SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
2 mai 2025
Opinions
par Birane Diop
VIDEO
LA MÉDIOCRITÉ AFFLIGEANTE DE CHEIKH OUMAR HANN
Ce ministre symbolise l’assèchement des idées, l’affaissement de l’exigence et la défaite de la pensée dans toute sa splendeur. Une telle personne ne doit pas diriger nos universités
Le ministre de l’Enseignement supérieur de la recherche, et de l’innovation, Cheikh Oumar Hann (COH), n’est ni un esprit brillant, ni une érudition encore moins une inspiration. Il est d’une médiocrité inouïe, vaniteuse et dévastatrice. Il est un excellent exemple de ce que peut symboliser l’assèchement des idées et l’affaissement de l’exigence. Je suis désolé si mes propos offusquent, mais c’est la vérité.
Cheikh Oumar Hann était l’invité de Baye Oumar Gueye, ce dimanche 05 juillet sur les ondes de Sud FM dans « Objection », une émission politique et citoyenne. COH était interrogé sur diverses questions d’ordre général et d’actualité, notamment la pandémie du Covid-19 et ses conséquences sur l’enseignement supérieur, la position du Sénégal dans le classement Shanghai, la forte chute de la croissance et les querelles immondes au sein de l’APR.
A toutes ces questions, COH n’a pas su répondre au journaliste, à l’exception de celle relevant des turpitudes de ses camarades. L’interview était profondément décevante et honteuse. COH n’a convaincu ni sur la forme ni sur le fond. D’habitude, les invités de Baye Oumar nettoyaient mes oreilles mais avec COH, j’ai eu les esgourdes bouchées. Ce préjudice mérite une indemnisation !
Durant toute l’émission « 1 : 00 :20 », le ministre de l’Enseignement supérieur du Sénégal n’a aligné que des phrases creuses. Il avait du mal à développer ses idées saugrenues. Son niveau de français est très inquiétant. N’eut été l’intervention de Baye Oumar qui lui filait certains mots, l’interview de COH aurait pu être plus catastrophique. On reproche très souvent aux étudiants leur faible niveau de langue. Je ne les dédouane pas. Mais ça peut se comprendre car leur ministre n’a pas du tout le niveau.
Mais le plus ahurissant avec le ministre, c’est son ignorance voire sa méconnaissance des réalités du pays. Dire que tous les étudiants ont des smartphones/ordinateurs qui leur permettent de suivre les cours en ligne me paraît illusoire. Les étudiants qui pullulent nos universités viennent des zones rurales, des banlieues in fine des familles modestes. C’est nous les fils d’ouvriers, d’agriculteurs, d’artisans qui occupons les amphithéâtres bondés. Beaucoup d’étudiants n’ont pas ces outils encore moins la 4G. Alors, parler de télé-enseignement dans ces conditions est indécent.
L’autre chose qui m’a paru drôle et triste, c’est sa vision bidouillée du classement Shanghai. Le monsieur a raconté n’importe quoi sur le classement académique des universités mondiales. Il a osé dire avec beaucoup d’assurance que les universités sénégalaises figurent dans Shanghai. Heureusement, Baye Oumar l’a poussé jusqu’à ses derniers retranchements.
Cheikh Oumar Hann est d’une médiocrité affligeante. Il symbolise la défaite de la pensée dans toute sa splendeur. Une telle personne ne doit pas diriger nos universités.
Par Calame
CÔTE D’IVOIRE, LA GUERRE DES HÉRITIERS RELANCÉE
Alassane Ouattara en annonçant qu'il ne se présentait pas à un troisième mandat et en choisissant Amadou Gon Coulibaly comme son successeur désigné ne le savait-il pas condamné et dans le meilleur des cas, inapte à battre campagne ?
Amadou Gon Coulibaly, Premier ministre de Côte d'ivoire et candidat désigné du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (Rhdp) est décédé hier mercredi dans l'après-midi à l’âge de 61 ans. Il avait été adoubé par Alassane Ouattara et plébiscité par la coalition réduite à l'état de bric et de broc, amputée des partisans de Guillaume Kibagfori Soro, ex-chef rebelle, ex-Premier ministre, ex-président de l'Assemblée et candidat à la présidentielle, si la justice ivoirienne ne lui barre pas la route.
Alassane Ouattara en annonçant qu'il ne se présentait pas à un troisième mandat et en choisissant Amadou Gon Coulibaly comme son successeur désigné ne le savait-il pas condamné et dans le meilleur des cas, inapte à battre campagne ? Espérait-il cette fatalité pour revenir sur son retrait conditionné par celui des gens de sa génération, tels Henri Konan Bedié et Laurent Gbagbo, sommés de laisser la place à une nouvelle génération par le parrain d'Amadou Gon Coulibaly, son fidèle lieutenant de 30 ans ? L'élection présidentielle prévue le 31octobre prochain pourrait être reportée. Entre la période de deuil qui s'ouvre dès après les funérailles nationales, on ne voit pas trop Alassane Ouattara et le Rhdp se lancer dans des manœuvres susceptibles d'affaiblir davantage la majorité présidentielle effritée et bien éprouvée.
La démission et le positionnement dans les starting blocks de la course à la présidentielle de cet autre compagnon de 30 ans, Marcel Amon-Tanoh, ancien directeur de Cabinet et ministre des Affaires étrangères, dès l'annonce du choix de Gon pour porter les couleurs du Rhdp pose autrement la question des options offertes à l'actuel chef de l'État ivoirien. Tanoh comme Gon sont du sérail houphouëtiste, allaité au biberon du parti démocratique de Côte d'Ivoire, section du Rassemblement démocratique africain (Pdci- Rda) fondé par le père de la nation ivoirienne, le Président Félix Houphouët Boigny .Tous deux sont issus de l'aristocratie régnante, chaperonné par un cacique parmi les caciques, l'ancien Président de l'Assemblée nationale ivoirienne, Philippe Yace, compagnon de la première heure d’Houphouët Boigny. Troisième prétendant à la succession d'Alassane Ouattara, l'ancien ministre de l'Enseignement supérieur, le Dr Albert Mabri Toikeuse, à la tête de l'Union pour la Démocratie et la Paix en Côte-d’Ivoire ( Udpci), parti de l'ex président putschiste, le général Robert Guei. Il a été candidat à la présidentielle de 2010, recueillant moins de 3% de suffrages avant de rejoindre le Rassemblement des Houphouëtistes censés barrer définitivement la route à Laurent Gbagbo et aux siens.
Estimant son tour venu, à la suite de Ouattara et de Bedié, tous deux ayant occupé la fonction présidentielle, il refusera ouvertement de cautionner le choix de Gon, qui ne pouvait même pas se prévaloir du statut de chef de parti, au moment de sa désignation comme dauphin. Il refuse ostensiblement de se lever pour acclamer le candidat de Ouattara, comme le demande le patron du parti et du pays, sachant que son sort était scellé. Il sera débarqué du gouvernement Gon au mois de mai dernier. Le Premier ministre évacué d'urgence à Paris pour y subir une deuxième intervention du coeurla Présidence ivoirienne annoncera faussement un «contrôle médical», c'est le sémillant ministre de la Défense Hamed Bagayokho (HBK), en embuscade, qui assure l'intérim. Il est présenté comme un patron des francs-maçons ivoiriens, ce qui pourrait peser dans la balance, si cela est avéré. HBK est également crédité d’avoir sécurisé le pays, ce qui était improbable avec l’instabilité que la Côte d’Ivoire a connue.
L’ancien ministre des finances et président de l’Assemblée nationale, sous Gbagbo, l’économiste Mamadou Coulibaly s’est positionné depuis longtemps comme prétendant à la présidence de la République de Côte d’Ivoire. Avec la candidature annoncée de Bedié, celle probable d'un poulain de Gbagbo, Ouattara fera-t-il marche arrière pour s'y coller, espérant ainsi sauver les meubles en assurant lui-même une transition forcée ? Une autre façon d'assurer ses arrières, en attendant des moments plus propices avec un nouveau dauphin crédible et sûr, lui qui a fait claironner qu'il n'avait pas de plan B à la candidature de Gon..?
Plus prosaïquement l'État de Côte d'Ivoire, son chef, l'alliée primordiale, la France et leurs services pouvaient-ils ignorer le bulletin de santé du Premier ministre, le pronostic vital de ses médecins français ? Il se susurre, dans certains milieux au fait des méandres de la politique africaine, ivoirienne en particulier, que Ouattara, en mobilisant son gouvernement et sa famille à l'accueil du Premier ministre-candidat, à son retour de France, avait voulu lui rendre un dernier hommage de son vivant. Le fait est inhabituel, dans les pratiques politiques en Afrique, voire dans le monde. Cet accueil d'un Président à son Premier ministre alors que l'usage consacre plutôt l'inverse constitue une première remarquable et remarquée. D'où l'interrogation sur les véritables motivations du Président ivoirien en choisissant Gon Coulibaly qu'il savait bien malade et en fin de parcours.
