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4 mai 2025
Opinions
Par Abdoul Aly KANE
LES INSTITUTIONS FINANCIÈRES INTERNATIONALES, LES ETATS AFRICAINS ET L’AFRIQUE
Le directeur de Département Afrique du FMI a entrepris une tournée sur le continent à l’effet de s’enquérir sur le terrain de l’état des économies africaines touchées par les chocs exogènes du Covid et de la guerre en Ukraine
Le directeur de Département Afrique du FMI a entrepris une tournée sur le continent à l’effet de s’enquérir sur le terrain de l’état des économies africaines touchées par les chocs exogènes du Covid et de la guerre en Ukraine.
Au terme de cette tournée, M. Selassié a tiré des conclusions et formulé des recommandations sur lesquelles nous souhaiterions nous attarder quelque peu, en nous adossant bien entendu au rôle que ce partenaire joue depuis près d’un demi-siècle auprès de nos gouvernants en matière de conseils de politiques publiques et de financement des besoins à court terme de notre économie. « Le FMI n’a jamais été aussi engagée pour l’Afrique » a-t-il soutenu d’emblée.
Au regard de la situation actuelle, nous pensons qu’il aurait été mieux indiqué de parler de l’aide du FMI aux Etats africains pris individuellement, plutôt qu’à une Afrique dont nous appelons de tous nos vœux l’intégration économique de ses composantes. L’aide aux Etats a souvent abouti à une sorte de sédimentation de la dette.
Hélas, malgré les importants concours financiers du FMI et de la Banque mondiale durant près d’un siècle, les bilans des Etats africains sont en deçà des attentes, pour ne pas dire peu reluisants, en termes de développement économique.
Faute de pertinence dans les emplois des ressources empruntées, et du fait de l’exigüité des marchés intérieurs, les Etats bénéficiaires finissent généralement par demander des annulations de dette pour réenclencher un nouveau cycle. Cela a été le cas après l’initiative PPTE (Pays pauvres très endettés). C’est le cas actuellement après le COVID.
L’aide ou l’investissement en faveur du continent en tant que tel, ne devrait être évoqué que lorsqu’il s’agit de programmes communs d’infrastructures de désenclavement, de promotion du marché régional, de création de monnaie, d’éducation, de formation ou de politique de santé.
L’une des principales causes de l’inefficience des prescriptions des institutions de Bretton Woods tient, selon nous, à l’absence de viabilité économique de la majorité des Etats africains dont les produits arrivent sur un marché mondial où les prix leur sont imposés, parce que formés en dehors d’eux.
L’échange inégal amplifié par le peu d’envergure de nos Etats, donc de nos productions respectives, a été décrié par tous, de Léopold Senghor (détérioration des termes de l’échange) aux tenants de la théorie de la dépendance (Samir Amin, Ander Gunder Frank etc..).
Toutes les organisations africaines créées depuis près de 50 ans pour unifier le continent, en particulier sur le plan économique, se sont avérées inefficaces faute de volonté politique des chefs d’Etat, aidés en cela par un certain désintérêt des populations.
Jaloux de leurs prérogatives et sidérés par l’étendue de leurs pouvoirs s’apparentant à ceux des rois d’avant, les chefs d’Etat post indépendance ont vite fait de ranger dans les tiroirs les rêves de leurs prédécesseurs tels que Kwamé Nkrumah du Ghana, Namdi Azikiwe du Nigeria, Jomo Kenyatta du Kenya etc.
Nous devons à la vérité de dire que les pères du NEPAD à savoir Abdel Aziz Bouteflika, Thabo Mbéki, Hosni Moubarack, Olusegun Obasanjo et Abdoulaye Wade se sont lancés dans la direction de l’intégration économique. Cependant, malgré les promesses faites à ces dirigeants lors du sommet du G8 de Gleneagles en 2008 et la création de structures dédiées comme le PIDA avec l’implication des banques africaines de développement (BAD) dans l’exécution, les choses sont restées en l’état.
L’idéal aurait été que des structures comme la CEDEAO ou l’UA, accompagnées par les banques de développement africaines (BCEAO, BAD) et vigoureusement soutenues par les bailleurs de fonds, puissent initier et réaliser des projets d’infrastructures de désenclavement financées avec la garantie des Etats riverains.
A notre connaissance, parmi les projets d’infrastructures de désenclavement identifiés par le NEPAD, seul le projet de développement de l’autoroute du « corridor Abidjan – Lagos » est en voie de réalisation.
Longue de 1 028 kilomètres et devant relier les capitales de cinq États d’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin et Nigéria), elle a pour objet de «promouvoir le commerce transfrontalier, d’intégrer les économies au sein de l’espace CEDEAO, de réduire les coûts de transport, de stimuler le commerce interrégional et de renforcer l’intégration régionale en Afrique de l’Ouest. Last but not least, cette infrastructure routière doit contribuer à accélérer la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf)».
En définitive, contrairement aux dires du représentant du FMI, les Etats africains ne sauraient être « l’Afrique », faute d’homogénéité de l’espace, de libre circulation des biens et des personnes, d’infrastructures routières, portuaires, aéroportuaires, ferroviaires, reliant les uns aux autres.
Vers un nécessaire désenclavement infrastructurel du continent
Toutefois, il semblerait que l’idée du nécessaire désenclavement infrastructurel de l’Afrique continue à faire son chemin. « Avec les partenaires du G7, nous visons à mobiliser 600 milliards de dollars, d’ici 2027, pour des investissements mondiaux dans les infrastructures », vient de déclarer la Maison Blanche pendant le sommet du mois de juin du G7 à Elmau. D’aucuns ont commenté cette annonce en ces termes : « C’est pour répondre aux projets portés par la Chine en Afrique, et à l’intérêt accru de la Russie pour le continent ».
En effet, faute de fluidité dans le transport africain, quelle efficacité attendre de la Zlecaf si les marchandises restent encore en souffrance, en proie à la qualité des routes et aux tracasseries administratives aux frontières ?
Si le Mali a absorbé 20 % des exportations du Sénégal en 2021, c’est bien parce qu’il est relié à notre pays par la route et le chemin de fer ; par conséquent, investir dans l’amélioration de l’état de la route et du chemin de fer vers ce pays est autrement plus profitable en termes de croissance et d’emplois que la réalisation d’infrastructures de transport à portée locale.
C’est la libération du marché africain de ses entraves en matière de circulation de biens qui permettra d’enclencher un processus d’accumulation primitive et « densifier » à terme le tissu économique africain.
Pour conclure, citons quelques conclusions d’un rapport intitulé « Des infrastructures de qualité pour l’Afrique du 21ème siècle », élaboré à la demande de Nana Akufo-Addo, président du Ghana, par l’OCDE, le Centre Africain pour la Transformation Économique (ACET) et l’AUDA-NEPAD : « En 2050, l’Afrique comptera 2.5 milliards d’habitants, soit près de deux fois plus qu’aujourd’hui. Face à ce bouleversement, le continent doit de toute urgence accélérer la construction d’infrastructures (routes, ponts, réseaux d’énergie, ouvrages hydrauliques, réseaux numériques, etc.) tout en veillant à leur qualité », selon un nouveau rapport publié par le Centre de développement de l’OCDE et en partenariat avec, Agence de Développement de l’Union Africaine.
Les modèles économiques habituels de réalisation de projets n’ont pas réussi à fournir les services d’infrastructures que requiert la dynamique de la croissance démographique et de l’urbanisation à l’œuvre en Afrique. Trente voire quarante années peuvent s’écouler entre la conception et l’achèvement d’un projet élémentaire, au terme desquelles les infrastructures mises en place ne correspondent plus aux besoins de la population et de l’économie.
Cela suppose de remédier aux lacunes des deux principales approches des partenaires financiers et techniques des pays africains : celle qui vise à aider à renforcer le cadre institutionnel parallèlement à la construction de l’infrastructure, et celle qui a pour objet de développer les infrastructures rapidement, la mise en place des institutions étant considérée comme une question locale et évolutive » (fin de citation).
Par Moussa KAMARA
LOI DU TALION
Ce qui s’est passé à l’aéroport d’Istanbul avec les Lions du Basket prouve que l’Egypte ne démord toujours pas de sa volonté farouche de laver l’affront des rayons lasers.
Ce qui s’est passé à l’aéroport d’Istanbul avec les Lions du Basket prouve que l’Egypte ne démord toujours pas de sa volonté farouche de laver l’affront des rayons lasers.
Et pourtant, c’est bien les ressortissants du pays des Pharaons qui avaient ouvert les hostilités contre le Sénégal au Caire lors du match aller. Au retour nous leur avons outrageusement rendu la monnaie de leur pièce. Et ce qui aurait dû se limiter au football a migré vers le basket.
