Outre l’instauration de la réciprocité de visa par le gouvernement du Sénégal, la cherté de certains services connexes à cette mesure, nombreux sont les touristes qui se plaignent également des harcèlements de certains guides dont ils se disent victimes, mais aussi des marchants ambulants.
De l’aéroport aux hôtels en passant par les galeries d’art et les plages, les touristes sont presque partout poursuivis par des gens qui leur proposent divers services. Au village artisanal de Soumbédioune, certains touristes rencontrés dénoncent l’attitude de ces guides occasionnels ou de marchands ambulants qui viennent proposer des prestations.
Devant une cantine bien achalandée d’objets d’arts brillants sous l’effet des rayons solaires, Henry Dimetry, touriste français, se lance dans un rude marchandage avec le propriétaire des lieux. Un jeune, la vingtaine à peine entamée, des statuettes entre ses mains, s’invite à la conversation. « Monsieur, combien peux-tu payer pour cet objet », lance-t-il au touriste dans un français approximatif. Ce dernier, très surpris, coupe court aux discussions avec son vendeur.
« Il y a une manière d’aborder les gens », sermonne M. Dimetry, très remonté. Son camarade, Charles Gan, d’un port vestimentaire très décontracté, s’en prend aux individus qui s’auto- proclament « guides touristique ». Selon lui, depuis l’aéroport jusqu’aux hôtels, les étrangers sont acculés au cours de leurs déplacements, surtout sur les plages et les sites touristiques.
Un comportement qui, à son avis, ne fait que ternir l’image du pays de la Téranga. « L’Etat devait régulariser le secteur des guides en octroyant des autorisations d’exercer ce métier. Ce qui permettra aux touristes de mieux passer leur séjour et de bien effectuer leurs déplacement partout sans aucune contrainte », préconise M. Gan.
Vêtu d’un body laissant apparaître ses biceps, pantalon aux diverses couleurs patchwork propre aux « Baye Fall », Rassoul Lèye, plus connu sous le diminutif Mame Kha’, guide touristique de son état, soutient avoir opté pour cette profession depuis plus de dix ans. « Le guide, dans le secteur du tourisme, est un métier comme toutes les autres professions », se défend-il.
Toutefois, le jeune fait savoir qu’il y a des individus qui ont infiltré cette activité. Ce qui explique, à son avis, toutes les dérives notées. « Ceux qui sont pressés à proposer des services aux touristes n’ont subi aucune formation dans le domaine du tourisme. Ce sont juste des gens qui cherchent à arrondir les angles en s’adonnant à la facilité », dénonce Mame Kha’.
A en croire Henriette Lopes, ressortissante cap-verdienne, près de la cinquantaine, des touristes rechignent à revenir au Sénégal en raison des difficultés qu’ils rencontrent durant le séjour. « Des marchants ambulants d’objets d’art nous interpellent en cours de route pour proposer leurs marchandises. Pire, ils augmentent les prix dès lors qu’il s’agit d’étrangers », se plaint Mme Lopes.
VILLAGE ARTISANAL DE SALY
LES MARCHANDS D’OBJETS D’ART VICTIMES DE LA MOROSITÉ DU SECTEUR TOURISTIQUE
Victimes depuis quelques années de la déliquescence du secteur touristique, les marchands d’objets d’art du Village artisanal de Saly passent leur quotidien à broyer du noir.
A la station balnéaire de Saly, le commerce a repris après la fine pluie matinale qui s’est abattue sur la cité. On entre et on sort dans les supermarchés et autres salles de jeux qui poussent comme des champignons. Les rues sont animées. Ça crie et vibre tel un début de carnaval. Tout le contraire au Village artisanal de Saly. Ici, le temps semble s’arrêter.
Un calme olympien règne. Las d’attendre des clients qui, depuis quelques temps, sont devenus rares, des marchands sont retranchés derrière leurs étals. Le regard perdu dans le vide. A défaut de ne rien faire, certains observent tranquillement un somme tandis que d’autres devisent sur tout et rien. La chute libre du tourisme dans la localité, depuis quelques années, a eu des effets collatéraux chez ces vendeurs.
En effet, ils estiment passer la plupart de leur temps à se tourner les pouces faute de clients. « Ici, rien ne va plus. Les touristes ne viennent presque plus », confesse Ousmane Ndiaye. Selon ce jeune homme, il y a seulement quelques années, il arrivait qu’il rentre le soir avec un gain quotidien de 100.000 à 150.000 FCfa. Aujourd’hui, regrette-il, il lui est difficile d’avoir 5000 FCfa par jour.
Même son de cloche chez Mamoudou Diallo qui informe qu’il y a des jours où certains marchands ne viennent pas au travail parce que n’ayant pas de quoi payer le transport. « Depuis 2000, les choses vont de mal en pis. Toutefois, nous espérons que la situation va changer avec la volonté affichée par les nouveaux dirigeants », laisse-t-il entendre. M. Diallo reproche aux rabatteurs d’avoir créé une situation d’insécurité qui fait fuir les étrangers. Pour sa part, Momar Diaw, président du Village artisanal, plaide pour un arrêt des visas afin que l’on puisse mieux faire la promotion de la destination Sénégal.
A SALY, LES RABATTEURS SONT INDEXÉS
Entre insécurité, insalubrité et érosion côtière, le tourisme est en chute libre depuis quelques années à Saly. En attendant que la situation change dans cette cité balnéaire connue pour ses bains de soleil et ses belles plages, les acteurs, sous l’énergie du désespoir, listent les maux qui assaillent le secteur.
En ce mardi, le jour s’est levé sans les doux premiers rayons du soleil. Les amas nuageux qui se forment et se déforment à l’horizon ont fini par créer une lenteur dans la transition entre le jour et la nuit. Pourtant, une bonne partie de cette cité balnéaire s’est déjà réveillée. La vie a repris son train-train quotidien. Les lieux d’attraction sont envahis par une ambiance festive. Comme étouffée durant la nuit, la cité respire. Tout le contraire dans les hôtels ou autres lieux touristiques. Dans ces endroits, règne une ambiance glaciale.
Une situation qui traduit, à bien des égards, toute la déliquescence que vit le secteur touristique dans la localité où, jadis, l’activité était très développée. Principale activité économique de la zone, le tourisme est devenu, depuis quelques années, moribond, au grand dam des populations, hôteliers, vendeurs d’objets d’art ou artisanaux...
Connu pour ses belles plages, son climat généreux pour une bonne période de l’année, ses bains de soleil qui font rêver..., Saly, ce site paradisiaque, s’essouffle peu à peu. Un diagnostic, moins méticuleux qu’il soit, montre que ce site touristique phare, est aujourd’hui atteint de plusieurs maux. Avec la saison touristique qui vient à peine de commencer, les acteurs sont partagés entre espoir et pessimisme. L’angoisse semblant être le sentiment le mieux partagé.
La sécurité en question
Entre insécurité, insalubrité et problèmes environnementaux, le site perd de plus en plus son lustre d’antan. « Ici, le touriste ne peut se promener sans être agressé, en plus, l’environnement n’est plus propice », lance un gérant d’hôtels qui a voulu garder l’anonymat.
Pour Emilie Diouf, la trentaine, travaillant dans le secteur des Tic, la situation difficile vécue l’année dernière, avec une nette baisse du nombre de visiteurs, fait craindre le pire cette année. Mais, le jeune homme, un tantinet optimiste, rêve du miracle pour la haute saison qui vient de commencer.
Un tour dans un célèbre hôtel permet d’avoir une idée du début moins fastueux de la saison touristique. Ici, des vigiles veillent au grain. Un silence inhabituel que perturbent, par moment, un ou deux visiteurs, enveloppe cet endroit voluptueux. A la réception, l’on ne s’impatiente pas d’attendre des clients qui, depuis quelque temps, sont devenus rares.