Décidément, sur les bords de la lagune Ebrié se joue le destin d'hommes et de femmes dont l'issue impactera fatalement l'équilibre du pays et celui de la sous-région. La France est depuis toujours à la manœuvre, sous le regard perplexe de la partie anglophone de la CDEAO mais aussi des pays ayant battu une monnaie nationale, en dehors de la zone CFA. Au total, les Ivoiriens ont toujours du mal à solder l'héritage de Felix Houphouët Boigny, le crocodile de Yamoussokro, qui semble leur faire un ultime pied de nez. D'outre-tombe où le rejoint le fidèle et loyal Gon, dernière victime en date de la guerre des héritiers. On en oublierait que la Côte d’Ivoire compte bien un vice-président. Un joker !
LU BEES AVEC RENÉ LAKE & OUSSEYNOU NAR GUEYE
VIDEO
LA RUPTURE NÉO-COLONIALE, UN IMPÉRATIF
EXCLUSIF SENEPLUS - Le jeu de négociation entre les marabouts, le politique et la République - Quelle transversalité entre la primauté de l'identité africaine et l'inscription dans l’universalisme, à la lumière du slogan "déboulonner Faidherbe" ?
Lu Bees, avec René Lake à Washington et Ousseynou Nar Gueye à Dakar.
Dans ce numéro, prenant prétexte du décès récent de Serigne Pape Malick Sy (porte-parole du khalife général des tidianes) longtemps impliqué en politique, engagement pour lequel il a été plusieurs fois incarcéré, et de Mouhamadou Bamba Diagne (ancien ministre en charge des affaires religieuses sous le président Wade), Ousseynou Nar Gueye revisite le jeu de négociation permanent entre les figures maraboutiques du Sénégal, le politique et la République, de Senghor à Macky Sall. Faut-il instituer à nouveau un ministère des Affaires religieuses au Sénégal ou est-ce au ministère de l'Intérieur de récupérer ses prérogatives régaliennes naturelles de supervision de l'activité des cultes religieux ?
De son côté, René Lake fait le point sur la progression constante des infections au coronavirus aux USA avec un parallèle entre le mouvement Black Lives Matter et la lame de fond décoloniale, en pointant la responsabilité de la jeunesse africaine dans cette néo-décolonisation.Quelle transversalité entre le combat pour la primauté de l'identité africaine et l'inscription des Africains dans les valeurs d'universalisme, à la lumière du slogan "il faut déboulonner Faidherbe" ?
Lu Bees est un talk audiovisuel hebdomadaire de SenePlus et Tract, réalisé et monté par Boubacar Badji.
par Mouhamadou Ngouda Mboup
LA CRISE DES PARTIS POLITIQUES
Si les partis politiques veulent changer de paradigme, ils doivent se représenter non pas comme de simples appareils mais comme des mécanismes ou leviers de contrôleurs, de forces de propositions et d’alternatives crédibles
Rarement crise profonde aura ébranlé autant les partis politiques sénégalais. Au-delà de la déstabilisation politique autant que matérielle de plusieurs leaders de partis ou grands appareils politiques, l'effet de souffle du spectacle de plusieurs coalitions de circonstance ne s'est pas borné à une remise en cause. Il a fait office de révélateur de la crise (interne et externe) qui secoue les partis politiques, doutant des valeurs qui fondaient leurs soubassements, objectifs, alliances et/ou coalitions. Que le paroxysme des tensions soit de temps en temps étouffé ne change donc rien à l'acuité des leçons à en tirer pour les acteurs politiques de demain, tant leur répétition est prévisible dans le futur et dans l’avenir.
Les quelques réflexions que nous nous proposons de partager, pour apprécier la situation actuelle des partis politiques, se réfèrent à des faits connus de tous. Il convient toutefois, pour en saisir la portée, de les replacer dans une perspective plus vaste car la construction démocratique s’inscrit dans la durée et elle obéit à des orientations stratégiques trop souvent masquées ou dévoilées par l’actualité immédiate. C’est pourquoi il importe de rappeler que la crise à la fois interne (I) et externe (II) des partis politiques est une réalité qui perce les yeux dont les prolongements permettent d’être dubitatif sur la probabilité d’un renouveau des partis politiques (III).
La crise interne
Dans une démocratie, les partis politiques remplissent un rôle de catalyseurs indispensables de l'expression des citoyens. C’est en ce sens que l’article 4 (nouveau) de la Constitution du 22 janvier 2001, issue de la loi constitutionnelle n° 2016-10 du 05 avril 2016 portant révision de la Constitution, adoptée à l’occasion du référendum du 30 mars 2016, dispose que « Les partis politiques et coalitions de partis politiques concourent à l’expression du suffrage dans les conditions fixées par la Constitution et par la loi. Ils œuvrent à la formation des citoyens, à la promotion de leur participation à la vie nationale et à la gestion des affaires publiques ». Une consécration constitutionnelle de ce rôle des partis pour le fonctionnement d'un système politique est utile pour rappeler leur importance dans le processus démocratique. Toutefois, dans une Constitution, une disposition sur les partis politiques n'est pas constitutive parce qu'elle n'est pas nécessaire à la reconnaissance de la fonction des partis dans le processus démocratique. Or, même si les partis politiques existent indépendamment d'une disposition constitutionnelle qui leur est réservée, leur présence est conditionnée par l'ordre juridique dans lequel ils évoluent. En conséquence, les partis politiques doivent constamment observer des règles, sont titulaires de droits et créent eux-mêmes des droits et des obligations. Tout cela nécessite des définitions et des précisions par rapport au système juridique existant, d'où l'intérêt de clarifier à nouveau leur statut juridique.
Dans sa vocation, tout parti politique s'assigne pour tâche de recueillir les suffrages des électeurs en vue de conquérir le pouvoir. Par-là, il se distingue des groupes de pressions (syndicats, lobbies) qui ne cherchent qu'à influencer les titulaires du pouvoir. A cet effet, il se distingue aussi des ligues ou des milices, ou mêmes des « prétoriens » qui ne se soumettent pas au verdict des électeurs mais assiègent le pouvoir et le conquièrent par la force. Les partis politiques participent à l’institutionnalisation démocratique du pouvoir politique. On conçoit alors que cette vocation implique que le parti mobilise, forme les opinions, fabrique des programmes et des valeurs, sélectionne les individus capables de défendre ses idées devant l'électorat et de les exprimer dans les institutions représentatives : le parti politique fabrique et construit des gouvernants pour la réalisation d’un projet de société.
Pourtant, il est évident que les partis politiques sont entrés dans une crise profonde, entraînant un coma dépassé du système partisan. Dans la plupart des cas, le champ partisan s’est déstructuré. Les partis ont complètement disparu, pour laisser place à des mouvements éphémères, liées à un courant évanescent qui mange ou concurrence en interne le parti jusque dans ses entrailles. Les origines, le mode de création, les statuts et objectifs des courants de pensées et mouvements politiques constituent un cocktail très compliqué à mélanger. Les mouvements et courants de pensées politiques naissent le plus souvent en dehors des structures officielles des partis politiques et prennent racine au niveau de cercles, d'intellectuels, groupes ou leaders qui ont une autre vision différente des choses et de la politique dans le parti. La légitimité de ces mouvements et courants de pensées réside dans la conscience collective de leurs membres d’exiger une démocratie interne dans le parti. Sur initiative d'une personne ou d’un groupe, ils se caractérisent par l'idée nouvelle de permanence et la défense d'une cause plus ou moins précise, diffuse, large, ou voilée, fondée surtout sur la revendication des droits et de la démocratie interne dans différents contextes.
Ce qui conforte toujours la thèse de la crise interne relève d’une rupture consommée entre les leaders de partis et leurs militants (rupture entre le sommet et la base), qu’ils soient de plus en plus clairement contestés dans le parti, que leur pouvoir se retrouve paralysé et, en outre, qu’ils soient privés de possibilité institutionnelle de restaurer leur autorité. Les conseils de discipline des partis politiques au fonctionnement souvent arbitraire propres au système partisan font partie de ces structures qui occupent une place non négligeable dans les représentations communes de l’univers politique mais restent pour l’essentiel largement méconnues. Leurs décisions d’exclusion sont souvent illégales et ne sont pas exemptes des griefs de violation des principes du respect des droits de la défense, de la contradiction et d'impartialité qui s'imposent dans le droit associatif et particulièrement dans le droit des partis politiques. Le droit des partis politiques est soumis aux principes constitutionnels et aux exigences conventionnelles du droit à un procès équitable.
