqu’à devenir un mentor pour beaucoup de personnes.
Retrouvez sur SenePlus, "Notes de terrain", la chronique de notre éditorialiste Paap Seen tous les dimanches.
EXCLUSIF SENEPLUS - Nous attendions que tu ressortes des vestiaires de l’hôpital Fann avec ce regard d'espoir devenu ta marque de fabrique. Hélas, pour une fois, le temps s'est s’arrêté, ce match était ton dernier
Boubacar Badji de SenePlus |
Publication 03/04/2020
C'est un coup de sifflet final qui retentira à jamais dans nos têtes. Habitués à tes grandes victoires marquées par des prouesses colorées en vert jaune et rouge, nous te croyions invincible jusqu'à 31 mars. Nous savions tous, dès le coup d'envoi que ce match était plus qu'un derby. Mais combien de derby n'as-tu pas remporté armé seulement de ton courage ?. Le temps est vite passé. Ton entrée dans les vestiaires Fann était pour nous un classique. Mais là aussi, nous savions qu'elle était différente de celles où tu longeais difficilement le couloir du vélodrome pour en ressortir, 15 minutes après, revigoré et déterminé à revenir au score d'abord avant de renverser la tendance en ta faveur lors des classicos.
Combien de victoire n'as-tu pas arraché dans les temps additionnels grâce à ton vaillant cœur de lion face aux enjeux financiers et parfois racistes ? Et nous attendions que tu ressortes de ces vestiaires de l’hôpital Fann avec ce regard d'espoir devenu ta marque de fabrique.
Hélas, pour une fois, le temps semble s’arrêter. Et il nous a fallu beaucoup de temps avant de comprendre que pour ce match, le diable ne s'est pas contenté de déjouer les pronostics. C'est lui-même en virus floqué du numéro Covid-19 qui jouait pour ne pas perdre face à toi. Et personne n'avait prévu son coup. Certes, il a gagné ce match mais le monde du foot soulèvera la coupe en ton nom. Quid de la manière ? Nous nous en ''footons''. Et même si c'est dans les dernières secondes que nous scellerons sa mort, l'essentiel pour nous est de rejouer au foot sans aucun diable encore moins de Covid-19 sur la pelouse.
Pardonnes-nous Pape Diouf. Nous n'avions pas pensé à formuler des prières collectives comme pour Moustapha Guirassy parce que tu nous as habitués à ne fêter que des victoires en grande pompe. Reposes en paix !
LETTRÉ COMME UN PAPE
Si, depuis son départ de l’OM, il disséminait les bons mots sur les plateaux TV plutôt que dans les vestiaires, il laisse derrière lui autant de souvenirs que de verbes conjugués au subjonctif imparfait...
Pape Diouf n’a jamais gagné de championnat de France, mais Pape Diouf savait parler. Si, depuis son départ de l’OM, il disséminait les bons mots sur les plateaux TV plutôt que dans les vestiaires, il laisse derrière lui autant de souvenirs que de verbes conjugués au subjonctif imparfait... nonobstant ses origines socio-culturelles. Habemus.
En arrivant, il avait demandé un café sans sucre. Puis il s’était assis, en attendant que la salle Albert Haddad de la Maison de l’avocat se remplisse doucement. Il y avait là des badauds curieux, des trentenaires en longue robe noire, leurs pères, leurs mères, parfois même leurs femmes, assis dans un amphithéâtre surélevé au-dessus d’une fosse vide. On vient voir la bête : ce 7 novembre 2014, comme le mime Marceau, Serge Gainsbourg, Salvador Dali ou Fabrice Luchini avant lui, Pape Diouf est l’invité d’honneur de la célèbre conférence Berryer, une joute oratoire vieille de 150 ans exceptionnellement délocalisée à Marseille. Les règles du soir sont simples : deux orateurs débattent chacun leur tour d’un thème en rapport avec l’invité reconnu pour son éloquence, avant de voir leur prestation critiquée par un jury de douze avocats, appelés les « Secrétaires » , des surdoués de la raillerie, féroces, méchants, cruels. L’exercice tient du masochisme : c’est à celui du jury qui aura la meilleure saillie humoristique, qu’elle concerne le fond, la forme, le CV ou le physique, et gloire à celui qui ose se présenter seul dans l’arène, l’objectif étant davantage d’en sortir vivant plutôt que grandi.