A Saly, le problème de sécurité des touristes est sur toutes les lèvres. Nombreux sont ceux qui soutiennent que l’insécurité a porté un coup fatal au secteur. Les rabatteurs sont pointés du doigt. On leur reproche d’être les seuls responsables de cette situation. « Les touristes qui viennent ici finissent par ne plus vouloir sortir de leur loge. Ils sont harcelés à tout bout de champ. C’est pourquoi, ils reviennent difficile- ment après être partis. Les seuls responsables de cet ennui restent les rabatteurs », tranche le sieur Diaw, vendeur d’objets d’art.
Au village artisanal de Saly, une chasse aux rabatteurs s’organise quotidiennement. « Les racoleurs n’osent pas mettre les pieds ici. Nous avons pris la décision ferme d’y faire face », déclare Momar Ndiaw.
Selon Boly Guèye, président du syndicat d’initiative du tourisme du département de Mbour, face à la situation économique difficile et la baisse du nombre de clients, beaucoup d’hôtels ont mis la clé sous le paillasson. Cet état de fait, poursuit- il, a créé, du coup, l’asphyxie d’une bonne partie des activités annexes.
« Je pense que pour la promotion du secteur, il faut travailler au renforcement de la sécurité », plaide M. Guèye. A l’en croire, l’autre écueil du tourisme à Saly reste l’érosion côtière qui a fini par engloutir une bonne partie des plages. Pour lui, la solution passerait, entre autres, par la création d’un comité de développement touristique local et un soutien aux entrepreneurs touristiques nationaux.
La lutte avec frappe, qui fait la fierté de certains Sénégalais et qui drainent beaucoup d’argent et de monde, semble tirer vers sa fin. La quasi totalité des grands promoteurs sont en train de quitter le milieu.
Quel avenir pour la lutte avec frappe au Sénégal ? Au vu de sa marche actuelle, on est tenté de dire que le ciel s’assombrit, surtout au-dessus des ténors de l’arène. Après les grands sponsors, ce sont les plus grands promoteurs de l’arène qui lâchent la lutte.
Le promoteur Aziz Ndiaye a annoncé dans un journal de la place que le combat Gris Bordeaux de l’écurie Fass contre Tyson de l’écurie Bul Faale est le dernier combat de sa carrière de promoteur. Il a tenu à jurer sur son marabout qu’il en avait fini, même si les raisons qu’il a avancées ne sont pas claires. “J’ai atteint mes limites et je crois que je n’ai plus rien à prouver dans la lutte”, a-t-il simplement dit.
Mais qu’en-est-il réellement ? A part Aziz Ndiaye qui est le promoteur phare de ces deux dernières saisons, il faut noter aussi le silence assourdissant du promoteur Luc Nicolaï. A la suite d’une condamnation dans une affaire de trafic de drogue, le promoteur de la Petite Côte qui avait ficelé toutes les grandes affiches de 2012 n’a plus refait signe de vie dans l’arène.
Plus d’affiches montées, plus de sortie dans la presse. Rien ! Luc Nicolai s’est enfermé dans un silence incompréhensible. Sa structure ne s’active plus dans la lutte. Depuis sa condamnation, il n’a pas ficelé de combat.
Et que dire de Gaston Mbengue? Le “Don King” de l’arène, le doyen de tous ces jeunes, a été le premier à faire grimper les cachets à 100 millions. Aujourd’hui, il peine à s’en sortir. Le promoteur doit à Ama Baldé un reliquat de 15 millions F Cfa, depuis le 1er juin 2014. Il avait annoncé son retrait de l’arène il y a de cela quelques années.
Depuis lors, il continue à monter des chocs, mais plutôt avec des lutteurs espoirs. Il ne titille plus les ténors, arguant que ceux-ci sont trop exigeants côté cachets. Et depuis quelques années, Gaston Mbengue est de plus en plus foot. Président du Ndiambour de Louga (Ligue 2), il a intégré la Commission marketing de la Fédération sénégalaise de football (FSF).
Et parmi les jeunes promoteurs, Assane Ndiaye de Baol Productions a été reconnu coupable dans une affaire de visas. Il a utilisé des contrats du Comité national de gestion de la lutte (CNg) pour trouver des visas à des lutteurs qui ne le sont pas en réalité. La sanction de l’instance n’est pas encore tombée mais il risque la suspension.
A cette période de l’année, les grandes affiches étaient déjà ficelées. Mais toujours rien. Les amateurs attendent toujours de voir leurs lutteurs engagés dans des combats. Les lutteurs qui ont plus à perdre dans ce retrait des promoteurs sont sur le qui-vive.
MALICK THIANDOUM, CHRONIQUEUR DE LUTTE À LA SEN TV
“On va vers des saisons extrêmement difficiles, surtout pour les Vip de l’arène”
“La lutte ne va pas vers la fin, mais vers un avenir incertain. C’est clair qu’il y a des difficultés qui font que les promoteurs sont en train de battre en retraite. Déjà, il y a eu Luc Nicolaï qui a été condamné et qui à coup sûr va perdre sa licence de promoteur. Avant Luc Nicolaï, il y a eu Alioune Petit Mbaye, mais aussi Palla Mbengue qui s’est retiré de la lutte depuis presque deux ans et qui avait à l’époque annoncé des lendemains sombres pour la lutte. Assane Ndiaye, avec le problème qu’il a eu dernièrement, va certainement vers des difficultés. Sans compter que Aziz Ndiaye a également annoncé son départ après le combat Gris Bordeaux / Tyson. Donc on va vers des saisons extrêmement difficiles et surtout pour les Vip de l’arène. Déjà, il n’y avait pas assez de promoteurs pour ficeler des combats chocs, on les compte sur les bouts des doigts. Il y a Gaston Mbengue et Aziz Ndiaye qui le faisaient. Prince a essayé cette année d’élever la barre, mais il se trouve actuellement dans des difficultés financières. C’est vous dire que l’année prochaine, il ne va pas monter de grosses affiches. Et que les lendemains de la lutte sont sombres et pas enchanteurs.
“Il faudrait que les lutteurs revoient leurs prétentions financières à la baisse”
Pour que les choses reviennent à la normale, la première chose que les acteurs de la lutte doivent faire, c’est de s’asseoir autour d’une table et faire un diagnostic sans complaisance de la situation. Pourquoi ne pas faire les états généraux de la lutte ? En deuxième position, il faudrait que les sociétés nationales, les sponsors, reviennent également pour appuyer les promoteurs dans les montages de certaines affiches. Et pour finir, il faudrait que les lutteurs revoient leurs prétentions financières à la baisse puisque les promoteurs ne peuvent plus payer certains cachets. Il faut que toutes ces conditions soient réunies pour que l’arène retrouve son lustre d’antan, sinon on va vers une crise sans précédent de la lutte.”
Sammy Baloji, est un artiste photographe congolais. De passage à Dakar dans le cadre de ses recherches, Sammy allie esthétique et art dans ses œuvres. Au Sénégal, il s'est intéressé à l'architecture dans les quartiers de Ouakam. Entretien…
Quel est l’objet de votre visite au Sénégal ?