La crise externe
De ce double mouvement nait le désenchantement politique. Chacun, pourtant, sait parfaitement que la crise-Covid, le chômage, l'équité territoriale, la dette publique, le système fiscal ou l’augmentation du prix de l’électricité sont des questions éminemment politiques mais chacun voit tout aussi clairement que ces questions sont pour les partis politiques de simples sujets sur lesquels ils sont improductifs d’idées et prendre la position qui leur rapportera le plus de visibilité médiatique et électorale par rapport aux concurrents reste la seule constante. On a ainsi assisté à une étonnante déstabilisation des formations, en dépit de l’inévitable inflation de créations partisanes dans l’euphorie du progrès de la démocratie. Par ailleurs, les coalitions de partis politiques qui naissent comme des champignons ne sont-ils pas des regroupements de partis politiques inutiles voire sans réelle valeur ajoutée d’une offre politique programmatique et idéologique ? Cette interrogation met en lumière l'ambivalence des relations entre l'État, les partis politiques et les coalitions de partis politiques : des relations tantôt concurrentielles, tantôt conflictuelles, parfois même de connivence. De manière générale, une coalition de partis politiques peut être définie comme une entité organisée, légalement constituée et regroupant plusieurs partis politiques et qui cherche à concourir à l’expression des suffrages, à travers la participation à la compétition électorale, à influencer les processus politiques dans un sens favorable à ses intérêts, sans pour autant avoir la personnalité juridique, ce qui le distingue du parti politique… Entrevoir un espoir de gouvernabilité exemplaire permettrait de réfléchir sur le maintien ou sur une perspective de faire disparaître la notion de «coalition de partis politiques » du système politique sénégalais. En effet, même si elles restent toujours possibles et souvent pratiques pour les acteurs politiques, les coalitions de partis deviennent tout simplement inutiles : c’est le parti politique, et non pas un ensemble de partis alliés, qui reçoit le vote des électeurs (ce qui lui permet de gouverner tout seul, sans dépendre d’alliances fragiles) ; ce sont deux partis politiques qui s’affronteront au second tour d’une élection et non plus deux coalitions de partis différents.
Le manque d'anticipation ajouté à l'inexistence ou à l'impuissance d'une véritable politique extérieure en direction des tiers au parti ne peuvent que déstabiliser un projet aussi ambitieux. Or la multiplication des conflits et le volume des différents soumettent aujourd'hui les partis politiques à des données nouvelles auxquelles ils ne sont pas certains de répondre efficacement. Inquiétude précédant les bouleversements que provoquent souvent les grandes désillusions électorales et qui transfigureront, elles aussi, les partis...
L’improbable renouveau des partis
Aujourd’hui, c'est un changement de paradigme qui attend les partis politiques. Si les partis politiques (pouvoir comme opposition, anciens comme nouveaux partis) veulent retrouver une fonction nouvelle et changer de paradigme, ils doivent se représenter non pas comme de simples appareils mais comme des mécanismes ou leviers de contrôleurs, de forces de propositions et d’alternatives crédibles. Ils doivent être les yeux qui regardent, critiquent, proposent, et éventuellement sanctionnent. Ils doivent être la voix qui parlent, forme, conduit, impulse, et concoure à l’expression de la démocratie.
A trois égards, l’existence d’un renouveau des partis politiques apparait limitée voire improbable. Tout d’abord, parce que le cadre des partis politiques est devenu circonscrit à quelques formations sérieuses. D’une part, et sans qu’il faille s’en étonner, le parti ne fonctionne et n’est identifiée que par les réunions que tiennent certains de ses leaders ou membres restreints. Sont donc ici implicitement exclus les autres membres (les militants) y compris ceux qui étaient en soutien ou même dans leurs coalitions. D’autre part, la lecture des communiqués qui sortent de ces réunions amène à plusieurs constats. D’abord, le parti répugne à renoncer au confort de son impuissance. Ensuite, il peine à proposer une offre politique crédible et alternative. Et, enfin, il n’a pas les moyens de ses ambitions.
S’il est certain qu’il est hors de question d’observer une minute de silence pour les partis politiques, il reste que la modernisation des partis politiques tant vendue lors du référendum du 30 mars 2016 devient une urgence dans l’urgence. Personne n’a eu à gagner une élection présidentielle au Sénégal sans un parti ou une coalition de partis politiques.
Les partis politiques se meurent, vivent la démocratie !
Mouhamadou Ngouda Mboup est Enseignant-chercheur de droit public FSJP/UCAD
par Hamidou Anne
PAAP SEEN, TU PERMETS ?
EXCLUSIF SENEPLUS - L’héritage intellectuel du PAI comme du RND est éloquent et peut nourrir une nouvelle génération d’avant-garde politique. Le défi est de nous nourrir de notre panthéon pour changer la vie des nôtres
À une de tes chroniques, ma réaction fut celle d’une main tendue sur une gauche de gouvernement à faire advenir et pour laquelle toi, moi et nos nombreux amis communs seront disponibles comme des porteurs d’eau d’une idée qui nous dépasse, celle d’un humanisme de combat.
Aux oubliés de notre mémoire amputée d’une partie de notre histoire, que tu réhabilites, tu adjoins une critique dure et sans concession sur la génération actuelle. Je la partage car elle ne peut être esquivée, au sujet de nos impasses actuelles.
Mais à nous se pose encore cette question, celle qui a été posée il y a plus d’un siècle par un vieux camarade, « Que faire ? » pour arriver, par l’hybridation de nos préoccupations, à la rupture des digues, afin de devenir majoritaire. Car il est là le défi, celui de nous nourrir de notre panthéon, de nos idoles, des exilés de la mémoire nationale hémiplégique, pour gouverner et changer la vie des nôtres, celles des ouvriers, des paysans, des malheureuses bouches affamées de nos aires urbaines et rurales. Changer la vie des nôtres, c’est aussi évoquer les intellectuels précaires, les étudiants, les sans-emplois, les artistes, les victimes de la gentrification urbaine. Celles et ceux dont tu nous plaques à la figure la souffrance chaque dimanche, pour nous obliger à ne pas oublier qu’être de gauche c’est concevoir l’intersectionnalité des violences faites aux femmes, dénoncer la traite des enfants de rue, documenter la vulnérabilisation des travailleurs, des retraités, des marchands ambulants…
Que faire face à une crise multiforme qui interpelle nos consciences et nous oblige à rester intransigeant sur la nécessité d’une gauche au gouvernement ? Crise de l’éducation, crise de la santé, crise de sens et de perspective. Nos impasses sont nombreuses dans le contexte d’une médiocrité inouïe du corps politique et des allégeances diverses aux corps intermédiaires et non à une république qui ne tient plus sa promesse d’égalité et de justice.
Avec certains de nos amis, nous avons une divergence de fond sur l’avènement de la révolution comme un moment brutal de renversement d’un ordre ancien et de respiration populaire, où le peuple, sur qui le pouvoir s’exerce, renverse ses dirigeants et s’auto-organise autour d’une communauté ré-inventée.
Je crois à cette idée de Zizek d’une guérilla patiente, qui sied notamment aux pays comme les nôtres englués dans une multitudes de trappes politique, religieuse, affairiste. C’est dans le travail de fond que se situent les mécanismes de réparation de la société sclérosée et en proie aux doutes, à la crise, à l’avenir sombre.
Que faire est une interrogation, mais aussi l’affirmation d’un certain nombre de critères déterminants, d’issues théoriques et pratiques qui fondent une praxis de la résistance à un ordre ancien ainsi qu’une éthique de l’action. C’est la rencontre entre les théories mures irriguées par les intellectuels organiques, l’action d’une avant-garde militante et le moment qui peut faire émerger des utopies transformatrices. Il s’agit là de bâtir ce que Foucault appelait très justement une hétérotopie comme lieu physique et mentale de rupture, de formulation et de construction concrète d’une action transformatrice.
Tu connais mon avis sur la nécessité de faire émerger à gauche des espaces liés par une symbolique du politique comme outil de conflictualité. Cette guérilla patiente que j’évoquais plus haut requiert de concevoir notre démocratie comme un espace du conflit, de bataille culturelle et de construction d’un mouvement de contre-insurrection intellectuelle afin de construire une ligne de front progressiste.
La gauche peut redevenir hégémonique chez les intellectuels, les artistes, l’élite, afin de se doter des « armes miraculeuses » pour bâtir une riposte contre-hégémonique globale et construire un peuple. Avec qui ? Tu as cité avec justesse l’héritage du PAI et du RND. Tu sais nos divergences sur Cheikh Anta Diop, que j’ai lu tardivement, mais dont les idées n’ont pas suffisamment pénétré mon corps politique car anti-marxistes.
L’héritage du PAI et du RND est mince dans l'actualité récente, car les mouvements qui en sont issus ont périclité à force de choix erratiques ou de séries d’isolement. Mais l’héritage intellectuel du PAI comme du RND, lui, est dense, éloquent et peut nourrir une nouvelle génération d’avant-garde politique. Il faut y puiser les ressources théoriques et pratiques pour affronter le capitalisme, le conservatisme militant nimbé de xénophobie et de relents complotistes et, pire, l’idéologie du renoncement à toute valeur au profit de la lutte des places antichambre de la kleptocratie.
Léopold Senghor, Mamadou Dia, Cheikh Anta Diop, Majmouth Diop, Abdoulaye Wade ont été – entre autres errances - à l’avant-garde du combat pour la souveraineté et la démocratie. Leurs épigones n’ont pas été dignes de leur grand combat. C’est peut-être aussi l’époque, mélange de vulgarité, de médiocrité et de grandiloquence technocrate, qui est propice à l’absence de grandes causes à défendre, de grandes idées à faire émerger et de rêves à propulser au cœur du corps social.
