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5 mai 2025
Opinions
Par Mamadou NDIONE
AGIR A LA FOIS SUR L’ANNULATION DE LA DETTE ET LE DÉVELOPPEMENT ENDOGÈNE
La relance de l’économie mondiale après cette pandémie se fera et ne se fera qu’avec des investissements massifs en Afrique partie la plus vierge d’un Monde qui a déjà mis un genou à terre. L’avenir du Monde est en Afrique.
En fin 2019, la dette mondiale de tous les agents économiques dépassait déjà les 250 000 milliards de dollars US (soit plus de 240% du PIB de la planète) au moment où les besoins en investissements dans des domaines fondamentaux comme la santé, l’éducation et les infrastructures de l’ensemble des pays à faible revenu s’élevaient à 500 milliards de dollars US (soit 0,5 % du PIB mondial).
A ces pays à revenu faible et aux autres qui, comme le Sénégal ont fait des efforts énormes pour être dans la grille des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, il est opposé souvent des critères de soutenabilité pour dire que leur endettement est problématique au moment où la dette publique des USA par exemple culminait à plus de 20 000 milliards de dollars et celle cumulée de tous les agents économiques américains à 69 000 milliards de dollars US contre 40 000 milliards de dollars US de dette publique et privée de la Chine. On voit bien que l’emprunt n’est pas signe de pauvreté ! Il est vrai que la problématique de la dette africaine avait poussé en 1996, le FMI et la Banque mondiale à lancer l’initiative « Pays Pauvres Très Endettés (PPTE). Il est tout aussi vrai qu’en 2005, il a fallu une deuxièmement initiative des institutions de Bretton Woods pour l’effacement de la dette multilatérale contractée par des pays africains auprès du FMI, de la Banque mondiale et le Fonds africain de développement.
Ces deux initiatives aussi salutaires soient-elles, n’avaient toutefois pas effacé la mauvaise perception des bailleurs sur l’endettement africain. C’est sans doute une des raisons de l’organisation par le Sénégal le 02 décembre 2019 de la Conférence sur « Développement durable et dette soutenable : trouver le juste équilibre ».
De façon quasi prémonitoire, le Président Macky Sall semblait en début décembre 2019 prendre les devants pour défendre la cause africaine. En effet, moins d’un mois après la conférence de Dakar, en Chine naissait une maladie qui, allait vite franchir les paliers d’épidémie à pandémie en moins de quatre mois pour bouleverser le Monde. Aujourd’hui, le COVID-19, a fini de mettre la planète Terre dans des prévisions de récession comprise entre 3% et 6% en fonction de scénarios optimistes (fin pandémie à fin juin 2020) ou optimistes (non maîtrise de la fin après juin 2020).
La Conférence sur la dette africaine du 02 décembre 2019 qui avait réuni six Chefs d’État Africains avec entre autres autorités la nouvelle Directrice Générale du FMI, le vice-président Afrique de la banque Mondiale et le vice-secrétaire Général des Nations Unies avait déjà permis de faire bouger les lignes de perceptions de la dette publique africaine. L’Afrique n’est pas surendettée quand on sait que sa dette publique qui ne représentait en réalité que 60% de son PIB de 2018 est loin des 240% de PIB mondial que représentait l’endettement public et privé a l’échelle planétaire. La dette publique africaine en terme de ratio est encore loin des 80% du PIB que représentait la dette publique cumulée de 27 pays de l’Union Européenne.
L’Afrique n’est pas surendettée puisqu’en 2019, l’encours de sa dette était juste de 1 330 milliards de dollars US soit 57% de son PIB au moment où la dette publique mondiale était d’au moins 83,3% du PIB mondial et celle publique et privé à 240%. Lors de la conférence de Dakar du 02 décembre, la Banque Mondiale et le FMI par les voix autorisées de leurs dirigeants avaient pris bonne note et l’espoir était permis d’aller par exemple à terme vers une révision des critères de convergence monétaire ou d’appréciation de la dette en tenant compte éventuellement des dépenses dues aux chocs sécuritaires ou climatiques dans l’analyse des ratios d’endettement ou de déficit de nos pays.