Les sujets du soir sont les suivants : « Le Pape peut-il changer la donne ? » et « Où t’es, Pape où t’es ? » La soirée s’allonge, les orateurs déclament, les jurys descendent, et Pape, lui, reste silencieux. Il rit peu. Au bout du bout, la salle se tourne vers lui. Les plaidoiries ont duré trois heures. Il se lève, juste aux côtés de Lucas Montagnier, 29 ans à l’époque, avocat au barreau de Marseille et membre des Secrétaires, et prend la parole : « Au lieu de faire la critique des orateurs comme il est coutume de faire, il a presque retourné le concept, explique l’avocat. Il trouvait ça injuste que le jury se mette à critiquer de manière aussi acide ceux qui avaient eu le courage de débattre d'un sujet aussi farfelu. On sentait que ce qu’il voulait, c’est critiquer ceux qui formulaient des critiques. Il avait une présence incontestable. Ce soir-là, il avait marqué tout le monde. Les pères, les mères de famille de membres du jury. » Les témoins de la scène repartiront médusés, Pape Diouf renforcé de son auréole de défenseur des innocents, des audacieux, des opprimés. Le tout grâce à deux choses : son cerveau, et sa langue.
Homme du mot juste
Pape Diouf était un homme grand et un grand homme, dont la parole portait aussi loin que son aura. C’est d’ailleurs un point commun à la majorité des hommages qui lui sont rendus depuis mardi soir : on y souligne au choix son « phrasé » si particulier, son « verbe » élégant ou son « langage de haute tenue » . Diouf était, de fait, de ces hommes qu’il élève d’écouter, dont la parole était autant respectée pour sa pertinence que pour son raffinement, et dont l’origine, elle, reste un secret. Comment lui, l’immigré sénégalais, le renvoyé du collège Sacré-Cœur de Dakar, l’ancien coursier, le manutentionnaire, le pointeur du port de Marseille, a-t-il appris à utiliser le mot « nonobstant » ? Cette partie de l’histoire reste évasive.
Mais voilà pour sûr « le Black le plus intelligent que je connaisse » - comme lui dit un jour Bernard Tapie -, capable de découper un joueur en pièce tout en levant l’auriculaire. « Un jour, un joueur de l’OM l'a pris de haut, nous confiait mercredi Jean-Paul Delhoume, journaliste à La Marseillaise, canard de gauche pour lequel Diouf a travaillé de 1975 à 1987. Pape lui a dit dans son langage châtié : "Je crois que nous allons en arriver à des extrémités physiques regrettables..." - pour lui dire : "Je vais te casser la gueule." » On déguste ses tirades comme on lit du Proust, et il est d’ailleurs intéressant de constater qu’il fait partie des rares acteurs du monde du foot à avoir ses propres citations compilées sur le site dédié du Monde, ou à être occasionnellement cité aux Grosses Têtes, avec George Best et Cantona.
En 2008, à la descente d’un avion, il était sorti de son habituelle réserve policée, évoquant les « nababs » et les « vizirs » de l’effectif olympien éliminé quelques heures plus tôt par le Zénith Saint-Pétersbourg en 8es de finale de la Coupe de l’UEFA. Ses coups de gueule en avaient, de la gueule. Et il pouvait faire mal. « On sortait le dictionnaire après ses causeries » , avouait récemment Benoît Cheyrou. Lucas Montagnier évoque lui un « homme du mot juste » avec « du recul et de la nuance. » Et plus précisément « une parole aussi respectée que crainte, parce qu’il avait un style très direct. Il ne faisait pas d’effets de styles : lorsqu'il avait fini de parler, on attendait souvent la chute, et elle ne venait pas. Il faisait parfois la conclusion en introduction. Il avait une manière à lui d’exposer ses positions, faisant de lui un homme qu’on écoute. » Son éloquence est même allée jusqu’à intéresser les universitaires, lui trouvant des occurrences avec... Michel Fourniret.