Dans cet espace public actuel existe une place pour une gauche non sectaire, ouverte, intelligente, pragmatique, sociale, écologique, féministe qui ne peut penser le pays qu’avec l’influence du digital, de l’écologie, de la culture urbaine et de la vitalité du tissu associatif dans les villes et les villages.
Par la renonciation à la pureté idéologique exclusive nous dépasserons les clivages d’hier afin de bâtir de nouveaux consensus sur la notion de progrès humain et social, de justice, de service public, de nation et de liberté. Par la fermeté sur des nouvelles thématiques liées à la souveraineté sans transiger avec l’internationalisme et le dialogue culturel nous réussirons à faire revenir les jeunes partis à l’extrême-droite séduits par le racisme inversé et la xénophobie déguisés en patriotisme.
Voici cher Paap, sur le souci de l’Homme et le courage de l’indépendance…
Tandis le covid-19 consume notre économie et fait des ravages dans les hôpitaux, des hommes politiques déclament des insanités. L’écart entre la gravité de la situation qui nous attend à la rentrée et l’insouciance ambiante est pire que le corona
En 64, Rome fut ravagée par un terrible incendie. La légende veut que l’Empereur Néron, qui s’est toujours pris pour un artiste de grand talent, déclame des vers pendant que Rome était consumée par des flammes qui feront des milliers de morts. Chez nous, tandis le coronavirus consume notre économie et fait des ravages dans les hôpitaux, des hommes politiques déclament des insanités.
L’écart entre la gravité de la situation qui nous attend à la rentrée et l’insouciance ambiante est pire que le corona. «Je n’ai que des larmes, du sang et de la sueur à offrir», disait Churchill avant la veille de l’entrée de son pays dans la deuxième Guerre mondiale.
En dehors du sang, c’est tout ce que le Président Macky Sall pourra promettre au pays dans la phase post-Covid-19. Et plus tôt il le dira aux Sénégalais mieux ça vaudra ! Le président de la République a déjà mobilisé le gouvernement pour «six mois de travail intensif». Il faut aussi qu’il informe le pays que les 6 prochains mois seront difficiles et que chacun devrait redoubler d’efforts.
Les peuples, pour se mobiliser, exigent que l’exemple vienne de ceux d’en haut, ceux qu’on appelait les patriciens dans la Rome antique. C’est pourquoi, dans ce contexte où on compte chaque jour les morts du corona, où l’économie est à genoux avec une perte record de croissance, cette arme de distraction massive qu’est la diffusion d’audios d’insultes est purement scandaleuse. Ces excès de Plébéiens qui se sont retrouvés par «inadvertance républicaine», pour parler comme Me Mbaye Jacques Diop, chez les patriciens de la République, déshonorent la République qui, on l’oublie souvent, est une affaire d’élite, contrairement à la démocratie.
Ces excès auraient pu, auraient dû être «insignifiants», n’eut été le contexte de crise nationale, si «l’heure n’était pas grave» comme avait dit le président de la République en proclamant l’Etat d’urgence. Nous avons besoin d’un autre Etat d’urgence pour sauver le cœur de la République du cannibalisme de la désacralisation des institutions, de la «banalisation du mal», de l’insulte et la vulgarité dans la politique, dans la culture, sur les réseaux sociaux, sur les forums de discussions.
Malheureusement, le mauvais exemple vient du sommet quand Wade insulte Macky, quand des fractions de l’APR s’injurient par médias interposés, quand de façon nihiliste on refuse tout mérite individuel pour toujours renvoyer la personne à ses origines, à la condition socio-économique de ses parents ou de ses grands-parents, en oubliant que la République est le système qui a aboli le hasard de la naissance pour le remplacer par le mérite. Le mal est profond et le meilleur indicateur de ce mal qui ronge notre société est internet où les gens avancent masqués pour montrer leur vrai visage et leurs vrais sentiments.
Ainsi Akon, probablement, l’un des plus grands Sénégalais qui trônent sur le monde est réduit à «teug dawoul bar», Youssou Ndour, une autre fierté nationale qui a porté si haut les couleurs du pays, est réduit à sa caste, Babacar Ngom à son poulailler de départ.
Dans notre pays, on aime détester ceux qui ont réussi pour justifier son échec, on aime banaliser ceux que le monde nous envie. C’est notre différence fondamentale avec les Américains qui adorent ceux qui ont réussi, qu’ils considèrent comme des héros, qu’ils sacralisent. C’est juste une question de philosophie. Une question de mentalité. Et aucun pays n’a jamais émergé dans la haine de soi. Cette haine de soi qui a été un terreau fertile à l’esclavage.
Les Américains ont émergé en vénérant et en s’inspirant des succès de Carnegie, Vanderbilt et autre Rockefeller. Aujourd’hui, ils adorent Steve Jobs, Elon Musk et les autres. Chez nous, la réussite est toujours une présomption de culpabilité aussi bien pour ceux qui sont dans la poussière du Colisée que ceux qui sont dans le marbre du Sénat.
par El Hadj GUISSE
CONTRE L’ANNULATION DE LA DETTE DES PAYS DU TIERS MONDE
Célèbre avocat et ancien magistrat, Me El Hadj Guissé a eu à occuper différentes fonctions dans le système judiciaire de notre pays. il a aussi exercé de hautes responsabilités sur le plan international. Si nous l’avions perdu de vue, c’est parce qu’il était à la Cour Africaine de Justice à Arusha (Tanzanie). En sa qualité de citoyen sénégalais et de militant africain des droits de l’homme, Me El Hadj Guissé a choisi « Le Témoin » pour faire son « réquisitoire » ou plaidoyer juridique et économique pour l’annulation de la dette des pays du tiers monde. Document…
Depuis près d’un demi-siècle, les pays en développement sont confrontés à de graves problèmes économiques, politiques et sociaux qui menacent dangereusement l’existence de leurs populations et par conséquent, empêchent la réalisation ou la protection des droits humains de l’individu. Ces problèmes et cette situation d’ensemble sont engendrés par la dette et le service qu’elle leur fait supporter.
Ainsi la dette est devenue non seulement un moyen de pousser ces pays dans l’extrême pauvreté, mais également un moyen de domination et d’exploitation que nous croyions disparu avec la colonisation. Pire elle a permis de passer d’une colonisation publique à une colonisation privée, j’allais dire un retour à l’esclavage tel que nous l’avons connu au XIVème siècle. La dette empêche tout développement humain durable, toute stabilité politique et toute sécurité. La dette, ce fléau du XXIème siècle, a bien entendu un impact négatif sur les droits de l’homme, qu’ils soient communautaires ou individuels. Par ses conséquences négatives, la dette des populations du tiers monde demeure une entrave incontournable au développement économique et social. Elle est à l’origine de l’extrême pauvreté dans laquelle se débattent des milliards d’individus. Rappelons que 20% de la population mondiale détiennent et jouissent des richesses du monde alors que 80% croupissent dans la misère, la faim et la maladie et y sont maintenus par une gestion négative de la dette et un déséquilibre chronique de l’économie mondiale.
HISTORIQUE
L’histoire de la dette du tiers monde est celle d’une formidable ponction opérée par la finance internationale sur les peuples les plus démunis. Une ponction programmée pour être indéfinie, grâce à un mécanisme infernal de reproduction de la dette à une échelle de plus en plus vaste, mécanisme que l’on ne pourra briser que par l’annulation de la dette. La dette doit être examinée historiquement, tout en faisant ressortir ses aspects juridiques, notamment son fondement au sens du droit international positif, qui considère déjà qu’elle est illégitime. La dette des pays en développement résulte en partie de la prise en charge indue des dettes des Etats colonisateurs imposée par ceux-ci aux jeunes états au moment de leur accession à la souveraineté internationale.
En effet, dès 1960, la dette publique extérieure de ces pays atteignait 59 milliards de dollars des Etats-Unis. Grevée d’un taux d’intérêt de 14% unilatéralement fixé, cette dette a rapidement augmenté. Les nouveaux débiteurs, avant même d’avoir le temps d’organiser et de démarrer leur économie, portaient déjà le lourd fardeau de la dette. Pour exemple, la commission Lester Pearson avait estimé qu’en 1977 déjà, la dette, c’est-à-dire le remboursement annuel du principal et le paiement des intérêts, dépassait à lui seul le montant brut des nouveaux prêts dans une proportion de 20% en Afrique et 30% en Amérique Latine.
En d’autres termes, le nouveaux prêts qu’un état en développement estime devoir contracter pour réaliser son développement ne pouvaient être affectés à cet usage et ne suffisaient même pas à faire face au simple service de la dette antérieure. L’état en développement devra dorénavant s’endetter régulièrement non pour investir mais pour rembourser le service de la dette. Cette situation est le résultat de l’application d’un droit internationale injuste. L’ordre juridique créé par l’ancienne société internationale avait l’apparence de la neutralité ou de l’indifférence mais aboutissait en réalité à une non-intervention du droit permettant aux forts d’écraser les faibles. Il s’agissait d’un droit permissif dans les faits. C’était un droit colonial institutionnalisé à la conférence de Berlin de 1885 sur le Congo. Ce droit de conquête reconnait la validité des traités inégaux fondamentalement léonins que les colonisateurs signaient avec les autochtones pour finalement accaparer la totalité de leurs biens mobiliers et immobiliers.