C’est une visite qui entre dans le cadre d’un projet qui m’intéresse, à savoir les scénographies urbaines. La première fois, c’était en décembre 2012 où j’ai participé à une résidence dans le village de Ouakam. C’est un projet monté par une association basée en France avec Premier temps, une compagnie de danse contemporaine installée à Dakar. L’idée est d’inviter une quinzaine d' artistes plasticiens, chorégraphes, photographes, écrivains, entre autres, pour créer et mener des actions artistiques en lien avec la communauté dans laquelle ils se sont installés pendant un mois. Personnellement, je m’étais intéressé à ce projet de résidence, à la manière dont la transformation se ressentait dans la ville et dans la partie Ascena à Ouakam. Et c’était impressionnant de voir tous ces projets d’habitation, de construction qui envahissaient carrément la ville, ce qui était assez émouvant. C’est après que j’ai compris, que c’était un village et qu'il y avait une communauté Lébou qui y était installée. L’idée était de suivre cette transition.
Est-ce que c’est ce même projet qui se poursuit ?
Oui, mais cette fois en faisant beaucoup dans la collaboration avec un architecte local. La première fois, j’ai fais des recherches, des prises de vue, une première tentative, un véritable travail de recherche, mais cette fois-ci, c’est toujours intéressant de recourir à un architecte pour avoir un point de vue extérieur. Je suis sur cette évolution, cette lecture.
Quel est le regard du photographe que vous êtes sur cette évolution?
Je suis dans une étape de recherche et de toutes les façons cette transformation est assez choquante et captivante en même temps. Je pense que photographiquement parlant, ces espaces de transition sont toujours très impressionnants et cela donne de très belles images mais, ils ne s’arrêtent pas là. Il faut après, voir comment la population sur place réfléchit? Comment elle reçoit cette transformation? Quels sont les différents acteurs qui y interviennent? Je suis là que pour observer et rendre compte artistiquement.
L’amour pour l’architecture ressort le plus souvent dans vos prises. Est-ce un choix personnel?
Ce n’est pas l’architecture qui occupe une place importante dans mon travail. Je fais plus de rapprochements qui sont conceptuels mais qui sont aussi vrais. Car, ce qui n’est pas de l’architecture peut être considéré comme notre corps, à savoir la manière dont nous pensons, dont nous parlons, etc. L’architecture en tant que bâti, n’est pas mon premier intérêt mais comment l’individu réagit avec cet édifice. Mon premier point d’entrée, c’est d’abord l’individu et les relations qu’il a avec l’environnement.
Vous faites beaucoup de recherche. Et vous aimez faire ressortir des similitudes avec ce qui se passe dans votre pays et d’autres continents?
Je viens du Congo, de Lubumbashi qui est la deuxième ville du pays après la capitale. J’ai grandi dans cette ville et pendant 26 ans sans jamais bouger. J’ai eu l’impression du fait que, je n’ai pas quitté durant toute cette période mon pays et aussi par rapport à toute la réalité de mon pays avec la crise, les moments de rébellion, que ma ville était un coin reculé du monde. Ce qui n’est pas forcément vrai. Parce que, quand on voit l’influence qu’à la musique congolaise au niveau de l’Afrique et au niveau mondial, on commence à se poser autrement des questions et ça devient un point de curiosité. Quand on voit l’uranium qui est servi à la bombe atomique venir de Lubumbashi, quand on regarde l’assassinat de Lumumba avec l’implication des Etats Unis qui y étaient pour quelque chose, quand on regarde toutes ces régions là, on se rend compte, où que l’on soit, qu’on reste lié au monde. Il faut arrêter de s’enfermer mais plutôt s’ouvrir à la mondialisation. Creuser et apporter sa valeur. Aujourd’hui, je suis à Dakar où je compte travailler et apporter ma contribution sur les questions de changement et de mondialisation.
NADINE GORDIMER EST MORTE
PRIX NOBEL DE LITTERATURE, MILITANTE DE LA LUTTE ANTI-APARTHEID
“J’ai lu tous les romans non interdits de Nadine Gordimer et ai appris beaucoup sur la sensibilité des Blancs libéraux” (opposés à l’apartheid), a écrit Nelson Mandela dans son autobiographie, relatant ses vingt-sept ans passés en prison. C’est cette voix forte de la lutte anti-apartheid qui vient de s’éteindre.
L’écrivaine sud-africaine Nadine Gordimer, est décédée dimanche à l’âge de 90 ans, dans son sommeil, à son domicile de Johannesburg, a annoncé hier lundi, un communiqué de la famille. Composée de quinze romans, quelque 200 nouvelles et de nombreux essais et critiques, son œuvre dont la plupart avait été interdite sous l’apartheid, dénonce avec force la politique d’apartheid de son pays.
«Ses plus grandes fiertés», rappellent ses enfants, «n’était pas seulement d’avoir reçu le prix Nobel de littérature en 1991, mais aussi d’avoir témoigné (à un procès) en 1986, contribuant à sauver la vie de 22 membres de l’ANC, tous accusés de trahison». Membre du Congrès national africain (ANC) depuis 1990, elle fut longtemps l’une des dirigeantes du Congrès des écrivains sud-africains (COSAW). Elle a continué à écrire après l’avènement de la démocratie en 1994, n’hésitant pas, malgré son grand âge, à pointer les défauts du nouveau pouvoir des successeurs de Nelson Mandela.
“Le slogan de l’ANC, Une vie meilleure pour tous, n’est pas allé sous terre !” , avait-elle indiqué en 2012, quelques semaines après que la police a abattu 34 grévistes à la mine de Marikana (nord). Elle s’était récemment opposée à une loi restreignant la diffusion d’informations classifiées, jugée liberticide par la presse sud-africaine. Née le 20 novembre 1923, de père juif lituanien et d’une mère chrétienne anglaise, chrétienne elle-même, Nadine Gordimer vit une enfance conformiste dans le milieu petit-bourgeois de Springs, cité minière de la banlieue de Johannesburg.
Débordant d’amour pour sa terre qu’elle n’a jamais voulu quitter même aux pires moments de l’apartheid, elle incarnait la conscience littéraire de la littérature sud-africaine. Proche des avocats de Nelson Mandela, elle fut l’une des premières personnalités que l’icône de la lutte anti-apartheid a demandé à voir après sa libération de prison en 1990.
PAR SIRÉ SY
CONCILIER CULTURE ET INDUSTRIES CULTURELLES
NOUVELLE SOCIÉTÉ DE GESTION COLLECTIVE DU DROIT D’AUTEUR ET DES DROITS VOISINS
Dans les espaces anglo-saxons, on parle d’Industries culturelles. Dans les espaces francophones, on parle de Culture. Et vous avez toute la différence dans les angles d’approche, de perception et de finalité. Dans les espaces francophones, la Culture est toujours restée dans ses dimensions (l’œuvre de création ou la créativité) de sens, d’essence et de quintessence, sur fond d’idéologie et/ou de religion. Parce que justement, largement et longtemps influencée par les écoles de l’Art abstrait et du Pop Art.
Dans les espaces anglo-saxons, en plus de ses dimensions Entertainment (divertissement-loisir) et Edutainment (éducation-formation), la Culture est d’abord et avant tout, Business. Tant qu’il est vrai dans ces environnements-là, l’Art est (aussi) économie et l’Economie est (aussi) art. Parce qu’articulé sur de véritables ‘’business models’’ économiques et adossé à de véritables marchés d’art et des industries culturelles.
Culture et Industries culturelles
Ainsi, ce sera à la nouvelle Société de Gestion Collective du Droit d’auteur et des Droits voisins, de concilier, à travers une dialectique et une synergie, deux approches à priori contradictoire mais en réalité complémentaire parce qu’inclusives : Culture et Industries culturelles.
Pour que nos pouvoirs publics ne regardent plus le secteur de la Culture comme un secteur de sinistralité- là on est dans le social-, mais comme un secteur à haute profitabilité économique, avec un fort potentiel de retour sur investissement et une niche d’employabilité.
