1er juillet. Le Roi des arènes met sa couronne en jeu. Face à lui, Museek Madame Palastig. De redoutables adversaires. Sans foi ni loi. Le stade est plein comme un œuf.
Les supporters sont hystériques. D’un côté, les fans du détenteur du titre. De l’autre, les inconditionnels de ses challengers. On croirait que la décharge de Mbëbëss avait effectué le déplacement, tant les semblables du couple de lutteurs étaient venus en masse.
Pas de round d’observation. Dès le coup d’envoi de la partie, sur fond de battements de tambours et d’envolée de la cantatrice Khar Mbaye, les protagonistes engagent les hostilités. Après les avoir malmenés avec des coups de poings bien ajustés, le Roi des arènes empoigne ses adversaires. Ses supporters sont en transe, la partie est sur le point de livrer son verdict.
Mais subitement, retournement de situation. Museek Madame Palastig se rebiffent, la partie n’est pas terminée. Loin de là…
Ce film d’animation dure environ six minutes. Il est signé Joe Gaï Ramaka, en collaboration avec le Conseil régional de Dakar, notamment. Par le biais de la métaphore de la lutte, cette production de Gorée Island Cinema relate les méfaits du plastique sur l’environnement.
SenePlus vous propose le film en intégralité. Il vous suffit de cliquer sur "Watch on Vimeo". Suspense !
EXIT LE CREUSET CULTUREL, BONJOUR LA JAUGE POUR MUSICIENS DÉSIREUX DE SE PESER !
On voulait en faire un lieu d’excellence de la création artistique, une Mecque de la culture africaine avec une ouverture sur le monde. C’était du moins la vision qu’en avait l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade. Malheureusement, presque quatre ans après son ouverture, le Grand théâtre souffre d’une de nos tares les plus hideuses. Ce temple de la culture est en effet devenu celui de l’ostentation avec un voyeurisme qui frise la folie.
Construit par la République populaire de Chine, le majestueux Grand théâtre cristallise, depuis son ouverture aux musiciens sénégalais, tous les regards de cette corporation pour qui, y jouer et afficher le plein, c’est comme prendre son pied voire atteindre le Graal !
Des musiciens qui considèrent qu’aujourd’hui, on ne compte pas tant qu’on ne réussit pas à remplir cette salle de spectacles d’une capacité de presque 2000 places. A l’image d’une belle dame difficile à conquérir, le bijou construit grâce à l’ancien président de la République du Sénégal, Me Abdoulaye Wade, apparait si proche et si lointain pour certains acteurs de la musique.
Connaissez – vous le premier groupe musical qui s’est produit au Grand Théâtre ? C’est un orchestre familial, le « Takeifa ». Et c’est devant un public clairsemé, voire familial, qu’il avait joué. Même scénario quelques mois plus tard lors de la fête de la musique.
Quand Youssou Ndour, alors ministre de la Culture, décida de renouer avec la scène en vue de créer une chaine de solidarité autour des sinistrés des inondations de l’année 2012 avec quelques ténors de la musique sénégalaise, bien qu’il y eut du monde, on pouvait néanmoins remarquer des fauteuils inoccupés.
Et voilà qu’un beau jour, un garnement qui n’avait même pas deux produits sur le marché décida d’y fêter son anniversaire. Ou, plutôt, celui de son groupe. A l’époque, le public n’avait pas manqué de s’étonner de son culot.
Mais c’était ignorer que derrière Wally Seck, puisque c’est de lui qu’il s’agit, il y avait un rouleau compresseur voire une machine bien huilée. Car il n’est pas n’importe qui, le gosse. Son père, le crooner Thione Ballago, a blanchi sous le harnais de la musique sénégalaise dont il demeure un monument. Ce qui ne devait pas pour autant donner à son fils l’audace de brûler les étapes.
Mais il Wally ne s’était pas levé un beau jour pour décider de franchir le Rubicon. Tout a été planifié. Son beau-frère, Bougane Dany Guèye, a joué une partition décisive dans ce coup de maître. Lui non plus n’est pas n’importe qui.
Il est le patron de la chaîne Sentv en plus d’être le propriétaire de la radio Zik Fm, d’un quotidien et d’un magazine. Ce n’est pas tout. C’est aussi un des magnats de la publicité qui règne en maître sur le secteur.
Cerise sur le gâteau, il possède également un institut de sondages. Bref, une véritable machine de guerre médiatique qu’il a mise à contribution pour promouvoir le concert de son protégé. Tout au service de Wally.
Dans ces conditions, remplir le Grand Théâtre fut un jeu d’enfant pour Bougane. Wally Ballago Seck fit feu et flammes et quitta les lieux avec plus d’une cinquantaine de millions de nos francs. Le fils de Thione ayant levé la barre très haut, toutes les stars de la musique voulurent relever le défi histoire de prouver qu’ils ne sont pas des nains.
Et le Grand théâtre fut transformé en un lieu où l’on va pour mesurer sa popularité. Quiconque réussit à le remplir peut considérer faire partie des stars et être entré dans la cour des grands. Pour les autres, c’est le purgatoire de la deuxième division, le ring des poids plumes.
A cette aune, le duo Pape et Cheikh fut le second groupe à avoir réussi son examen de passage. Comme Wally Seck, il bénéficia d’un grand matraquage publicitaire en plus des réseaux sociaux que le staff des deux musiciens envahit. Résultat, à quelques jours du concert de ces deux musiciens, tous les billets étaient déjà vendus.
Coumba Gawlo Seck, forte de ses plus de 20 ans de scène, releva elle aussi le défi et récolta beaucoup de millions au cours d’une soirée délirante.
Et vint Viviane Chédid qui sortait d’un divorce avec Bouba Ndour qui l’a toujours couvée comme un bébé en la menant au succès. Bouba n’étant plus là, certains avaient bien sûr douté de la capacité de Viviane à remplir le Grand théâtre.
Bien qu’ayant vécu quelques moments de stress, elle s’en sortit cependant haut la main après avoir créé le buzz autour de cet évènement, ses conseillers inventant même une agression. Résultat : deux semaines avant son concert, on ne parlait plus que de Viviane.
« Elle va se casser la gueule sans le concours de Bouba Ndour », disaient certains, d’autres juraient qu’elle allait réussir. Et ce fut le cas, elle sortit de ce temple, avec le sourire, rayonnant de bonheur d’avoir réussi son examen de passage. Elle aussi avait réussi à tuer le mythe qui entoure ce joyau.
Et puis arriva Salam Diallo. Il n’est pas un nain dans le showbiz. Il joue toujours à guichets fermés dans les boites de nuit où il se produit. Et puis, il a déjà fait le plein plusieurs fois à Sorano. Une belle carte de visite pour le Roi du «Tassou» adulé par les femmes.
