C’est une chanteuse française qui a toujours éprouvé un certain penchant pour l’Afrique. Elle séjourne régulièrement au Sénégal pour jouer dans des hôtels. Son dernier voyage remonte au mois de juin et nous l’avions rencontrée pour discuter avec elle de ses projets et de son ambition de partager son savoir avec les artistes sénégalais.
Depuis son plus jeune âge, Maïmouna Pascale Quatela est chanteuse, elle a toujours eu une grande attirance pour la musique afro-américaine et africaine.
C’est pourquoi, elle est successivement chanteuse de jazz dans les clubs parisiens mais aussi en Angleterre dans les années 80 où elle côtoie et collabore avec le guitariste Allan Holdsworh et le batteur Gary Husband puis à New-York dans les années 90 où elle se rapproche de la communauté afro-américaine qu’elle considère comme sa vrai famille de cœur.
En 1996, elle a l’opportunité de chanter pendant plusieurs mois dans notre pays et elle crée son projet de collectif d’artistes « Mélanine Mobile Vibe » en 1996. Elle décide d’orienter sa carrière vers une forme de partage portant un message humanitaire et spirituel.
Elle sera sollicitée en 1997 par le Secours Catholique pour chanter à Bercy, à Lourdes et à l’île de La réunion pour être, en quelque sorte, la porte-parole des « sans voix ».
En 1999, après avoir travaillé au festival Banlieues Bleues (93) avec le chanteur Joe Lee Wilson (Radio France décembre 1999) et le chanteur de gospel de Chicago Stanley Davis, Maïmouna décide de créer sa propre chorale dans le département 91.
Son projet a porté ses fruits car, à ce jour, cette chorale regroupe annuellement plus de 100 choristes sur sept ateliers hebdomadaires. Cette chanteuse au talent reconnu a fini par tisser des liens très étroits avec le Sénégal. C’est d’ailleurs à l’issue de son premier séjour dans notre pays en 1996 que le prénom de Maïmouna lui a été donné par des amis. Elle a eu à jouer dans l’orchestre de Pape Niang, le chanteur et batteur non voyant. Il faut dire que ce premier voyage au Sénégal n’était pas du tout fortuit.
Vivant dans une certaine précarité en France et ayant en charge trois enfants, Maïmouna a voulu effectuer le grand saut. A l’époque, elle jouait régulièrement dans un club du nom de « Farafina » en France. C’est ce qui lui a permis de côtoyer des artistes comme Amadou et Myriam, Salif Keita et autres.
Elle finit par s’incruster à Dakar et elle trouve un job au niveau d’un club de jazz. Elle retourne alors en France pour faire ses valises et revenir à Dakar. Après avoir vendu sa maison de Normandie, elle s’établit au Sénégal en 1999.
Sur les conseils d’un ami, elle préfère assurer ses arrières et ouvre un lieu à Paris pour accueillir des artistes africains. Cette belle aventure a duré trois ans avant qu’elle ouvre d’autres chantiers toujours en Afrique. Suite à une vision, elle décide d’ouvrir une école de musique au Sénégal.
Altruiste et généreuse dans l’âme, Maïmouna, qui veut toujours participer à l’essor d’une nouvelle race de musiciens, ambitionne de travailler avec des artistes sénégalais. Au cours de son dernier séjour, elle a travaillé avec Doudou Konaré, l’ancien soliste du Super Diamono. Elle ambitionne d’ailleurs de booster considérablement la carrière de cet instrumentiste de talent.
Elle est drôle et foutraque. Aïda Patra cette extravagante animatrice qui pousse l’audace trop loin sur la lucarne. C’est la recette de son succès. Audacieuse, provocatrice invétérée, Aïda Patra, moulée dans un meulfeu orange, maquillée à la marocaine, est aussi sollicitée qu’appréciée. Son téléphone grésille entre deux phrases. Dans cet entretien, elle cloue le bec à des détracteurs qui n’ont pas manqué de commenter le tourbillon médiatique dans lequel elle a été happée ces derniers mois : le scandale de l’affaire des faux billets qui a affolé le web. Elle ouvre son cœur pour parler de sa vie privée et de sa vie publique.
Patra, pouvez-vous décliner votre niveau d’étude et votre parcours professionnel ?
Moi, j’ai arrêté mes études en classe de 4 secondaire, après j’ai fait du commerce. J’ai aussi aidé ma mère dans son travail qui consistait à vendre des poissons. Maintenant, avec les retombées de la vente, ma mère m’a donné de l’argent. Et avec cet argent, je partais au marché Sandaga pour acheter des jeans, des chemises que je revendais à la Plage de Yarakh près de la baie de Hann et à la plage de Soumbédioune. Je me suis très tôt mariée.
Par rapport à l’animation ? En rentrant à la maison, j’ai acheté beaucoup de bonnes choses à manger et à boire. Arrivée chez moi, j’ai allumé la radio pour écouter Sokhna Fm (station privée appartenant à Dunya Vision). C’était la première fois que j’écoutais la radio. Parce que j’avoue que je n’avais pas le temps d’écouter la radio. Car, j’ai passé toute mon enfance à travailler pour ma mère et à l’aider dans toutes ses entreprises.
Bizarrement, je suis partie acheter du crédit ce jour-là pour «appeler en direct à la radio». Et je disais des choses rigolos au Dj. Quand j’ai raccroché, Ben Bass Diagne (fondateur de Dunya), paix à son âme, a demandé à ce que l’on me rappelle automatiquement.
Et il m’a demandé de passer à son bureau. Quand je suis arrivée à son bureau, il m’a fait subir un test que j’ai réussi haut la main. Il m’a demandé si je voulais vraiment faire de l’animation, j’ai répondu oui. Et c’est parti comme ça. C’est le commencement de ma carrière d’animatrice dans les ondes de la bande Fm.
Vous avez soutenu que vous vous êtes mariée très tôt. A 18 ans, vous avez divorcé. Qu’est-ce qui explique cette instabilité sur le plan sentimental ?
C’est la volonté divine. C’est Dieu qui l’a voulu ainsi. Et je l’ai acceptée avec philosophie. Si vous observez le film que j’ai tourné à Paris qui s’appelle «Aïda Patra vie privée, vie publique» produit par Africa production, c’est ma belle- mère qui a fait des témoignages éloquents sur moi. C’est la mère de mon premier mari. Je pense que beaucoup de femmes divorcées n’ont pas ce privilège de leur ex-belle-mère.
C’est une manière de faire comprendre à tout le monde que mon premier divorce n’est pas lié à une dispute ou une bagarre. (Fataliste). Cela devait tout simplement se terminer à cette date. Et voilà maintenant, je suis passée à autre chose. Grâce à Dieu, j’ai eu deux enfants issus de ce mariage. Elles s’appellent Mamy Ndiaye et Khadidiatou Ndiaye, mes deux chéries et amours.
Entre temps, vous vous êtes remariée ?
Oui ! Oui ! Je me suis remariée en 2000. Et je vais vous faire une confession : Je suis divorcée, il y a tout juste quatre mois. C’est la première fois que j’en parle dans la presse. Je viens tout juste de divorcer. Et je ne sais même pas pourquoi je te le dis (rires).
Pourquoi avez-vous divorcé cette fois-ci ?
En fait, j’ai divorcé parce que mon mari s’était converti en islam quand il a demandé ma main. Et dernièrement, il a voulu reprendre sa religion. Je n‘ai pas été d’accord avec sa décision. Par la suite, il y a eu de petits malentendus et des différends. Et on a divorcé. Cela ne veut pas dire qu’il est mauvais. J‘avoue aussi que j’avais le meilleur mari du monde. Il s’occupait de moi et de ma famille. Il a été le premier homme à m’offrir un million cache. Pour un homme de cette envergure, je ne peux que prier pour lui et lui souhaiter tout le bonheur du monde. Que Dieu fasse qu’il rencontre une femme meilleure que moi. C’est un homme bien (elle insiste).