Pour que les acteurs du secteur intègrent (enfin) la dimension de la mondialisation et de l’économie globalisée dans leurs œuvres de création et de créativité, qui devraient les amener à tirer le meilleur profit des outils-monde (la technique, la technologie et le Marché) d’une part et d’autre part, à adosser leurs créations et leurs créativités sur de véritables ‘’business models’’ économiques.
Pour que, au Sénégal, l’on puisse passer vers une révolution conceptuelle et symbolique qui fera qu’on ne parlerait plus de ministère de la Culture mais de ministère de la Culture et des Industries culturelles.
Ce sera à cette nouvelle société, de définir et de porter la stratégie ‘’vaisseau amirale’’ pour l’avènement de véritables industries culturelles au Sénégal. Ce sera à elle aussi de donner le ton à un début de structuration de notre marché des arts et des industries culturelles. Ce sera à elle également de faire de sorte que nos artistes et créateurs ne soient plus vus comme seulement des amuseurs publics, mais aussi comme une catégorie socio-professionnelle dont les membres vont vivre financièrement de leur art, génie et talent.
Ce sera enfin elle qui devra, par ses résultats sur le terrain, démontrer aux décideurs, dirigeants et acteurs, que la Culture et ses industries, sont de véritables relais de croissance comme le sont les secteurs de l’agro-alimentaire, des télécommunications, des mines, de l’agriculture, du tourisme, etc.
Au demeurant, si on commençait par calculer le Pib culturel dans le Pib national du Sénégal. Les Industries culturelles ont contribué à hauteur de 4% au Pib mondial en 2012. Au Canada, il a été de 3,8% en 2012. En France, il a été de 3,2% en 2012. Aux USA, les industries culturelles représentent en termes de valeur ajoutée au Pib, un volume financier de 400 milliards de $ en 2012.
Siré Sy est économiste-consultant, Stratégies et Industries culturelles
Dakar, 13 juil (APS) – L’enseignant-chercheur Ibrahima Wane a reçu samedi le grade de docteur d’Etat ès lettres de l’Université Cheikh Anta Diop pour sa thèse intitulée : ‘’Chanson populaire et conscience politique au Sénégal : l’art de penser la nation’’, un travail scientifique qui lui a valu la mention ‘’très honorable’’ et les félicitations du jury.
Le nouveau docteur d’Etat ‘’fait découvrir, dans sa thèse, comment des textes musicaux engagés contribuent à l’émergence ou à la consolidation d’un certain nombre de valeurs de civilisation comme la bravoure, le sens de l’honneur, la dignité, l’éthique, l’endurance...’’, a souligné le président du jury, le linguiste et grammairien Moussa Daff.
‘’En ayant campé votre texte entre 1960 et 1985, vous mettez en exergue deux figures politiques : les présidents Léopold Sédar Senghor et Abdou Diouf. On voit comment tous ces éléments sont organisés et comment l’Etat, par le biais de la chanson populaire, devient une instance républicaine qui fixe les règles sociales’’, a-t-il indiqué.
Le professeur de lettres Bassirou Dieng a pour sa part qualifié Ibrahima Wane d’un ‘’des plus brillants chercheurs de sa génération’’, soulignant qu’avec lui ‘’il est beaucoup plus question de partage que d’autre chose’’. ‘’Il est capable de fonder une école, de bousculer les frontières de la recherche, s’il en a le vouloir’’, a affirmé M. Dieng.
Dans son travail, Wane propose une lecture de l’histoire politique du Sénégal à travers la chanson populaire, analysant 84 compositions de 47 auteurs, dans la période allant de 1960 à 1985.
Il y parle notamment de la transition des groupes folkloriques à la formation des premiers orchestres, des événements culturels qui ont servi ‘’d’embrayeurs’’ – selon Bassirou Dieng -, comme le premier Festival mondial des arts nègres (avril 1966), la place centrale de la chanson dans l’activité de l’homme politique, le rôle des clubs culturels surtout dans les formations politiques de gauche alors dans la clandestinité.
Le professeur Amadou Ly a, lui, signalé que ‘’cette thèse fait le point sur une question d’ordre littéraire qui a une portée sociopolitique fondamentale qu’elle éclaire’’, regrettant cependant l’absence d’annexes telles que des photographies ou des transcriptions de quelques chansons en notes musicales.
Il a salué le travail sur le contenu idéologique et social des chansons politiques, l’esprit de recherche d’Ibrahima Wane qui, a-t-il dit, ‘’nous met en face d’une partie très importante de notre héritage artistique et de ce que notre génération va léguer, parce qu’il s’agit là d’une étude sur les dernières productions de l’oralité’’.
Dans la présentation de son travail, Ibrahima Wane a signalé que le parcours qui a mené à sa thèse d’Etat a commencé il y a une vingtaine d’années, lorsqu’il s’est intéressé à la littérature orale à travers les enseignements de Bassirou Dieng. Ainsi a-t-il été conduit à ‘’mettre à distance les signes, les discours qui peuplent (son) quotidien’’ et à apprendre à ‘’lire autrement (son) univers’’.
Le fait de baigner dans cet univers où évoluent Amade Faye, Amadou Ly, Bassirou Dieng, qu’ils considèrent comme ses maîtres, l’a conduit à ce travail de recherche et d’analyse, avec l’objectif de ‘’faire autant qu’eux en contribuant à ouvrir quelques volets du champ qu’ils ont initié’’, a-t-il expliqué.
Pour cette thèse de 621 pages – en deux volumes (une partie théorique et un corpus de textes en pulaar et wolof, traduits en français) – le chercheur procède à une étude du contexte de genèse de ces œuvres, lesquelles apparaissent, selon lui, ‘’à la fin des années 1960 en contrepoids du discours officiel’’.
Ibrahima Wane relève en conclusion que la chanson constitue un lieu de symbiose de différents héritages, signalant que la langue dans laquelle elle est dite est une vision du monde qui réarticule le message. Le nouveau docteur d’Etat analyse aussi les questions de la modernité et du développement en soutenant que la première ‘’n’est pas contradictoire à un retour à soi’’.
‘’C’est une excellente thèse, d’une grande facture. Ibrahima Wane a produit un bon texte, uni, organisé et cohérent, qu’on lit avec beaucoup de plaisir. La langue est claire. Les insuffisances sont plus liées aux contraintes de temps qu’à votre valeur intrinsèque’’, a dit le président du jury, le linguiste et grammairien Moussa Daff, avant la délibération.
La soutenance de cette thèse d’Etat – dirigée par le professeur de lettres de Bassirou Dieng – s’est déroulée, pendant un peu plus de trois heures, à l’amphithéâtre de l’Ecole des bibliothécaires, archivistes et documentalistes (EBAD).
Outre MM Daff et Dieng, le jury comprenait le linguiste Momar Cissé, le philosophe Ibrahima Sow et le professeur de littérature africaine Amadou Ly, qui ont tous donné leur appréciation et critique.
'' NOUS AVONS L’OBLIGATION DE FAIRE EN SORTE QUE LES BÂTIMENTS DE GORÉE TRAVERSENT LES TEMPS''
ANNIE JOUGA, ARCHITECTE
Alioune Ndiaye et Kpénahi Traoré |
Publication 13/07/2014
Sous sa double casquette d’architecte et maire adjointe, Annie Jouga analyse, dans cet entretien, la menace qui pèse sur le patrimoine urbain de l’île de Gorée. Selon elle, il y a obligation de faire en sorte que les bâtiments traversent les temps.
Comment se porte aujourd’hui le patrimoine urbain de Gorée ?