Hélas, malgré le soutien de la Rts, Salam ne bénéficia pas de la même médiatisation que ses autres collègues. Il peut s’en prendre à la Rts qui n’a pas été à la hauteur en manquant de professionnalisme. Bien sûr, sa soirée fut une belle réussite sur le plan purement artistique, mais, pour faire le plein du Grand théâtre, Salam devra repasser.
Et depuis l’échec de ce troubadour de la musique, ses collègues qui nourrissaient l’ambition de se produire au Grand Théâtre jouent la prudence. Aïda Samb avoue n’être pas encore prête pour affronter cette redoutable épreuve.
D’autres, qui attendaient le joker Salam, regardent désormais vers l’avenue de la République où se trouve Sorano. C’est le cas de Abdou Guité Seck qui y célébra son anniversaire. Les « Takeifa » revinrent sur les lieux et réussirent une belle soirée sans pour autant faire le plein du Grand Théâtre.
Titi qui voulut y jouer coûte que coûte contre la volonté de son producteur, « Prince Arts », a dû se séparer de cette écurie pour aller se jeter dans les bras du propriétaire de la Sen Tv. Son passage au Grand théâtre fut certes un grand succès, mais elle n’a pu recoller les morceaux avec « Prince Arts » qui lui montra la porte de sortie.
Depuis lors, elle se morfond dans son coin car Sen Tv n’est pas un producteur et ne maitrise donc pas du bout des doigts les écueils de ce monde de requins. De son côté, la diva non plus n’a pas essayé de se trouver un producteur pour la suite de sa carrière.
Waly Seck revint sur les lieux avec le même succès que lors de sa première sortie. Mieux, il se paya le luxe d’une seconde soirée le lendemain pour contenter ses inconditionnels.
Assane Ndiaye et Fatou Guewel, les derniers à s’être produits dans ce lieu où l’on se jauge et soupèse, firent le plein avec comme partenaire le groupe de presse Futurs médias qui, à l’occasion, après avoir jeté à la porte Titi, a fait la cour à Coumba Gawlo Seck, aujourd’hui toute transie d’amour envers Youssou Ndour, patron du Groupe Futurs médias.
Aïda Coulibaly Ndour peut dormir tranquille ! Fatou Guéwel et Assane Ndiaye ont donné deux soirées mémorables qui ont montré au monde que ce petit pays n’est point pauvre, mais riche d’hommes prêts à jeter des millions de francs sur une scène — et devant les caméras des télévisions bien sûr ! — pour pouvoir exister aux yeux de leurs semblables.
Ce complexe du Grand Théâtre constitue une des tares du Sénégalais qui a un attrait démentiel pour tout ce qui est nouveau. On aurait construit une autre structure plus spacieuse ou même plus exigüe que le Grand Théâtre que tous les artistes s y presseraient.
Ce temple de la culture restera toujours un lieu inaccessible pour certains d’entre eux qui nourrissent le complexe de se produire dans ce joyau qui est avant tout une scène comme les autres. Et pour un musicien, même devant deux pelés et trois tondus, le résultat final c’est de réussir sa sortie artistique. Rien de plus !
Mais ne le dites surtout pas à nos avides de « Pukaré » de musiciens ! Il faut aussi reconnaitre que ceux qui ont en charge le management de cette structure manquent cruellement de vision pour faire de ces lieux un véritable creuset culturel selon le vœu du président Me Abdoulaye Wade qui voulait faire de ce bijou culturel le point de convergence de ce qui se fait de meilleur en expressions culturelles et artistiques dans le continent et ailleurs.
Mais malheureusement, le Grand théâtre porte déjà la face hideuse de nos comportements au point que certains ont déjà commencé à l’assimiler à un Sorano bis, même si l’ancien directeur général du théâtre national, le conteur Massamba Guèye, avait réussi à gommer cette charge négative pour faire de sa structure un creuset d’excellence.
Ce qui est loin d’être le cas pour le Grand Théâtre qui commence déjà à souffrir de sa transformation en salle de concerts. Déjà, lors des dernières soirées de Assane Ndiaye et Fatou Guéwel Diouf, la climatisation était défectueuse. Et demain, la sclérose…
Le chanteur El Guèye a lancé son troisième album au début du mois dernier. Une manière pour lui de se rappeler au bon souvenir des mélomanes. Votre journal vous fait mieux découvrir ce chanteur qui ambitionne de faire partie des grands artistes de notre pays.
Issu d’une grande famille de griots de Tivaouane, il a pour ainsi dire hérité de la chanson. Mais cela ne l’a pas empêché de tout faire pour trouver sa voie grâce à la pureté de sa voix.
L’homonyme du célèbre musicien traditionnel de la capitale de la Tidjania, feu El hadji Macoura Penda Guèye, a préféré se mouvoir dans la musique moderne.
El Guèye, qui est aussi apparenté à la célèbre chanteuse Ndèye Diarra Guèye ainsi qu’à Ndella Khalass, a éclos très rapidement. C’est en 2004 qu’il sort son premier album titré « Succès ».
Ce coup d’essai arrangé par le pianiste Papis Konaté, se révèle un coup de maître. Cette première ayant été très bien accueillis par la critique, El récidive trois ans plus tard en sortant l’album titré « Li Ci Xibaar ».
Cette seconde tentative est arrangée par les jumeaux Ouzin et Assane qui officiaient dans le groupe « Jaam » de feu Ndongo Lo.
Ensuite, il observe une petite pause pour mieux peaufiner ses créations. El met à profit cette pause pour sortir deux singles. Le premier est titré « Souhait » et il est relatif à l’éventualité d’une grâce présidentielle. Le second single est titré « Ndiaw ».
Après cette pause studieuse, El Guèye sort un album titré « You and me ». Une manière très philosophique de revenir sur ses relations particulières avec Youssou Ndour, le roi du Mbalakh. Ses questionnements existentiels d’une rare profondeur constituent quelque part une invite adressée au grand public qui s’est longtemps gaussé de sa ressemblance physique et vocale avec le chanteur natif de la Médina.
Sur six titres, El chante sa vision d’un monde meilleur et use de la pureté de sa voix pour délivrer des messages d’une rare profondeur. Pour arriver à ses fins et livrer un produit de qualité, le chanteur originaire de Tivaouane n’a pas lésiné sur les moyens.
Il s’est entouré d’une équipe de grands musiciens qui sont très présents sur la scène sénégalaise. Il s’agit du duo Papis Konaté et Laye Diagne, ce dernier étant le bassiste de Coumba Gawlo. Ils ont arrangé l’album. Les bassistes Dembel Diop et Thierno Sarr ont bien assuré.