C’est le seul motif de ce divorce ?
Si la réponse que je vous ai fournie ne vous satisfait pas, je ne sais plus quoi vous répondre. J’avais le meilleur mari du monde. C’est Dieu qui l’a décidé ainsi.
Comptez-vous vous remarier avec lui un jour ?
Tout dépend de Dieu. Parce que c’est Lui qui décide de nos destins. S’Il le voulait, je serais toujours mariée à lui.
Comptez-vous vous remarier une troisième fois ?
Remarier ? Jamais. J‘attends que mes filles se marient d’abord, et que toi tu te maries aussi (rires).
Sur le plan professionnel, on a remarqué que vous êtes absente des écrans de la 2Stv. Qui-est-ce qui explique cette absence ?
(Elle sourit). Toi tu es grave ! Je sais que vous savez que j’ai arrêté à la 2Stv. Je sais que vous êtes au courant. Vous cherchez une confirmation de l’info. Ok : J‘ai arrêté parce que j’ai vraiment constaté que je ne pouvais plus continuer à travailler là-bas. Les responsables se sont aussi rendu compte qu’on ne pouvait plus travailler ensemble. Voilà la seule et unique raison de mon départ de cette chaîne de télé.
Quel est le vrai motif parce que celui que vous invoquez paraît léger ?
Je vous explique : Tout le monde sait que j’arrive toujours en retard dans n’importe quelle télévision. Je suis comme ça partout. Ensuite, j’ai voulu aussi prendre un peu de repos. Ce n’est pas la fin du monde. Il y a beaucoup de chaînes de télévision. Comme toutes les télés se terminent par vision (sic), toutes les émissions se ressemblent.
Vous ne voulez pas aller au fond des choses....Mais, il y a anguille sous roche....
En tout cas, tout ce que je peux vous dire c’est que c’est Dieu qui l’a voulu ainsi. Et reprendre les dires d’une personne est perçu comme une calomnie dans notre société. Pas plus tard qu’hier (l’interview a eu lieu dimanche), j’ai appelé Marième Ndiaye (femme du propriétaire de la télé) pour passer prendre sama soukeurou koor. Alors si je vous dis que je me suis battue là-bas ou que je me suis disputée avec quelqu’un ce serait vous mentir. Je le jure sur Allah le Miséricordieux. Cela devait juste se terminer. La voiture Tigo Chery 4/4 que je conduis m’a été offerte par El Hadj Ndiaye. Si on s’était disputés, il m’aurait demandé de lui restituer sa voiture.
On a récemment cité votre nom dans un scandale de partouze et de faux billet....
Je ne pourrais pas trop m’avancer sur cette affaire. Parce que je n’étais même pas au courant de cette affaire. Ce jour-là, je fêtais l’anniversaire de mon mari. J’étais à ses cotés. Ensuite, le jour du rendez-vous du Tribunal, j’étais en train de travailler parce que j’animais mon émission After Work. Alors, je pense que c’est assez clair. Personne n’a cité mon nom dans cette affaire. Ce qui est sûr, c’est que tu peux trouver mille Patra sur Facebook que je ne connais même pas. En vérité, c’est une passion des Sénégalais de se faire passer pour des personnes qu’ils ne sont pas. Je n’y peux rien parce que la célébrité est ma destinée. Je l’assume totalement !
Comment votre famille a vécu cette affaire qui a connu une médiatisation vertigineuse ?
Cette affaire ne l’a affectée en aucun moment. Mes parents n’ont même pas cherché à comprendre comment cette histoire a été cousue. Ils me connaissent sérieusement pour savoir ce dont je suis capable. Je ne suis mêlée à cette histoire ni de près ni de loin. Et je tiens aussi à préciser que j’ai des preuves qui confirment que j’étais chez moi ce jour-là. Et c’est bien que j’en parle pour que mes fans sachent la vérité.
Avec votre style décoiffé et extravagant, vous croyez que vous pouvez apporter des choses positives à la société sénégalaise ?
Voilà une bonne question. Cela dépend de la compréhension des gens. Je détends l’atmosphère des chaumières. J’arrive à faire retrouver le sourire à une personne fatiguée ou malade ou même stressée par les soucis de la vie. A l’écran, je mets de côté mon orgueil, ma classe, et personnalité. Je me rabaisse à un niveau de clown pour lui faire plaisir. Et ce sourire qu’on arrive à offrir à ces personnes, c’est Dieu qui nous récompensera. On apporte du soulagement aux êtres humains et à la société en général. Et s’il y a des personnes que je dérange, j’en suis vraiment désolée. Et j’implore leur pardon car c’est fait juste dans le but de divertir.
Patra et l’alcool, Patra et les accidents dus à un état d’ivresse sont-ils des faits avérés ?
Je pense que m’a voiture a une fois fait un accident et je ne conduisais même pas. Je l’avais prêtée à un ami. Et si c’était à refaire, je le referai. On est très proches. Quant à l’alcool ? Si un fan me surprend en train de boire qu’il l’arrache de mes mains et le jette. Parce que ce n’est pas une bonne chose (elle sourit). Personne n’est à l’abri des rumeurs. Il faut se référer au prophète Mohamed (Psl) pour comprendre que la vie est ainsi faite. C’est les effets pervers de la célébrité. C’est un choix que j’assume. Je dis à mes fans que je serai toujours la Patra qu’ils ont connu et que je ne changerai jamais ma ligne de conduite.
Financièrement, comment arrivez- vous à vous en sortir parce que vous n’avez plus de boulot et de mari ?
J’ai divorcé avec mon mari. Mais, il doit prendre en charge ses enfants. Et il s’occupe bien d’eux. Quand on se mariait, il ne travaillait pas à un certain moment. Financièrement, on s’en sortait bien. Bref, on dépend tous de Dieu. Il y a des millionnaires qui rencontrent toutes les peines du monde pour vivre heureux. Je rends grâce à Dieu.
Quels sont vos projets professionnels sur le court terme ?
Actuellement, j’envisage beaucoup de choses. Je veux entrer dans le monde de la mode parce que je suis passionnée de ça. J’ouvrirai un atelier de couture qui portera mon nom. Je m’y active avec mes sœurs Aminata Kane et mon manager (Lamine). Nous sommes en train de préparer beaucoup de bonnes choses. Je dois voyager pour mettre un peu de vide. A mon retour, je verrai comment me réinsérer dans une des télés de la place, parce qu’il y a beaucoup de propositions. Je préfère patienter pour approfondir les discussions avec ma famille.
Pourquoi cette instabilité dans votre carrière professionnelle ? Les gens n’avaient pas compris votre départ de la Rts....
A la Rts, je ne pouvais plus concevoir qu’on me payait un bon salaire et qu’on bloque mes émissions. Alors que moi, je veux vivre à la sueur de mon front. Je ne supportais plus ce lourd poids qui me pesait. Je prenais de l’argent alors que je ne travaillais pas. Et je suis partie dans le bureau de Babacar Diagne (ex-Dg de la Rts) pour lui présenter ma démission. Ensuite, on est devenu de vrais amis. Moi, je veux vivre à la sueur de mon front.
L’éclatement du ménage Pape cheikh Diallo et Mamy Ndiaye, votre fille, a connu beaucoup de bruit. Aviez-vous assez d’influence sur ce couple ?