Les Etats européens projetaient ainsi sur le plan mondial leur puissance. Le droit international de l’époque était un droit octroyé, élaboré et appliqué par eux et pour eux. Bismarck, déclarait en 1878 au nom du Congrès de Berlin que « l’Europe a seule le droit de sanctionner l’indépendance ; elle doit donc se demander sous quelle condition elle prendra cette importante décision ». En somme, l’Europe seule était habilitée à établir l’acte de naissance d’un état. Â cette époque d’égocentrisme européen triomphant, le bien commun de l’Europe était identifié au bien commun de l’humanité. Aux fins de l’application du droit international européen, les populations du monde étaient classées en civilisées, demi-civilisées et non civilisées ou encore selon Lorimer, en civilisées, barbares et sauvages. Le droit de l’époque n’était appliqué que pour protéger les états européens.
En 1780, Jeremy Bentham précisait dans ses principes, qu’il était plus judicieux d’appeler « droit international l’ensemble des normes qui régissaient à l’époque les relations officielles entre les Etats européens ». Il est clair que ce droit n’avait d’international que le nom. L’Europe conquérante du XIXème siècle pouvait ainsi se forger une légitimité pour asservir et piller le tiers monde décrété non civilisé. C’est dans le cadre de ce droit international que la colonisation s’est réalisée en une application systématique de la loi du plus fort contre les faibles. C’est le droit également qui a permis l’esclavage, dont le paroxysme a été l’élaboration du code noir qui institutionnalisait la catégorie des sous-hommes qu’étaient les Noirs et qui, après l’abolition de l’esclavage, a abouti à la colonisation, qui était très peu différente quant à son application.
NAISSANCE ET AGGRAVATION DE LA DETTE
Les puissances coloniales, au moment où elles avaient en main la destinée des peuples coloniaux, ont contracté à leur nom des dettes dont le passif a été directement imputé aux Etats devenus indépendants. Cette transmission automatique de la dette a été critiquée par plusieurs auteurs qui ont soutenu que la succession au passif de l’Etat prédécesseur mérite d’être analysée et solutionnée en droit et non imposée. La solution de la non-succession apparaît comme la conséquence logique du respect de la souveraineté de l’Etat successeur, qui, n’étant pas le débiteur originaire, n’a pas à exécuter des obligations auxquelles il n’a pas consenti. Au niveau de la jurisprudence internationale, les partisans de cette solution négative citent volontiers la sentence rendue le 18 avril 1925 par l’arbitre suisse Eugène Borel dans l’affaire de la répartition de la dette ottomane entre la syrie, le Liban et l’Iraq détachés de l’empire le lendemain de la première Guerre mondiale.
D’après un passage significatif de cette décision, « il n’est pas possible malgré les précédents déjà existants de dire que la puissance cessionnaire du territoire est de plein droit tenue d’une part correspondante de la dette publique de l’Etat dont il faisait partie jusqu’alors. ». L’Etat successeur est un état tiers par rapport à tous les traités conclus par l’Etat prédécesseur. Le droit des traités, notamment la règle fondamentale de la relativité des traités, dicte cette solution de principe dont la doctrine ne peut que reconnaitre le bien fondé. L’acceptation d’une succession ne se présumant pas, c’est au créancier d’établir que l’ensemble des conditions de nature à lui permettre de réclamer paiement à l’héritier est réuni. La manifestation de la volonté d’accepter une succession ne résulte pas clairement de ce que la successible a été désigné comme héritier.
La puissance coloniale n’avait donc pas qualité pour désigner unilatéralement le pays colonisé comme étant héritier de son passif, fût-ce par un écrit ou compris dans un ensemble de faits juridiques constatés. La déclaration d’indépendance ne peut à elle seule constituer un support juridique pouvant transmettre le passif de la succession de l’Etat prédécesseur. Un être humain simplement conçu ne peut être débiteur, il ne peut à la limite qu’être créancier, précise le droit successoral. Les états anciennement colonisés, avant même de naître, c’est-à-dire avant d’accéder à la souveraineté internationale, avaient déjà des dettes dont le remboursement leur à été immédiatement exigé. Pour mieux gérer cette dette, les pays nantis ont créé deux structures en dehors du fonds monétaire international (Fmi) et de la banque mondiale. Il s’agit du Club de Paris et du Club de Londres.
LE CLUB DE PARIS
Il se réunit toujours à Paris et s’occupe de la dette publique. Il s’agit du groupement d’Etats créanciers spécialisés dans la normalisation des défauts de paiement des pays en développement, créé en 1956 autour de la crise avec l’Egypte. Les liens entre le Club de Paris et le Fmi sont extrêmement étroits ; ils se matérialisent par le statut d’observateur dont jouit le Fmi dans les réunions confidentielles du club de Paris, le Fmi joue un rôle clef dans la stratégie de la dette mise en œuvre par le club de Paris, qui s’en remet à son expertise et son jugement macroéconomique pour mettre en pratique l’un des principes essentiels du Club de Paris : la conditionnalité. Réciproquement, l’action du Club de Paris préserve le statut de créancier privilégié de Fmi et la conduite de ses stratégies d’ajustement dans les pays en développement.
LE CLUB DE LONDRES
Il réunit les banques privées qui détiennent des créances sur les états et les entreprises du tiers monde. Pendant les années 70, les banques de dépôt étaient devenues la principale source de crédit des pays en difficulté. Dès la fin de la décennie, ces dernières allouaient déjà plus de 50% du total des crédits accordés, tous prêteurs confondus. Au moment de la crise de la dette, en 1982 le Club de Londres eut donc intérêt à travailler avec le Fmi afin de gérer cette crise. Ces groupes de banque de dépôt se rencontrent pour coordonner les rééchelonnements de la dette des pays emprunteurs. On qualifie plus précisément ces groupes de « commissions consultatives ». Ces rencontres, à la différence du Club de Paris, qui se réunit toujours à Paris) ont lieu à New York, Londres, Paris, francfort ou ailleurs selon les préférences des pays et des banques. Les commissions consultatives, formées dans les années 80, ont toujours conseillé aux pays débiteurs d’adopter immédiatement une politique de stabilisation et de demander le soutien du fMI avant de solliciter un rééchelonnement ou une requête d’argent frais auprès des banques de dépôt Ce n’est qu’en de très rares occasions que les commissions consultatives donnent suite à un projet sans l’aval du fMI, si les banques de ces pays, mènent une politique adéquate.
TAUX D’INTÉRÊT DE LA DETTE
Cette dette d’un montant de 59 milliards de dollars en 1959 avait été affectée d’un taux de remboursement de 14% unilatéralement fixé par les institutions financières internationales au profit bien entendu des puissances d’argent également puissances coloniales. Ce taux a été considéré par beaucoup comme étant un taux usuraire. selon la loi, est prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit. Le taux appliqué à la dette des Etats du tiers monde était et reste exagérément usuraire si l’on tient compte de cette disposition légale.
En droit pénale, l’usure est un délit répréhensible tant sur le plan de la répression que celui de la réparation. Ce taux, qui plus tard a été diminué de moitié, est resté usuraire et a été unilatéralement décidé par les états du Nord. L’infraction pénale ne peut en aucun cas légitimer l’acquisition par réalisation. Ainsi, en droit et en logique, toute acquisition qui résulte de la commission d’un délit est nulle et de nul effet. Les juridictions nationales sont toutes imprégnées de cette notion. Cela reviendrait à dire que tous les intérêts que les pays débiteurs ont eus à payer sont de pleins droits nuls et doivent être restitués. L’article 1235 du Code civil français nous rappelle que « tout paiement suppose une dette : ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition ».
L’aggravation de la dette est due en très grande partie à l’application de ce taux d’intérêt qui, eu égard aux dispositions légales, demeure une source illégale d’acquisition. La loi précise par ailleurs que lorsqu’un prêt conventionnel est usuraire, les perceptions excessives sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et éventuellement le principal.
CONTESTATION JURIDIQUE DE LA DETTE
La contestation économique d’un droit des puissances nanties s’est réalisée progressivement grâce à la décolonisation. Le professeur Louis Henkin a bien résumé la position des états du tiers monde : « Le droit international ne peut survivre au déclin de la domination européenne et ne peut gouverner une communauté des nations dont la majorité des membres ne sont pas européens, ne participent pas au développement du droit et dont les intérêts sont différents de ceux des autres nations. s’adressant à la sixième session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies, en sa qualité de Président de la sixième Conférence au sommet des pays non alignés, le chef de l’Etat algérien a déclaré sur ce point : « L’examen des problèmes de la dette actuelle des pays en développement est hautement souhaitable. C’est examen devait envisager l’annulation de la dette dans un grand nombre de cas et dans d’autres sa récapitulation avec les meilleures conditions en matière de délai. Les principales conséquences de telles pratiques sont une multiplication et une aggravation des difficultés rencontrées par les pays en développement.