Les solistes Jeannot Mendy du « Jolof band » et Moustapha Gaye du Super Etoile ont participé à la réalisation du disque de même que les batteurs Laye Lo du Super Etoile et Jules Diop de la « Génération Consciente » de Pape Diouf.
Avec cette nouvelle production, El Guèye marque avec éclat son retour et livre au public un album de toute beauté.
Les villages de Brin et Djibonker organisent le 19 juillet prochain, 38 ans après leur dernière manifestation , une cérémonie d’initiation traditionnelle en milieu diola.
Les villages contigus de Brin et Djibonker, (en région sud, département de Ziguinchor, arrondissement de Nyassia, communauté rurale d’Enempore) vont vivre le 19 juillet prochain, le Boukout, l’événement patrimonial culturel et historique le plus important de leur localité.
Les anciens et les novices auront droit de vivre ces solennités traditionnelles, 38 ans après la toute dernière organisée en Juillet-Août 1976 et celle d’avant, en 1936. Le comité d’orientation a tenu hier vendredi, un point de presse au Collège Sacré cœur pour communiquer sur l’initiation et l’importance de cet événement pour le jeune garçon. Ce moment correspond à une grande école de formation et d’éducation au cours de laquelle on inculque certaines vertus cardinales aux candidats à l’initiation. «Cette cérémonie s’organisait tous les 20 ou 25 ans, mais cela n’est pas le cas aujourd’hui car la dernière en date remonte à Juillet-Août 1976, soit 38 ans à ce jour, et la précédente eut lieu en 1936», fait remarquer le porte- parole du jour, Bruno Diandy. Il poursuit: «Nous attendons beaucoup de monde, nous avons envoyé des faire-part et des demandes d’appui financier et matériel à beaucoup d’entreprises, société et ministères et particulièrement à la présidence et à la primature».
Et de souligner en se glorifiant, «Si à Djibonker le Baînounk est la langue de communication, à Brin, on utilise plutôt une variété de diola (fouloune) qui n’est parlée que dans ce village et également par les gens de Djibonker. Mais le hasard fait que autant les autres diolas ont du mal à comprendre notre langue, autant les Brinois ont la facilité de comprendre les autres variantes du diola».
Pour Adrien Bacourine, relais facilitateur national auprès des autorités étatiques de relever : «Nous travaillons à accompagner toutes les initiatives visant à entretenir le brassage socioculturel, sociolinguistique, socioreligieux et sociocommunautaire».
PAR NAYÉ A. BATHILY
MANIFESTE INÉGALITAIRE
"LE CAPITAL AU XXIE SIÈCLE" (SEUIL, 2013), 970 PAGES
«C'est un livre qui va changer et la manière dont nous pensons la société et celle dont nous faisons de l'économie», Paul Krugman, Prix Nobel, Économie, 2008
Le Capital au XXIe siècle (Seuil, 2013), 970 pages dans la mare est un best-seller international et incontestablement l’ouvrage économique de l’année, de la décennie, voire du siècle, avec plus de 700,000 exemplaires vendus dans le monde. Ce pavé très documenté du jeune économiste Thomas Piketty sur la montée des inégalités fait l'objet d'un concert de louanges. Dans un essai ample et brillant il y démontre que nous sommes à l'aube d'un nouveau monde, dans lequel l'héritage regagne, et les patrimoines ont retrouvé leur prospérité. C’est une «société de petits rentiers» qui se dessine sous nos yeux, affirme-t-il.
Au prix d’un colossal travail empirique l’«économiste rock star», déclenche un engouement et la polémique en établissant que : le premier risque pour l'économie mondiale n'est pas l'endettement ou la guerre nucléaire mais… les Inégalités. C’est la thèse centrale de Piketty- rebaptisé Marx 2.0 par le magazine américain Times.
Graphiques à l'appui, il explique combien la répartition des revenus devenant inégalitaire dans le monde profite de moins en moins aux salariés et de plus en plus aux détenteurs de capital. En résumé, les inégalités sont au cœur de la crise que nous vivons.
Le libre fonctionnement du marché conduit mécaniquement à leur augmentation, en raison d’une loi simple: ceux qui détiennent du capital obtiendront toujours plus par son rendement que ceux qui n’ont que leur force de travail pour s’enrichir. Piketty décrit longuement ce désastre– un retour à un niveau d'inégalité jamais atteint depuis la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle.
Dans ce scénario, une toute petite minorité accumule une immense fortune, non parce que ses membres seraient plus intelligents ou travailleraient davantage que le reste de la population, mais en raison d'une redistribution capricieuse des revenus par les forces économiques fondamentales.
Thomas Piketty affirme que le taux de rendement du capital est le plus souvent supérieur à celui du travail et il milite pour une «fiscalité prohibitive» tout en prônant le développement de l’actionnariat populaire et de la participation. Ne pas agir est dangereux pour nos sociétés et le risque est grand de renforcer les «capitalistes inutiles» que sont les rentiers au détriment des «capitalistes utiles» que sont les entrepreneurs.
Pour les Prix Nobel d’économie Stiglitz et Krugman le livre de Piketty vient à point, car il confirme entre autres l'intuition des militants du mouvement Occupy Wall Street qui affirment que depuis 1980, les inégalités ont augmenté de manière exponentielle et dangereuse. La part du lion a été confisquée par une minuscule hyperclasse.
Il apporte aussi du grain à moudre à tous les adeptes de la redistribution de la richesse qui voient en lui un nouveau héros dont Barack Obama, qui jugent que la lutte contre les inégalités est la priorité du monde d'aujourd'hui. Thomas Piketty a créé un petit vent de stupeur en indiquant que, pour la première fois en 2012, les 10 % les plus riches s'étaient arrogé plus de 50 % des revenus distribués aux Etats-Unis. «Jusqu'où cela va-t-il aller ? Jusqu'à 60 % ou 70 % ?»
Que faire pour réduire ces écarts dangereux ? Le «Marx revisité» appelle à une lutte concertée contre les inégalités au niveau mondial et suggère un impôt progressif et mondial sur le capital (ou le patrimoine). Socialement, c'est une thèse explosive laquelle braque nombre d'économistes qui jugent un tel impôt non pertinent et paralysant pour l’économie mondiale.
La vérité est qu'aucun d'eux n'a idée de ce que pourrait être la réponse adéquate à un problème aussi complexe. Il le reconnaît, sa proposition- exigerait un niveau important et sans aucun doute irréaliste de coopération internationale et qu’Il faudrait éviter de privilégier les solutions trop hâtives. Mais dans un contexte de forte valorisation du capital, cela vaut-il toujours la peine de travailler, de faire des études, de cultiver l’effort ? Comment reformuler notre modèle méritocratique ?