Souverain poncif
Parce qu’il n’y connaît pas grand-chose en football, et surtout parce qu’il habite en Australie, Bert Peeters n’a appris le décès de Pape Diouf que mercredi sur les coups de 15h. Qui ça ? Il fallait raviver les souvenirs : ce linguiste belge réputé, ancien professeur de langues étrangères à l’université de Tasmanie et à l’université Macquarie, à Sydney, s’était intéressé au baryton dans l’une de ses thèses, « Il fallut que je sois fusse... » : à la recherche d’un temps perdu (2001-2012), consacrée à la disparition du subjonctif imparfait dans la langue française. Son travail est divisé en trois parties :
- Allusions qui étonnent
- Usages qui détonnent
- Usages qui divisent
Pape Diouf, sans surprise, est dans la deuxième. « C’est en faisant des fouilles dans ce cadre que je suis tombé sur son nom, qui revenait dans de nombreux papiers comme utilisateur de ce temps presque disparu, à part pour les linguistes comme moi, explique Peeters. Et étant donné ses débuts d’homme noir au Sénégal, c’était assez étonnant qu’il s'exprime dans un français aussi subtil. »
Il s’appuie notamment sur un papier de Libération, « Règlement de comptes à OM Corral » , où le journaliste Michel Henry écrit ces mots : « Il n’y a qu’un seul Pape sur terre. Et il marche sur l’eau du Vieux-Port en chaussures Berluti. Le Pape Diouf Ier, dit « l’Unique » , peut commencer une phrase et la terminer trois jours plus tard sans se tromper dans un imparfait du subjonctif ni exprimer de souverains poncifs. » L’autre exemple cité dans sa thèse est Michel Fourniret, qui utilisait le subjonctif imparfait dans les trois carnets de notes retrouvés dans sa cellule, ceux où il décrivait ses meurtres dans une langue impeccable, et concluant l’un de ses récits par cette phrase devenue culte : « Il fallut bien alors que je l’enterrasse... »
Bert Peeters : « Fourniret, c’était de la stratégie, il faisait n’importe quoi pour se faire remarquer. Mais chez Pape Diouf, on peut lire dans son autobiographie (C'est bien plus qu'un jeu, N.D.L.R) qu’il a une aversion pour la langue de bois. Ça va bien ensemble, et c’est le signe d’une éducation très très poussée. Mais je vais vous avouer quelque chose : je n’ai jamais réellement trouvé d’exemple d’utilisation du subjonctif imparfait par Diouf, malgré la lecture de dizaines de témoignages, à part pour des verbes très simples : faire, aller, être. J’en suis arrivé à la conclusion qu’il y a un mythe urbain qui s’est installé à son propos. Vous avez vu des discours où il utilisait vraiment ce temps-là, vous ? » Les souvenirs s’emmêlent. Était-ce du subjonctif imparfait, du passé simple, du petit lait ? Après tout, peu importe. Pape Diouf parlait bien, parlait mieux que quiconque, descendant dans la crypte des tonalités à mesure que son verbe s’élevait. « Il aurait fait un bon avocat, mais surtout un très bon juge, ose Lucas Montagnier. C’était quelqu’un de juste, et la parole juste se fait rare. » Une pause, puis : « C’est décidément pas facile de parler de lui à l’imparfait. »
PAR Abdou Latif Coulibaly
FAUCHÉ PAR LE VIRUS, PAPE DIOUF SURPREND !
En choisissant, entre mille exemples possibles, tes fonctions de président de l’OM, je témoigne de ta réussite dans ce milieu spécial de la présidence des clubs de football, réputé dur et quasi hostile, surtout à un noir, comme tu l’as souvent relevé
Quand j'ai appris ton hospitalisation et pris la mesure de la gravité de ton mal, je me suis persuadé que le corps médical sénégalais ferait des miracles pour rendre réversible le processus qui semblait te conduire vers l’irréparable. Quand la nouvelle est tombée, nous étions tous incrédules. Nous n’étions pas naïfs, exceptés des fanatiques illuminés ou de rares adeptes des thèses complotistes, pour ne pas croire à la réalité de la tragédie mondiale provoquée par le Covid 19.
Celui-ci ne dévoile-t-il pas chaque jour sa face hideuse et son allure macabre en plongeant dans le deuil quotidien les nations du monde, par le fauchage brutal des êtres humains, sans distinction de race, de sexe, de classe sociale, de pays, de rang et de gardes ? Nous étions encore, jusqu’à l’annonce de ta mort, naïfs peut-être de penser que la pandémie, on ne sait par quel miracle impossible, ne ferait pas de morts chez nous ! Même les rares personnes qui savaient que tu faisais partie des deux victimes du Covid 19 et dont l’état de santé inspirait de sérieuses inquiétudes à tes soignants, ne voulaient pas croire à cette issue fatale.
Pourtant, comme pour préparer l’opinion à recevoir une tragique nouvelle, ces mêmes soignants avaient parlé de la gravité de la situation, tout en tentant de rassurer. Hélas, en dépit des efforts inouïs des médecins sénégalais, à la tête desquels le professeur Seydi, rien n'y fit. Ton décès plonge la France, l'Afrique et le Sénégal dans un douloureux deuil.