Cela dépend de quel côté vous le regardez. Si vous regardez le littoral qui, pour moi, est vraiment le patrimoine urbain de Gorée, le littoral se porte très mal. Il est particulièrement endommagé par les forces de la nature, la mer, la houle ; mais aussi parce que l’homme ne fait pas le travail qu’il doit faire pour se protéger des forces de la nature.
Quand on est dans un pays où il y a des cyclones, et qu’on construit toujours sans tenir compte de ce fait, on aura à chaque fois des maisons qui vont se casser la figure. Le problème de Gorée, c’est cela. Les colons avaient trouvé quelque chose qu’ils appelaient « les batteries » pour protéger le littoral, notamment la batterie de l’ouest qui fait face à la partie Est de Dakar.
Sur cette partie, il y avait une batterie qui avait été construite il y a très longtemps et qui a été réhabilitée dans les années 1978. Depuis, on la regarde, on la voit s’écrouler. Cette batterie devait atténuer la puissance de l’eau et réguler les marées. Elle est désormais une brèche. Il y a de gros trous, elle est complètement cassée.
C’est cela qui, depuis 30 ans, affaiblit toute cette partie. Si on l’avait régulièrement entretenue, je pense qu’on n’aurait pas eu tous les problèmes rencontrés le mois dernier avec un pan de mur de la mosquée qui est tombé.
On n’aurait pas eu également cette eau au milieu de la cour du Relais de l’espadon. Et l’eau n’est pas le bon ami du bâtiment. Du côté de Mariama Bâ, c’est pareil, il y a des agressions de la mer. Pourtant, Mariama Bâ est du côté Est de Gorée, moins agressé, mais c’est à la pointe.
Mais il y a des travaux à Mariama Bâ...
En ce moment, ils sont en train de faire des travaux. Nous sommes au courant parce que c’est sur le territoire, mais nous ne sommes pas au fait du dossier. C’est géré par l’Education nationale, donc nous ne connaissons pas la nature réelle des projets. Est-ce qu’ils vont prendre en compte le littoral ?
C’est un cas compliqué, parce qu’on ne peut pas s’occuper du littoral en un point A et négliger tous les autres points. Un littoral, ça se conçoit globalement. On ne peut pas réparer un côté et laisser le reste. C’est vraiment un travail d’ensemble.
C’est comme l’étanchéité dans une toiture. Si vous pensez que vous allez vous contenter de faire un petit travail là où vous avez l’impression que ça coule, vous vous mettez le doigt dans l’œil parce que le traitement de l’étanchéité, il faut l’entendre globalement et non partiellement. C’est la même chose avec le littoral, et cette situation nous dépasse car c’est une question de milliards. Et moins on s’en occupe, plus les milliards vont être importants.
Gorée étant classée patrimoine mondial de l’Unesco, ne fait-on pas face à une interdiction de reconstruire les bâtiments ?
Non, pas du tout, cela n’a rien à voir. Au contraire, on vous classe patrimoine mondial et on vous dit que vous avez une responsabilité de classement pour que ça reste patrimoine mondial, sinon cela devient après un patrimoine en péril. Vous êtes classé patrimoine mondial et il y a des exigences. Vous devez faire en sorte de le rester. Et pour cela, il faut réhabiliter et protéger.
Est-ce le travail de l’Etat ?
C’est le travail de tout le monde. Nous, nous sommes un démembrement de l’Etat et nous devons bâtir notre politique de développement local sur la réhabilitation dans les règles. Il faut le faire dans les règles parce que quand on ne réhabilite pas dans les règles, on va avoir des problèmes. C’est une île, si on construit avec du béton armé, on va vers des problèmes. Il faut construire avec de la pierre basaltique.
Il y a des bâtiments importants qui sont habités par les populations. C’est le cas de William Ponty...
Ce sont, comme je les appelle, les grands ensembles de Gorée. Ce sont de belles maisons qui ont une histoire ; tout a une histoire à Gorée. Par exemple, William Ponty, et aussi l’ancien hôpital ; c’est le premier hôpital de Gorée et même du Sénégal. Dans l’histoire, c’est très important. Effectivement, il y a des gens qui habitent là-dedans.
Est-ce normal de laisser les populations habiter dans un bâtiment classé patrimoine mondial au risque de porter atteinte à son intégrité ou de le démythifier ?
Ce n’est pas normal, de toute façon, de laisser les bâtiments dans cet état. Je pense que nous avons l’obligation de faire en sorte que ces bâtiments traversent les temps. Ce sont des bâtiments qui datent du XVIIIe siècle, et ils peuvent encore traverser des siècles si on s’en occupe dans les règles de l’art. Donc c’est anormal de les laisser dans cet état.
Maintenant, à qui imputer la responsabilité ? En général, tous les grands ensembles sont la propriété de l’Etat. William Ponty, l’ancien hôpital, le Relais de l’espadon qui est le symbole de la colonisation française puisqu’il a été construit pour être le palais du Gouverneur. De ce fait, c’est très symbolique. L’architecture coloniale est une belle construction, donc ils devraient être réhabilités.
Mais que dire des populations qui investissent les lieux en soutenant qu’elles n’ont pas de titres fonciers à Gorée et que la solution est de réadapter ces bâtiments et d’y habiter ?
Il ne faut pas que les tuiles leur tombent sur la tête. Ce n’est pas fait dans les règles de l’art, d’où l’intérêt de considérer que c’est un problème qu’il faut considérer comme une priorité et trouver les bons mécanismes pour que le bâtiment ne soit pas victime de cette non réhabilitation. Il y a des solutions. On n’est pas le seul pays, Cuba a réhabilité la vieille Havane sur 20 ans et ça marche. Même si on n’est pas Cuba, on peut trouver des mécanismes en fonction de là où on est.
Mais réhabiliter ces bâtiments ne fera-t-il pas perdre à Gorée son authenticité ?
La réhabilitation veut dire qu’on évite justement que ça s’écroule, on le maintient, c’est normal. C’est aider les bâtiments à vieillir correctement, avec dignité. Maintenant, en parlant d’authenticité, il y a un règlement d’urbanisme à Gorée qui est, à mon avis, peut-être pas stricte dans certains domaines et trop stricte dans d’autres.
Et si les habitants prennent l’initiative de réaménager à leurs goûts ?
Ils le font plus ou moins parce qu’ils sont, pour la plupart, sans droits ni titres. Ils se débrouillent pour le faire ; mais c’est évident qu’en voulant sauver son petit toit, on déroge à la règle et ainsi on dérègle les choses. Il est plus préférable que ce soit dans l’ensemble. Il faut qu’on arrête de faire la politique de l’autruche et regarder les choses en face. Il faut y mettre tous les moyens techniques et voir à qui va profiter la réhabilitation. Gorée est un produit qui fait vendre le Sénégal. Plus les gens seront correctement installés, plus on aura l’impression que le niveau de vie monte, et les gens se sentiront rassurés.
S’il y a aujourd’hui des projets de réhabilitation des bâtiments de Gorée, pensez-vous que ces populations seront prêtes à collaborer et quitter les lieux ?
Personnellement, je pense qu’il faut qu’elles collaborent si elles veulent compter, parce que ça appartient à l’Etat et je ne vois pas pourquoi on les donnerait à des privés, y compris les populations locales. Il n’y a pas de raison qu’on les donne aux populations. Par contre, on peut louer. Je ne vois pas pourquoi la population goréenne, quelle qu’elle soit, soit logée gratuitement. Il faudra trouver des moyens afin que ces bâtiments puissent générer des revenus pour pouvoir être entretenus. C’est tout l’enjeu de travailler ensemble, l’Etat, la collectivité locale et les populations, pour y arriver, et moi j’y crois.
Peut-on donc dire que la vétusté de ces bâtiments constitue un danger pour la transmission de l’histoire ?