Extensif sur l'histoire économique, l'ouvrage au sérieux scientifique incontestable l'est moins sur ses propositions, et n'est pas sans faille. Doit-on prioriser l'égalité ou la prospérité ? Pour ne prendre qu'un exemple, Piketty consacre beaucoup critiques à l'augmentation des inégalités en Chine ces trente dernières années au fur et à mesure qu'elle adoptait des politiques de libre-marché.
Par contre, il passe complètement sous silence que ces politiques ont arraché plusieurs millions de personnes de la pauvreté. Ne prônerait-il pas un monde qui serait plus égal mais aussi nettement plus pauvre ? Les «solutions» qu'il apporte sont tout aussi problématiques. Il semble croire que l'on peut imposer un «impôt prohibitif» sans changer les incitatifs ou décourager l'innovation et la création de richesse. Le monde selon Piketty serait sans doute plus égal, mais serait aussi certainement nettement plus pauvre.
Plutôt que d'attaquer le capital et le capitalisme, pourquoi ne pas augmenter le nombre de personnes pouvant bénéficier de capital ? En somme, pourquoi ne pas créer plus de richesses partagées lancent ses détracteurs ? Car un problème majeur de notre époque serait pour eux une présence trop restreinte, et non trop étendue du capitalisme.
Aussi il serait possible d'augmenter l'impôt des plus nantis par d'autres biais, essentiellement en réduisant ou annulant les exemptions fiscales qui leur bénéficient de manière disproportionnée, ou en harmonisant la taxation sur les revenus et enfin en luttant contre l'évasion fiscale. Les partisans de Piketty devraient méditer sur ces idées.
En tout état de cause Le capital au XXIe siècle est un livre qui fera date et restera un ouvrage de référence. La pertinence et l'acuité du diagnostic, la profondeur des analyses sont exceptionnelles, plus que les solutions, fragiles et exploratoires. La solution d'une façon générale c'est la démocratie : les institutions démocratiques et la transparence financière et économique pour que l'intérêt commun l'emporte sur les intérêts privés. En conclusion : augmenter ou diminuer les inégalités relève de choix politiques et non d'une quelconque fatalité.
Le Sénégal à l’instar de beaucoup de pays africains se trouve aujourd’hui confronté à la conservation de son patrimoine urbain, qui est menacé par la prolifération des constructions anarchiques et une législation qui n’est plus adaptée. Dans cet entretien, le directeur du Patrimoine culturel, Hamady Bocoum, évoque le problème lié à la préservation du paysage urbain à Dakar ainsi que les grandes lignes de la conférence internationale sur le patrimoine urbain des pays de l’espace francophone qui s’est tenue du 6 au 9 juillet à Dakar.
Au terme d’un atelier sur le patrimoine urbain dans l’espace francophone, quels sont les grands axes qui ont été développés durant ces deux jours ?
Cet atelier, organisé par le ministère de la Culture et du Patri- moine en collaboration avec Wallonie-Bruxelles, s’inscrit dans le cadre du XVème sommet de la Francophonie. L’idée, c’est de mener un plaidoyer pour le patrimoine lors de ce sommet. La rencontre a regroupé une trentaine d’experts venus de différents pays. Nous avons essayé de réfléchir sur toutes les dimensions du patrimoine dans l’espace francophone, à savoir le patrimoine immobilier, immatériel et des paysages naturels. La réflexion que nous menons va aussi au-delà de l’espace francophone.
C’est une réflexion holistique. Mais, il fallait commencer quelque part. L’exercice est d’autant plus aisé qu’en termes de globalisation, il y a des instruments normatifs internationaux, notamment à l’Unesco, autour desquels se retrouvent les Etats membres de l’espace francophone. Donc, l’idée c’est d’essayer d’attirer l’attention des autorités de la Francophonie sur l’importance de maintenir le patrimoine qui est un lien.
Le patrimoine est un ensemble de valeurs matérielles et immatérielles qui fait que l’espace francophone a une identité. On ne construit pas de la même manière à Paris qu’à Washington, Dakar ou Abuja. Nous avons des villes qui ont des traditions différentes.
Mais cela ne veut pas dire qu’elles ne sont pas complémentaires. Actuellement, il y a une organisation qui a l’ambition de mettre tout cela en cohérence. Je pense qu’elle (l’Organisation) doit avoir une politique patrimoniale claire, précise et un agenda.
La Francophonie, elle est d’abord culturelle. Les pères-fondateurs de cette organisation l’ont d’abord fondée sur un échéancier culturel. La politique, l’économie, c’est important mais ce qui fait l’essence dans la culture, c’est le patrimoine.
Quels sont aujourd’hui les écueils auxquels se heurte le patrimoine urbain africain en général et sénégalais en particulier ?
Les problèmes sont multiples et variés. Actuellement, nos pays sont en plein aménagement. Cela suppose des contenus intelligents entre les nécessités d’aménagement du territoire et la sauvegarde du patrimoine. On ne parvient toujours pas à faire la jonction. Très souvent, ceux qui ont envie d’aménager disent que ceux qui veulent protéger le patrimoine sont des obstacles au développement. Ce qui est faux.
Aujourd’hui, toutes les instances internationales y compris la Banque mondiale savent qu’on ne peut pas faire du développement en détruisant la mémoire. Laquelle est une partie intégrante du développement parce que c’est à partir d’elle qu’on fait la liaison entre hier, aujourd’hui et qu’on se projette sur demain. Ce serait donc une erreur grave que de penser qu’en détruisant le patrimoine on fait du développement.
Aujourd’hui à Dakar, on a de véritable problème pour préserver le paysage urbain. Des immeubles poussent partout. On est en train de créer l’incohérence dans une ville qui était normée et qui avait une âme. On est en train d’agresser l’âme de la ville, en montant, sans aucune cohérence, des immeubles à gauche et à droite. Quand la ville n’a plus de cohérence, elle ne parle plus, elle n’intéresse plus personne et devient une ville quelconque.
La France est actuellement le pays le plus visité au monde parce qu’il a maintenu des cohérences. Aux Champs Elysées, ceux qui ont une propriété ont la possibilité de faire des gratte-ciels mais les gens ont maintenu une certaine cohérence. Et c’est ce qui fait que cet endroit constitue l’une des belles avenues du monde. Quand certains ont voulu construire des villes neuves, on leur a dit : aller à la défense.