En clair, le chemin était balisé pour des actions énergiques allant dans le sens d’une meilleure soutenabilité de la dette africaine. Entretemps, le COVID-19, a coulé sous les ponts plongeant le Monde dans une sorte de secousse aux conséquences dramatiques que d’aucuns voient déjà dans des schémas comparables à la crise de 1929. Tous les pays du Monde seront touchés dans leur système de production et au niveau de leur volume d’échange et personne ne peut dire avec exactitude la date du bout de tunnel. Au Sénégal, pays qui était sur la rampe d’émergence, l’État a pris, à travers le Programme de Résilience Économique et Sociale (PRES), d’un coût global de 1000 milliards de FCFA des mesures de résilience pour agir à la fois agir au triple plan sanitaire, social et économique.
À l’instar de tous les pays africains, notre pays aura besoin de l’accompagnement des créanciers et institutions financières internationales pour mieux passer le cap par la résilience sanitaire, sociale et macroéconomique. L’Afrique qui est en train de subir les conséquences désastreuses de cette pandémie doit rester solidaire et proactive. C’est pourquoi il est salutaire de soutenir l’initiative du Président Macky Sall de demande d’annulation de la dette publique africaine et de réaménagement de sa dette privée.
Cette annulation de la dette, jumelée à un allègement des règles de discipline budgétaire, pourrait permettre après la crise d’aller avec plus de volontarisme vers le financement des infrastructures africaines condition sine qua non du développement continental. On se souvient qu’au lendemain de la deuxième guerre mondiale, par le biais du Plan Marshall, les USA avaient en quatre ans injecté en prêts l’équivalent de l’équivalent de 173 milliards de dollars de 2019. Que serait devenu l’Europe d’après-guerre sans le Plan Marshall ? L’Afrique en construction en guerre contre le COVID-19 a besoin d’investissements massifs pour rendre ses économies plus efficientes.
La solution à l’endettement de l’Afrique n’est pas seulement dans « le plus d’endettement », mais bien dans un sursaut de réalisme des partenaires techniques et financiers dans un Monde où la pandémie du COVId-19 requiert un changement de paradigme avec un nouveau regard à porter sur le continent berceau de l’Humanité. Le Monde a besoin d’une Afrique forte pour un rebond de l’Humain après le COVID-19. Le gel du service de la dette de quarante pays africains comme réponse à la demande d’annulation est certes un premier pas important, mais ce que veut l’Afrique, c’est un effacement de sa dette publique couplé à un réaménagement de sa dette privée.
La relance de l’économie mondiale après cette pandémie se fera et ne se fera qu’avec des investissements massifs en Afrique partie la plus vierge d’un Monde qui a déjà mis un genou à terre. L’avenir du Monde est en Afrique. C’est aussi un message important que ce virus invisible a fini de rendre plus lisible. Il est de la responsabilité des élites africaines de tout faire pour à la fois rendre la demande d’annulation de la dette plus audible et persuasive, mais aussi réfléchir déjà sur les pistes du développement endogène à l’échelle continentale ; autre message à décortiquer de cette pandémie qui nous a rappelé à tous que nous pouvons beaucoup faire par nos braves créateurs africains à l’instar de ces chercheurs de l’institut polytechnique de Thiès qui ont fabriqué en dix jours le prototype d’appareil respiratoire made in Sénégal. L’après COVID-19 doit faire de l’Afrique la prochaine usine du Monde par, pour et avec tous les Africains. Ce sujet, plus que les sempiternelles querelles de casting doit occuper en ambition et humilité l’intelligentsia africaine qui le devoir de création d’avenir.
par Mamadou NDIONE
DG du COSEC
par Ndiakhat Ngom
RÉSEAUX SOCIAUX, FAKE NEWS ET CONTROVERSES EN TEMPS DE COVID-19
Les autorités sénégalaises seraient donc bien avisées de doter les comités de crise COVID 19 d’un organe d’alerte et de veille. Comme nous y invite l’UNESCO, traquer les fausses informations devient un impératif catégorique
Internet et ses différentes plateformes (Messenger, WhatsApp, Instagram) jouent un rôle déterminant dans la circulation de l’information sur le Covid 19. Les populations disposent largement de précieux renseignements sur la situation géographique de la pandémie, les mesures préventives à adopter ainsi que les controverses sur le vaccin en préparation. Jamais, peut-être, dans l’histoire humaine, les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) n’ont été aussi présentes dans la gestation d’une catastrophe planétaire. C’est l’un des grands enseignements de Covid-19. Toutefois, la vitesse de circulation des NTIC a généré aussi de la surinformation qui flirte dangereusement, dans certains cas, avec la désinformation.