Depuis les années 60, le Sénégal ne faisait que tendre l’autre joue après avoir reçu une bonne claque. Les supporters sénégalais ont décidé que cet état de fait ne doit plus perdurer. C’est à présent la loi du talion qui va s’appliquer pour tous les désagréments subis dans nos matchs à l’étranger. On a joué longtemps aux bons Samaritains presque partout en Afrique et maintenant que nous avons glané notre premier titre de champion d’Afrique de football, il nous faut défendre notre honneur partout où besoin sera. C’est si simple parce que désormais il sera difficile de parler football en Afrique sans penser au Sénégal.
Pour ce couronnement à Yaoundé derrière lequel nous avons couru depuis une soixantaine d’années, jamais les manifestations de l’accueil n’avaient été si populaires et si monstrueuses. Nous avons tellement rêvé de cette étoile floquée sur le maillot à la poitrine de nos « Lions » que beaucoup de nos grands sportifs n’ont pas eu le bonheur de fêter parce que définitivement partis. Nous avons longtemps subi dans notre chair les avanies que nous ont fait endurer nos ‘’amis’’ d’Afrique du Nord.
De Rabat au Caire en passant par Tunis, Alger et Tripoli, les Arabes et le fair-play, c’est toujours zéro. Ici au Sénégal, les problèmes du Sport sont gérés par un seul ministre quand chez les Arabes c’est tout un Etat qui s’aligne derrière les fédérations.
Quand l’Egypte refuse d’accorder un visa après des heures d’attente dans des conditions effroyables à un supporter sénégalais qui a accompagné tous nos sportifs dans tous les lieux de compétition à l’extérieur, on s’en désole puis on en rit. Les Sénégalais sont des champions qui apprennent vite et bien.
Le gouvernement peut s’accommoder de bonnes relations diplomatiques mais le public sportif a des ressentis pas du tout protocolaires. Il réclame du respect et de la sportivité sans quoi il va toujours appliquer la loi du talion.
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SAARABAA : LA COVID-19 EXISTE, JE L’AI RENCONTRÉE
EXCLUSIF SENEPLUS - Abdoulaye Elimane Kane revient dans ce nouveau livre, sur son expérience avec le coronavirus dont il a souffert en février 2021, étant asthmatique. L'auteur évoque aussi les implications de la prise en charge médicale de la pandémie
SenePlus publie ci-dessous, les bonnes feuilles du nouveau livre d'Abdoulaye Elimane Kane, "Saarabaa. La Covid-19 existe, je l’ai rencontrée", récemment paru aux éditions L'Harmattan Sénégal. L'ancien ministre y relate son expérience d'asthmatique infecté par le virus en février 2021 et les implications de la lutte contre cette pandémie.
Préface
Djibril Samb, médaille d’argent de l’Académie française, Professeur émérite des universités, Grand-Croix de l’ordre du Mérite.
Abdoulaye Élimane Kane, professeur émérite des universités de son état, est un écrivain accompli qui s’est essayé à tous les genres littéraires, de l’essai au roman en passant par l’autobiographie et la littérature de jeunesse 1, entre autres. Il est donc rompu à toutes les techniques de l’écriture. L’on ne s’étonnera pas qu’aujourd’hui, avec ce nouveau livre, peu volumineux mais dense, intitulé : "Saarabaa. La Covid-19 existe, je l’ai rencontrée", il explore un genre particulier : le récit.
Le livre d’Abdoulaye Élimane Kane, en effet, est un récit au sens que retient, en première intention, la 9e édition du Dictionnaire de l’Académie française (sub verbo), suivant ses ipsissima uerba : « Relation, narration, orale ou écrite, d’un événement ». Qu’entend-on par événement, ici ? En seconde dénotation, cette fois, les Immortels définissent ainsi ce substantif : « Ce qui survient, ce qui arrive, en un temps et en un lieu déterminés ». Si l’on regarde la définition de l’événement par l’Académie, elle comporte trois composantes consistant en une substance « factuelle » et deux coordonnées, géométrique (un lieu) et physique (un temps). Le lecteur retiendra que, dans le sens précis où je l’entends, l’événement ne renvoie à rien de controuvé ni d’irréel.
1 Christian Chelebourg, Francis Maucoin, La littérature de jeunesse, Paris : Armand Colin, 2007, 126 p
Avant – propos
J’avais l’intention de prendre part à des initiatives très pertinentes concernant des témoignages sur la perception des différents aspects de la pandémie créés par la Covid-19. J’ai hésité entre plusieurs formules. Celles qui m’avaient le plus tenté étaient les suivantes. Broder sur une parole de la sagesse des Haalpulaaren que j’ai mise en exergue dans deux ouvrages portant en partie sur la maladie : « La santé est l’article premier de la prospérité. » Une telle approche m’aurait permis de puiser dans différentes sources de l’actualité médicale des arguments venant confirmer la pertinence de cette assertion. J’ai aussi été tenté de consacrer une telle contribution à l’application d’un autre aphorisme qui fait l’éloge de la médecine comme activité singulière parmi toutes celles qui concourent à réaliser un équilibre entre l’homme comme être biologique et son environnement social et naturel. C’est au philosophe et médecin Georges Canguilhem que nous devons cette assertion : « La médecine est un art au carrefour de plusieurs savoirs. »
Première partie
Le choc
La Covid-19 existe. Je l’ai rencontrée. Vivant avec une maladie chronique, l’asthme, depuis près de quarante ans, je suis un spécimen de ce que convoite la Covid-19 : les avis scientifiques n’ont cessé de faire savoir que ceux qui sont porteurs d’une comorbidité sont davantage susceptibles de souffrir de l’infection de ce virus. Aussi, prenant les précautions d’usage imposées par l’asthme tout en observant les mesures et gestes barrières, j’ai fait de mon mieux dès les premières annonces relatives à l’apparition de ce virus pour ne pas être vulnérable. Lorsqu’en début février 2021, j’ai ressenti les premiers symptômes de ce qui se révélera par la suite être une attaque du virus, le monde est depuis un an soumis à la loi de la Covid-19 qui n’a épargné aucun pays et a fait s’effondrer de nombreux pans de la vie économique, sociale et culturelle. Le virus est entré au Sénégal le 2 mars 2020 et le pays a enregistré son premier mort, Pape Diouf, le célèbre ancien administrateur de l’Olympique de Marseille, en fin mars.
L’Afrique est présentée dans les médias – et plus prudemment par l’OMS – comme le continent qui a le mieux résisté à cette pandémie alors que d’autres annonces faites au cours des premières semaines de l’apparition du virus faisaient craindre une hécatombe dans cette partie du monde. Le Sénégal est même cité dans le top des dix pays de notre Planète où il y a eu le moins de morts et où le système de santé a bien géré cette épidémie. Certains jours, on notait avec satisfaction zéro mort, et l’optimisme était de mise. Puis il y a eu cette seconde vague qui a tout remis en cause : recrudescence des cas de contamination, hausse du nombre d’hospitalisations, augmentation du nombre de décès même si, dans le même temps on note un nombre plus élevé de guérisons que de morts. Cette deuxième vague a commencé au Sénégal en début décembre 2020 et a duré quatre mois, y compris donc celui du mois de février 2021 au cours duquel j’ai senti les premiers symptômes de l’infection. Une troisième vague surviendra sans doute, voire une quatrième. Trois nuits de calvaire et besoin de comprendre C’est au cours de cette deuxième vague qu’un soir, vers 19 h, j’ai brusquement senti un refroidissement de tout le corps. J’ai pensé tout de suite à une grippe car il fait très froid en cette période à Dakar et la Cité où j’habite jouxte le lac du Technopole d’où nous parviennent de fréquentes rafales de vent.
Au cours de la période qui a précédé mon infection j’observais un régime alimentaire particulier et une hygiène de vie qui pouvaient expliquer cette nouvelle physionomie contrastant avec celle que j’ai longtemps affichée et plus conforme à l’idée qu’on se fait d’un asthmatique à vie. S’agissant justement de l’asthme, depuis un bon moment, je ne m’en plaignais plus ; je n’avais pas fait de visite médicale liée à une menace ou à un début de crise d’asthme depuis longtemps et il m’arrivait même d’oublier que j’ai toujours, par précaution, ma Ventoline par devers moi. Au cours de cette période de relatif bien-être, je monte les escaliers sans être essoufflé et chaque jour j’effectue à pied le tour de la Cité, où j’habite, pour une trentaine de minutes. En somme je suis bien dans ma peau, entouré par ma femme, mes enfants, leurs épouses et leurs enfants dans une ambiance chaleureuse. Comment ai-je été infecté, par qui, dans quelles circonstances ? Questions à nombreuses inconnues que beaucoup de patients infectés ont dû se poser. Passer en revue des hypothèses – la bonne vieille recette de Socrate / Platon pour chercher la vérité – est une méthode qui peut, à défaut de trouver la réponse, aider à circonscrire le champ des possibles.