Si on reste comme ça d’ici 5 ans, la mosquée va s’écrouler, le relais de l’espadon aussi. Si on continue dans ce sens, il va y avoir des catastrophes. Depuis le mois de juin, nous n’avons pas d’électricité, nous fonctionnons avec un groupe électrogène.
On a un câble électrique qui passe sous la mer, il y a tellement de houle que quand il s’abîme, on n’arrive pas à le réparer. Ce qui fait qu’il n’y a pas d’électricité directe. Ce sont de vrais problèmes.
GORÉE, ÎLE-MÉMOIRE EN PÉRIL ?
PATRIMOINE URBAIN
Alioune Ndiaye et Kpénahi Traoré |
Publication 13/07/2014
L’île de Gorée est la mémoire de la traite atlantique et ce qui reste de cette période sombre pour l’homme noir. La maison des esclaves, témoin de ce passé douloureux, en est l’un des symboles les plus visités par les touristes. Ce site, inscrit sur la liste du patrimoine mondial depuis 1978, est protégé au titre des monuments historiques. Mais, aujourd’hui, on assiste à la dégradation des édifices publics de l’île, certains servant même d’habitation. Un phénomène qui peut constituer un frein au processus de transmission de la mémoire de Gorée et de son patrimoine urbain.
L’église Saint-Charles Borromée, le Fort d'Estrées (Musée historique du Sénégal), l’Hôtel de ville, la Maison des esclaves, la Mosquée de Gorée, le Musée de la femme Henriette Bathily, la Place du Gouvernement, la Place du marché, le Quai des Boucaniers, l’école des jeunes filles Mariama Bâ, ou l’école des « anciens présidents » William Ponty ..., ce sont autant de bâtisses qui font le charme de Gorée.
L'île-mémoire est plantée dans l'azur profond de l'océan Atlantique, à quelques encablures de Dakar. Une petite île attachante dont les vieilles maisons fleuries de bougainvilliers surplombent une poignée de sable fin et baignée d'eau claire. Gorée se visite à pied et une journée s'avère nécessaire pour l'explorer à fond. D’où cette attraction touristique singulièrement en période estivale.
Ce haut de lieu de mémoire est devenu depuis 1978 patrimoine mondial de l’Unesco. Le passé de l’île est souvent assimilé au souvenir des souffrances et traumatismes subis par l’Afrique et sa diaspora à travers l’esclavage et la traite atlantique.
Cette île d’environ 1.200 habitants reçoit chaque année des milliers de visiteurs venant de toutes les contrées. Mais, l’Etat du Sénégal est aujourd’hui face à un grand dilemme en ce qui concerne la sauvegarde de la mémoire collective de Gorée. Faut-il laisser les monuments et constructions coloniales de l’île tels qu’ils sont, sous le poids de l’âge, pour garder leur authenticité et tout ce mythe autour, ou bien faut-il les rénover pour une plus grande longévité, tout en démythifiant l’île, la désacralisant?
DEVENIR DE L’ÎLE
Assis sous le grand arbre de la place du gouvernement, Abdoul Aziz Ndiaye regarde passer les nombreux visiteurs qui viennent de débarquer de la chaloupe. Aussi, réfléchit-il sans doute au devenir de son île natale. « Nous, en tant qu’administration communale, nous ne pouvons pas rénover parce que nous n’avons pas les moyens. Ce sont des projets de l’Etat.
Nous pouvons avoir des partenaires étrangers pour nous aider à refaire les maisons et les attribuer aux gens parce que nous n’avons pas de patrimoine foncier à Gorée », explique A. A. Ndiaye. Il ajoute : « La commune n’hérite de rien par rapport aux autres communes de Dakar. Nous sommes juste un petit périmètre, c’est tout. Nous aimerions que l’Etat nous aide à rénover toutes ces maisons même si c’est pour payer un loyer symbolique ».
Ces bâtiments, ô combien importants pour la transmission de la mémoire collective aux générations futures et qui ont chacun une histoire bien définie dans le processus du commerce et de la traite négrière, ne tiennent plus. Et plus grave encore, certains habitants de l’île en ont fait leurs domiciles. C’est le cas de l’ancienne École normale William Ponty, où près d’une centaine de personnes résident actuellement.
Abdoul Aziz Ndiaye, surveillant de plage à la retraite qui loge dans ce bâtiment, juge ce phénomène d’indispensable. « J’habite dans cette ancienne école depuis maintenant 6 ans. Nous sommes obligés de rester ici car nous savons tous qu’il n’y a pas d’espace où construire à Gorée », déplore l’ancien agent de la ville de Dakar. « Ma grand- mère a fait la lessive avec Houphouët Boigny à William Ponty », se targue le sexagénaire.
Ce monument très représentatif dans le patrimoine urbain de Gorée ne peut même plus être exploré dans son intégralité à cause de son occupation par les populations de l’île. « C’est un plaisir et une fierté » pour Maïmouna Sarr, habitante de Gorée, de s’approprier ces locaux. Connaît-elle l’histoire qui se cache derrière ces bâtiments ? « Oui, c’est l’école des anciens présidents africains », répond-elle avec le sourire.
Transformé en habitations, ce haut lieu qui a formé de grands hommes du continent a perdu sa structuration d’origine. « Nous-mêmes nous ne savons pas où se trouvaient les salles de classe. Pourtant, quand les gens viennent, ils veulent savoir, mais nous ne savons pas », affirme-t-elle. L’île, classée patrimoine mondial de l’Unesco en 1978, semble résister à la transformation architecturale moderne.
Ces anciens bâtiments qui ont contribué à forger son identité gardent encore leurs spécificités. Ils sont debout même si l’état de délabrement, pour la plupart, reste visible et très avancé. Peintures délavées, toitures à moitié écroulées, fenêtres et portes cassées et ressoudées, les édifices publics de Gorée sont aux abois.
Malgré les stigmates du temps, certains habitants restent convaincus que les constructions en ont encore pour des années. Dans son récit qu’il veut convaincant, l’un des guides de l’île, Hamidou Ndiaye, précise que « la Maison des esclaves est faite à base de pierres rocheuses et de pierres volcaniques », ce qui lui permet de traverser les âges.
UNE ARCHITECTURE TYPIQUE
« Ces bâtiments de Gorée tiennent bien plus que n’importe quel bâtiment à Dakar parce que ce n’est pas le même type de construction. Les murs sont faits en roches basaltiques, sans fer à l’intérieur. Il n’y a que du ciment ou alors avec du matériel ancien ; c’était de la chaux et des coquillages. Le tout était d’abord mélangé avec du sable, mis dans un four avant d’être aspergé sur le mur », explique Abdoul Aziz Ndiaye.
Néanmoins, il aimerait que certaines bâtisses soient réaménagées en logements pour les habitants. Ces derniers essaient d’adapter ces maisons à leurs besoins au risque de les endommager ou de mettre leur vie en danger. Pourtant, le fait que ces constructions soient classées patrimoine mondial ne leur laisse pas la latitude d’y apporter des touches de modifications.
Et même s’ils avaient ce droit, les moyens financiers feraient défaut car une reconstruction nécessite des investissements importants surtout sur un périmètre comme Gorée. C’est pour cette raison qu’Abdoul Aziz Ndiaye lance un appel à l’Etat sénégalais.
Selon lui, la mémoire collective de la race noire qui a vécu les moments les plus sombres de son existence dans cette île risque de s’éteindre si des solutions durables ne sont pas mises en œuvre.
Pour le moment, le climat et la vétusté de ce patrimoine urbain ont pris le dessus et sont bien partis pour plonger les générations à venir dans l’ignorance totale de leur histoire, de leur culture.