Depuis l’accélération des NTIC, il y a 20 ans, les leviers traditionnels de l’information (les organes étatiques ou privés détenant le monopole de sa gestation) cohabitent désormais avec de nouveaux cercles dans ce terrain très sensible. Aujourd’hui, les applications sur Google store permettent à n’importe qui de relayer des informations sans pour autant s’assurer de leur authenticité. Pire : certaines applications permettent de confectionner ou de détourner des vidéos, images ou audio à des fins de tromperie évidentes. Chacun peut le faire en faisant fi des normes déontologiques requises. La relation traditionnelle entre émetteur (l’organe reconnu) et récepteur (public) est brouillée.
II suffit d’un simple clic pour transférer des messages dans l’instantanéité. Ce qui évacue les mesures précautionneuses apprises dans les écoles de journalisme ; recueillir et recouper avant la publication. Les individus sont alors submergés par le sensationnalisme et ces effets contradictoires qui ciblent moins le cortex cérébral (intelligence) que la zone limbique du cerveau (émotion). Perdus dans ce flot discontinu, le cerveau n’arrive plus à avoir la lucidité, gage d’une bonne évaluation de ce brouhaha. En gros, les parties les plus primitives de l’esprit humain sont mises en branle.
Naturellement, cet état psychologique particulier fait le lit des fake news (fausses informations).
L’UNESCO invite à la plus grande prudence à ce sujet. Le Covid-19 est un moment béni pour les théories complotistes pour alimenter les réseaux sociaux d’informations erronées. Les internautes se les échangent sans grande précaution. Les exemples pullulent : on a affirmé que le Pr Raoult aurait déconseillé aux Africains de se détourner du vaccin en préparation puisqu’il viserait à limiter la fécondité galopante des femmes africaines. Des images de films sur des épidémies ont circulé prétendant un complot international pour le contrôle de la planète via les firmes pharmaceutiques. II en est de même de la prétendue arrestation d’un éminent membre du Pentagone en complicité avec un pays qui aurait fabriqué le virus. On peut ajouter l’exemple de la 5G ou certaines images d’animaux en ballade dans les villes pour renforcer la thèse de la revanche de la nature sur la civilisation.
Ce n’est pas tout. Certains ont défendu l’idée que coronavirus serait une maladie des populations caucasiennes alors que les Africains en seraient immunisés. Cette thèse est d’une absurdité affligeante. La Chine, point de départ de la pandémie, est une puissante plateforme commerciale, financière et économique. C’est normal qu’elle attire plus les populations des pays riches comme elle. Les Africains qui y sont proportionnellement moins représentés sont moins atteints. On peut supposer que les Chinois ont longtemps gardé le silence sur la maladie. Ce qui explique que les premiers européens infectés (les Italiens) soient tranquillement rentrés chez eux sans s’inquiéter. La fin de la période d’incubation a révélé la nature et l’ampleur du drame : c’était trop tard.
Le même raisonnement est valable pour l’épidémie d’Ebola en RDC (2008) ou en Guinée (2014). Elle a moins touché les Européens, peu représentés dans ces pays, hormis certains volontaires des ONG (Médecins sans frontière). Par conséquent, la Chine en tant que puissance planétaire a généré une pandémie (envergure planétaire) tandis que la Guinée et la RDC ont généré des épidémies (portée régionale). Comme on le voit, le poids économique des zones concernées ou la vitesse de circulation des individus détermine cette disproportion ethnique ou géographique.