Les principales victimes sont, bien entendu, les couches sociales démunies, dont les moyens de subsistance diminuent ; rien ne semble stopper l’évolution de ces populations vers une pauvreté absolue. Tout porte à croire que la perpétuation de la dette des pays en développement résulte d’une volonté politique délibérée dont l’unique objectif est d’anéantir tout effort tendant à l’amélioration économique et sociale de ces pays et de leurs populations. Il est certain que les déséquilibres financiers internationaux vont frapper de plein fouet les économies déjà fragilisées des pays en développement ; ces déséquilibres s’aggraveront aussi longtemps que les structures de l’économie mondiale seront placées sous le signe de l’échange inégal. Par ailleurs, tout porte à croire que le maintien en l’état de la dette permettra de faire de celle-ci un levier formidable pour mettre les pays en développement à genoux, tout en fournissant à leurs classes dirigeantes les moyens de se mettre à l’abri et être les partisans « j’allais dire les artisans » d’une politique économique catastrophique pour la grande majorité des populations pauvres du globe. Le procédé par lequel la dette est actuellement gérée va permettre en outre aux sociétés transnationales de briser toute velléité des pays débiteurs d’affirmer leur souveraineté et de définir leur propre voie de développement.
En raison du rôle qu’elle joue de nos jours, la dette est un fantastique instrument de domination que les sociétés transnationales manient dangereusement contre les pays en développement. Il faut mentionner ici l’échec des institutions monétaires de Bretton Woods qui ont failli à leur mission première consistant notamment à créer et maintenir entre les différents acteurs de la vie économique internationale l’équilibre dans l’intérêt supérieur de l’humanité. Cet échec, conjugué avec l’action des sociétés transnationales et l’égoïsme des états développés, a conduit à la création de deux pratiques néfastes et destructrices que sont les programmes d’ajustement structurel et, plus récemment, la dévaluation des monnaies des pays en développement. C’est dans ces conditions qu’intervient la mondialisation de l’économie, qui, au-delà de la négation qu’elle constitue pour les pauvres, est une source de déséquilibre constituant un obstacle incontournable pour la création d’un ordre économique et social mondial.
Rappelons que l’annulation de la dette des pays colonisés avait été évoquée à New Delhi, lors de la deuxième session de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement. M. Louis Nègre, ministre des finances du Mali, à la 58ème séance plénière, disait que beaucoup de ces pays auraient pu légitimement contester la validité juridique des dettes contractées du chef des puissances étrangères, et il ajoutait que par-delà le juridisme et la formation du bon droit, nous voudrions simplement réclamer des pays créanciers développés, comme preuve de leur bonne volonté sur ce sujet, qu’ils décrètent l’annulation pure et simple de toutes les dettes contractées pendant la période coloniale en fonction d’intérêts qui n’étaient pas fondamentalement les leurs et dont le service leur incombe injustement.
UN PIEGE DANGEREUX : LE MORATOIRE
Le moratoire consiste à différer le payement du principal et des intérêts. Durant le temps de la suspension, les intérêts continuent de s’accumuler .et d’augmenter la dette. Le moratoire va simplement contribuer à augmenter la dette et renforcer la mainmise des Etats créanciers sur l’économie des pays en développement.
CONCLUSION
Aux termes des informations que nous mettons à votre disposition, nous vous invitons à partager notre préoccupation et d’exiger l’annulation pure et simple de la dette des pays en développement et la restitution de ce qui a été indument perçu et ce sera justice ; nous exigeons la réforme des institutions monétaires internationales et la présence des Etats en développement au niveau de leurs organes de direction de gestion et contrôle.
Par Rokhaya Daba Fall
LES PROFONDES MUTATIONS D’APRES CRISES
La COVID 19 et l’odieux meurtre public de Georges Floyd. Deux évènements pour lesquels, différentes voix d’experts se sont élevées de tous bords pour, entre autres, prévenir des mutations profondes et inéluctables qu’ils vont entrainer.
La COVID 19 et l’odieux meurtre public de Georges Floyd. Deux évènements pour lesquels, différentes voix d’experts se sont élevées de tous bords pour, entre autres, prévenir des mutations profondes et inéluctables qu’ils vont entrainer. Ma voix est celle d’une indignée de première heure qui lance un grand cri du cœur, un appel à l’Afrique et aux panafricanistes afin qu’ils anticipent sur les grands changements prédits au lieu de les subir et ainsi trainer encore les peuples noirs d’Afrique et d’ailleurs dans des situations de discrimination, d’exclusion, de ségrégation, d’exposition aux maladies, de lynchage, de meurtres organisés, en somme des effets et impacts du racisme systémique qui règne dans la grande majorité des sociétés humaines.
L’assassinat de Georges Floyd à Minneapolis (USA), le 25 Mai 2020, est un crime de trop contre l’humanité, un meurtre de trop contre la peau noire. Afro-Américain ou Afro descendants versus Euro-Américains ou Euro descendants, tous deux des immigrés en Amérique, sont en conflit de l’esclavage à l’institutionnalisation du racisme. D’une seule voix l’Afrique a parlé en demandant aux instances des Nations Unies habilitées, d’inscrire un débat profond sur le racisme et ses manifestations violentes et sournoises.
Ensemble l’Afrique devra agir, parce qu’elle sait que la dignité de ses enfants, celle de l’Homme noir, est étroitement liée à la place qu’elle occupe dans le concert des Nations. Ce n’est pas hasard si le panafricanisme est né et a été porté surtout par les Afro descendants de la diaspora. Cependant, l’- heure est venue pour que le continent, d’une seule voix et à travers un programme d’action consensuel, s’unisse et porte le combat contre toutes formes de discrimination, d’exclusion, un combat contre l’ignorance qui divise la race humaine en plusieurs catégories selon la couleur de la peau.
La crise sanitaire et économique en cours a déjà sonné une alarme d’urgence en interpellant des postures que l’Afrique et ses décideurs ont adopté depuis des décennies sans mesurer leur impact sur le non-développement des pays subsahariens, en particulier.
La bagarre autour des masques, livrée entre certains pays « développés » et le fait que le premier partenaire de notre « sous développement », la France, ait déclaré ne plus alimenter nos réserves pharmaceutiques, constituent des signes annonciateurs de la grande mue sociale, économique et politique qui se prépare ou plutôt qui se déroule avec la persistance de cette pandémie. Ne pas se préparer à cette mue nous obligerait à la subir. Et nous ne pouvons nous permettre dans ce climat de déliquescence généralisée ou toutes les faiblesses sont mises à nu, de survivre à la pandémie en subissant toutes les mutations qu’elle aura entrainées.
L’Afrique devra, parler d’une seule voix et agir en tant que entité(s) pour s’indigner et dénoncer, mais surtout pour anticiper sur les profonds changements annoncés et plus encore, provoquer ces changements sous l’angle des intérêts de ses peuples. En somme, l’Afrique devra faire de la pandémie et de cette crise raciale exacerbée par les assassinats et meurtres publics, une série d’opportunités.
Quelles sont les postures à changer pour anticiper sur ces mutations ?
L’Afrique devra fondamentalement repenser son développement.
En tant que continent certes, mais en passant par ses entités sous régionales. Une sous-région comme l’Afrique de l’Ouest réunie autour de la CEDEAO devrait mobiliser toutes ses matières grises aussi bien dans le continent qu’au niveau de la diaspora pour revisiter le listing des priorités et gouverner son développement inclusif dans le cadre d’une intégration régionale effective.
Une des raisons qui interpelle l’approche sous régionale a été révélé notamment par une des leçons à tirer de la fermeture des frontières étatiques, comme mesure phare de prévention et de lutte contre la pandémie. En effet, la fermeture des frontières administratives ne peut être effective et productive que si une autosuffisance autant alimentaire que sanitaire et une performance du système éducatif sont assurées. Si les limites frontalières sont repoussées pour englober la sous région, alors les effets d’une récession économique d’une insuffisance alimentaire et nutritionnelle seront amoindris. Par ailleurs, la possibilité de gérer de façon souveraine les flux monétaires permet de mieux envisager autant le secteur de la santé que celui de l’Action sociale. Aussi, la région de l’UEMOA devra vivement se concerter afin que la survenu de l’ECO soit celle de la CEDEAO et non un simple remplacement du FCFA au sein de l’UEMOA.
En ce qui concerne l’autosuffisance alimentaire et nutritionnelle, le moment a sonné pour l’Afrique de mutualiser ses plans, stratégies et programmes dans leurs aspects qui ont le mieux marché. Au niveau de la production, la Grande Offensive Agricole pourla Nourriture et l’Abondance (GOANA) reste à biens des égards, figure d’exemple. En amont, au niveau, et de la gestion foncière et de la recherche, la sous région devrait créer des cadres de collaboration des services, d’autonomie assurée quant à leur financement. D’une part, la mutualisation des cadres et services de recherches permettra de juguler les coûts de cette activité à haut rendement, mais à financement de base difficile pour chaque pays pris individuellement. D’autre part, la mutualisation des réflexions sur le foncier, pourra certainement sauvegarder les terres des accaparements de tout acabit.