Quatrième partie : réflexions sur les implications sociales, éthiques et épistémologiques de la lutte contre la Covid-19
Pour conforter cette position, il importe de l’examiner à la lumière d’une autre question rendue centrale par les conséquences des atermoiements, erreurs, tâtonnements et démissions liés à la soudaineté de la survenue de la pandémie, à la cécité et à l’imprévoyance de certaines politiques publiques : la santé doit-elle être la priorité des priorités ? J’ai, à ce propos, plus d’une fois cité un adage de ma langue maternelle, le Pulaar. L’aphorisme qui l’exprime porte une leçon de sagesse à méditer. Cet adage dit ceci : - « La santé est l’article premier de la prospérité. » : traduction non littérale. Sa traduction littérale est intéressante à mentionner : - « La santé est la fille aînée de la prospérité. » Le commentaire de ces deux versions est de nature à faire prendre conscience de la signification et de l’importance de la question qui nous occupe ici, à savoir si la santé est la priorité des priorités. Commençons par la traduction littérale : elle signifie que, de tout ce que la prospérité a produit, la santé est la première née. En conséquence : la prospérité d’abord, le reste ensuite avec la santé en tête. La première version (traduction non littérale) comporte une option nette pour une affirmation de la primauté absolue de la santé sur toutes autres questions, y compris la prospérité elle-même. Si la prospérité demeure le dénominateur commun de ces deux traductions, le statut accordé respectivement à la santé et à la prospérité dans l’ordre de préséance diffère d’une version à l’autre. Dans la version « littérale », la prospérité est la condition fondamentale de toute vie sociale bonne ; et la santé est élevée au rang de première bénéficiaire de cette manne qui la rend possible. Elle est la première née de la prospérité, elle n’a été possible qu’avec la prospérité du groupe même si elle occupe une place de choix. Dans la version non littérale la santé apparaît comme la condition de la prospérité. Elle est elle-même prospérité et métaphore de la prospérité car n’étant pas assimilable à un bien matériel au sens où l’on considère habituellement celle-ci : espèces sonnantes, biens immobiliers, objets en nature, bétail, etc. L’on comprend dès lors aisément que les tenants d’une conception techno-économiste du développement soient favorables à la version « littérale » et soient enclins à articuler des arguments visant à subordonner une politique de la santé à des conditions et résultats économiques. Nul ne peut nier que pour investir dans les domaines porteurs de croissance, de bien-être et de prospérité il est utile, voire nécessaire, que de la richesse soit produite. Et que des proportions variables de celle-ci soient affectées à différents secteurs en fonction de leur ordre de priorité. L’intérêt de la version non littérale, qui fait de la santé une priorité absolue réside en ceci : soutenir que sans la santé aucune perspective de prospérité ne peut être envisagée. La santé précède et conditionne le développement et donc la prospérité. Avec possibilité de répondre par ‘oui‘ à chacune des questions suivantes qui pourraient ruiner une telle thèse : - Même en cas de pauvreté ? Avant même qu’on ait des routes, des écoles, des maisons solides ? Et d’autres questions du même ordre. La radicalité d’une telle position n’est soutenable que parce qu’elle est la traduction d’un autre primat : la vie sur tout autre chose. Et dans cette notion de vie il y a certes le manger, le boire, l’habitat, les soins du corps, les loisirs, l’imaginaire et d’autres composantes du bien-être au sens large mais ces éléments énumérés sont, aussi, des composantes de la vie et de la santé. Cette position radicale est surtout une manière de rappeler les décideurs à leurs devoirs : on ne peut pas faire de la santé la parente pauvre d’une société qui aurait pour valeur première l’accumulation et le profit au bénéfice d’individualités ou de groupes privilégiés, situation qui condamne la majorité de la population à se « débrouiller » pour survivre ou à attendre que la prospérité des dits groupes dégage des excédents à distribuer à d’autres catégories de citoyens et à des secteurs jugés plus ou moins subalternes, dont celui de la santé.
Retour sur Saarabaa, une métaphore de la santé ? Dans ce récit, j’ai, à plusieurs reprises, fait mention de cette œuvre musicale, après avoir rappelé dans quelles circonstances malheureuses je l’ai découverte et comment elle a été présente dans mon esprit au cours d’un long mois d’hospitalisation. Tout au long de cette épreuve, j’ai été écartelé entre l’envie de connaître le sens de cet air devenu, malgré moi, un mantra et le souci de ne pas ajouter à l’anxiété d’un moral rythmé par entre des hauts et des bas. En cause : les deux sentiments contradictoires que ce mantra a fait naître en moi dans les différentes occurrences de son surgissement, tantôt la tristesse, tantôt une certaine forme d’entrain. C’est par conséquent cette ambivalence qui m’a amené, aux différentes étapes de mon traitement, à prendre la décision, dès que je recouvrerai la santé, de pousser plus avant mes investigations sur les différentes interprétations de cet air afin de tirer au clair ce qui pour moi est jusque-là resté une énigme : s’agit-il d’une œuvre exaltant la gloire du personnage désigné dans son titre ? Avons-nous plutôt à faire avec un chant de détresse ? Cette œuvre étant chantée en langue wolof, un idiome que je comprends et pratique couramment pour quelles raisons le sens des paroles ne m’a pas été accessible après avoir écouté, dans mon bureau, au cours de cette nuit de souffrance, les interprétations de Samba Diabaré Samb et d’un orchestre mauritanien ? Essentiellement pour la raison suivante : si le refrain « nañu dem Saarabaa, nañu ñibi Saaraba est transparent et immédiatement intelligible il n’en n’est pas de même pour les autres paroles. En effet les griots ont une élocution particulière et, étant des poètes ils usent d’un langage imagé, marqué par une tendance à l’emphase quasi permanente car la louange occupe une place centrale dans la pratique de leur métier d’artistes. Déjà, je me doutais bien que Saarabaa comme toponyme ne correspondant à aucune localité du Sénégal d’aujourd’hui : ce nom pourrait alors évoquer un village, une contrée, un royaume du passé, effacés de nos mémoires et conservés grâce à une technique de substitution au nom propre comme par exemple « La ville Lumière » pour dire Paris. D’où la nécessité de pousser plus avant cette investigation. Après ma sortie d’hôpital, j’ai tenu à observer la période de convalescence sans courir aucun risque de la perturber. Aussi n’ai-je pas ouvert mon bureau ni travaillé sur mon ordinateur pour procéder par moi-même à la recherche de ces informations complémentaires.
Par Papa Mouhamed DIOP
LA GESTION DE L’EAU À MBORO
D’Ofor à la plateforme Aquatech Dégage, en passant par la société concessionnaire Aquatech, Mboro n’a jamais connu de stabilité dans la gestion de sa boisson précieuse.
On ne le dira jamais assez, la gestion de l’eau à Mboro, est d’une nébulosité extrêmement grave. D’Ofor à la plateforme Aquatech Dégage, en passant par la société concessionnaire Aquatech, Mboro n’a jamais connu de stabilité dans la gestion de sa boisson précieuse.
En effet, comme à l’accoutumée, chaque année, la population est plongée dans un désarroi total. Depuis presque une semaine, l’eau ne coule plus des robinets et la raison d’une telle situation est inconnue. Au début, on nous avait déclaré une pièce de rechange provenant de Dakar et maintenant, c’est silence radio. Qu’en est-il de la pièce ? Doit-on éternellement laisser la gestion de l’eau entre les mains IN-EXPERTES d’une tierce plateforme ?
En outre, le président de le République avait demandé en août 2020, à son ministre de l’Hydraulique, de statuer de façon définitive sur le cas de Mboro. Qu’en est-il aujourd’hui ? D’ailleurs, le 1er décembre 2020, la plateforme Aquatech Dégage avait, dans sa réunion préparatoire pour la marche contre Aquatech, soutenu qu’elle allait «installer une gestion communautaire». Qu’en est-il aujourd’hui ? Ne se sont-ils pas éternisés à la tête de la gestion de l’eau ? Ce que je craignais d’ailleurs pour avoir alerté la population à cette époque. Le même jour où il avait sorti un communiqué, j’ai posté ceci : «Aquatech Dégage à vous de dégager afin que l’eau coule à Mboro.» Qu’est-ce que cela ne m’avait pas coûté en termes de calomnie ?