Ils ont construit une nouvelle ville qui a sa personnalité et qui dialogue avec la ville ancienne. Par exemple, au Quartier latin, il y a des rues qui ne comptent même pas trois mètres. On pouvait les casser et faire des boulevards mais, on sait que le Quartier latin a une âme. C’est tout cela qui fait qu’aujourd’hui, la France est la principale destination du monde. Il faut relativiser les choses, Dakar avait un avantage comparatif incroyable.
C’était la capitale de l’Afrique occidentale française (Aof). Le patrimoine urbain dakarois est un patrimoine partagé. C’est celui de toute l’Afrique et ce serait dommage de le voir partir en lambeau avec des immeubles aussi inélégants les uns que les autres qui poussent sans aucune harmonie et qui sont en train d’étouffer la ville.
Ils auront fini de poser un problème de mobilité urbaine insurmontable, et surtout qu’on aura enlevé à la ville ce qui faisait sa particularité et qui faisait d’elle une ville où il était agréable de se promener, de balader et de découvrir, au niveau de chaque coin de rue, quelque chose de particulier.
Et pourquoi en est-on arrivé là?
Je pense que nous avons une législation qui n’est plus adaptée. Aussi, nous avons une faiblesse au niveau des structures qui sont chargées de veiller à la réglementation. La Direction du patrimoine, organiquement, n’a plus les moyens de faire face à tout ce pouvoir de l’argent qui est à mesure de mettre les gens devant les faits accomplis. Il y a une nécessité de revoir tout cela et de faire de telle sorte que le ministre de la Culture ait plus de poids, plus d’autorité dans les décisions qui concernent les espaces protégés.
Au vu de tout cela, quelle politique faudrait-il adopter pour arriver à mettre définitivement un terme à ce désordre ?
La politique, c’est la réglementation. Déjà, il y a une législation qui existe, il faut la respecter. Malheureusement, ce n’est pas le cas et nous n’avons aucun moyen d’agir.
En outre, il faudrait accroître davantage la capacité des services étatiques en charge du patrimoine, faire de telle sorte que la délinquance dans ce domaine soit punie.
N’y a-t-il pas lieu de penser à une gestion collective du patrimoine entre l’Etat, la collectivité et les populations ?
Il y a toujours un plaidoyer, un travail à faire, en dehors de sensibiliser davantage. Je peux dire que ceux qui s’attaquent le plus au patrimoine, ce sont ceux qui le connaissent le plus. Ce sont eux qui ont de l’argent et qui ont envie de détruire des sites pour mettre autre chose. Les gens qui détruisent le plus, ce ne sont pas les populations.
Le patrimoine de l’Ile de Gorée est menacé... Ce qui se passe à l’Ile de Gorée est un problème sérieux. Le climat a changé. On y observe des houles de plus de 4 mètres. Le système de protection, qui existait, est détruit faute d’entretien. Il se pose un véritable problème. L’Ile est menacée dans son intégrité physique. Des études ont été faites et on connaît à peu près les solutions à mettre en œuvre.
Je pense que le gouvernement est en train de chercher des partenariats et de mettre en place les solutions qui s’imposent pour protéger Gorée.
Par ailleurs, au niveau de l’Ile, la trame urbaine est relativement bien conservée contrairement à Saint-Louis où elle est agressée parce qu’il y a des constructions qui sont tout à fait en porte à faux avec la trame urbaine qui est le socle des valeurs universelles exceptionnelles pour lesquelles cette ville a été inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco.
Qu’en est-il de Kermel ?
Kermel, c’est une catastrophe. C’est le centre urbain le plus représentatif de la ville et l’un des plus anciens de toute l’Afrique de l’Ouest en termes de ville moderne, qui est en train d’être détruit. Malgré les protections, les gens parviennent à obtenir des dérogations. Ils ne respectent pas la réglementation, la- quelle y est quotidiennement violée.
Aujourd’hui, la trame urbaine à Kermel est désarticulée et s’il n’y a pas une réaction forte des autorités, dans dix ans, il n’y aura plus de centre urbain historique. On aura perdu, on aura banalisé, on aura vendangé la mémoire de la ville.
Et Dakar deviendra une ville quelconque où il n’y aura plus rien à voir, où la mobilité urbaine sera réduite à sa plus simple expression parce que tous ces immeubles qu’on est en train de construire seront totalement vides. On aura détruit pour rien.
La direction du Patrimoine culturel a-t-elle les moyens pour de dissuader tous ceux qui font des constructions anarchiques et portent atteinte à toute cette richesse historique ?
Malheureusement non. Nous n’avons ni les moyens matériels ni les moyens humains pour remplir cette mission avec efficacité. Mais, ce que nous pouvons faire quand nous constatons un désordre, c’est d’adresser une sommation, une de- mande d’arrêt des travaux. Seulement, cela se multiplie dans tous les sens. Avant que le préfet arrive pour constater, les dégâts sont déjà faits.
Les gens marquent souvent un temps de pause et ils reprennent nuitamment à construire. Je pense qu’il y a une véritable culture génocidaire vis-à-vis du patrimoine menée par des gens qui ont de l’argent.
Il y a nécessité de renforcer les compétences de la Direction. Je pense que si on veut sauver le patrimoine dakarois, sauver le patrimoine sénégalais, il faudrait qu’on change la législation. Vous savez, ce n’est pas seulement les villes qu’il faut sauver. Le Sénégal est un pays qui doit se développer. On doit construire des infrastructures lourdes, des routes, des aéroports, des autoroutes, des ports. Je ne dis pas au détriment du patrimoine. Mais, cela doit être une opportunité de tout mettre en valeur.
Le patrimoine qui est parfois invisible pour le profane, il faut le préserver comme cela se fait dans tous les pays actuellement et faire en sorte que l’aménagement du territoire soit une opportunité pour l’aménagement culturelle du territoire. Faire de telle sorte que la culture soit au sommet du développement. Les Etats-Unis sont le pays qui vend le plus de culture au monde et qui n’a même pas de ministère de la Culture.
Et la France, le pays qui a la plus forte concentration touristique au monde, n’a pas de ministère du Tourisme. Ce n’est pas dans l’existence de structures, c’est dans l’existence de politiques. Nous avons besoin de politiques fortes pour développer notre pays.
Le tourisme est un facteur de développement universellement connu... Les points forts de notre patrimoine culturel et naturel doivent être protégés. A Dakar, on a le point le plus occidental de l’ancien monde, en l’occurrence la pointe des Almadies.
Quel lien existe-t-il entre le patrimoine urbain et le développement ?