Si on parle des travers de ce mariage, c’est à cause de moi. Parce que la maman de Mamy Ndiaye est une femme très célèbre. C’est aussi simple que ça. Sinon entre Pape Cheikh et Mamy, je n’ai jamais été au courant de grand-chose dans leur vie. Après leur divorce, ils sont devenus encore beaucoup plus proches et soudés.
C’est Pape Cheikh qui a courtisé Mamy à mon insu. Pape Cheikh, c’est mon fils. Je lui ai beaucoup appris dans ce métier et il le dit jusqu’à présent. Ma fille savait qu’à chaque fois qu’elle se disputait avec son mari, je prenais fait et cause pour son mari. Je pris le bon Dieu pour qu’ils restent toujours en parfaite harmonie.
Le jeune écrivain Ousseynou J. M. Guèye a présenté, jeudi, son ouvrage « Ahmadou Bamba, le solitaire de Dieu » au West african research center (Warc). Dans cet œuvre qui retrace la vie et l’existence du fondateur du Mouridisme Cheikh Ahmadou Bamba, l’auteur prétend explorer« la vie privée du Cheikh ,sans faire du voyeurisme».
Ousseynou J. M. Guèye, jeune étudiant de 23 ans en Sciences économiques, a procédé, jeudi, à la présentation et aux dédicaces de son deuxième ouvrage « Ahmadou Bamba, le solitaire de Dieu ». Cette cérémonie qui s’est déroulée au Warc, présidée par le professeur Iba Der Thiam, a réuni beaucoup d’autorités religieuses et politiques à l’image de Serigne Cheikh Fatma Mbacké, Serigne Moustapha Diattara, conservateur de la bibliothèque Khadim Rassoul de Touba, ou de Mamadou Diop Decroix.
Après un premier ouvrage consacré à la vie du prophète Mouhamed (Saw), ce nouveau livre d’Ousseynou Gueye a été agréablement accueilli par les personnalités présentes lors de la cérémonie. Selon l’auteur, cet ouvrage résulte d’abord d’un besoin de savoir sur son guide religieux qui l’animait, mais aussi d’une envie de partager ses recherches sur le saint homme.
« On me posait beaucoup de questions sur la personnalité de Cheikh Ahmadou Bamba. Je ne savais pas quoi répondre exactement, alors je me suis lancé dans la recherche », indique l’auteur.
Préfacé par Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, « Ahmadou Bamba, le solitaire de Dieu » est un livre qui étudie le quotidien de l’homme qu’était le fondateur du Mouridisme. En effet, celui que le professeur Iba Der Thiam surnomme « le génie de l’intelligence » s’est un peu démarqué de l’aspect religieux de la vie de Cheikh Ahmadou Bamba dans cet ouvrage.
« J’ai en quelque sorte étudié la vie privée du Cheikh, sans pour autant faire du voyeurisme », signale Ousseynou Guèye. Selon le professeur Iba Der Thiam, « ce livre marque un tournant par rapport à sa démarche, à l’angle adopté par l’auteur. Il mérite sa place dans toutes les bibliothèques du Sénégal ».
Dans un style d’écriture d’une simplicité remarquable, cette œuvre de Ousseynou Guèye comporte trois grandes parties : d’abord il y a le « contexte », c'est-à-dire la période un peu avant la naissance du Cheikh ; ensuite « la vie de l’homme », qui s’intéresse surtout à son quotidien ; et enfin « l’heure de la récompense » qui parle de son exil au Gabon.
Le conservateur de la bibliothèque de Touba, Serigne Moustapha Diattara, a félicité cette initiative de Ousseynou Guèye âgé seulement de 23 ans et invite les jeunes à en faire autant pour pérenniser les œuvres des hommes religieux du Sénégal.
YAYE FALL JUSQU’AU BOUT DES... ONDES
SEYNABOU SIDIBÉ, CHANTEUSE DE KHASSAÏDE ADULÉE À DIOURBEL
Ses rendez-vous avec les auditeurs sont très courus et aussi bien suivis par les auditeurs et talibés mourides qu’elle berce à travers les chants des khassaïde qu’elle débite sur la chaîne régionale de Diourbel. En transe ou en pleurs, certains fanas n’hésitent pas à faire le déplacement pour venir voir de près ce bout de femme qui les tient en haleine les jeudis et vendredis soir. Agée de 50 ans, Seynabou Sidibé a dédié sa vie au Cheikh du mouridisme.
Le rêve est devenu réalité. Native de fatick, cette fille de sérère n’était pas mouride à ses débuts. C’est en 1998 qu’elle a vu en songe Serigne Fallou Mbacké qui lui prédisait un avenir radieux dans le mouridisme si elle cessait le boulot qu’elle effectuait dans une entreprise de la place. Le songe se révéla réalité.
Dès le lendemain, elle est licenciée par le directeur à 11H comme l’avait dit Serigne Fallou Mbacké en rêve. Le reste de sa vie est une succession d’évènements heureux. Seynabou Sidibé, chanteuse de khassaïde, est une icône à Diourbel. En 1978, elle fait acte d’allégeance à Serigne Modou Diouf Borom Bak. Mais, son destin est au bout des... ondes.
Elle taquine le micro à la radio Touba internationale dirigée à l’époque par Ndella Madior Diouf. Mère de famille, la cinquantaine, cette dame à la démarche alerte, est reconnaissable avec son accoutrement «Baye Lahat». Depuis cette date, elle fond sa silhouette dans l’univers médiatico-mouride où elle est respectée. Et son talent célébré.
Le 14 janvier 2004, elle fait le grand saut : elle commence à animer des émissions à la station Rts de Diourbel. L’intéressée raconte des débuts difficiles. Elle dit : «C’est le 14 janvier 2004 que j’ai débuté. C’était avec Ousmane Tanou Diallo (actuel chef de la station Rts de Kaolack) qui m’a beaucoup épaulée. C’était difficile parce que je quittais Dakar pour venir animer des émissions. Une année durant, j’animais les émissions le mercredi et le jeudi nuit et le lendemain, je rentrais à Dakar. Je n’avais pas de cachet.»
Mais, elle est poussée par son élan de mouride. Elle a su déplacer les montagnes pour se retrouver à sa position actuelle. «Avec ma foi mouride, je savais que tôt ou tard, j’allais exceller dans ce travail et récolter les fruits», sourit-elle. Elle pétille de bonheur au milieu des collègues qui saluent son talent de chanteuse de khassaïde. «C’est un symbole de la Rts», témoigne Mahmoud Myriam Niang.
«Elle est une femme toute dévouée à la cause du mouridisme», ajoute-t- elle. Ces témoignages sont corroborés par Demba Malick Mbodji, le chef de la station Rts de Diourbel. «Il y a un an, lors de notre prise de contact, elle est venue dans mon bureau pour me dire : ««Diawrigne naniou dok si deugue kécé» (Ndlr : Chef, qu’on se dise la vérité). Elle s’est tellement fondue dans son monde et que pour elle, tout tourne autour de la philosophie Baye Fall. Tout est abnégation chez elle. Elle apporte son dynamisme. C’est une femme de défi aussi bien à la radio où elle fait un travail professionnel remarquable que dans ses activités dont elle me rend compte des fois. Humainement, elle est très naturelle. Elle n’hésite pas à dire ce qu’elle pense»», explique Demba Malick Mbodji.
Communicateur traditionnel, Alé Niang relativise ce succès en formulant des conseils : «C’est une professionnelle très passionnée, cultivée qui connaît bien le Cheikh et son histoire mais elle gagnerait à cultiver ses ardeurs. Elle devrait refréner ses ardeurs et parler moins à l’antenne.» Seynabou Sidibé conjugue son temps professionnel à la vie et à l’œuvre de Serigne Touba.