Enfin, des experts ont agité une thèse de fond d’après laquelle un génocide ou un eugénisme négatif (élimination de personnes ou de populations jugées inférieures ou inaptes) serait en cours contre les populations noires aux Etats-Unis ou en Angleterre. Les statistiques montrent qu’elles sont, proportionnellement, les plus grandes victimes, inversement à leur représentativité. En fait, l’explication tiendrait moins à des raisons génétiques que socioéconomiques. D’abord, les populations noires et asiatiques (en Angleterre) occupent les postes qui sont les plus exposés au virus (infirmiers, chauffeurs, livreurs, caissiers). En temps de confinement, elles continuent de travailler et s’exposent aux risques d’infection. Ensuite, elles ont moins accès aux soins de santé qui les prémuniraient des maladies diabétiques et cardiovasculaires qui ont une relation profonde avec le stress de leur emploi. Enfin, on peut indexer une mauvaise alimentation.
Bien évidemment, ces paramètres n’éludent évidemment pas le racisme structurel mis en lumière par les études sur la « postcolonie » en vogue dans les pays anglo-saxons et en France (bien tardivement, il est vrai).
Les autorités sénégalaises seraient donc bien avisées de doter les comités de crise COVID 19 d’un organe d’alerte et de veille. Comme nous y invite l’UNESCO, traquer les fake news devient un impératif catégorique. On imagine déjà certaines réticences, par exemple, qui impacteront négativement les campagnes de vaccination dans les pays du sud.
Ndiakhat Ngom est président de l’Institut Transatlantique pour les Coopérations Sud-Sud (ITCSS)
Cet appel à la vigilance que j’adresse à la jeunesse africaine, m’est venu comme un déclic, suite, à la lecture de propos recueillis dans un article paru dans le site du journal lemonde.fr. Il y est rapporté qu’une coalition de chercheurs a déjà un soi-disant plan de tests cliniques et que l’Afrique ne devrait pas être exclue.
Ce type d’intérêt soudain, à l’égard de l’Afrique, me fait réagir ici avec sursaut quant au bienfondé d’une soi-disant bienveillance à notre endroit.
Tout récemment encore, une vidéo virale parue sur une chaine française, dans laquelle, deux chercheurs français démontrent le mépris qu’ont encore d’autres envers toute l’Afrique noire. Cela en dit long également sur la façon dont les médias occidentaux persistent encore à vendre une image toujours dégradante et irrespectueuse envers l’Afrique.
Défier les réelles intentions des grandes puissances à l’égard de l’Afrique.
Plus que jamais, nous devons nous imposer une règle d’or de prudence et de méfiance à l’endroit de leurs actuelles intentions et actions, dont l’histoire nous a appris, ont été inavoués, trompeuses et surtout néfastes à notre chère Afrique. Une première bonne raison de se méfier est de se poser la question à savoir sur quel modèle actuellement fiable peuvent-ils fonder leurs projections pour prédire avec prétention et arrogance, une hécatombe en Afrique ? Des modèles capables de prédire des pics selon les spécificités des mesures sanitaires et des conditions socio-économiques, n’existent pas à l’heure actuelle. Ceci sans vouloir minimiser le risque élevé de propagation en Afrique. Toutefois, ces modèles sont souvent d’ajustement logistique sur un nombre suffisant de cas testés et servent actuellement qu’à des besoins de comparaison à des scenarii extrêmes pour justifier la nécessité d’un effort de distanciation sociale et de ne pas courir le risque de surcharge et de dépassement des capacités de prise en charge médicale. Par ailleurs, même si l’évolution de la pandémie en Amérique ou en Europe a montré une situation alarmante, des modèles d’approximation basées sur ces données empiriques ne s’ajusteraient pas telle-quelle en Afrique. En effet, le nombre de tests nécessaires pour mieux contenir celle-ci n’est pas comparable à celle de l’Allemagne par exemple. Ceci faute de moyens matériels et de disponibilités financières.
Une autre bonne raison de se méfier en est de se poser la question : pourquoi ne se contenteraient-ils pas de faire des tests cliniques seulement sur leurs populations dans des conditions idéales, trouver des traitements et les partager avec le reste du monde y compris l’Afrique ? Car, il n’existe, actuellement, aucune preuve, même pas d’hypothèse en quoi l’être africain réagirait-il différemment face à ce virus ; ce qui justifierait de faire des tests cliniques spécifique en Afrique. Cette hypothèse serait d’ailleurs absurde en considération du taux de décès aux États-Unis parmi la communauté noire.