Surprise, stupéfaction et consternation ! Comme dirait Sénèque : "tu as tes occupations et la vie se hâte ; sur ces entrefaites la mort sera là, à laquelle, bon gré mal gré, il faut bien finir par se livrer". Le Covid-19 a fini de te livrer à la mort, le Sénégal et la France expriment leur peine ; les deux nations sont pleinement assaillies par la douleur et le chagrin. Un profond sentiment d’impuissance et de désarroi qui est, sans aucun doute, à la hauteur de ce que tu as représenté et symbolisé, pour l'un et l'autre pays. Alors que le Sénégal priait, tout en utilisant également tous les moyens à sa disposition : son savoir-faire médical, ses capacités techniques, son attention à un malade spécial et particulier pour lui, en vue de te sortir de là, la France également se tenait prête pour te donner toutes les chances qui pourraient t'aider à éviter de te laisser terrasser définitivement par le virus.
Deux pays, deux nations, unis et solidaires autour d’un homme, toi, pour éviter le pire. Hélas Pape ! Le Sénégal et la France unis par une dualité de bon aloi, pour la mise en commun d’efforts et de moyens, en vue de produire les synergies utiles qui devaient aider à sauver leur enfant. Cet enfant dont la tête, avec deux faces, est comme celle de Janus : l’une regardant vers sa patrie d'origine où il s’est éteint, et l’autre, tournée vers cette France qui l’a vu grandir et réaliser une vie intense et réussie. Cette dualité dont tu es une marque significative est, en définitive, le reflet de ta vie même. Celle-ci a ébloui la France, en consacrant une réussite personnelle d'abord. Ensuite, celle d’une communauté - même si je sais que ce mot déplaît là-bas - qui s’est entièrement retrouvée en toi. Toutes choses dont ton pays d'origine est si fier. Tu es le symbole marquant de l’enfant noir, très tôt tenté par l’aventure de l’émigration en Occident.
A l’arrivée, ce ne fut pas, comme pour tous les immigrés un cadeau du Ciel. Au contraire ! Pape, tu as vite compris, qu’à force de travailler, en étant surtout exigeant avec toi-même, intransigeant par rapport au respect qui t’est dû, tu es arrivé au sommet de la pyramide. Tu as réussi à te placer au sommet de ton art, tant dans ta profession de journalisme, que dans tes fonctions de dirigeant sportif. Tu y es arrivé, en portant en bandoulière des principes et des valeurs comme savent en faire valoir des hommes de ton acabit. Tu disais dans une vidéo devenue virale sur internet depuis l’annonce de ton décès : "Tout principe a une contrepartie. Sinon c'est un préjugé. Si tu peux dire merde à ton patron, la contrepartie c'est qu'il peut te virer. Pour aller plus loin dans ce que je fais, ma ligne directrice a toujours été dans ma vie d'aller jusqu'au bout de mes objectifs, de mes projets. C'est ce qui me permet de conserver ma dignité. C'est ma manière de voir la vie ».
Belle et digne manière de vivre la vie que tu as lâchée à soixante-huit ans. Digne, vous l'avez été comme le soulignait avec lucidité cet éminent intellectuel dont les travaux dans le domaine du sport font autorité en France, Pascal Boniface dans "De but en blanc" : Diouf a choisi entre son poste et son honneur. Tu es parti en ayant pleinement rempli sur terre ta mission d’homme et de citoyen. Et, qui plus est, sur des terrains, des lieux et en des temps a priori peu favorable. Et pour tout cela, tu fais la fierté de tout un continent. Ce n'est pas un hasard que ton destin soit lié à celui d'un autre géant d'Afrique, lui aussi emporté par le Covid-19, Manu Dibango.
Diouf-Dibango, deux destins liés
Curieuse coïncidence dans vos itinéraires ! Lui aussi a quitté très jeune l’Afrique pour partir en France. Lui-même dit qu’il est parti à l’âge de quinze ans. Et toi à 17 ans renseignent plusieurs sources. Tout ceci me fait croire que le hasard, pour ne pas dire Dieu, a décidé de lier vos destins dans la tragédie de cette pandémie. Il a procédé ainsi, pour mieux vous montrer, pour vous distinguer et vous célébrer dans la grande masse des nombreux enfants du continent immigrés en France qui ont marqué de très belle manière, de leur empreinte, la pratique de leur métier, lui dans le secteur de la musique, et toi dans le journalisme et le management du sport, le football en particulier.