Dans ce «brûlot», je craignais la politique de «ôtes toi de là que je m’y mette», et voilà que deux ans après, l’histoire m’a donné raison, aucune «gestion communautaire» n’est faite. On s’attendait au moins à une gestion de transition. C’est-à-dire prendre les rênes de la gestion de l’eau et passer ensuite à un appel d’offres, afin de laisser la gestion de l’eau entre des mains EXPERTES, avec un cahier de charge bien ficelé. Et dans ce cas, on n’en serait pas là aujourd’hui. .
L’eau, bien que n’étant pas une compétence transférée, il n’en demeure pas moins vrai que son utilité est une affaire de survie. Fort de cela, la mairie doit prendre son courage à deux mains et se saisir de ce dossier pour ne serait-ce qu’assurer son premier rôle, qui est de veiller sur la sécurité de la population. Il n’y a pas plus sécurisant que d’avoir de l’eau en qualité et en quantité, mais aussi avec des factures vraiment abordables.
Papa Mouhamed DIOP
Coordinateur du Fsd/Bj Mboro
Par Mame Atta GUEYE
LETTRE À HAMIDOU
Il n’y a pas lieu d’être tellement hargneux à l’égard de Sonko au point que les gens finissent par faire de toi maître El Hadji Diouf sans les grimaces, insultes et conférences de presse
Il n’y a pas lieu d’être tellement hargneux à l’égard de Sonko au point que les gens finissent par faire de toi Maître El Hadji Diouf sans les grimaces, insultes et conférences de presse. Tes articles frisent une certaine obsession de dénonciation de Sonko.
Tu subis des critiques qui peuvent équivaloir à des menaces. Mais quel est ton poids intellectuel d’influence ? Si tu en as, tu ferais alors un contrepoids politique à lui. Cites-nous les passages où tu attaques Macky Sall sur le fait d’encercler la maison de Sonko, de refuser le droit de manifestation, de brader les points de notre économie aux multinationales. .
Tu es, toi aussi, dans le jeu de dénonciation de Sonko pour avoir des prébendes ou quoi ? Je ne le crois pas. Tu en es sachant tout ce que des dirigeants de Gauche ont engrangé comme fonds de commerce pour ouvrir de sombres et tristes boutiques afin de capturer des prébendes de Macky.
Tu as peur peut-être d’une répétition de l’histoire en farce. La question est pertinente alors, parce que la vraie réflexion devrait porter sur la reconnaissance du boom d’entrée en politique des jeunes, de ce qui se configure comme enjeux, argile à pétrir dans le bon sens du peuple.
Tu t’es demandé pourquoi ces milliers de jeunes sont des sujets de la politique par le biais d’une filiation presque messianique à Sonko. Qu’est-ce que le régime a fait pour que ces jeunes se fidélisent à l’appel et l’image de Sonko ?
Macky Sall et sa politique y sont pour beaucoup. As-tu fait une analyse socioéconomico-anthropologique de ces jeunes fatigués des défaillances des élites politiques, particulièrement d’une certaine Gauche historique ayant vendu son âme au libéralisme ?
Et puis, tu ne dois pas te prendre au piège de croire que des jeunes ne savent même pas lire pour t’attaquer. Descends de ton piédestal et écoute-les. Ils parlent de leur vécu économique sans avoir lu si tu veux. Moi, je crois que l’école de la vie les a formés à être des militants d’un changement réel. Et ils argumentent, construisent des discours sur leur vie sans avenir, sur la politique rendue à fabriquer des opinions de mensonges et d’insultes, de complots. Ils veulent un autre système. .
Posons alors le débat sur la catégorie de système. Je crois que le contrat de confiance qu’ils instruisent, avec Sonko ou n’importe qui, est lourd. Ils pensent et savent, contrairement à ce que je crois que tu penses d’eux. Et ils signifient à Sonko qu’ils ne lui pardonneront rien en cas de défaillance. Ce n’est pas dans l’aveuglement conditionnel qu’ils se situent.
Leur enthousiasme est lu comme une simple connerie de jeunes pour des gens du pouvoir et certains autres conquis par leur confort individuel. C’est une insulte à leur endroit, un refus de voir dans cet enthousiasme, le levain de construction, demain, de ce pays, de l’Afrique et du monde des exploités. Il y a là évènement au sens de qui arrive de nouveau dans ce qui arrive. Ces jeunes veulent un changement réel. Sonko est l’espoir que Macky Sall leur a donné par sa radiation, la fouille nulle de son enrichissement, les complots, etc. Moi j’aurais aimé que ce soit un autre plus instruit de ce que le capitalisme est comme mode au point de faire de tous les gouvernements des fondés de pouvoir du capital. J’aurais aimé quelqu’un d’instruit des échecs de construction du socialisme pour s’en inspirer et innover une autre façon de vivre en commun de façon égalitaire.
Mais la réalité est autre et appelle que j’en prenne compte pour garder le cap car il y a Sonko et les jeunes. Mais cela n’empêche de faire quelque chose. Les jeunes des réseaux sociaux sont peut-être même aussi politiques que Sonko et toi et moi. Leurs analyses sont dotées de fondements réels. Le vrai débat, ce n’est pas d’aligner des références politiques intellectualistes, mais d’ouvrir des débats avec les jeunes (à l’intérieur de Pastef ou en dehors, contre Pastef ou sympathisants) sur les types de pouvoirs populaires, en dehors de l’Assemblée nationale, à constituer par les jeunes pour contrôler, vérifier les actions gouvernementales, choisir et démettre quand c’est nécessaire.
Le débat est : comment orienter avec les jeunes, la dynamique de vouloir plus d’égalité, de Justice pour que leur victoire ne soit pas volée comme elle l’a été avec Wade et Macky ? Sonko et qui que ce soit d’autre ne doivent pas voler cet élan d’en-commun en train de se construire. Tes taxations de fascisme, de populisme, d’intégrisme ont la même saveur de contre-productivisme (sans se faire de la même façon) que celle des influenceurs des réseaux qui insultent le père et la mère de Sonko. La bataille des idées a cédé la place à la caractérisation.
Et puis moi qui ne suis pas de Pastef, j’ose croire que Sonko ne peut être seul dans Pastef. Ils partagent avec des jeunes, des vieux, des femmes, intellectuels sincères de par leur engagement, leur parcours. Il est l’incarnation de l’UN d’un MULTIPLE. Comme toi, tu échanges, je suppose, avec ceux que tu nommes une opposition, la vraie contre Macky.
Cette incarnation du peuple par UN Sonko ou Thierno Alassane Sall ou Guy Marius ou Barthélemy, ne doit pas être vaine ou détournée par le pouvoir qui corrompt la raison. C’est pourquoi il faut questionner avec les jeunes dès maintenant, la nature de ce pouvoir et ce qu’il faut lui substituer. Et ce débat-là n’est pas public ou n’existe pas. La réalité est que des milliers de jeunes sont entrés à nouveau en politique. Un cycle est là, ouvert.
L’enjeu est d’organiser des débats sur les organes populaires nouveaux, à discuter comme autant de moyens pour ne plus élire Sonko ou un autre et en faire un monarque, un gourou, un saltimbanque, un prédateur financier. Nous sommes tous des intellectuels de la politique dès lors que nous déclarons sur le réel du pays.
Intellectuels bardés de diplômes français, arabes et autres, l’ère des intellectuels dirigeants charismatiques menant seuls la barque est révolue. Macky ne peut le comprendre.
Que Sonko le sache. Il faut des dirigeants vivant dans le peuple et de ce avec quoi le peuple vit, menant avec le peuple les luttes de transformations sociales et politiques dans l’intérêt de tous.
Que Sonko et autres l’entendent. Macky ne l’a jamais entendu. Il faut poser aussi le débat avec les jeunes, du recyclage politique des vieilles figures qui n’ont pas été bénies par le prince et se sont enthousiasmées dans la coalition Yewwi à l’idée d’une nouvelle cure de jouvence politique.
Nous devons discuter dès maintenant de la taille des gouvernements, du contrôle populaire des budgets ministériels, de la définition d’une autre assemblée et de son mode d’élection, dans le but de rompre avec la figure de fonctionnaire de la politique. Je crois que ces débats et tant d’autres s’instituent en pensées des enjeux de faire la politique de l’en-commun, de restituer le pouvoir aux masses.
L'organisation sous-régionale est dans l’impasse. Seul un autre type de leadership, imbu de l’idéologie panafricaniste et capable de défendre les intérêts des pays membres, pourrait en faire une CEDEAO des peuples
Le 3 juillet 2022, le Sommet du syndicat de chefs d’Etat de la CEDEAO a levé l’embargo illégal, honteux et inhumain contre le Mali ainsi que le blocage de ses avoirs à la BCEAO, pris depuis le 9 janvier 2022. Ces décisions sont tout simplement le résultat d’un constat d’échec cinglant qui discrédite davantage les membres de ce syndicat, notamment les vassaux de la France, Macky Sall et Alassane Ouattara.