À n’en pas douter, l’élève est sur les traces du maître. En moins de deux ans d’exercice du pouvoir, le président Macky Sall a déjà usé deux ministres de la Culture.
Chahuté, malmené, mal théorisé, le département de la Culture perd, à chaque changement d’équipe, non seulement de couleurs mais aussi d’appellations. Lesquelles se révèlent être, à la fin, des coquilles vides.
Il faut dire que, depuis la première Alternance intervenue avec le président Abdoulaye Wade, le département de la culture est devenu le parent pauvre du gouvernement. A chaque remaniement ministériel, celui qui se trouve à sa tête en fait les frais. Ce qui fait que le travail y est un éternel recommencement.
En effet, chaque ministre qui arrive, plutôt que de poursuivre les actions de son prédécesseur, essaie d’imprimer à la politique culturelle sa propre vision et sa marque. Conséquence, les acteurs se retrouvent dans un véritable méli – mélo… artistique, chacun essayant de tirer des avantages du nouveau ministre sans que ce dernier puisse impulser ou mettre en œuvre de grands projets.
Et même dans le cas exceptionnel où il y aurait un début d’exécution, les chantiers sont vite stoppés par un remaniement. Si Youssou Ndour avait trouvé grâce dans le cercle de quelques artistes, son successeur, M. Abdoul Aziz Mbaye, a été le ministre le plus décrié depuis bientôt dix ans.
Enfourchant le cheval de la diversité culturelle, il s’est beaucoup plus soucié de promouvoir celle-là à grand frais plutôt que d’impulser le secteur culturel dans son ensemble. Ses relations heurtées avec beaucoup de ses collaborateurs n’étaient pas non plus pour arranger les choses.
Ce qui fait que son départ de la Culture ne constitue en réalité pas une surprise pour la majorité des acteurs culturels. La surprise vient plutôt de celui qui l’a remplacé au département de la Culture.
Mbagnick Ndiaye nommé à la tête de ce qui est devenu le ministère de la Culture et de la Communication, des acteurs ont vite fait de saluer sa nomination tout en l’invitant à poursuivre les actions de son prédécesseur. Seulement voilà, le nouveau ministre de la Culture a beau être l’initiateur des journées culturelles « Ndef leng », la culture ne peut être assimilée à du folklore.
Or, malheureusement, la plupart de nos décideurs ont la fâcheuse tendance de reléguer la culture au rang de vestige alors qu’elle est plus que cela. Elle devrait en effet être un véritable moteur de l’économie mais, hélas, ceux qui ont été nommés à la tête du ministère de la Culture n’en ont jamais pris conscience. Sauf Youssou Ndour mais, lui, il était plus intéressé par la promotion de ses propres intérêts que par autre chose.
Connaissant mieux le mouvement sportif dont il est un grand militant, présidant, avant son arrivée au gouvernement, la Fédération sénégalaise d’escrime, inspecteur de la jeunesse et des sports de métier, M. Ndiaye, dont le seul engagement connu dans le domaine culturel est son militantisme au sein de l’association sérère Ndef leng qu’il préside d’ailleurs, M. Ndiaye, donc, devra s’appliquer à poursuivre les chantiers jamais exécutés de son prédécesseur et beaucoup échanger avec les acteurs culturels.
Lesquels ne doivent pas se résumer aux seuls laudateurs plus préoccupés par les avantages qu’ils peuvent tirer du ministre que par développement de la culture. Et Dieu sait que les chantiers culturels sont nombreux ! Ils ne sont pas titanesques pour autant. Il suffit juste d’exécuter les résolutions issues des différents colloques et autres séminaires tenus sur la question pour donner enfin à la Culture ses habits de lumière.
Autant dire qu’il s’agit juste pour l’Etat du Sénégal d’être animé de beaucoup de bonne volonté pour faire de la Culture la locomotive de notre développement économique. Surtout que nombreux sont les artistes à désespérer des politiques de l’Etat qui manqueraient, selon eux, de vision.
Sans compter que les différents changements au niveau du ministère de la Culture constituent une chape de plomb pour ce département qui a le plus souffert des différents remaniements que notre pays a connus ces 14 dernières années. Une période au cours de laquelle le Sénégal a connu au moins dix ministres de la Culture. Effarant !
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"SI J’AVAIS POURSUIVI MES ÉTUDES, ON AURAIT PARLÉ D’UN AUTRE KOUTHIA !"
Samba Sine alias Kouthia est devenu par la force des choses incontournable dans le paysage audiovisuel national. Son talent indéniable a explosé au grand jour cette année. Deux sacres aux « Sédars » et au « micro d’or » ont fini de le consacrer comme le Roi de l’Humour au Sénégal. C’est un boute-en-train conscient de la lourdeur de la tâche qui nous a accueillis à la TFM où il officie. Avec son humour qui ne le quitte jamais, il a répondu à nos questions sans user de la langue de bois. Entretien avec un as de la comédie qui refuse de se prendre au sérieux.
Le Témoin - Tu as longtemps clamé ta suprématie dans le domaine de la comédie. N’est-ce pas un peu prétentieux de ta part ?
KOUTHIA – Ecoutez, cela dépend du degré de perception des gens ! Certains pensent effectivement que je ne dois pas le dire et d’autres en rient simplement. Psychologiquement, c’est un défi que je veux lancer car cela incite les autres à se focaliser sur moi et à essayer de me surpasser. C’est une parole que je lance pour créer la polémique et me rendre compte ainsi de l’état d’esprit des autres comédiens mais cela n’a rien de prétentieux. Comme dans toutes choses, j’enregistre des réactions positives et négatives.
As-tu des conseils à donner aux jeunes qui veulent embrasser ton métier car maintenant tu es cité en exemple ?
De mon point de vue, il faut embrasser le métier très jeune. Soit c’est inné en toi ou bien les gens vont savoir que la comédie est ton domaine et ils vont t’inviter à foncer. Après, il faudra travailler dur et, surtout, bien suivre l’actualité. C’est de cette seule façon que le comédien peut durer sur le devant de la scène. Il ne faut pas se contenter de faire rire les gens car, dans chaque maison, il y a forcément un comédien. Il est très facile de raconter des histoires drôles pour détendre l’atmosphère. Donc, pour éviter de tomber dans la routine et se couvrir de ridicule, il faut se cultiver et tout faire pour s’inscrire dans la modernité. Il faut aussi disposer d’un bon plan de carrière en suivant l’actualité. C’est différent de ceux qui se contentent de raconter des blagues et de jouer au clown. Je pense que, dans notre pays, pour qu’un comédien réussisse à captiver le public et à s’inscrire dans la durée, il faut qu’il puise dans l’actualité. C’est ce qui lui permettra d’être au diapason.
Est-ce que la comédie est un métier difficile ? Y a t-il des contraintes, des avantages et des inconvénients ?
D’abord, il faut disposer d’un bon cœur et être une personne qui ne se fâche pas vite. Parce qu’il arrive souvent que l’on te colle un sobriquet à la suite d’une prestation. Il faut aussi savoir maîtriser et canaliser les bambins qui sont prompts à te chahuter. Il faut savoir se maîtriser en toutes circonstances et cela est valable pour tous les artistes et hommes publics. Cependant, je dois dire que c’est le métier de comédien qui est le plus éprouvant dans ce domaine. Le public a toujours tendance à te prendre pour un amuseur public qui doit le faire rire en toutes circonstances. Ce qui n’est pas toujours le cas car il y a des moments où on n’a pas envie de se mettre en scène. Il faut savoir faire la part des choses pour gérer toutes ces situations sinon on ne fera pas long feu.