La culture, à travers le patrimoine, est le plus puissant moteur de développement partout dans le monde. Aujourd’hui, en France, ils sont plus de 42 sites inscrits dans le patrimoine mondial. Ils ont préservé tous les terroirs depuis la loi Malraux en 1949. C’est pourquoi si quelqu’un veut visiter la France, il a l’embarras du choix... Par conséquent, un touriste qui vient dans ce pays, il y passe 10 jours. Ici, il n’y passe à peine que 3 à 4 jours.
Je pense que l’articulation entre le patrimoine et le développement est évidente. Malheureusement, chez nous, on voit tout le contraire. Ce n’est pas par hasard que le tourisme décline ; nous n’avons pas d’offre. Notre offre balnéaire n’est pas le plus reluisant en Afrique. Si nous voulons aujourd’hui développer le pays, nous devons le faire de manière holistique, en faisant en sorte que notre patrimoine soit mis avec efficacité et intelligence.
Par exemple, au Cambodge, ils ont un seul site classé patrimoine mondial, le site archéologique d'Angkor.
Mais, ils ont décidé d’en faire un moteur du développement. Ce site accueille, chaque année, 4 millions de visiteurs. Le Sénégal fait à peine un demi-million avec ses 7 sites classés au patrimoine mondial de l’Unesco. Si chaque site faisait le dixième d’Angkor, les objectifs du Plan Sénégal émergent (Pse) seraient atteints.
Le mois de ramadan demeure la période propice pour certains comédiens de se faire des rentrées d'argents. Dans toutes les chaines de télévision, c'est les téléfilms sur le ramadan animés par des artistes qui sont diffusés juste avant et après la rupture du jeûne. Toutefois, le contenu manque d'originalité et les avis sont partagés chez les spectateurs.
En cette période de ramadan, les comédiens prennent d'assaut les chaines de télévision. Les programmes sont saturés de téléfilms sur le ramadan. Ils sont diffusés soit avant ou après la rupture du jeûne. D'année en année, on retrouve les mêmes personnages dans les mêmes chaines de télévision. Toutefois, au niveau du contenu des films, la finalité est toujours la même. L'un prenant son «Ndogou» au moment de la rupture, tandis que le personnage principal s'emballe dans des difficultés à trouver de quoi mettre sous les dents.
En parcourant les chaines de télévision, il n'y a pas de différence. Un constat qui amène à croire que le ramadan est une affaire de manger et de boire. Même si certains comédiens cherchent à distraire les jeûneurs, mais le langage de certains d'entre eux frustre plus d'un, parce qu'à la limite de l'injure. Des choses qui devront être revues pour amener les jeûneurs à vivre pleinement le mois de ramadan dans la piété.
Pour certains spectateurs: « il y a une manière de distraire la personne tout en l'aidant à vivre son ramadan. Il suffit juste d'introduire les préceptes de l'islam pour mieux faire connaître la religion », lance Mohamed Sylla, la trentaine, rencontré au quartier des Hlm. Selon ce dernier, les téléfilms manquent d'originalité et c'est toujours la même chose. «Il faut suivre « Ndogou Ly », le ramadan de mère Ndial, le ramadan de Lamarana et celui de Sannex, il n'y a pas de différence.
Les acteurs font le mourant à l'approche de la rupture, ce qui décrédibilise encore une fois la religion. D'autres, nous proposent des choses qui sont contraires aux règles de bonne conduite. Je peux comprendre que c'est une forme de dénoncer des vices qu'utilisent certains jeûneurs pour lutter contre la faim. Mais encore, une fois de plus, ce n'est pas ce qu'on attend d'eux.»
Pour Malick Sow, c'est des programmes qui doivent disparaître des chaines de télévision, car n'apportant rien à la population. «Il y a les religieux, ce temps devait leur être accordé pour les prédications. Les comédiens cherchent de l'argent et ils feront tout pour distraire les spectateurs. La concurrence est très rude et c'est la quantité en lieu et place de la qualité. Les télévisions doivent revoir leur programme et travailler davantage sur la sélection des contenus, car il y va de leur crédibilité» lance-il.
Le ministère de la Culture sous le magistère de Macky Sall en est à son troisième responsable. Après Youssou Ndour et Aziz Mbaye, Mbagnick Ndiaye s’installe. Les acteurs culturels étalent leurs doléances.
Les attentes sont nombreuses et diffèrent selon les corps de métiers qui constituent le secteur culturel. La préoccupation des uns n’est pas forcément celle des autres. C’est ainsi que pour le président de l’Association des cinéastes sénégalais associés (CINESEAS), Ngaïdo Bâ, le plus urgent pour Mbagnick Ndiaye est de rétablir les acteurs culturels dans leur droit.
“Depuis que Macky Sall est président de la République, aucune association professionnelle culturelle n’a reçu de subvention annuelle, alors que c’est dans le budget voté. On espère qu’il va réparer cette injustice. C’est le premier problème qu’il doit régler, à mon avis, et l’espoir est permis parce qu’il est un des nôtres”, a dit M. Bâ.
“La pleine réussite de M. Mbagnick Ndiaye dans ses missions passe par ces impératifs qui sont, synthétiquement, autant d’actes non seulement à poser en urgence de façon plus pressante : une aptitude à s’ouvrir aux acteurs socioculturels, à les écouter, à les entendre et, avec eux, se mettre au travail à dessein de convertir leurs attentes en destin”, selon l’écrivain et éditeur Elie Charles Moreau.
Sur l’un de ces points s’accordent les différents acteurs joints par EnQuête. “Aucun des derniers ministres de la culture n’a rendu visite aux associations professionnelles culturelles. Il faut que Mbagnick Ndiaye rectifie le tir”, a suggéré Ngaïdo Bâ.
“Il faut associer les acteurs culturels dans les projets qui les concernent. Tant qu’ils y sont associés les priorités sont bien menées”, a relevé le président par intérim de l’Association des métiers de la musique (AMS), Daniel Gomez. “Il faut que le ministre appelle les acteurs et échangent avec eux. On ne peut faire une politique culturelle sans parler aux acteurs”, a-t-il indiqué.
Au-delà de ces échanges, les comédiens attendent le ministre sur divers terrains.
Assurance vie
Le plus urgent est sans nul ce projet d’établissement d’une assurance vie. “J’avais discuté avec M. Mbaye et le directeur de l’Ipres sur un projet. Un canevas avait été dégagé. Je veux aller voir le directeur de la Caisse de sécurité sociale pour une assurance vie pour l’artiste. Nous sommes en train de nous mutualiser. Nous avons juste besoin de l’appui du ministre”, a relevé le président de l’Association des artistes comédiens du théâtre sénégalais (ARCOTS). L’association qu’il dirige souhaite aussi un siège.