Un échec cuisant !
En effet, l’embargo et les autres mesures scélérates avaient pour but de mettre le Mali à genoux et amener ses dirigeants à capituler. Mais dès le début, les choses étaient mal engagées, avec le refus de la Guinée d’appliquer les sanctions. Ensuite, la diplomatie malienne a intelligemment exploité les divergences au sein et en dehors de la CEDEAO. C’est ainsi qu’après Conakry, les autorités maliennes avaient pris langue avec la Mauritanie, qui a également refusé d’appliquer l’embargo malgré les appels du pied de la CEDEAO. Cela avait permis au Mali d’ouvrir deux corridors : Bamako-Conakry et Bamako-Nouakchott, pour expédier ses marchandises via les ports de ces pays. Le coup d’état intervenu au Burkina Faso, le 24 janvier 2022, renforça l’échec de l’embargo avec l’ouverture de la frontière avec le Mali. Ce fut le tour du gouvernement togolais de fermer les yeux sur l’embargo. Ce qui explique le rôle de médiateur que le Mali a confié au président togolais. Par ailleurs, la Cour de Justice de l’UEMOA avait condamné le gel des avoirs du Mali par la BCEAO et ordonné la suspension immédiate de la décision.
Mais les dirigeants de l’UEMOA, en particulier Macky Sall, Alassane Ouattara, les principaux vassaux de Macron dans la sous-région, refusèrent d’appliquer la décision de la Cour. En outre, les opinions publiques en Côte d’Ivoire et au Sénégal étaient en grande majorité hostiles à l’embargo et solidaires du peuple malien. Les secteurs économiques affectés par l’embargo, notamment les transporteurs routiers, avaient donné de la voie pour attirer l’attention sur les conséquences catastrophiques des décisions de la CEDEAO. Les actes de solidarité envers le Mali et ses dirigeants se sont multipliés au Sénégal et ailleurs. Plusieurs dizaines de jeunes sénégalais avaient marché de Dakar à Bamako où ils avaient reçu un accueil triomphal par les populations et rencontré les autorités maliennes. De jeunes guinéens leur avait emboîté le pas. Plusieurs délégations de la société civile africaine, dont celle du Sénégal, conduite par l’Honorable député Mamadou Diop « Decroix », le Pr. Pierre Sané et Guy Marius Sagna, avaient également été reçues à Bamako par les autorités de la Transition.
Une victoire du peuple malien et de ses dirigeants
Echec cinglant donc pour les dirigeants de la CEDEAO et de la France. Et victoire éclatante pour le peuple et les dirigeants maliens. En effet, le peuple malien avait administré une réponse magistrale aux présidents de la CEDEAO. La manifestation de centaines de milliers de personnes à Bamako et dans plusieurs autres villes ainsi que dans la diaspora malienne, le 14 janvier 2022, avait exprimé le rejet avec mépris des décisions illégales de la CEDEAO et de l’UEMOA. Cette démonstration de force comportait surtout un message clair et net : le peuple malien était prêt à tous les sacrifices pour préserver sa souveraineté et garder sa dignité. Ce puissant soutien populaire avait renforcé la détermination des dirigeants maliens à tenir bon face aux pressions à la fois de la CEDEAO et de la France. Le Mali est donc sorti grandi de cette épreuve. Il est aujourd’hui perçu par l’opinion africaine comme l’exemple de pays africain capable de préserver sa dignité, son indépendant et sa souveraineté face aux pressions extérieures et aux défis internes.
Quant à la France, elle a été obligée de quitter honteusement le Mali, après plusieurs années d’échec dans la lutte contre le terrorisme, qu’elle a souvent instrumentalisé pour déstabiliser ce pays. La popularité d’Assimi Goïta est telle qu’il est assimilé à Thomas Sankara. Quant à Macky Sall et Alassane Ouattara, ils sont perçus par l’opinion africaine comme de vulgaires valets de la France, prêts à défendre les intérêts de celle-ci contre ceux d’un pays frère.
Le Sénégal, grand perdant
En décrétant cet embargo illégal, Macky Sall n’avait pas bien calculé les pertesincommensurables qu’il allait infliger à l’économie de son pays. Le patronat sénégalais et d’autres milieux d’affaires ont essayé de chiffrer ces pertes pendant les six mois qu’a durés l’embargo. Selon eux, le trafic de conteneurs avec le Mali a baissé de 70%. Cette baisse a affecté nombre de secteurs, comme les matériaux de construction, les produits chimiques et les produits alimentaires. A cela, il faut ajouter les pertes subies par les investisseurs du fait du gel des transactions financières décrétées par l’UEMOA. On voit ainsi que le Sénégal a été le dindon de la farce de cet embargo. Mais au-delà des chiffres, ce que le Sénégal risque de perdre c’est la confiance des milieux d’affaires maliens et sa crédibilité.
L’on peut se demander si au bout du compte, le Sénégal ne risque pas de perdre beaucoup plus, avec la possible réduction des activités des entrepôts maliens au Port autonome de Dakar (PAD). Les milieux d’affaires et une bonne partie de l’opinion se sont demandé depuis le début de l’embargo comment le président Macky Sall a pu soutenir une telle décision contre son principal partenaire commercial dans la CEDEAO, avec lequel les échanges annuels se chiffrent à près de 500 milliards de francs CFA. La fonction première d’un chef d’Etat est la défense des intérêts de son pays. Dans le cas présent, les intérêts du Sénégal ont été passés par pertes et profits pour promouvoir l’agenda de la France contre le Mali. En fait, le comportement des dirigeants de la CEDEAO face aux crises en cours amène à s’interroger sur l’avenir même de celle-ci.
L’avenir de la CEDEAO en question
Ces crises sont le reflet de la crise profonde qui ronge la CEDEAO elle-même. Après des décennies d’existence, elle semble être bloquée, incapable d’avancer, d’accomplir des progrès significatifs. Prenons le cas de la monnaie unique ou commune en débat depuis des décennies. Son adoption a été renvoyée à 2027. Mais au point où vont les choses cette échéance n’a aucune chance d’être respectée. Les crises de la Covid-19 et les bouleversements géopolitiques en cours, avec la guerre en Ukraine et ses conséquences, ont complètement changé le contexte économique mondial et africain. Cela a mis les pays de la CEDEAO dans une situation critique, illustrée par l’échec des politiques néolibérales complètement discréditées.
Sur le plan politique, les dirigeants de la CEDEAO, dont certains sont de véritables despotes, prétendent jouer aux gendarmes pour faire respecter « l’ordre constitutionnel » chez leurs voisins. Mais ils sont disqualifiés pour jouer ce rôle alors que ces despotes violent allègrement la Constitution de leur pays et n’ont aucun respect pour l’Etat de droit. C’est le cas notamment de Alassane Ouattara qui est à son troisième mandant et de Macky Sall qui cherche lui aussi à violer la Constitution pour briguer un troisième mandat en 2024. Ces dictateurs sont complètement disqualifiés pour donner des leçons au Mali et aux autres pays. Pas de doute, la CEDEAO est dans l’impasse. Seul un autre type de leadership, imbu de l’idéologie panafricaniste et capable de défendre les intérêts des pays membres, pourrait la sortir de cette impasse et en faire une CEDEAO des peuples.
Par Ismaila Madior FALL
QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES OBSERVATIONS DU DOYEN IBRAHIMA FALL
Parrainage électoral et liste de candidats aux législatives, la suggestion du Professeur Fall, ne se justifie pas au Sénégal où chaque veille d’élection est l’occasion d’annonce d’un chaos vite oublié au lendemain de la proclamation des résultats
1.Professeur émérite et jurisconsulte réputé, le doyen Ibrahima Fall a, outre la formulation de quelques observations condamnatoires du parrainage électoral en vigueur au Sénégal depuis 2018, émis des critiques sur les décisions prises par les autorités administratives et juridictionnelles (Conseil constitutionnel) relativement à la publication des listes de candidats aux législatives, avant d’en tirer la «conclusion-suggestion» de la nécessité de la suspension du processus électoral en cours et la tenue de concertations nationales inclusives en vue de l’adoption d’un nouveau code électoral consensuel, cohérent et débarrassé du système de parrainage.
2. Ayant été un étudiant admiratif du professeur Fall, je voudrais, sans avoir son sens de la formule, lui emprunter son style pour formuler, en tant que « citoyen et professionnel du droit public » comme lui, quelques observations sur ces observations.