«Les commérages et les parlottes de grand’places», Seynabou Sidibé a décidé de s’en débarrasser pour vivre pleinement sa foi et sa passion. En termes d’audimat, les émissions de Seynabou Sidibé sont très suivies dans le Baol où sa silhouette ne passe plus inaperçue dans les rues sinistrées de Diourbel. Le serveur explose. Emotive, elle craque souvent durant ces rendez-vous avec les auditeurs.
Aujourd’hui, cette passion pour le Cheikh lui ouvre d’autres opportunités. Les retombées sont là : Elle perçoit des adiyas (dons) en nature et en espèces. Elle a trouvé un nouveau créneau pour asseoir son appartenance dans cette confrérie. Depuis quelque temps, elle collecte des tonnes de couscous qu’elle distribue lors du Magal de Touba. Pourquoi le choix du couscous ?
«Il faut se souvenir que lorsque le Cheikh était à Komack, les talibés qui allaient lui rendre visite lui apportaient comme présent du couscous. Une partie du couscous est aussi distribuée dans les daaras pour aider les talibés», répond-elle. Le mouridisme, c’est son opium. En parlant de cette confrérie, ses yeux frétillent d’extase. Elle ne s’arrête pas. Elle est possédée par le Cheikh.
Silhouette sahélienne, Seynabou Sidibé est très respestée dans l’establishment mouride. Invitée dans tous les Magals qui se déroulent un peu partout au Sénégal, Seynabou Sidibé est aussi une médiatrice sociale.
Dans les familles, elle est sollicitée pour régenter les conflits sociaux comme les divorces et les différends familiaux. Apôtre de la paix et de la droiture, Seynabou Sidibé déteste «l’hypocrisie et ceux qui négligent leur religion».
LES DERNIERS RÊVES ARTISTIQUES DE SOULEYMANE KEITA
Dakar, 24 juil (APS) - L’artiste-peintre Souleymane Keita, décédé samedi à l’âge de 67 ans, avait des projets, dont le premier, personnel, était la création à une cinquantaine de kilomètres de Dakar d’un espace culturel dans lequel il voulait rassembler ses œuvres exposées dans des galeries à travers le monde.
‘’Il est (…) venu le temps de mettre sur pied un espace culturel, entre quatre murs. J’ai plein d’œuvres d’art qui sont dans des galeries en France, aux Etats-Unis, je veux les rapatrier. C’est sur ça que je travaille’’, avait-il dit lors de l’émission ‘’Culture en fête’’, diffusée le 21 avril 2012 sur la radio privée Sud Fm.
Alors qu’il venait de recevoir le Grand Prix du chef de l’Etat pour l’ensemble de son œuvre, Souleymane Keita avait dit son ‘’devoir’’ d’assumer cette distinction en mettant en œuvre des projets personnels et en rappelant les préoccupations des artistes.
Souleymane Keita est considéré comme l'un des précurseurs de la création contemporaine au Sénégal. Il a étudié à l’Ecole nationale des Beaux-Arts de Dakar, sous la direction d’un autre peintre, Iba Ndiaye (1928-2008). C’est en 1969 qu’il a commencé à exposer ses œuvres aux quatre coins du monde.
Au sujet de la Biennale de l’art africain contemporain (Dak’Art), il avait rappelé que les artistes n’avaient pas encore eu tout ce qu’ils recherchaient à travers l’organisation de cette manifestation dans la capitale sénégalaise.
‘’Nous voulions que Dakar soit une plaque tournante pour le marché de l’art’’, rappelait-il, relevant que ‘’beaucoup de gens se battent pour récupérer cette biennale’’. ‘’Je ne citerai pas de personne ou de pays, mais si nous ne sommes pas vigilants, d’ici quelques temps, nous aurons des difficultés pour organiser la biennale’’, avait-il averti.
Il ajoutait : ‘’Ce serait dommage, parce que la pression va être trop forte et il va de plus en plus être question d’argent. Il faut qu’on travaille à pérenniser la biennale, parce que c’est très important pour la jeune génération. C’est une question de volonté politique. On ne peut forcer aucun Etat à le faire.’’
Pour Souleymane Keita, il est urgent de créer un musée d’art contemporain qui, selon lui, ‘’revêt une importance capitale’’. ‘’Cela peut, disait-il, inciter des personnes qui hésitaient à s’intéresser au domaine de l’art à avoir confiance et à investir dans le secteur.’’
Il était convaincu que, ‘’pour la reconnaissance des artistes locaux et du reste du continent, ça doit être quelque chose de nouveau, d’original et de simple’’ où pourraient être mises des œuvres d’artistes comme Iba Ndiaye, Ousmane Faye, Seydou Barry…
‘’Ça aurait été tellement intéressant d’avoir un endroit où on pourrait trouver les œuvres de ces artistes ainsi que des œuvres monographiques’’, soutenait Keita, estimant toutefois que le problème est politique’’.
Concernant l’Ecole des Beaux-Arts, il s’agit selon lui de savoir jusqu’à quel niveau l’Etat est prêt à hisser cette institution à un niveau lui permettant de remplir ses missions académiques.
‘’L’école n’est pas dans un bon état. Tous les deux ans, on entend dire qu’elle a été déplacée. Elle n’a pas un budget à la hauteur de ses missions’’, déplorait l’artiste, par ailleurs préoccupé par le développement d’un mécénat d’art.
Le concept est fondé sur le partage dans cette « vaste et grande cour avec toujours une porte toujours ouverte ». Dans la langue mandingue, l’expression « Korda Ba » renvoie non seulement à l’immensité de la cour, mais aussi au fait qu’on y entre en apportant quelque chose. Et par extension, Ablaye Cissokho y invite ses amis, musiciens comme mélomanes.
En fait, une « continuité de la scène, permettant par exemple à des artistes du « In » du festival, de venir côtoyer d’autres personnes, des jeunes, de nouer des rencontres artistiques ». Déroulé « Autour de minuit », le spectacle d’Abdoulaye Cissokho a été le plus couru durant le festival après les prestations du « In » de la place Faidherbe.
Pour ce musicien, qui se définit comme « petit griot qui joue à la kora tout en essayant de préserver l’héritage qui m’a été légué », le Festival de jazz constitue une « identité » eu égard au fait de l’opportunité artistique et à la renommée qu’il a eues grâce à celui-ci. D’aucuns le désignent d’ailleurs, de son air de faux timide, comme le « totem » du festival qui l’a vu grandir.
L’artiste dit « être redevable à la ville de Saint- Louis qui m’a tout donné ». Même son épouse. « Je suis tombé amoureux de la ville », souligne-t-il, de ses binocles d’intello qui s’exprime dans un français très correct acquis certainement avec ses nombreux voyages.
Se voulant griot, Abdoulaye Cissokho revendique être, à la base, un « noble qui ne cours pas les baptêmes, mariages ou cérémonies auxquels » il n’est pas invité. Il se veut un gardien de la tradition qui préfère aller « jouer dans les bars ou restaurants pour gagner mon pain » et ne pas se contenter de l’étiquette d’un « griot collant». Il est d’avis qu’il « n’est pas facile d’être un griot dans un environnement où l’on n’est pas écouté et compris ». Le jeune griot a compris très tôt qu’il pouvait vivre de son art tout en restant un « gardien de la tradition ».