Ainsi, dans cette période de confusion totale où personne n’a aucune connaissance fiable, sur comment traiter cette maladie, il est inconcevable pour un africain conscient des enjeux économiques et stratégiques des grandes puissances, de vouloir encore accepter d’être les cobayes et matières premières pour les mêmes qui n’ont cessé depuis des siècles de prétendre être solidaire envers ceux qu’ils ont sciemment déshumanisés à la face du monde, spolier de leurs ressources matérielles et humaines, annihiler de leurs idées innovatrices et créatrices, de leurs organisations sociales, jadis, encrées dans l’entre-aide et le partage que reflétaient de grande valeurs morales et humaines ; Croyants que nos nobles valeurs de partage sont universellement partagées, nous nous sommes exposé sans défense aux actions nuisibles et destructrices venant de civilisations prédatrices. Le résultat est sans doute ce que toute l’Afrique noire vit de nos jours ; et non sans pour autant résister.
L’heure de veille et affirmation pour préserver notre destinée commune
Aujourd’hui, la jeunesse africaine incarne cette résilience. Cette jeunesse est d’autant plus éveillée et déterminée à résister et surtout s’affirmer d’elle-même aux yeux du monde.
Il nous est désormais imposé, à nous cette nouvelle génération africaine et par nous-même, de faire preuve d’une grande vigilance et de veille permanent contre toutes les tentatives de nuisance de ces prédateurs sur nos ressources et notre capacité d’affirmation. Car, au-delà même du nombre de morts déplorables dus au COVID-19, la crise économique mondiale qui en découle, aussi courte serait telle souhaitable, fera certainement resurgir comme à l’accoutumée, des velléités hégémoniques et impérialistes de convoitise (de quelconque origine soit telle) envers l’Afrique. Ainsi, l’heure n’a jamais été aussi propice pour la jeunesse africaine de se mobiliser afin de pouvoir :
- Désormais, faire bloc et dissuader toute action nuisible à son destin commun tant convoité. Cet esprit de veille doit habiter chacun(e) de nous, partout dans le continent et dans la diaspora. Il doit être lieu, par exemple, de croire à notre capacité de déceler toute action néfaste, de faire suivre l’information par nous-même et de rallier toute cette force vive de partout le monde, faire barrage et infléchir du bon côté, à temps, les prises de décision de nos dirigeants sur les impératifs de bonne gouvernance, les besoins et formes de coopération internationale et surtout les orientations stratégiques de développement humain au-delà même de la croissance économique. Plus que jamais, nous devons nous incarner la demande sociale d’un changement majeur d’état d’esprit.
- Promouvoir un leadership africain courageux et capable de nous mener en unisson vers cet objectif. Le moment est venu pour la jeunesse africaine de prendre le relai afin de promulguer ce nouveau type de leadership. Cette jeunesse bien formée sur tous les domaines scientifiques, de management, d’entreprenariat, mais surtout celle qui incarne bien les valeurs morales et humaines africaines.
La jeunesse africaine doit d’ores et déjà exiger un leadership qui comprend l’urgence africaine de l’industrialisation et de l’autosuffisance. Les domaines de l’éducation à la formation pratique soutenue par un fort élan de recherche, de l’agriculture, de la santé et des nouvelles technologies de l’information doivent être des cibles prioritaires des politiques africaines de développement humain et se refléter dans les facteurs-clés des fondamentaux économiques.
La jeunesse africaine s’est déjà s’appropriée le combat de libération partout où elle se trouve dans le monde. Il est impératif actuellement de prendre conscience que ces mouvements doivent être cordonnés.
Une solidarité internationale de sortie de crise envers l’Afrique.
Afin de pouvoir faire rupture avec la relation toxique néocolonialiste d’autan, le temps est venu pour l’Afrique d’exiger de la part des grandes puissances économiques actuelles qu’elles fassent preuve d’une coopération internationale honnête et sincère dans l’intérêt de toute l’humanité. Non ! Cette exigence n’est pas en soi une demande de l’aide basée sur les concepts et mécanismes d’organismes internationaux qui n’ont jusque-là réussi à remplir leurs rôles à l’endroit de l’Afrique ; ou du moins en reconnaissant le préjudice, de corriger le tir et rendre la monnaie. S’aurait été un grand service rendu à toute l’humanité entière.