En tant qu’autodidacte, peut-on dire que la comédie est un don chez Kouthia ?
A mon avis, il s’agit tout simplement d’un don de Dieu. En effet, depuis ma tendre enfance, j’ai toujours eu des prédispositions pour faire rire les gens. Aussi bien au niveau de mon quartier que dans les écoles, je passais tout mon temps à faire rire les gens. Je n’ai jamais voulu que les gens soient tristes autour de moi. C’est un don car je n’écris pas de texte. J’improvise tout le temps. Si je prends la peine d’écrire, c’est juste pour disposer d’un fil conducteur.
Kouthia a t-il une référence dans ce milieu ?
Il est vrai qu’à mes débuts, j’avais trouvé des artistes comme feu Sanokho sur place. Mais comme je ne fais pas beaucoup d’imitations dans les différentes langues nationales, je n’ai pas trouvé un artiste qui avait comme champ de mire la scène politique. Il a fallu débroussailler le chemin. Encore une fois, il s’agit d’un don du bon Dieu mais, vraiment, je n’ai pas de référence particulière ici au Sénégal.
Quels rapports entretiens-tu avec les personnes que tu imites ? Comment réagissent-elles ?
Il faut reconnaître que certains le prennent très mal et d’autres en rigolent. Certains ne veulent même pas me voir en peinture. Cependant, je suis conscient que tout se passe bien car les régulateurs de l’audiovisuel ne se sont jamais plaints de mes agissements. Je m’évertue à ne pas heurter certaines sensibilités et comme ces gens de la régulation sont mandatés par le gouvernement, cela prouve que je respecte les chartes.
Certains te reprochent de déraper parfois, surtout les religieux, n’as-tu pas peur de choquer par moments ? Quelles sont les limites que Kouthia s’est fixées ?
Il est vrai qu’il peut arriver que tu dérapes quelquefois. Cependant, je prends toujours en compte nos réalités et nos traditions. Nous ne sommes pas éduqués de cette façon car des vertus comme la « Kersa » (retenue) existent toujours chez nous et on ne peut pas se permettre de tout dire. Comme j’improvise tout le temps, c’est peut-être ce qui est à la base de ces dérapages mais ce n’est jamais intentionnel. J’essaye toujours de cadrer les choses car je veux toujours bien faire et faire rire les gens. Je ne suis animé que de cette seule intention, il n’y a rien derrière. Je suis aussi conscient du fait que nous ne sommes pas comme les occidentaux qui sont beaucoup plus libérés que nous.
Quels rapports entretiens-tu avec les autres comédiens comme Sanekh et Sa Ndiogou, par exemple, car il fut un temps où vos rapports n’étaient pas des meilleurs ?
Oui, c’est une réalité mais avec Sa Nekh nous avons fumé le calumet de la paix. Nous travaillons ensemble à la radio et tout se passe bien. En ce qui concerne tous les autres, je dois dire que nous n’avons pas de rapports suivis. Hormis les spectacles où l’on se retrouve et on se salue, nous ne nous fréquentons pas. Je dirais que nous ne nous rencontrons que sur les plateaux et ce n’est pas une bonne chose pour notre art. Il fut des temps où on se retrouvait au Central Park pour jouer ensemble. C’est de là qu’est né le groupe « Khakhatay Show » avec les Kader et Tony. C’est cette entente-là qui manque au Sénégal. A l’instar des pianos bars, il fallait disposer de lieux de spectacles où tous les comédiens se retrouvent pour jouer et échanger durant les week-ends. Cela permettra au public de découvrir des comédiens comme Sanekh, Sa Ndiogou etc. Cela ne pourra se faire que si nous cultivons l’entente entre nous. Il nous faut disposer de lieux pour nous produire et arrondir nos fins de mois.
A propos de moyens, peut-on dire que Kouthia est riche actuellement ?
Je rends grâce à Dieu mais il n’est pas question de richesse. Avec mon salaire, j’arrive à régler mes besoins primaires. Je paye mon loyer et j’assure la ration alimentaire du mois.
Il faut vraiment que l’on mette un peu plus à l’aise le comédien. Ce dernier passe tout son temps à cogiter et à réfléchir aux voies et moyens de faire rire les gens. Ce qui est noble et valorisant à la fois. Donc, il doit être quelqu’un de stable et à l’abri du besoin. Si, en venant au boulot, on a des problèmes de dépense quotidienne, de téléphone ou de transport, il est très difficile de dérider le public.
Comment les membres de la famille apprécient-ils ce que tu fais ?
Ils sont toujours surpris et étonnés. Ils sont fiers et très compréhensifs. Ma famille est toujours là et je vais souvent voir ma mère et mes sœurs. Les membres de ma famille me considèrent toujours comme un artiste et une star car ils sont très fiers de mes prouesses et cela leur fait énormément plaisir de disposer d’une star dans la famille (rires).
As-tu des regrets et, si oui, quelle est la chose que tu ne referais plus ?
Vraiment, je regrette de ne pas avoir poursuivi mes études car cela m’aurait permis d’améliorer mon boulot et, par la même occasion, enrichir ma carrière artistique. Je suis obligé de suivre des cours d’anglais et de parfaire mon niveau de français. Ce qui me permet de pouvoir toucher d’autres personnes qui ne comprennent pas notre langue. Cela aussi devra me permettre de pouvoir collaborer avec d’autres artistes. Je suis conscient que, si j’avais poursuivi mes études, on allait forcément parler d’un autre Kouthia.
Es-tu tenté par une carrière politique ?
Ah oui parce que je me sens bien dans ce milieu ! Il faut forcément qu’il y ait un « député culturel » à l’Assemblée nationale.
Qu’est-ce qui te fait rire ?
Ce sont mes amis je m’éclate bien avec eux.
Parle-nous de tes bons et mauvais souvenirs…
Mes meilleurs souvenirs découlent de mon séjour à La Mecque et à Médine. A chaque fois que j’entends des versets de Coran, cela me ramène aux Lieux Saints de l’Islam et à mon pèlerinage. En ce qui concerne les pires moments, j’évoquerais les batailles épiques que je livrais à certains de mes camarades durant ma tendre jeunesse. Il m’arrive de rencontrer quelqu’un à qui j’avais cassé le bras au cours d’une bagarre ou un autre à qui j’avais cassé la tête et cela me fait toujours mal. Je regrette sincèrement ces moments d’égarements car je ne suis pas un violent.
Quel genre d’homme est Kouthia, autrement dit comment te présenterais-tu ?
Comme je l’ai dit, je veux toujours distribuer de la bonne humeur à tout moment. Mes filles sont des comédiennes nées et on passe tout notre temps à rigoler. Je ne supporte pas la morosité. Tout est comédie dans ma vie.
Kouthia est vraiment adulé par les tout-petits. Est-ce que tu es conscient de cela et que prévois-tu pour ces jeunes qui t’adorent ?
Je dois avouer que c’est un phénomène qui m’échappe vraiment. En effet, il y a des enfants âgés d’un an à deux ans et qui ne comprennent pas ce que Kouthia dit mais ils sont les plus grands fans. Je crois que cela découle de la volonté divine et je n’arrive pas à me l’expliquer. C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai décidé de lancer une initiative dénommée le Grand Rire au Grand Théâtre. Nous sommes en train d’y travailler et cela va se tenir au plus tard à la fin du mois de décembre. Nous allons nous produire durant trois jours successifs au Grand Théâtre. Ce sera une manière de satisfaire tous nos fans. Il y aura un spectacle pour les enfants, un autre pour les jeunes et enfin un show pour les adultes. Pour les enfants, nous allons démarrer tôt un samedi ou un dimanche et pour les autres, nous allons nous produire en soirée.