Aussi, il dit jouer pour les mélomanes sans pour autant donner un qualificatif à sa musique. « Je préfère laisser les autres caractériser ma musique. Certains disent que je fais du jazz, d’autres du classique. Il y en a même qui soutiennent que je fais du blues. Je peux dire que je ne suis pas à la recherche de quelque chose, mais bien à la découverte », estime l’artiste qui déroule dorénavant une carrière internationale qui l’a conduit un peu partout dans le monde.
Ce qui entre en phase dans sa conception de l’art qu’il voudrait être un « dialogue permanent entre artistes ». Il est à l’aise quand il partage la scène avec d’autres confrères. Et laisse libre cours à l’expression d’une partition solo d’un musicien qui se lance.
Parlant du festival de jazz, Abdoulaye Cissokho appelle toutes les bonnes volontés à le soutenir puisqu’il s’« agit là d’une vitrine pour la ville ». Bien que la « Fondation Bnp Paribas et la Bicis sont des acquis pour le festival, il faudrait que d’autres sponsors puissent venir appuyer ce qui se fait ».
Il dit aussi être reconnaissant à l’endroit de l’institution bancaire et sa Fondation qui l’ont permis d’ « asseoir une carrière ». « J’insiste beaucoup sur le soutien de la Bicis puisqu’elle m’a appuyé pour mon premier album en 2008. C’est grâce à la banque que j’ai connu la Fondation Bnp Paribas qui m’a soutenu également dans mes projets artistiques et permis de me produire à l’étranger », rappelle M. Cissokho.
Avec neuf albums à son actif, il taquine aussi la musique de film depuis trois ans. Si les débuts ont été difficiles, il ne regrette pas le chemin parcouru qui l’a permis de se forger une stature artistique. Il vient juste de créer une entreprise culturelle et promet un album à la fin de cette année.
Interpellé par tout ce qui se passe dans son environnement, Abdoulaye Cissokho dit se laisser guider par son inspiration. « Je ne force pas les choses quand je compose. Les choses m’arrivent naturellement, mais mes chansons constituent souvent un condensé de l’actualité.
Des thèmes comme l’amour, la paix, la mort m’inspirent naturellement », confirme celui qui chante la plupart du temps dans la langue mandingue.
22 ANS D’EXISTENCE, DEBOUT MALGRÉ UN MANQUE CRIANT DE MOYENS
La 22ème édition du Festival de Jazz de Saint-Louis (du 4 au 8 juin dernier) n’a pas dérogé à la règle : la scène offerte par la rencontre artistique demeure l’une des attractions de l’ancienne capitale de l’Afrique occidentale française (Aof). D’un projet de budget de 204 millions de FCfa, la dernière édition s’est contentée d’une « portion congrue », selon les termes du président de l’Association Saint-Louis Jazz, Me Ibrahima Diop. Une réalité qui pose avec acuité la question de la précarité d’un Festival qui est devenu et demeure, selon certains, la « plus grande scène ouest-africaine ». Très couru par les autorités, élus locaux, mélomanes et touristes, le Festival ne voit pas tout l’engouement qu’il suscite traduit en termes de soutiens financiers conséquents. Heureusement que certains sponsors n’ont pas failli, se félicite Me Diop. Au nombre desquels la Fondation Bnp Paribas et la Bicis.
Le temps du festival (cinq jours), Saint-Louis devient le point de rallie- ment des mélomanes, mais aussi de disciples tidjanes férus de la nuit spi- rituelle de Serigne Cheikh, dont la tenue coïncide habituellement, dans la vieille ville avec cet événement occasionnant beaucoup d’embouteillages. La tranquille ville n’a alors plus rien à voir avec le cliché carte postale de ville indolente avec son nouveau pont Faidherbe et les belles et mystiques bâtisses de l’île.
Le contraste des deux manifestations, musicale et religieuse, qui cohabitent et au grand bonheur des Saint-Louisiens est simplement le reflet d’un esprit de paix, mais aussi d’une cohabitation harmonieuse nés d’un héritage hétéroclite et de tolérance des « Ndar-Ndar ». Faisant de la ville la capitale de la musique sénégalaise, l’une des plus « grandes scènes » même si le président de l’Association Saint-Louis Jazz, Me Ibrahima Diop, ne peut pas l’appuyer avec des chiffres précis.
Préoccupé qu’il est, avec les membres très volontaires de son Association, à honorer le rendez-vous qu’ils ont instauré avec les fils de la ville, mais surtout avec toute la diaspora et les mélomanes qui s’attendent, chaque année, à retrouver les plus belles affiches de « passionnés du jazz ». Impossible de ne pas se retrouver nez à nez avec les touristes qui arpentent les ruelles de l’ancienne capitale du Sénégal, parcourent les marchés de Sor ou étables de Nguet-Ndar ou encore se paient une virée sur le fleuve Sénégal à bord du Bou El Mogdad qui renferme une mine d’infos sur un pan de l’histoire coloniale des villes traversées.
Cette année, 22ème édition de ce rendez-vous, a été synonyme de retours. Que ce soit celui de la tête d’affiche, l’Américain Lucky Peterson, ou ceux des Franco-Sénégalais, Wasis Diop et Hervé Samb, ou encore des Cubains de l’Orchestra Aragon.
Un Lucky Peterson qui, après avoir irrité son clavier et chauffé la mythique place Faidherbe de sa chaude et envahissante voix, se confond avec ses inconditionnels d’un soir qui accueillent avec bonheur ses notes de guitare. Tout sourire, heureux de semer le bonheur, Peterson est comblé de distiller des notes de joie. Jusqu’à en perdre une corde de sa rythmique guitare, ce qui n’altère en rien les variantes gammes qu’il joue.
« Je me sens un privilège d’être ici. Je souhaite que mes enfants viennent ici, ressentent ce que je ressens présentement. La musique est ma vie et c’est aussi mon travail. J’aime rendre les gens heureux », s’exclame- t-il. Heureux comme lui qui clôt l’édition bien que le public en redemande et le pousse à rester sur scène des minutes durant encore.
Cette 22ème édition, c’est aussi le come-back d’un Hervé Samb qui a grandi en talent 19 ans après son premier passage et qui a plus que chauffé la scène avec sa guitare magique.
Air nonchalant et absent, voix traînante, Wasis Diop n’en restera pas moins également dans les annales de cette édition. Versant à souhait dans la provocation, il a démontré, 17 ans après, qu’il était encore maître de son art, puisant au fond de lui-même dans une invite à « dépasser les clichés » pour former la grande « famille humaine ». Que dire du retour du mythique Orchestra Aragon, qui a ouvert le bal et placé la barre très haut ? Qu’il continue simplement d’ « œuvrer pour le bonheur des mélomanes, indépendamment des vicissitudes de l’histoire ».
Le groupe cubain a rendu un hommage appuyé à Pape Seck par une reprise de « Yaye Boye » qui a fait danser le nombreux public. Mais visiblement, leur art était encore là, comme il y a près de vingt ans, quand Aragon s’est produit pour la première fois à Ndar. A l’arrivée, cette édition a été un bon cru même si le Festival de Saint- Louis gagnerait à se professionnaliser davantage. « Nous sommes parvenus à avoir un plateau relevé malgré toutes les difficultés que nous connaissons. La tête d’affiche, Lucky Peterson, nous a coûté cher, mais il n’y a pas de regrets à nourrir.
Nous gérons des conflits à l’ombre, mais c’est quasiment le propre de toutes les grandes organisations », reconnaît le président de Saint-Louis Jazz. Pour Me Ibrahima Diop, des « coupes drastiques » ont été opérées dans le budget. Ce qui explique que le colloque qui avait été prévu sur le « liens entre le coton et le jazz » n’ait pu se tenir.