J’exagère rien, vous êtes tous les deux célébrés et applaudis, au-delà du cercle des immigrés d'Afrique. Cercle dans lequel certains esprits voulaient vous maintenir à jamais. Ceux-là, incapables de procéder à des mues essentielles adaptées à notre époque, ils ont toujours ainsi tenté de vous réduire à votre origine. Et ceux-ci, éternellement piégés par le récit de l'histoire coloniale, refusant ainsi de te voir et de te regarder autrement que par le prisme déformant de cette même histoire coloniale, sans l’avouer, ont été bluffés par l’insolence de la manière par laquelle tu es monté haut en France et pour demeurer au sommet jusqu’à la fin de ta vie.
Pour eux, tu ne pouvais être autre chose qu’un simple immigré ; tu leur as prouvé qu’ils se trompaient lourdement. En choisissant, entre mille exemples possibles, tes fonctions de président de l’Olympique de Marseille, je témoigne de ta réussite dans ce milieu spécial de la présidence des clubs de football, réputé dur et quasi hostile, surtout à un noir, comme tu l’as souvent relevé. Bernard Tapie est le seul à avoir fait mieux que toi à la tête de ce club très particulier. Et encore que, lui, était à la fois propriétaire et président du club. Il a en plus duré plus que toi dans ses fonctions. Tu as eu une belle carrière en France et reçu le respect dû à ton statut et ton rang là-bas. Le prestigieux quotidien sportif français, l’Équipe titrait le mardi 31 mars 2020, à la Une de son édition électronique du soir : "Notre Pape est mort". Au-delà de l’affection sincère traduite dans ce titre, on comprend que tu as appartenu à deux nations. Dommage, nous aurions tous souhaité que ta vie soit plus longue que soixante-huit (68) ans. Tragique, le Covid-19 en aura décidé autrement. En tout état de cause, Pape, ta vie aura été bien remplie ; c’est peut-être bien cela l’essentiel. J'ai envie de conclure en retournant à Sénèque qui a dit "La mort est bien lourde pour celui qui meurt trop connu des autres, mais inconnu de lui-même". Ta mort illustre parfaitement le propos et donne raison au philosophe.
LA DISPARITION DE PAPE DIOUF INCARNE LE COVID-19 AU SÉNÉGAL ENDEUILLÉ
Le premier décès de la pandémie est celui d'une personnalité familière d'un grand nombre de Sénégalais pour qui la réalité du coronavirus se matérialisait jusqu'alors par le couvre-feu, la fermeture des écoles ou l'impossibilité de prier à la mosquée
La disparition de Pape Diouf, ancien président de l'Olympique de Marseille, met un visage connu et unanimement respecté sur l'épidémie de coronavirus au Sénégal où la dangerosité de la maladie reste diversement prise en compte.
Le point journalier du ministère sénégalais de la Santé retransmis en direct a cessé mercredi d'être l'austère énoncé, en français et en wolof, du nombre de tests, de cas de personnes contaminées, de patients guéris.
Le sinistre bilan comporte désormais une entrée de plus: celle des morts, et le premier décès nommé par le ministère est celui d'une personnalité familière d'un grand nombre de Sénégalais pour qui la réalité du coronavirus se matérialisait jusqu'alors par le couvre-feu nocturne, la fermeture des écoles ou l'impossibilité de prier à la mosquée ou à l'église.
Pape Diouf, ancien président de l'un des clubs de foot les plus populaires de France (et du Sénégal), ancien agent de grands praticiens du ballon rond, ancien journaliste, est décédé mardi à 68 ans dans un hôpital de Dakar.
Adama Ndione, vice-président des Supporteurs de l'Olympique de Marseille au Sénégal, club de fans qui revendique quelques centaines de membres encartés, a "versé beaucoup de larmes": "C'était un Sénégalais, un exemple parfait de réussite dans tout ce qu'il entreprenait, un exemple pour nous", dit-il.
Dans le pays qui était le sien avec la France, et où il revenait constamment pour des raisons personnelles et professionnelles, les hommages ont afflué: du président Macky Sall, du chanteur Youssou Ndour pour lequel il était un "homme formidable et multidimensionnel", des joueurs passés ou présents, confrères journalistes...
- Dernier appel -
La photo de Pape Diouf a rempli la une des journaux."Pape Diouf perd son dernier match", se sont accordés l'As et le Quotidien.
Le maillot frappé de l'écussion "Droit au but" est un spectacle courant dans ce pays fou de foot.Pape Diouf y était populaire pour avoir ramené l'OM sur le devant de la scène sportive, pour ses relations avec les champions, mais aussi pour son parcours personnel, sa personnalité attachante, et son sens du verbe apprécié au Sénégal.