“Cela va nous permettre de mettre sous fichier tous les comédiens pour savoir qui est qui. On pourra aussi organiser des formations pour les acteurs, les metteurs en scène etc.”, a requis Lamine Ndiaye.
L’association dirigée par Daniel Gomez est plus intéressée par “la continuité étatique”. “Un travail a été fait et a pris beaucoup de temps sur le réforme de l’environnement juridique. La nouvelle société de gestion collective a été mise sur pied en association avec les acteurs. On espère continuer sur la même lancée”, a dit M. Gomez.
Chez les animateurs culturels, les préoccupations sont tout autres. “Il ne saurait y avoir de développement sans à la base une formation des acteurs qui ont en charge la conduite du secteur de la culture. Pour dire que la formation des agents du ministère devrait être une priorité. Le Musée des civilisations noires va être livré sous peu. Ça risque de devenir comme la Place du Souvenir ou le Grand-Théâtre. Des contenants sans contenu. Il faut aussi définir des profils pour les postes, ce par rapport aux nominations des chefs de service. Mais les deux choses essentielles sont : revoir le statut des animateurs culturels et des conseillers aux affaires culturelles, ainsi que la réforme de l’Ecole nationale des arts”, a déclaré Abdoulaye Gaye, animateur culturel en service à la Place du Souvenir africain.
Alors qu’il n’était pas candidat aux élections locales, Abdou Aziz Mbaye a pourtant été limogé du ministère de la Culture et du Patrimoine. Un lieu où conflits divers et démissions remarquables ont marqué son passage.
Le seul limogeage du dernier remaniement ministériel qui ne s’explique pas par des raisons liées aux élections locales, en dehors du cas de la socialiste Aminata Mbengue Ndiaye, battue mais qui a conservé son poste au bénéfice des quotas offerts aux alliés, c’est bien celui du ministre de la Culture Abdou Aziz Mbaye. Celui-ci n’était candidat ni pour une mairie ni pour un département. Il aurait pu donc échapper à la guillotine du Président Sall. Il l’a reçue en pleine gorge, remplacé par l’ex-ministre des Sports Mbagnick Ndiaye.
Qu’est-ce qui a pu donc emporter M. Mbaye ? En effet, malgré les multiples critiques des acteurs culturels à son endroit, et son bras de fer avec les animateurs culturels contractuels, cet ex-ambassadeur de l’Union européenne est resté dans le gouvernement même après le départ d’Abdoul Mbaye en septembre 2013. Un «moment propice» pendant lequel ses adversaires et détracteurs le voyaient bien partir « enfin ». C’est donc au moment où ils s’y attendaient le moins que Mbaye est finalement parti. A quatre mois du sommet de la francophonie dont l’organisation est pilotée par son ministère.
L’ex directeur de cabinet du Président Macky Sall a certainement dû payer les rivalités, critiques et attaques des acteurs culturels, mais également de ses propres collaborateurs. Ainsi, trois démissions de taille sont survenues sous ses yeux. Celle d’abord de Mariama Ndoye, directrice du Livre et de la Lecture qui avait ouvert le bal à l’époque en évoquant des «raisons personnelles.» Celle ensuite autour d’une ponte locale, le secrétaire général du ministère, Pape Massène Sène, pour pratiquement les mêmes raisons. «Convenances personnelles», disait-il. Celle enfin du directeur général de Sorano, Massamba Guèye qui, dans un style plus direct, aurait demandé ‘’à rompre sa collaboration avec Abdou Aziz Mbaye’’.
Pourquoi cette cascade de démissions ? Aucune réponse officielle pertinente n’est jamais venue du ministère. Abdou Aziz serait-il à ce point insupportable avec certains de ses principaux collaborateurs ? Seraient-ce plutôt ces derniers qui n’auraient pas réussi à intégrer un cadre de travail rigoureux et moins complaisant ? On savait que la Culture a la réputation établie d’être une broyeuse de ministres. Mais entre «convenances personnelles» alléguées et «incompréhension» sur cette «virée rurale», selon le mot de l’écrivain Eli Charles Moreau critiquant la tournée dite de «diversité culturelle» pilotée par le ci-devant ministre, c’en était peut-être trop pour le chef de l’Etat.
Les perdants des Locales à la guillotine, les gagnants au pinacle, les femmes au rabot, les alliés ménagés, un nouveau cri de guerre et des formes généreuses. Voici le nouveau gouvernement du Sénégal dirigé par Mahammed Dionne.
Guillotine pour les loosers
Sitôt dit, sitôt fait. Le président de la République est passé à l’acte. Il avait déclaré urbi et orbi qu’il passerait à la guillotine tous les responsables apéristes occupant des postes de responsabilité qui échoueraient aux élections locales.
La première tête du looser qui est tombée est naturellement celle du chef du gouvernement Aminata Touré. Il s’en est suivi celles d’Abdoulatif Coulibaly, Benoit Sambou, Pape Diouf, Mor Ngom, Thierno Alassane Sall, Ali Haïdar, Anta Sarr et Seydou Guèye. Abdou Aziz Mbaye qui n’est pas concerné par les locales a été limogé pour résultats nuls au ministère de la Culture.
Certains de ces responsables ont perdu leur localité pour avoir présenté des listes antagonistes dont le cumul des voix les aurait rendus victorieux. C’est le cas de Mor Ngom, Pape Diouf et du député Pape Mbodj à Bambey. Tous les trois ont été terrassés par la seule Aïda Mbodj qui a bien profité de la division des trois responsables de Bennoo Bokk Yaakaar pour conquérir la commune et le département.
Idem pour Thierno Alassane Sall, Benoit Sambou et Ali Haïdar qui ont fait respectivement les frais de la division de la coalition présidentielle à Thiès et à Ziguinchor. En sus, l’ex ministre de l’environnement est aussi victime des lobbys du bois et du manque de transparence des accords de pêche de l’Union européenne.
Abdoulatif Coulibaly a subi les contrecoups de son comportement inconvenant à Sokone. La population jeune estudiantine qui a voté en masse pour son adversaire Petit Guèye lui reproche son arrogance et son indifférence vis-à-vis de leurs difficultés.
Seydou est victime lui aussi des clivages entre ses frères apéristes de la Médina notamment Sidy Sam dont les jours sont comptés à la tête de la direction qu’il occupe.
Anta Sarr, qui conduisait la liste de la Coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY) a été battue par la Coalition Taxawu Dakar de Khalifa Sall dans la commune de Sicap Liberté, cède la place à Mariama Sarr, l’ancienne occupante du poste sous la primature d’Abdoul Mbaye. Cette dernière avait dû quitter le gouvernement de Mimi pour avoir refusé de quitter son poste de ministre de la Femme pour un autre de moindre envergure.