En somme, au niveau de la CEDEAO, les leaders des 8 pays qui la constituent, devraient aisément comprendre que leur leadership s’évaluera dans leur capacité de transformer les défis mis à nu par la pandémie en opportunités de développement de leur « pays » qui désormais ne peut s’entendre que dans celui plus global de la sous région.
La deuxième posture de l’Afrique consiste à tirer profit de ces lendemains qui chamboulent tous les équilibres géopolitiques pour sortir de son paradoxe de continent le plus Riche du Monde où vivent des Peuples parmi les plus Pauvres de l’Humanité. Pour relever ce paradoxe, les contrats d’exploitation des ressources naturelles devront être revisités et renégociés, une opportunité permise par la crise à ne pas rater. Ce n’est que par le biais de ces renégociations qu’un système endogène et durable de financements et d’investissements de l’Agriculture sera établi. C’est aussi par ce biais que des avenues de refondation de la coopération internationale seront érigées pour prendre en compte les intérêts de l’Afrique.
Enfin, la pandémie a permis de mieux nous imprégner des innombrables réserves médicinales naturelles de l’Afrique. L’Afrique, à travers le Congo et le Cameroun, a toujours secondé l’Indonésie dans la fourniture d’écorces d’où est extrait la quinine naturelle, une substance sans impact négatif sur l’- Homme contrairement aux synthèses chimiques alimentaires et médicinales qui ont largement remplacé tous les produits naturels. C’est le moment de bâtir et développer la « Souveraineté Sanitaire Africain (SSA) » à partir des connaissances traditionnelles et des ressources naturelles ; il s’agit bien de SSA et non de « Médicine Traditionnelle », une appellation à connotation souvent négligée, dérisoire ou même rendue méprisante par rapport à la médecine dite « moderne ». La SSA est plus une question de volonté politique qu’un problème de moyens quelconques. Cette SSA constitue un des piliers de notre fierté identitaire et notre désir commun d’appartenir à une entité qui fonctionne et occupe une place respectable et respectée dans le concert des nations.
Au niveau des individus et des organisations panafricanistes, l’histoire nous enseigne que le mouvement panafricaniste englobe déjà plusieurs générations qui sont mortes ou vivent encore dans une Afrique soumise ou, partout ailleurs dans le monde, se heurtent à des faits de ségrégation, d’exclusion et de discrimination multiples allant jusqu’aux meurtres et assassinats. L’histoire nous enseigne aussi que le leadership continue de constituer un handicap certain à la réalisation du commun vouloir, partagé par tous à travers ces générations, à savoir, la création des « États Africains Unis » (EAU). Il est donc temps de changer de posture en participant sans calcul à l’épanouissement de toute personne, toute organisation, tout mouvement panafricaniste, afin que tous ensemble, sous des leaderships multiples et diversifiés, atteignions enfin l’objectif commun, les EAU.
Nos Organisations continentales et sous régionales demeurent des cadres de la cause panafricaniste. L’action marginale qui se développe partout devra être accompagnée par celle au sein de ces entités grâce à une disponibilité sincère et gratuite de l’expertise panafricaine périphérique. Demeurer à la marge des instances de décisions pour le continent, les sous régions ou les pays, ne milite pas dans le sens de l’obtention de notre désir commun. L’expression de ce désir commun par certains des décideurs du continent à l’occasion de discours qui font date au niveau des grandes instances Onusiennes, comme à dates échelonnées, le discours de Robert Mugabe, de Mobutu Seseko, de Maky Sall et tant d’autres encore, indiquent clairement la nécessite de faire corps avec les instances de décisions pour hâter l’atteinte de notre objectif commun, les EAU.
Le mouvement panafricaniste est dans sa diversité, resté très intellectuel au niveau des classes moyennes. A travers des projets et activités dans les systèmes de Santé, de l’Agriculture et de l’Éducation, trois grands secteurs que la pandémie COVID 19 a sérieusement secoués, la grande masse aura une vision palpable de la noblesse de la cause, la seule qui nous motive, les EAU.
Ces 6 changements de postures autant au niveau des pays des sous régions, du continent, que des panafricanistes et de leurs différentes organisations, forment les séries de bonnes Gouvernances de notre développement, un ensemble de requis qui s’impose pour anticiper sur les changements prévisibles propulsés par la pandémie COVID 19 et l’arrogante démonstration du racisme systémique.
par Aguibou Diallo
INSULTES, IRRÉVÉRENCE POUR EUX ET DEVOIR DE DISSIDENCE POUR NOUS
Pour autant et pour prévisible que puissent être l'inconsistance, l'incompétence et le substrat folklorique de la gouvernance du Macky, la pagaille dans laquelle il nous installe dépasse toutes les prévisions
"Après avoir pris ainsi tour à tour dans ses puissantes mains chaque individu, et l'avoir pétri à sa guise, le souverain étend ses bras sur la société tout entière ; il en couvre la surface d'un réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes, à travers lesquelles les esprits les plus originaux et les âmes les plus vigoureuses ne sauraient faire jour pour dépasser la foule ; il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige ; il force rarement d'agir, mais il s'oppose sans cesse à ce qu'on agisse ; il ne détruit point, il empêche de naître ; il ne tyrannise point, il gêne, il comprime, il énerve, il éteint, il hébète, et il réduit enfin chaque nation à n'être plus qu'un troupeau d'animaux timides et industrieux, dont le gouvernement est le berger." Alexis De Tocqueville
Cissé Lô, Yakham, Farba et le couple présidentiel ne sont pas qu'inconscients, ils ne sont pas que perdus par le pouvoir, non ! Ils sont la petitesse bestiale de sous hommes surfaits. Il n'est pas besoin de remonter au Marquis de Sade ou à Dostoïevski pour intégrer imprévisibilité prévisible et du destin et de la nature de l'homme.
Pour autant et pour prévisible que puissent être l'inconsistance, l'incompétence et le substrat folklorique de la gouvernance du Macky, la pagaille dans laquelle il nous installe dépasse toutes les prévisions.
Il y a lieu, en effet, de s'interroger sur le modèle rationnel dont répond ce système. Il ne suffit pas de logique prébendière ou d'être frappé d'une impotence systémique. Ni non plus de se limiter au gangstérisme d'État que cette horde de pillards incultes a réussi à ériger en mode de gouvernance.
Il existe semblerait-il une congruence entre la posture démissionnaire et fataliste des populations, et principalement de la jeunesse, et la boulimie insatiable de nos Arsène Lupin tropicaux.
Même le pouvoir des Romanov, du nom de la dernière famille des Tsars russes, avec les frasques rédhibitoires de Raspoutine, n'avait pas été aussi bas que terre que celui du Macky.
Raspoutine s'était fait une pléthore d'ennemis intérieurs, son emprise sur Alexandra, épouse du Tsar Nicolas II, et les avantages y resultant, pouvaient le justifier.
S'y ajoute que son art ne se limitait plus à soigner miraculeusement et à distiller un culte hérétique de l'évangile, son emprise se prolongea jusqu'à préempter la conduite à tenir par le Tsar dans la gouvernance des affaires courantes de la Russie.
Cet affaissement du pouvoir russe lui valait la risée dans toutes les chaumières d'Europe et d'ailleurs.
Un siècle plus tard, c'est sur les tropiques du continent noir, le pays d'illustres hommes de tout ordre, spirituel, scientifique et littéraire, offre un spectacle que le plus inspiré des romanciers ne sauraient inventer, aussi inspiré soient-ils ! Ici la réalité surpasse la fiction et la rend fade.
Mais les sénégalais que nous sommes sont moins dignes que les bolcheviks, nous feignons l'indignation, pour parodier les anciens, mais freinons des quatre fers quand vient le temps de remplir la fonction y attenante.
La culture de la courte échelle et des raccourcis est autant vilipendée de la vulgate populaire qu'elle s'insinue insidieusement dans les prières secrètes de chaque aspirant à la réussite matérielle, qui peuple les bêtes de sommes que nous sommes devenus.
De sorte qu’en sus du fossé béant qui éloigne nos mandants du constituant sénégalais, la désinvolture et le langage de charretier tient lieu de discours politiquement savant.
Disons tout bonnement, dans notre cas, que "l'emprise croissante du non-sens s'est accompagnée d'une perte du sens commun. Et à bien des égards, ce phénomène est apparu simplement comme progrès de la stupidité", dixit Hannah Arendt, dans la nature du totalitarisme.
Voilà ce que cela nous coûte de nous saupoudrer d'une démocratie de pacotille avec des leaders (majorité et opposition) d'opérette, et qui est dépouillée de tout souci d'exemplarité, pour l'Histoire et la postérité.
Pierre Rosanvallon nous dit dans le bon gouvernement que " gouverner, c'est aussi parler". Mais peut-on vraiment qualifier le discours de cette caste de politiciens de langage ?