3. Le doyen Ibrahima Fall considère que notre système électoral, notamment sur son aspect relatif au parrainage, est frappé d’illégalité internationale et nationale. Ce jugement hâtif et exagéré comporte quelques erreurs d’appréciation ou inattentions analytiques qu’il convient de souligner.
4. Sur l’illégalité internationale, il rappelle que dans un arrêt en date du 21 avril 2021, la Cour a considéré que le parrainage « constitue un véritable obstacle à la liberté et au secret de l’exercice du droit de vote d’une part, et une sérieuse atteinte au droit de participer aux élections en tant que candidat d’autre part ». Il souligne que la Cour a ordonné au gouvernement du Sénégal de supprimer « le système de parrainage électoral » ; Elle a également fait injonction à notre gouvernement de soumettre dans un délai de 6 mois un rapport sur l’exécution de sa décision. Une certaine prudence s’impose par rapport à l’interprétation de l’exécution de l’arrêt USL c/ État du Sénégal de la Cour de justice de la CEDEAO du 21 avril 2021 concernant la loi 2018-22 du 4 février 2018 introduisant le parrainage dans notre ordre juridique. La Cour a précisé que la loi sur le parrainage « n’a pas un caractère discriminatoire », point 84 ; elle a ordonné au gouvernement sénégalais de « lever tous les obstacles à une libre participation aux élections consécutifs à cette modification par la suppression du système de parrainage électoral » (point 105). Donc, la Cour semble condamner le mode opératoire pour filtrer les candidatures aux élections ; ce qui relève de la compétence des autorités nationales. Il convient, à cet égard, de préciser que la Cour d’Abuja récuse toute velléité d’assumer une mission de juge constitutionnel dans les États membres. La Cour ne s’immisce pas dans la manière dont les États exécutent ses arrêts. L’article 24§4 du Protocole de 2005 sur la Cour rappelle que « les États membres désigneront l’autorité nationale compétence pour recevoir exécuter la décision de la Cour ». Elle indique que ce serait contraire à sa vocation de « s’ingérer dans le processus d’exécutions de ses arrêts » (Djibril Yipene Bassole & Leone Simeon Martine, c/Burkina Faso, ECW/CCJ/JUD/25/16 du 11 octobre 2016). Le maintien du « système de parrainage » ne signifie pas forcément refus d’appliquer la décision de la juridiction communautaire par l’État du Sénégal comme le prétend le professeur Ibrahima Fall. Cela n’emporte pas, pour ainsi dire, d’« illégalité internationale », d’autant plus que la Cour n’a pas censuré la loi sur le parrainage validée par le Conseil constitutionnel du Sénégal. La question soulevée par la Cour relève plus du système d’opérationnalisation de la loi que de la légalité internationale qui est amélioration continue comme on l’a vu avec les candidatures aux législatives. A cet égard, l’État du Sénégal manifeste sa bonne foi dans la logique d’appliquer les décisions de la Cour de justice de la CEDEAO lorsque cela s’avère possible matériellement et objectivement. En outre, la Cour ne peut pas se prononcer sur une loi constitutionnelle instaurant le parrainage à la présidentielle ni se substituer au Conseil constitutionnel dans l’interprétation de la loi l’étendant aux législatives. Sur ce point, le dialogue en cours avec la Cour devrait permettre de vite lever ces équivoques.
5. A propos de ce qu’il qualifie d’illégalité nationale, le doyen Fall écrit : « A cette illégalité internationale du parrainage, s’ajoute une illégalité nationale. En effet, le maintien du parrainage, malgré l’arrêt de la Cour de justice de la CEDEAO, viole notre loi fondamentale qui, en son article 98, reconnait aux traités ou accords régulièrement ratifiés par le Sénégal une « autorité supérieure à celle des lois » nationales, ce qui est le cas à la fois pour le traité révisé de la CEDEAO et pour le protocole relatif à la Cour de justice de la CEDEAO». Là aussi, le raisonnement est affecté d’une erreur d’appréciation : le parrainage est depuis 2018 une loi constitutionnelle pour ce qui est de la présidentielle avant d’être étendue aux législatives par voie de modification législative du code électoral. Le principe du parrainage procède donc d’une règle de nature constitutionnelle avant d’être prolongé dans le code électoral. Or, l’article 98 de la Constitution cité par le Doyen Fall, qui reconnaît aux traités une autorité supérieure à celle des lois, ne s’applique pas à la Constitution et aux lois constitutionnelles, mais aux lois (ordinaires et organiques) comme le précise bien la loi fondamentale. En effet, cela échappe à bien des juristes : si, dans l’ordre juridique international, la supériorité des traités aux lois, y compris celles constitutionnelles, est admise, en revanche, dans l’ordre juridique interne, les traités ont une valeur supra-législative (rang supérieur aux lois), mais infra-constitutionnelle (rang inférieur à la Constitution). En effet, dans la plupart des Etats comme le Sénégal, la Constitution trône au sommet de la pyramide juridique et met en échec l’application de tout traité international qui lui est contraire. Ce qui explique l’obligation préalable d’une révision de la Constitution pour la ratification d’un traité international qui contiendrait des dispositions contraires à la Constitution.
6. En ce qui concerne la décision du Conseil arrêtant la liste des candidats, le doyen Ibrahima Fall s’érige contre la position du Conseil constitutionnel ayant déclaré irrecevables la liste des candidats titulaires de Yewi et celle des candidats suppléants de BBY qui ne respectaient pas les conditions exigées par la loi, en termes, respectivement, de complétude et de non-respect de la parité. Il fonde l’essentiel de son argumentaire sur l’unicité et l’indivisibilité de la liste des candidats pour le scrutin proportionnel. Sa stratégie argumentative a consisté à lister tous les articles du code qui usent du singulier en parlant de la liste nationale, mais en ayant eu l’honnêteté (et il faut le saluer) de citer un article décisif (article L 149) qui use du pluriel en indiquant les listes de titulaires et de suppléants. Cette variation rédactionnelle induit une ambiguïté de sens que seul le juge peut clarifier à partir de l’interprétation qui est, avant tout, acte de volonté avant d’être un acte de connaissance. Unicité ou dualité, solidarité ou autonomie desdites listes.
7. Ecrit en général par des politiques lors des concertations institutionnalisées, le code électoral contient souvent des dispositions dont la compréhension nécessite l’intervention des autorités chargées de mener les opérations électorales et, en dernière instance, de celle du juge, en l’occurrence le Conseil constitutionnel. Ce dernier ne se situe pas dans une posture de faire du bien ou du mal, de plaire ou de déplaire, mais simplement d’appliquer la Constitution, dans le sens de favoriser la participation à l’élection conformément à l’article 4 de la Constitution, mais dans le respect de la loi. Aussi, cette ambigüité rédactionnelle de ces dispositions du code électoral et de bien d’autres mérite d’être clarifiée à l’occasion de la prochaine revue du code électoral. Mais en attendant, que doit faire le juge devant des « incohérences du code électoral » ? Déni de justice ou interprétation constructive de la loi pour permettre la continuité du processus électoral dans le respect de la loi. Le Conseil a choisi le second terme de l’alternative. A cet égard, il faut juste rappeler au doyen Fall que cette trouvaille jurisprudentielle n’est pas le fait du Conseil constitutionnel mais plutôt de la Cour suprême qui, dans son arrêt du 24 juin 2014, avait « limité l’irrecevabilité à la liste proportionnelle titulaire » « And Deffair Thiès » pour les élections municipales de la commune de Fandène. Il s’agit simplement d’un emprunt de jurisprudence du Conseil constitutionnel à la Cour suprême. Ce qui montre que cette solution de sauvetage des listes non affectées ou non infectées par un vice juridique n’est ni inédite, ni bizarre. Elle doit, au contraire, être saluée en ce qu’elle permet au juge de sortir de l’alternative martiale du tout ou rien en favorisant, autant que faire se peut, la participation de toutes les forces politiques à l’élection.
8. Une autre erreur d’appréciation résulte de ce qu’il qualifie d’autres conséquences crisogènes comme «l’impossibilité de remplacer, en cas de décès, un candidat élu sur une liste de titulaires sans suppléants, ou de remplacer, en cas de décès, un candidat élu sur une liste de suppléants ». Bien naïf est ce raisonnement qui évoque des hypothèses de fiction juridique et situationnelle car aucune liste, pas même celle du pouvoir, en cas de large victoire, ne peut, au regard de la configuration pluraliste du système politique, voir sa liste d’élus (53 pour BBY et 50 pour YAW) épuisée par indisponibilité (décès, démission), au point qu’il soit nécessaire de recourir à la liste des suppléants. En effet, à titre d’illustration, avec 50% des suffrages, la liste recueille 26 sièges et 36 à peu près à 60%. Ce qui fait qu’il lui restera encore une réserve de 17 suppléants. Il n’est jamais arrivé que lors d’une législature autant de suppléants aient été sollicités pour remplacer leurs collègues démissionnaires ou décédés. En clair, aucune liste (quelle soit celle des titulaires de BBY ou des suppléants de YAW qui, dans ce dernier cas, devient de fait celle des titulaires) ne pourrait être épuisée jusqu’à la fin de la législature. Et même si cette hypothèse de science politique fiction devait survenir à plus d’une année des prochaines législatives, rien n’empêche, alors dans l’absolu juridique, d’organiser une élection partielle au niveau national pour pourvoir les sièges vacants, bien que celle-ci ne soit expressément prévue que le scrutin majoritaire départemental.