Encore que le « Off » du festival a coûté 5 millions de FCfa, selon Me Diop qui regrette certains « couacs » dans la communication indépendamment de l’ « engagement bénévole des membres de la structure ». D’où le sens de son appel à tous les « Saint-Louisiens d’ici et de la diaspora » pour faire face aux « terribles pressions financières ».
Me Diop s’est réjoui du soutien constant de la Banque internationale du commerce et de l’industrie du Sénégal (Bicis) et de la Fondation Bnp Paribas, ses principaux sponsors. « Il faut reconnaître que c’est grâce au partenariat de la Bicis que nous avons pu réaliser ce que nous avons fait », dira- t-il reconnaissant à l’endroit de l’institution financière. Pour sa part, le directeur général de la Bicis, Pierre Bérogovoy a réitéré le soutien de la banque et de la Fondation Bnp Paribas.
« Notre histoire avec le Festival est une histoire ancienne. Le partenariat s’est renforcé. Nous sommes conscients que cet événement culturel a un impact sur l’économie locale », explique M. Bérogovoy justifiant que la décision de son institution de ne plus « amener de musiciens ou de groupes de jazz » par la volonté de laisser à l’Association Saint-Louis Jazz les coudées franches. Une telle décision a été prise en parfaite intelligence avec les organisateurs, selon lui.
Il insiste d’ailleurs sur le « renforcement du partenariat sur de nombreux autres domaines », mettant l’accent sur l’impact économique du festival sur la ville et le « calme plat qui l’envahit », le mardi, lorsque les rideaux tombent sur la scène.
CES OBJETS SURCLASSÉS PAR LES TIC
RADIOCASSETTES, TELECOPIEURS, DISQUETTES, MACHINES A ECRIRE.
Ce sont des objets jadis tendance mais qui sont aujourd’hui presque jetés à l’oubli. Radios ou vidéocassettes, télécopies, machines à écrire, phonographes, tourne-disques, électrophones sont chassés du quotidien par l’Internet, les Compacts disques (Cd), ordinateurs, les imprimantes, les clefs USB, les smartphones, les tablettes et autres gadgets des temps modernes. La révolution des technologies de l’information et de la communication est passée par là. Pourtant, ils ont fait les beaux jours de l’humanité. Coup de projecteur sur une mutation spectaculaire.
Casquette bien vissée, démarche nonchalante, jean mis en évidence, écouteurs fixés aux oreilles, Bacar, 26 ans, étudiant au département d’Anglais de la faculté des Lettres et Sciences humaines de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, « kiffe » du son à partir de son « Ipod ». Les écouteurs qui lui collent aux oreilles, l’empêchent de saisir le moindre bruit dans son environnement immédiat.
La multitude de chansons composées par divers artistes, qu’il parvient à écouter, à partir de ce petit instrument nommé « Ipod » canalise son attention. Il n’arrive plus à se passer de ses oreillettes, qui lui sont devenues une sorte de « fétiches ». Une manière également pour lui, de s'isoler et de déserter, l'espace commun.
Trouvée chez elle, Ndèye Fatou Ndiaye, 30 ans, agent commercial dans une structure de téléphonie mobile, allume son ordinateur pour «mettre du son». Une fois dehors, elle branche le fil des écouteurs rattachés à son téléphone portable et sélectionne une « playlist ». «Cela fait des années que j'ai pris ce réflexe de mettre de la musique quand je vais quelque part», explique-t-elle. Au travail, Ndèye, se « débranche » le temps de remplir sa besogne et d'échanger avec ses clients. Une fois sur le chemin du retour, elle remet le son en marche. Le soir venu, elle travaille ou se détend... toujours en musique.
Avec le tournant numérique et le développement du téléchargement sur Internet, « l’oreillette», a fini d’envahir l'espace urbain. Dans les transports en commun, à pied, en courant ou à moto... partout, des individus vissent leurs écouteurs ou fixent leur casque.
D’autres parés de leur baladeur MP3 ou de leur Smartphone, s'envoient une dose de décibels. «L'importance qu'ont pris ces écouteurs dans nos vies est incroyable. Comme si l’on ne pouvait plus rien faire sans eux!», souligne cet adepte trouvé au marché de Sandaga.
Le Mp3 est un moyen d’écoute performant en tant que tel, car permettant l’intégration dans un seul système global, d’une multiplicité d’éléments. « Dans une autre époque, cela dénotait de l’impossible. Pour entendre ses différents artistes musiciens, il faillait se procurer leurs cassettes. Prendre le soin d’écouter la face A, avant de passer à celle dite B. Encore que cette audition ne pouvait se faire que sur place. Nous étions alors à l’ère des radios cassettes », note Maguèye Diop, la soixantaine.
Cette époque révolue, a suffisamment fait son temps. Aujourd’hui, il est question d’instruments beaucoup plus performants, à même de vous procurer le contenu désiré, sans fournir trop d’efforts. « La relation de mélomane à artiste passait traditionnellement par l’achat d’une cassette, qu’il fallait se procurer sur le marché, avant que le stock ne s’épuise. Aujourd’hui, grâce à Internet, le client devient un élément du système de gestion globale de son écoute. Il contrôle ses goûts musicaux. Un ensemble très accessible d’envoi de sons est ainsi instantanément réalisé », regrette ce nostalgique.
Une disparition qui s’opère à compte gouttes
Parmi ces instruments « révolutionnaires », figure également la clé USB qui permet de stocker facilement des fichiers, à partir de tout système disposant de prises ordinateur. La clé USB permet donc de transférer des données et donne la possibilité de sortir assez facilement, une copie électronique. Elle admet également à ceux qui le désirent, de télécharger des sons de l’ensemble de leurs artistes.
Nous sommes loin de l’époque où la machine à écrire faisait les beaux jours de la civilisation moderne. Les secrétaires, devant leur appareil, s’appliquaient avec ardeur. Le bruit aigu qui se dégageait des tapes de saisie, était alors perceptible à mille et une lieues.
Une mutation, d’ampleur grandissante, des machines est donc en train de se produire. Il s’agit de l’impact des Technologies de l’information et de la communication (Tic), de leur utilisation, en particulier. Ces nouvelles machines se distinguent, en raison de leur portée révolutionnaire.
La machine à écrire, instrument de bureautique, constituait une sorte de substitution à l’imprimerie. Elle permettait à l’utilisateur d’imprimer, sur place, des textes de quantité moindre. Elle faisait, dès lors, partie de l’environnement des dactylographes.
« Il nous paraissait alors impossible d’imaginer un bureau, une administration, une chambre d’étudiant sans clavier dactylographique. Qu’elle soit portative, standard, ou à traitement de texte. Il y a toujours une machine à écrire quelque part », note dans un brin nostalgique, Khadijatou Sy, secrétaire à la retraite.
Aujourd’hui, les ordinateurs portables, machines fixes et autres... font le travail. De fait, même si quelques machines à écrire subsistent encore, elles sont devenues très rares. Leur disparition n’est, en réalité, assujettie qu’à une question de temps.
Autrefois en vogue, aujourd’hui méconnue
« Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai reçu un télégramme de l'asile : Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués. Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier ». Le récit du livre d’Albert Camus, l’Etranger, paru en 1942, commence par cette annonce autant sèche, dure, qu’imprécise. C’est qu’à l’époque, les télégrammes étaient comptés par les doigts de la main, il fallait alors faire preuve d’ingéniosité et d’esprit succinct dans la transcription.