Puisque, nous dit Rosanvallon, " parler, parce que le langage est organisateur du monde humain, tout simplement." Alors de quelle organisation relève le langage cherretier de cette caste ?
Même si, argue le même auteur, qu' "une politique démocratique implique de donner un langage à ce que vivent les gens, de rendre lisibles l'action publique, ses objectifs et ses vicissitudes, de trouver les mots qui expriment à un moment donné le sens d'une épreuve ou d'une fierté collectives."
En l'espèce, ce débat de chiffonniers, catapultés à la direction de l'Etat, exhibe et rend lisible la perspective d'une implosion mortifère nous guettant avec hâte, que notre posture " de troupeau d'animaux timides et industrieux" facilite aisément.
En effet, selon l'historien français, "parler vrai, c'est accroître du même coup la maîtrise des citoyens sur leur existence et leur permettre d'instaurer une relation positive avec la vie politique. Parler faux ou parler creux, c'est à l'inverse amplifier l'écart. Au sens le plus fort du terme, le langage politique est pour cette raison au cœur de l'établissement de la confiance. Car c'est dans le sentiment de sa justesse que réside la possibilité de lier le présent à l'avenir".
Or, quel honnête observateur peut soutenir que cette caste de politiciens nous tient un langage politique qui raffermit le sentiment de confiance ? L'altérité prend ici des accents de caractérisation infâmante d'autrui. Et pour tout dire, avouons-le sans tomber dans la caricature, l'assimilation de l'espace politique en arène, ne relève pas seulement du champ lexical, elle traduit l'emprunt par les politiques du langage des lutteurs.
Nous nous sommes amusés du wathiathia de Macky, ulcérés des insanités de Cissé Lô ou de Farba, alors qu'il s'agissait bien là de la mise en feu de la mèche qui fera sauter la poudrière au-dessus de nos têtes.
Sauf à écourter le mandat en cours, exiger la démission du Macky, la mèche qui se consume petit à petit finira par nous perdre tous.
Le devoir de dissidence est un impératif pour la survie du pays et des prochaines générations, notre amour pour la paix ne saurait servir d'excuse face à la volonté déterminée d'une poignée d'hommes liges acquis à la cause de notre perte.
Les sénégalais de toutes obédiences et de toutes classes sociales, civils comme militaires, sont interpellés devant le péril que Macky et ses sicaires veulent nous projeter.
Le changement, ce n'est pas demain. C'est maintenant ou jamais !
par Mamadou Ndiaye
LA DÉMOCRATIE RECULE
Devant les forfaitures qui se multiplient, les spéculations se focalisent plus sur les agissements de certains que sur la solidité de notre architecture institutionnelle
Par un étrange paradoxe les démocrates quittent la scène lassés et abasourdis par l’affligeante pauvreté du spectacle qui s’offre. Signe des temps, le débat s’appauvrit faute de savoir remplacé par un « vernis de savoir pour se faire valoir » comme le disait le philosophe de la Renaissance Montaigne, dans son œuvre majeure : « Les Essais ».
La démocratie faiblit, recule et se cache. Pourquoi ? « Parce que la démocratie est un mauvais système », répond l’homme politique anglais Winston Churchill qui s’empresse toutefois de nuancer : « mais elle (la démocratie s’entend) est le moins mauvais de tous les systèmes ». A-t-elle montré ses propres limites ? Est-elle essoufflée ? A l’échelle planétaire sont arrivés au pouvoir par des voies démocratiques des hommes politiques hostiles à la démocratie. L’essentiel pour eux c’est d’atteindre la cime à l’image du singe qui s’agrippe à la branche. Peu importe donc les moyens utilisés. Danger ? Oui.
A quoi ressembleraient les sociétés humaines sans instances de délibération sur les « affaires de la cité » ? La liberté de parole, conquise de haute lutte, dévoile les maux de l’humanité dans un débordement frénétique, sans tenue, ni retenue. Le jeu politicien tue l’enjeu politique. Les calculs envahissent l’espace publique qui se transforme en estrade de pugilat peuplée de « grandes gueules ».
Et pourtant elle avait fière allure à ses débuts, la démocratie. Tout le monde la vantait tant la majorité gouvernait sans écraser la minorité dont les droits étaient préservés. Maintenant l’édifice se craquelle. Les honnêtes gens se claquemurent, préférant s’écarter plutôt que d’assister à une dégradante comédie de boulevard. Plus rien ne paraissant normal, des pratiques que la morale réprouve s’érigent en petites vertus : le mensonge est toléré, le vol, la cupidité, l’injure, le parjure, l’invective ne soulèvent plus d’objection.
La forfanterie qui s’étale au grand jour, semble ne déranger personne. Les vices deviennent majoritaires dans une société en manque de probité. La configuration de l’avenir reste d’autant plus incertaine que les visages de sagesses se raréfient. Le cynisme s’installe dans la durée. Même si des actions choquantes et impudentes se déroulent au quotidien, elles indignent de moins en moins. Grave. Parfois même les auteurs de ces actes répréhensibles trouvent dans l’opinion des « défenseurs » prêts à soutenir l’insoutenable légèreté.
Le Sénégal est-il à ce point permissif ? A quelle grandeur de vie pouvons-nous aspirer si chaque jour nous observons un délitement des liens sociaux ? De multiples facteurs se combinent pour détricoter notre tissu social : malaises de vie, désoeuvrement, absence de perspectives, chevauchement de générations, perte de pouvoirs d’achat et d’autorité, dilution des responsabilités, inégalités, injustices et accaparement des biens.
Les sources de pouvoirs sont littéralement prises d’assauts par des gens incompétents et dépourvus d’humanité qui masquent leur incurie par une grandiloquence repoussante. Les crises à répétition que nous vivons déchirent la société et fragmentent sa cohésion entraînant un repli identitaire qui menace des équilibres déjà fragilisés. Qu’avons-nous en commun ? L’Etat, censé nous sécuriser et nous protéger surtout en ces temps de tourments. Des institutions fortes, au-dessus de tous soupçons, incarnées par des hommes d’envergure attachés aux valeurs de transparence, d’équité et de stabilité.
Ces hommes existent-ils encore dans notre cher Sénégal ? En vérité, ces serviteurs se mettent en retrait pour éviter les télescopages. Qui plus est, parce qu’ils ne se fréquentent pas entre eux, ils vident des « lieux » qu’occupent sans vergogne d’autres mus par des non valeurs. Ces derniers n’obéissent à aucune règle. Leur empressement à conquérir des positions les disqualifie parce que discrédités. Devant les forfaitures qui se multiplient, les spéculations se focalisent plus sur les agissements de certains que sur la solidité de notre architecture institutionnelle.
De ce fait, les partis politiques ne sont que des associations privées alors que l’Etat nous représente et notre premier devoir en tant que citoyens, de surcroit républicains, est de travailler à le pérenniser parce que son rayonnement transcende nos prismes partisans.
Alors pourquoi gloser sur les emportements d’un individu, fut-il parlementaire, à l’endroit d’autres quand le même s’attaque à la première institution du pays avec une déconcertante désinvolture qui ne lui vaut que désapprobation verbale ? Le danger gît dans cette proximité avec des bougons aux mains tremblantes capables d’appuyer sur le « bouton nucléaire ».
Le choix des collaborateurs est une prérogative du leader. S’il se trompe dans la composition de son entourage, il expose la nation. Les propos haineux de ce parlementaire atypique ne datent pas d’hier et en plus ils sont sortis de leur contexte. Visiblement, il s’agit d’une conversation privée entre gens de même acabit dépourvus de pudeur et d’oreilles chastes. L’un d’eux a brisé l’omerta. Et du coup, en s’en saisissant, l’opinion s’est émue de la moralité de certains de ceux qui nous gouvernent.
Diffusée de manière virale, la bande sonore révèle l’absence notoire de scrupules chez les mêmes qui affichent des airs de parvenus assis au cœur de l’Etat. Sensibles à la démocratie d’opinion, les instances disciplinaires du parti au pouvoir et de l’Assemblée nationale ont très vite sévi pour écarter toute velléité de complaisance à l’égard d’une bande d’inclassables qui écument les allées du pouvoir en quête de « pognon de dingue ».
Le pire est à redouter. D’abord des règlements de compte par des arguments de force et non par la force des arguments. Après tout, les débats argumentés ne sont plus légion. Ensuite par médias interposés qui se délectent à l’évidence de ce « feuilleton d’été » à rebondissements. En principe, dans ce cas de figure, la presse devrait fonder sa démarche sur une information « honnête et précise » et sans doute exhaustive, en se hâtant lentement.
Elle joue sa crédibilité dans les affaires qui éclaboussent la classe politico-affairiste. En outre, elle devrait saisir cette opportunité pour ne pas suivre l’humeur de l’opinion encore moins la provoquer comme semblent y exceller quelques titres aux élans emphatiques. En bonne logique quand les médias empiètent sur la vie privée des personnalités, l’opinion publique devrait s’émouvoir parce que se sentant menacée. Mais « l’enfer, c’est les autres ! » Jusqu’à quand ?