9. La conclusion que le doyen Fall tire de son raisonnement est, au regard de ce qu’il qualifie d’«impasse grave qui affecte le présent processus électoral fondé sur le parrainage (…) la suspension du processus électoral et la tenue de concertations nationales inclusives en vue de l’adoption d’un nouveau code électoral consensuel, cohérent et débarrassé du système de parrainage ». Cette suggestion du Professeur Fall, habituellement pertinente dans le contexte de pays en crise profonde où il a brillamment officié comme envoyé spécial ou médiateur, ne se justifie pas dans une vieille démocratie comme le Sénégal où chaque veille d’élection est l’occasion d’annonce d’un chaos vite oublié au lendemain de la proclamation des résultats. En outre, la proposition est rendue caduque par l’évolution paisible de la situation politique et risque de ne pas avoir de souteneurs dans un contexte où la partie de l’opposition (YAW), qui contestait l’irrecevabilité de sa liste de titulaires et menaçait d’empêcher la tenue des élections législatives, a finalement décidé d’y prendre part avec sa liste de suppléants.
par l'éditorialiste de seneplus, ibe niang ardo
QUAND UN LOUP HURLE DÉMOCRATIE, C’EST L’AGNEAU QU’IL LEURRE
EXCLUSIF SENEPLUS - Crier haro sur les dérives verbales, les invectives et insultes, c'est ce qu’il nous faut si on veut substituer notre situation délétère à une stabilité sociale durable
Ibe Niang Ardo de SenePlus |
Publication 06/07/2022
L’on a une classe politique qui au cri « démocratie ! démocratie ! » s’oppose et, au nom de ce concept gage de paix sociale, se donne paradoxalement le droit d’exercer la violence à l’encontre de frères rivaux, rabaissés au rang d’ennemis. Tout cela aux fins de s’aliéner les agneaux (en l’occurrence les forces vives de la nation, la jeunesse, les électeurs) et les mener dans la gueule des loups (les politiciens qu’ils sont). Gare ! La motivation de la plupart des hommes politiques est leur propre intérêt matériel et non ce qu’ils brandissent comme slogan fallacieux.
Comment comprendre sinon que le Sénégal, pionnier de l’État de droit démocratique en Afrique en soit aujourd’hui à reproduire à chaque échéance électorale les mêmes conflits maintes fois renégociés, alors que notre Code électoral a permis deux alternances par le verdict des urnes. Ce n’est point faute d’intelligence des protagonistes politiques mais tout simplement parce qu’aux moments de ces négociations, ils sont sous l’emprise de la même motivation : leur propre intérêt et non l’intérêt général. Tous les politiques, ilne faut pas s’y méprendre ! Les opposants d’aujourd’hui veulent le pouvoir pour se servir de la même permissivité d’un État régalien qui pour rien au monde pour eux, ne doit perdre de son lustre.
Il faudrait penser à instituer les principes du sacerdoce pour toutes les fonctions politiques : beaucoup de dévouement pour un salaire modeste et une rigueur dans les procédures dirimante à l’enrichissement illicite. Renforcer notre dispositif législatif et les procédures d’application des peines à l’effet d’une parfaite efficacité à l’encontre des forfaitures.
La démocratie est plurielle, évolutive et flexible
L’on se plaît à nous asséner abusivement la démocratie comme une panacée sociale avec comme référence les États-Unis d’Amérique ou la France. Pourtant nous n’avons rien à envier à ces pays au regard de l’Histoire, car ils ne sont pas nés avec de solides normes démocratiques. S’agissant des États-Unis il me plait de relever des faits politiques marquants de leur histoire qui donnent à relativiser les condamnations de notre jeune démocratie :
- savez-vous qu’en 1798 pour mettre fin à un climat politique invivable, fait d’hostilité et de méfiance extrêmes entre fédéralistes et républicains, les premiers avaient eu recours à la « Sedition Act » : une loi pour soi-disant criminaliser les diffamations à l’encontre du gouvernement, mais qui du fait de son ambiguïté avait virtuellement inclus toutes critiques extrêmes du gouvernement, de sorte à entraîner une grande retenue des commentateurs politiques, activistes et même journalistes. De nombreux historiens contemporains sont convaincus que cela a été très bénéfique et permis de stabiliser durablement le climat politique.
Plus tard en 1864 il s’est passé au terme d’un débat long et crucial à propos de l’abolition de l’esclavage, une élection à laquelle un tiers des États qui composaient l’Amérique n’avaient pas participé. Abraham Lincoln au pouvoir à l’époque, s’était retrouvé avec 22 des 50 sièges du Sénat et un quart des sièges du parlement vacants. Cela ne l’avait pas empêché de gouverner tranquillement. Il avait tout simplement suspendu la “Habeas Corpus Act”, cette loi fondamentale qui garantit la liberté individuelle des citoyens en remédiant aux dangers des arrestations et détentions arbitraires. Il s’était alors mis à prendre des ordres exécutoires pour la marche du pays comme il l’entendait. C’est d’ailleurs à l’un de ces ordres exécutoires que l’on doit la fameuse loi de l’abolition de l’esclavage aux USA
-Franklin Roosevelt, élu dans les années les plus sombres de la grande dépression, avait à la grande surprise des Américains, dit dans son allocution inaugurale au matin du 4 mars 1933 : « ... pour faire face à cette crise domestique grave, je vais demander au Congrès de m’accorder les pouvoirs exécutifs les plus étendus, pareils à ceux donnés pour braver une guerre... ».
Ce bref rappel d’événements qui ont marqué la démocratie américaine confirme que la démocratie est évolutive, mais également nous renseigne sur la flexibilité possible en cas de péril. Il y a des circonstances cruciales où l’urgence commande de rétablir l’ordre et la discipline, le respect mutuel et celui des institutions ; auxquels cas peuvent prévaloir les mêmes armes de défense de la République qu’en situation d’agression par un ennemi venant de l’extérieur.
Pour ce qui est de la France, je me contenterai ici de ne relever qu’un seul acte récent qui réaffirme la responsabilité de l’État face aux dégâts que causent les manifestations publiques : c’est la décision prise le 23 juin par le tribunal administratif de Rouen, qui a reconnu le préjudice financier subi par la société des autoroutes du Nord et de l’Est de la France lors des manifestations des gilets jaunes et condamné l’État à verser respectivement 557 300 et 27 687 euros à deux sociétés d’autoroutes, juste parce que des automobilistes n’avaient pu accéder aux péages et payer leurs tickets, du fait des blocages de manifestants. N’est-ce pas là une claire mise au point pour ceux qui prônent captieusement la liberté totale de manifester où et quand l’on veut au nez de l’État ?
Normes et règles non écrites, réels gages de la démocratie
Ce que l’Amérique, après être passé par une guerre civile qui lui a coûté des centaines de milliers de morts et causé de graves traumatismes avait fini par apprendre, était que les lois ne suffisaient pas pour vivre une démocratie pacifique. Au-delà, il était nécessaire de bannir la rhétorique agressive en politique et convenir de normes non écrites de mutuelle tolérance en lieu et place de l’animosité partisane et l’opposition permanente. Une résolution salutaire devenue une solide culture politique.
Crier haro sur les dérives verbales, les invectives et insultes, est ce qu’il nous faut si on veut substituer notre situation délétère à une stabilité sociale durable. Des hommes politiques raisonnables, quel que soit leur camp, qui respectent leurs pairs, respectent les institutions, l’administration publique, les magistrats, les militaires, policiers et gendarmes et qui ont l’impérieux soucis de l’équilibre des pouvoirs de la République dans toutes les décisions qu’ils prennent. C’est de cela dont on a besoin là et tout de suite ; d’hommes et de femmes au comportement éthico-religieux indubitable, capables d’amorcer ce virage et non de pyromanes qui agitent en permanence un déluge de feu et de sang à leur bon gré.