La télécopie était l’instrument d’échange par excellence, pour les questions urgentes. Facebook n’était pas en vogue, les correspondances parvenaient à travers la poste, ou à partir d’envois de Fax. « L’échange est aujourd’hui beaucoup plus interactif, il permet à deux individus de communiquer facilement à temps réel, sur la base d’une simple connexion internet.»
Aussi, les boites emails permettent d’envoyer et de recevoir des contenus en un temps réel. Hormis cela, les usagers peuvent, sur place, échanger avec leurs amis à travers Facebook ou émettre des appels à partir des applications comme Skype, Viber ou encore Whatsup. Toutes choses qui, naguère, auraient requis une multitude d’efforts.
Ce changement qui préconise une véritable révolution, reçoit l’adhésion de la majeure partie des personnes interrogées. « Avec un téléphone portable, l’on peut aujourd’hui appeler, se connecter à Internet, écouter de la musique, suivre la radio, prendre des photos, gérer certaines données personnelles... le tout à partir d’un petit appareil. Cette révolution sonne comme un soulagement », note Adama Guèye, 40 ans, fonctionnaire.
Il est loin derrière nous, cette époque où les cassettes, les télécopieurs, les tournes disques et autres machine à écrire ou autres composantes du vintage étaient tendance. A l’époque de la miniaturisation et du nec plus ultra, ce sont les smartphones, les tablettes et l’Inter- net qui sont en vogue. Jusqu’à nouvel ordre !
Ces bourreaux des Tic
Ils allument leur ordinateur au lever, consultent leur courrier électronique plus de dix fois par jour, ne vivent que pour le net... Les accros de l'Internet sont de plus en plus nombreux. Au début, c'était un outil nouveau, un instrument de travail, un moyen rapide de communiquer avec ses contacts. Progressivement, Internet est devenu une véritable contrainte pour certains, qui n’arrivent plus à s’en passer.
Difficile d'imaginer que cette jeune femme souriante et posée vit un véritable calvaire. Nulle nervosité ne transparaît dans son attitude, si ce n'est un léger tremblement de ses doigts. Et pourtant, Awa Badji, 21 ans, est une «internaute addict » : depuis qu'elle a découvert l'e-mail dans ses études, elle n’arrive plus à s’en passer.
Elle consulte son courrier jusqu'à vingt fois par jour, allant même jusqu'à se lever au milieu de la nuit, pour voir qui est sur « Facebook », un réseau virtuel qui permet de communiquer instantanément avec ses contacts connectés. « C'est plus fort que moi. L’idée qu'un message ait pu me parvenir pendant mon sommeil m'angoisse littéralement», confesse-t-elle. La majeure partie des dépendants de l’Internet sont des cadres qui, dans l’exercice de leur fonction, ont constamment besoin de cet outil.
Au début de l’histoire, Internet est pour eux, un outil nécessaire, s'ils veulent rester compétitifs. « Dans mon travail, il est essentiel d'être flexible, rapide, efficace. L'e-mail est un instrument clé du consulting moderne, un moyen d'intégrer le management. Je pensais utiliser le web juste pour rentabiliser mes contacts professionnels, c'est le web qui m'a utilisé», déplore Jean Batiste Diatta, 28 ans, cadre supérieur dans une compagnie de téléphonie.
Internet est, désormais, une nécessité des temps modernes, un doudou numérique pour les plus jeunes, un instrument de secours pour les seniors. Il est devenu une exigence dont on a de plus en plus de mal à se passer. « L’internet occupe, en effet, une place centrale dans notre vie de tous les jours », note Ibrahima Bâ, informaticien dans une agence de publicité. Ibrahima qui relève ne pouvoir plus se passer de cet instrument, devenu incontournable dans ses activités, est un parmi tant d’autres. Les possibilités sont infinies.
Consulter l'annuaire, se localiser en temps réel, relever ses e-mails, jouer, regarder des vidéos, écouter de la musique, prendre des photos ou des vidéos, se connecter aux réseaux sociaux Facebook et Twitter, lire des magazines ou la version numérique des dépêches, etc. « Internet me permet de faire tout cela à distance », souligne t-il.
L’homme a la cinquantaine révolue mais ne fait pas son âge. Il a une passion : le vintage. Modou Gadiaga qui a vécu dans l’univers des cassettes les chérit au point d’en collectionner à la pelle. Aujourd’hui, ce tablier qui a pignon sur rue au marché Petersen, revend ces objets d’un autre âge aux mélomanes nostalgiques.
Il y a des hommes qui ont du mal à se départir du passé. Des hommes qui incarnent des valeurs aux antipodes de celles en vogue dans la société moderne. Et ces hommes, Modou Gadiaga en fait incontestablement partie. Né aux confins du Baol, il y a plus de cinquante ans maintenant, Modou est un homme qui se plait dans la vente de cassettes. A Petersen où il a son commerce, il fait partie des rares personnes qui s’adonnent maintenant à cette activité liée au vintage. A une autre époque.
Le commerce de casettes fut jadis lucratif. Il y a une quinzaine d’années, cette évolution technologique était le « must » en termes de musique. Tous les grands artistes célébraient, avec faste et fierté, la sortie de leurs casettes.
Les hommes d’affaires de l’époque ont vite saisi la balle au rebond en investissant dans les studios de production. Les cassettes, dernière trouvaille technologique de l’époque, avaient fini de chasser des habitudes les électrophones, les phonographes et autres tourne-disques.
A présent, les cassettes, qu’elles soient destinées aux radios ou aux postes téléviseurs, sont, à leurs tours, chassées par les Compact disques (Cd), les clefs USB et les autres gadgets technologiques. Ce sont ces objets d’un autre âge que proposent Modou Gadiaga. Sa place, où plutôt ce qui en fait office, se trouve sur la rue qui relie Petersen au siège de l’ancien service d’hygiène. Sous un parasol de fabrication artisanale, il range des milliers de cassettes, de toutes sortes, à même le sol. Les cassettes sont tellement nombreuses que leur rangement forme une sorte de table derrière laquelle, il place un banc sur lequel, il s’assoit pour superviser sa marchandise.
« J’ai de fidèles clients qui ne compte que sur moi pour des cassettes », fait remarquer Modou Gadiaga. Ce frêle bout d’homme au teint basané a longtemps baigné dans l’univers des cassettes. Un de ses frères, Oumar Gadiaga en l’occurrence, avait mis sur pied la structure Gadiaga Production.
A l’époque, le frérot avait produit beaucoup d’artistes sénégalais. Il fut, en outre, familier aux studios Xippi et Origines propriétés respectives de Youssou Ndour et El Hadj Ndiaye. Deux hommes qui n’ont pas raté la marche du train. La baraka aidant, ils ont su suivre l’évolution des technologies. Modou lui a foi à son commerce, foi aux hommes, foi à l’avancée des technologies de l’information et de la communication.
Il rappelle que les mutations sont incontournables dans la vie. « C’est l’évolution des technologies », souligne-t-il. « Maintenant, on parle de Cd, de clefs Usb, de Mp3, je suis sûr que dans une dizaine d’années, ces objets seront obsolètes », se console-t-il.
Il rappelle qu’il y a des années, étaient dans le vent, les personnes qui possédaient ces objets qui à l’époque étaient à la pointe de la technologie. Qui vient chez Modou ?
Généralement ce sont les personnes du troisième âge, les mélomanes bucoliques et les nostalgiques surannés. Ils demandent surtout des classiques de la musique sénégalaise en particulier et ceux africaines en général. D’autres ont leurs artistes fétiches et sont prêts à acheter leurs produits quels que soient les supports musicaux.
D’ailleurs, selon Modou, il est beaucoup plus prudent de conserver des sons en cassette qu’en Cd ou autres moyens modernes. « La poussière ou les virus peuvent facilement endommager ces nouveaux outils », fait-il remarquer.