Comme d'autres, Bacary Cissé, rédacteur en chef du journal de sport Record, le présente comme son "parrain", celui qui l'a lancé dans la carrière.Il a donné son nom à son fils, et est bouleversé.
Jeudi, Pape Diouf lui écrivait qu'il traînait une mauvaise angine mais pensait à lui.Vendredi, son mentor l'a appelé pour lui dire qu'il était à l'isolement et qu'il avait été diagnostiqué positif.
"Samedi matin, nous nous sommes parlé pour la dernière fois.Il m'a dit: +Bacary, écoute, Petit, la maladie, on va tous s'en relever+".
Bacary Cissé est lui-même atteint et hospitalisé.Le Sénégal a déclaré 190 cas de contamination, dont 45 guéris et, désormais, un mort.La progression de la maladie et la part grandissante prise par les transmissions "communautaires" et non plus "importées", conjuguées à l'état des systèmes sanitaires africains, suscitent l'inquiétude.
- Sensibilisation posthume -
Le Sénégal a pris des mesures pour contenir le mal et se prépare à célébrer samedi 60 années d'indépendance sans le faste auquel un tel anniversaire aurait pu donner lieu.
Le débat est ouvert sur la nécessité de dispositions encore plus fermes que l'état d'urgence et le couvre-feu, jusqu'au confinement.Mais ici, comme ailleurs en Afrique, comment la part considérable de la population qui vit au jour le jour dans l'économie informelle fera-t-elle pour vivre en confinement ?
Nombreux sont ceux qui, comme le maire du quartier populaire de la Médina à Dakar, déplorent le mépris des règles anti-coronavirus par les Sénégalais, qu'ils agissent par nécessité ou méconnaissance du danger.
"Le décès de Pape sensibilise par sa forte résonance", dit un psychologue cité dans le journal l'Observateur, Serigne Mor Mbaye, "on le voyait tout puissant, à un niveau inaccessible (...) La dimension du personnage fait qu'on a peur"
Jusqu'alors, "les gens ne voulaient pas y croire" (à la maladie), dit Adama Ndione, du club de supporteurs, maintenant ils "vont commencer à avoir peur".Il ignore encore comment, avec l'interdiction des rassemblements, les fans sénégalais honoreront la mémoire du défunt.
PAPE DIOUF A ÉTÉ COURTISÉ POUR LE POSTE DE MINISTRE DES SPORTS
L’ancien président de l’OM, décédé mardi à Dakar, a été approché sous la présidence Wade (2000-2012) pour le poste de ministre des Sports, a révélé, Mamadou Koumé, un de ses amis les plus proches
L’ancien président de l’OM, Pape Diouf décédé mardi à Dakar, a été approché sous la présidence Abdoulaye Wade (2000-2012) pour le poste de ministre des Sports, a révélé, Mamadou Koumé, ancien directeur général de l’Agence de presse sénégalaise (APS), un des amis les plus proches.
’’Je peux vous le dire, Pape (Diouf) avait été consulté pour devenir ministre des Sports mais il a décliné en prétextant qu’il y avait des Sénégalais mieux outillés et plus qualifiés pour faire ce travail’’, a témoigné Koumé qui l’a connu en 1987.
Pape Diouf aurait été ministre des Sports s’il avait accepté l’offre, a ajouté l’ancien reporter sportif du quotidien gouvernemental, Le Soleil qui avait lancé avec Diouf l’hebdomadaire, Le Sportif en septembre 1991.
Ce journal était pour lui ’’un cadre d’expression pour les sportifs sénégalais et aussi une perche pour ses nombreux amis de la presse sportive nationale’’, a rappelé M. Koumé.
’’Il avait beaucoup d’amis dans la corporation, il pensait que le temps était propice pour lancer ce journal à la veille de la CAN 1992 au Sénégal’’, a-t-il dit indiquant qu’une bonne performance de l’équipe nationale aurait permis de solidifier la publication sportive.
’’Malheureusement, ça n’a pas été le cas avec cette élimination prématurée des Lions en quart de finale’’, a rappelé Koumé qui a su toujours garder les mêmes relations avec Pape Diouf emporté mardi par le coronavirus devenant ainsi la première victime sénégalaise de cette pandémie.
Et en dépit des nombreuses fonctions qu’il a eues à occuper, Pape Diouf est resté foncièrement journaliste jusqu’à la fin de sa vie.