Le Sénégal et /ou la République déchirée…A mes concitoyens, sachons que notre devoir est d’éradiquer de notre discours tout ce qui relève de la méchanceté, de la haine, de l’arrogance, de la stratégie du «ôtes-toi de là que je m’y mette»
Spectateur engagé depuis les premières années des indépendances des pays africains –que certains contesteront et je respecterai leurs positions–, je dois (la démocratie l’exige), par la liberté d’expression, poser des actes pour que des forums de l’esprit, de l’imagination et des programmes de développement, prennent une place centrale sur la scène politico-médiatique de notre pays.
A mes concitoyens, sachons que notre devoir est d’éradiquer de notre discours tout ce qui relève de la méchanceté, de la haine, de l’arrogance, de la stratégie du «ôtes-toi de là que je m’y mette». Cette vision neuve devrait être la cheville de notre société si complexe ou la quille de notre «gaal» (navire).
Le Sénégal des périodes post-coloniales, débarrassé des rivalités des royaumes, se construit avec la devise républicaine «Un Peuple, Un But, une Foi» et j’ajouterais si je puis me le permettre «Le Dialogue». Mais les récents évènements constitués de rivalités et non de concertations politiques témoignent de la méconnaissance de la «Loi Fondamentale» (La Constitution) et font le lit d’une stratégie de déconstruction.
Un peuple que nous devons chaque jour, chaque minute fortifier par l’instruction, et unifier dans ses diversités en vue du progrès.
Un But pour l’épanouissement du citoyen dans une synergie de nos efforts afin d’atteindre l’inaccessible étoile verte fixée sur l’or (la couleur jaune).
Une Foi inébranlable dans nos cœurs pour que les diversités linguistiques, ethniques, écologiques, géographiques et que les religions s’inscrivent dans l’Unicité.
La République est une et indivisible et toutes les actions des concitoyens devraient éviter la déchirure de ce drap républicain.
Nous devons, à tout moment, parfaire le processus démocratique par l’expression libre des citoyens.
Actuellement les lois et codes en vigueur constituent le seul canevas pour refuser de travestir la démocratie par une majorité en une dictature de la minorité.
Alphabétiser, éduquer, instruire les populations, réfléchir sur l’employabilité de la force de travail de la jeunesse afin d’élever la dignité sont des actions nobles. La politique ne se définit pas par la capacité de nuisance ou par la témérité ou par une guerre des «ego».
Le contexte africain et mondial nous impose de prendre nos responsabilités. Nous devons toujours nous souvenir des actions du Haut fonctionnaire Galaye Blaise Diagne, du député Galandou Diouf et de Dr Lamine Guèye, les guerres mondiales, l’émancipation des indigènes et la défense des droits des autochtones, des actions de Me Lamine Guèye et Président Mamadou Dia, du Président L. S. Senghor pour l’indépendance, la construction de la République et le soutien apporté à la libération de la Guinée-Bissau, des actions du Président Abdou Diouf d’éradication de l’Apartheid, du Président Abdoulaye Wade sur la Libye, le Nepad, l’Union africaine, de l’Ingénieur de conception, le Président Macky Sall sur la guerre Ukraine/Russie. Ces hommes politiques, instruits sans oublier les Pr C. A. Diop, Pr A. Bathily, Pr A.M. MBow, … et nos figures emblématiques (chefs des confréries) n’ont ménagé aucun effort pour conduire notre pays dans le dialogue et le respect mutuel.
Ces confrontations des «ego», menées par des intellectuels et intellocrates, ne semblent d’aucune utilité pour atteindre le progrès économique et social dans notre pays. Je tiens aussi à rappeler que les vociférations, les contestations sur le mandat de n’importe quel élu ne peuvent trouver de réponses que par des élections.
Le Président Macky Sall, ingénieur de conception, élu sur la base du Programme Sénégal émergent (Pse) tente de l’exécuter avec des Sénégalais et des partenaires internationaux (aucun pays au monde ne peut vivre en autarcie et ne dispose de tout, capitaux, technologie, savoir-faire, capital humain ….).
Notre pays est ouvert au monde extérieur et aucun Etat ne peut imposer son point de vue d’où la coopération par le dialogue, la négociation.
La politique se fait avec de l’imagination, de la conception, de la planification, du bon diagnostic des forces et faiblesses et avec des échanges.
Débattons sur nos projets de société pour plus de prospérité et ne nous battons pas pour déchirer notre République.
Le Sénégal avec ses valeureux filles et fils ne mérite pas ce décor planté en 2022.
Ressaisissons-nous pour ne pas affaiblir notre Nation en construction.
Pr. Dr. Ing ès Sci.Géol.
Momar SAMB
Par Yoro DIA
VAGUE DÉMOCRATIQUE ET INTERMÈDES MILITAIRES
Les militaires maliens ont voulu ressusciter la logique de la Guerre froide en s’abritant derrière le parapluie russe, qui est malheureusement troué par la guerre en Ukraine et les sanctions qui affaiblissent leur mentor
Le printemps des coups d’Etat que nous avons connu récemment en Afrique de l’Ouest ne pouvait être qu’un intermède dans la deuxième vague démocratique africaine, partie de Ouagadougou quand les Burkinabè ont fait la révolution pour chasser Compaoré.
La dernière rencontre des chefs d’Etat de la Cedeao, qui a décidé de lever les sanctions après avoir obligé les militaires à remettre l’épée dans le fourreau, marque la fin de ce printemps des coups d’Etat. Un printemps aussi bref que le Printemps démocratique de Prague lors de la Guerre froide.
Ce printemps des coups d’Etat ne pouvait être que de courte durée pour trois raisons. Premièrement : à l’exception de la Guinée (coup d’Etat de règlement de comptes), les putschistes au Burkina Faso et au Mali ne pouvaient légitimer leurs actions que par la détérioration de la situation sécuritaire. Au finish, l’arrivée des militaires aux commandes n’a pas amélioré la situation. Au contraire, elle s’est aggravée. Ce qui n’est pas étonnant parce que ce sont les mêmes armées et les mêmes pratiques, avec le même problème congénital, qui consiste à transformer l’armée non pas en un outil de défense du territoire mais à en transformer une partie en une force spéciale surarmée pour défendre un régime et empêcher les coups d’Etat. C’était le cas au Burkina sous Blaise Compaoré avec le Rsp (Régiment de sécurité présidentielle) ou en Guinée avec les forces spéciales du légionnaire Mamady Doumbouya.
Les armées ne peuvent être efficaces contre les djihadistes à cause de ce détournement d’objectif qui a duré des décennies. Le Rsp a été redoutable pour défendre le régime de Compaoré et pour empêcher les coups d’Etat, mais le reste de l’Armée et ses autres missions ont été négligés et relégués à l’arrière-plan.
Deuxièmement, le printemps de coups d’Etat ne pouvait pas durer parce que les putschistes n’ont pas de forces sociales pour se maintenir, même s’ils peuvent bénéficier, pour parler comme Sandbrook, du «soutien mercenaire» politique de vieux dinosaures politiques comme Choguel Maïga, pour donner un verni idéologique et politique à leurs actions, avant de se rendre compte que les politiciens, de véritables passagers clandestins, les ont plus utilisés qu’aiguillonnés.
Troisièmement, ce printemps putschiste ne pouvait qu’être de courte durée à cause du contexte international qui a radicalement changé. Des indépendances jusqu’à la Conférence de la Baule, on pouvait faire un coup d’Etat et se maintenir en invoquant soit la menace de l’avancée communiste pour avoir le soutien du camp occidental, soit s’abriter derrière la lutte anti-impérialiste pour avoir le soutien de Moscou et du bloc de l’Est. Aujourd’hui, le monde a changé.
Les militaires maliens ont voulu ressusciter la logique de la Guerre froide en s’abritant derrière le parapluie russe, qui est malheureusement troué par la guerre en Ukraine et les sanctions qui affaiblissent leur mentor. Cette victoire de la Cedeao, qui a réussi à imposer aux militaires de meilleurs sentiments démocratiques, va avoir le même effet sur les coups d’Etat que la première vague démocratique partie de la Baule et des conférences démocratiques comme l’a écrit le Général Cheikh Sène à la page 31 de son livre, «Implication des forces de sécurité et de Défense dans le processus de démocratisation de l’Etat au Sénégal» : «Entre 1950 et 2000, 53 pays ont subi 85 coups d’Etat, ayant abouti à des changements de régime. Après une période de répit dans les années 90, le continent africain est celui qui a connu le plus de coups d’Etat dans les années 2000 avec 27 tentatives de putsch.»
En étant ferme jusqu’à obtenir gain de cause sur les militaires, la Cedeao va imposer un nouveau répit parce qu’elle vient de prouver qu’un coup d’Etat est non seulement anachronique, mais contreproductif.