Modou Gadiaga reconnait l’utilité de la modernité. Il souhaite plus tard proposer à ses clients ces objets miniaturisés. « Si j’ai les moyens, je vais diversifier mon commerce. A côté des cassettes que je vends, je veux aussi vendre des Cd, des Mp3, et autres objets numériques », fait-il noter.
Au bord de cette route passante, Modou a les yeux rivé sur sa marchandise. Tantôt, il répond à une interrogation d’un passant sur tel ou tel produit, tantôt il dépoussière les cassettes. Il philosophe : « Comme vous le savez, ce n’est pas trop facile de tout abandonner du jour au lendemain. Il y a beaucoup de gens qui comptent sur moi pour s’approvisionner en cassettes ».
On est dans une société où les cassettes sont passées de mode. Pourtant, Modou n’éprouve aucune difficulté à s’en approvisionner. « Il y a environ sept à huit ans, j’avais une bonne quantité de cassettes inutilisées alors, j’ai décidé de les vendre. C’est ainsi que de fil en aiguille, je me suis mis dans le commerce de cassettes », se souvient-il.
A présent qu’il a pignon sur rue, ce sont les collectionneurs et autres mélomanes d’antan qui viennent lui proposer des cassettes. Des produits qu’il revend à des prix modiques. Parfois, lorsque la chance lui sourit, il peut réaliser un bon chiffre d’affaires. Mais cela arrive exceptionnellement. Aussi, il est obligé de vendre quelques objets courants dans la vie de tous les jours, histoire de joindre les deux bouts.
Les artistes plasticiens ont rendu un dernier hommage à Souleymane Keita, décédé le samedi 19 juillet 2014. Il fut l'un des peintres qui ont donné à l'art contemporain sénégalais sa splendeur. Son œuvre associe dessin, couleur, collage et couture. La nature l'a beaucoup inspiré. Si on le classe dans « l'Ecole de Dakar », sa démarche artistique ne relève pas d'une telle approche.
Souley Keita avait l’âme d’un îlien. La musicalité de sa voix était toute goréenne. Il est né sur cette île de Gorée où l’ocre des maisons se marie au bleu de l’océan. Il y a grandi et travaillé. Sa peinture porte les couleurs et l’apaisement de cette île. Au temps où il vivait sur l’île avant de rejoindre le continent, sa maison au flanc de Castel était empreinte de cette quiétude que transportent les vents du sud, d’une pointilleuse douceur aussi. La décoration intérieure de cette charmante demeure était un compromis entre style ancien et style moderne, plus ancien que moderne. Il trouvait dans la broderie fait main d’admirables motifs au charme bucolique exécutés attentionnèment par les grands-mères.
Sa collection de malles de boucaniers et de meubles des années 50, taillés dans le pitchpin, témoignaient de sa passion de tout ce qui pouvait procurer une agréable sensation au toucher. Tout dans cette maison qu’il habitait avec Khady, son épouse saint-louisienne relevait de la composition ; respirait l’ordre et soulignait le bon goût de l’artiste. Son raffinement.
En venant s’installer sur le continent, il y avait amené son île. Souley avait dessiné la pochette du premier album de l’orchestre Xalam, se souvient Henri Guillabert l’un des musiciens du mythique groupe. Une manière pour l’artiste plasticien Souleymane Keita, décédé à l’âge de 67 ans, de soutenir l’émergence d’une musique sénégalaise dans les années 70 qui plaçait la barre un cran au-dessus et dans une nouvelle orientation.
Souleymane Keita que tout le monde se plait à appeler Souley Keita était amateur de jazz. Il peignait sous l’impulsion de cette musique. Peintre discret, spirituel à souhait, sa palette a des accents soufis par la quiétude et la sérénité qui s’en dégage. Ce qu’avait perçu la philosophe Aminata Diaw de l’UCAD qui, dans sa présentation à l’exposition de Souley Keita en 2007 et intitulée « Ndokalé Gorée », écrit « Son œuvre trouve sa force dans cette incertitude qui lui tient lieu d’impulsion originelle et transforme la peinture en expérience esthétique et existentielle. Peindre devient une rencontre avec la vie, une expérience de l’âme à travers des formes , des couleurs , de la matière, des émotions… une quête de soi. » Elle conclut en disant : « Le travail de Souleymane force le respect tant il est empreint aujourd’hui de la sérénité et de la justesse qui invitent à méditer sur soi et sur la vie »
Loin des coteries, des courants à la mode, il tirait de la nature, qu’il savait observer et qui le lui rendait bien des formes, des ambiances, des atmosphères. Pleine Lune à Gorée (1987), Souvenirs du Cap-Vert (1988), Voyage au Mali (1985), il arrachait à chacun de ses voyages un lambeau du pays visité pour les fixer dans la mémoire de ses toiles. Il plaçait sa création au confluent de ce qui apparaissait aux yeux des autres comme des oppositions. Qu’est- ce qui en effet peut unir un papillon et une méduse. Ont-ils la chance de se croiser en chemin ? Ils ne sont ni du même milieu ni de la même forme. Souley Keita voyait dans les couleurs de leur revêtement des pigments que peut saisir l’œil de l’artiste pour les projeter sur la toile. Ainsi naquit la collection Papillons et Méduse revêtue de camaïeu, de pastel et d’aqua marine.
Les Criquets sont d’une autre facture. Sa première exposition personnelle date de 1969. C ‘est le hall de la BIAO, une banque de Dakar, qui avait accueilli ses œuvres. Une exposition qui allait se déplacer au Centre culturel français de la même ville. Deux ans après c’est au tour de Nouakchott de recevoir sa peinture. De 1972 à 1991, Souley keita a presque montré sa palette, tous les ans, dans divers lieux avec des changements de formes dans ses supports et dans son approche picturale, mais toujours fidèle à l’art abstrait porteur de sens. Ouagadougou, Creusot Loire, Toronto, France, Cap-Vert, les galeries new-yorkaises (Randall gallery Madison ; Phelps Stoke Fumb, The Uptown Gallery; Joan Wood Land, Spectrum IV Gallery, Charles gallery Brooklyn, Robonart ltd gallery, Kenkeleba gallery, Diane Brewer arts work gallery, International Monetaey Washington DC,), toutes ces galeries ont salué son travail.
Les créations de Souley Keita n’ont pas seulement l’accent du terroir mais portent les marques de l’ailleurs. Voyage au Mali en 1985 sacre un tournant dans la peinture de Souley Keita , une découverte des origines en quelque sorte et l ’apparition de scarifications, de fil de coton, de nœud, de couture dans son travail. Le pays Dogon et les habits du chasseur ouvraient ses yeux sur une autre façon de percevoir l’art en Afrique. La chemise du chasseur en témoigne. Ce qui le pousse à aménager un petit atelier de recherche dans son propre atelier. Apparition de l’encre de chine, couleur goudron et technique monocolore, fruits de ses recherches.
Souley Keita était un peintre naturaliste. A sa manière, il militait pour la protection de la nature et avait fondé avec Marie Josée Crespin et d’autre amis goréens une association pour reverdir l’ile. Il était aussi dans la culture bio avec son épouse. Céramiste de formation , il a souvent travaillé en complicité avec les Ateliers Almadies de Maoro Petroni, avec ses amis Amadou Sow, Anta Germaine Gaye . C’est un grand peintre qui disparait et dont Jo Ouakam Issa Samb disait, dans son texte « La lumière éclatée » : « Sa peinture propose de reconsidérer le trait même s’il se refuse à être confiné à l’essentiel »