Honneurs et récompenses aux vainqueurs
En plus de Mariama Sarr qui a gagné sa commune de Kaolack, d’autres responsables sortis victorieux du scrutin local ont été récompensés. Il s’agit de Mansour Faye, Matar Bâ et de Moustapha Diop et Abdoulaye Diouf Sarr, lesquels ont gagné respectivement les communes de Saint-Louis, de Fatick, de Louga, et de Yoff.
Un gouvernement obèse
La nouveauté, c’est la taille du gouvernement qui s’élargit de cinq secrétaires d’Etat même s’ils ne siègent pas en conseil de ministres. Sauf lorsqu'un point de l'ordre du jour ressort de leurs attributions. On croyait qu’un gouvernement resserré allait être nommé mais le président de la République a du mal à former un gouvernement restreint. Ce qui est un non-sens quand on parle de la réduction du train de vie de l’Etat.
La portion congrue pour les femmes
Sur les 38 membres du gouvernement, on ne compte que sept femmes, ce qui constitue une aberration quand on sort d’élections où la notion de parité de était la règle de base pour la confection des listes municipales et départementales. Cela montre que le discours sur la parité porté par les politiciens n’est qu’une escroquerie pour berner l’électorat féminin.
Les alliés maintenus
Quant aux alliés, excepté le cas de Haïdar, ils conservent leur poste. Chose bizarre puisqu’on pensait que le Parti socialiste qui a combattu voire vaincu dans plusieurs localités la liste Bennoo Bokk Yaakaar allait être exclu de la mouvance présidentielle. Certainement c’est par prudence politique que le président les a maintenus car ce serait suicidaire de rajouter à la nouvelle force incarnée par Khalifa Sall tous ces alliés qui n’ont pas joué le jeu des alliances.
Un nouveau slogan : «au travail, travail, au travail»
A l’instar de son prédécesseur, le tout nouveau Premier ministre a lancé un triptyque qui sonne comme un leitmotiv voire une conviction profonde : « au travail, travail, au travail ». Pourvu que cela ne soit pas comme le slogan de Mimi qui n’a jamais su accéléré la cadence. De même qu’Abdoulaye Wade qui enjoignait les Sénégal au travail avec sa devise : « il faut travailler, encore travailler et toujours travailler » mais qui n’a jamais réussi à le mettre en pratique parce qu’avec lui, les Sénégalais vouaient un culte à l’argent facile plutôt que se consacrer au travail.
: Madame Awa Marie Coll SECK, Ministre de la Santé et de l’Action sociale
: Monsieur Augustin TINE, Ministre des Forces Armées
: Monsieur Abdoulaye Daouda DIALLO, Ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique,
: Monsieur Sidiki KABA, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice,
: Monsieur Mankeur NDIAYE, Ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur,
: Monsieur Amadou BA, Ministre de l'Economie, des Finances et du plan,
: Monsieur Papa Abdoulaye SECK, Ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural,
Madame Mariama SARR, Ministre de la Femme de la Famille et de l’Enfance,
Monsieur Diène Farba SARR, Ministre du renouveau urbain, de l’habitat et du cadre de vie,
Monsieur Oumar YOUM, Ministre de la Gouvernance Locale, du Développement et de l’Aménagement du Territoire, porte parole du Gouvernement,
Monsieur Mansour FAYE, Ministre de l’Hydraulique et de l’Assainissement,
Monsieur Aly Ngouille NDIAYE, Ministre de l’Industrie et des Mines,
Monsieur Mansour Elimane KANE, Ministre des infrastructures, des transports terrestres et du Désenclavement,
Monsieur Abdoulaye BALDE, Ministre de l’Environnement et du développement durable,
: Monsieur Mary Teuw NIANE, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche,
Monsieur Serigne Mbaye THIAM, Ministre de l’Education Nationale,
Monsieur Alioune SARR, Ministre du Commerce, du secteur informel, de la Consommation, de la Promotion des produits locaux et des PME,
Monsieur Oumar GUEYE, Ministre de la Pêche et de l’Economie Maritime,
Monsieur Yaya Abdoul KANE, Ministre des postes et des télécommunications,
Madame Aminata MBENGUE ndiaye, Ministre de l’Elevage et des productions animales,
Monsieur Abdoulaye DIOUF SARR, Ministre du Tourisme et des Transports Aériens,
Madame Khoudia MBAYE, Ministre de la Promotion des investissements, des partenariats et du développement des téléservices de l’Etat,
Monsieur Mbagnick NDIAYE, Ministre de la Culture et de la Communication,
Monsieur Mansour SY, Ministre du Travail, du dialogue social, des organisations professionnelles et des relations avec les institutions,
Madame Maimouna NDOYE SECK, Ministre de l’Energie et du Développement des Energies Renouvelables,
Monsieur Mamadou TALLA, Ministre de la formation professionnelle, de l’apprentissage et de l’artisanat,
Monsieur Mame Mbaye NIANG, Ministre de la Jeunesse, de l’Emploi et de la construction citoyenne,
Monsieur Matar BA, Ministre des Sports,
Madame Viviane Laure Elisabeth BAMPASSY, Ministre de la Fonction Publique, de la Rationalisation des effectifs et du renouveau du service public,
Monsieur Khadim DIOP, Ministre de l’intégration Africaine, du NEPAD et de la Promotion de la Bonne Gouvernance,
Trois (3) ministres délégués
Monsieur Birima MANGARA, Ministre Délégué auprès du Ministre de l’Economie et des Finances et du Plan, Chargé du Budget,
Monsieur Moustapha DIOP, Ministre Délégué auprès du Ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfance, Chargé de la Micro-finance et de l’Economie solidaire,
Madame Fatou TAMBEDOU, Ministre délégué auprès du Ministre du renouveau urbain, de l’Habitat et du cadre de vie, chargé de la restructuration et de la requalification des banlieues
CINQ (5) SECRÉTAIRES D’ÉTAT
Monsieur Souleymane Jules DIOP, Secrétaire d’Etat aux Sénégalais de l’Extérieur,
Monsieur Moustapha Lo DIATTA, Secrétaire d’Etat à l’Accompagnement et à la mutualisation des Organisations Paysannes,
Monsieur Diène Faye, Secrétaire d’Etat à l’hydraulique Rurale,
Monsieur Yakham MBAYE, Secrétaire d’Etat à la Communication,
Monsieur Abdou Ndéné SALL, Secrétaire d’Etat au réseau ferroviaire national,
Monsieur Youssou TOURE, Secrétaire d’Etat à l’Alphabétisation et à la Promotion des langues nationales