Cette fois-ci, nous devons veiller à ce qu’elle soit bénéfique à nous-même et équitable aux autres dans un cadre de respect mutuel qui permettrait aux pays Africains de s’assurer que :
- Cette solidarité internationale soit de nature à se soulager de sa dette souveraine qui en est, dans bien des mesures, anormalement contraignante et moralement soutenable.
- Des financements de fonds de lutte contre le COVID-19 se font en concordance avec l’organisation effective déjà mise en place pour contrer la pandémie. Car, à l’instar de la Chine et de beaucoup de pays en prise dans cette épidémie, bien des pays africains ont pu mettre en place, à la hauteur de leurs moyens, des mesures de sortie de crise adéquate. Il ne doit plus être lieu d’ignorer cette volonté réelle sous aucun prétexte.
L’Afrique doit ainsi se libérer de toute tutelle d’encadrement ou pilotage des puissances étrangères. Cela n’est plus nécessaire de nos jours ; la garantie d’une bonne gouvernance est de nos jours exigée par la nouvelle génération africaine, une jeunesse aussi bien décomplexée et capable de relever le défi.
Pour y arriver, il est, également, impératif de forger ce développement d’abord au niveau sous-régional, ensuite régional et finalement avec une certaine ouverture au reste du monde.
L’Afrique n’a plus, également, à avoir peur de dire non au capitalisme sauvage, sans morale, qui ne serait même d’aucune vertu à l’humanité toute entière. L’Afrique doit à présent réinventer sa propre voie de développement à l’instar des nouveaux dragons d’Asie.
Une solution alternative africaine à cette crise sanitaire et même de celle d’une coopération internationale basée sur valeurs humaines s’impose. Celle–ci doit émanée de nous-même.
Oui, Il faudra d’or et avant compter sur cette jeune Afrique qui a pris conscience d’elle-même et de ce qu’elle a de plus précieuse.
Elle est plus que jamais déterminée à le défendre.
Malick Diallo, un Saloum - Saloum au Canada
Spécialiste En Gestion de Risques Financières, Analyse Économique et Travaux Statistiques
Est-il vrai que des rappeurs ont été reçus par le président et qu’une enveloppe aurait été mise à disposition pour indemniser les acteurs de la culture urbaine (essentiellement des musiciens) d’hypothétiques pertes liées au couvre-feu ?
Nous aimons leurs textes, nous aimons leur engagement, ils sont des contributeurs essentiels de notre démocratie, mais le rapport de certains rappeurs sénégalais à l’argent est aussi intriguant qu’inquiétant. Est-il vrai que des rappeurs ont été reçus par le président de la République et qu’une enveloppe aurait été mise à disposition pour indemniser les acteurs de la culture urbaine (essentiellement des musiciens) d’hypothétiques pertes liées au couvre-feu ? Est-il vrai qu’un formulaire Google circule sous le manteau dans l’underground du hip-hop sénégalais pour identifier les artistes ayant subi des pertes liées au repos forcé ? À l’heure où des Sénégalais de bonne volonté cotisent pour contribuer à la force Covid, d’autres, et parmi les auto-proclamés défenseurs du peuple, rempliraient des documents pour recevoir une partie de cette cagnotte ?
Si la démarche du gouvernement ressemble plus à un investissement politique sur le futur, j’ai beaucoup de mal à croire qu’un seul rappeur puisse accepter ce marché indigne. Si le gouvernement n’en est pas à sa première attaque contre l’intérêt supérieur de la nation, les rappeurs ne devraient en aucun cas se rendre complices d’une telle mascarade. Il serait temps qu’ils mettent un peu d’éthique dans leur rapport au système politique qu’ils prétendent dénoncer. Face à la détresse de beaucoup de familles, ils devraient être en première ligne, pour soulager les citoyens. En tant que soldats de la conscience collective, il me semble qu’ils devraient aller au-delà du sacrifice dans ces moments difficiles. On peut leur concéder de ne pas contribuer, à la cagnotte, nul n’y est obligé. Par contre, il est problématique vu leur discours d’imaginer toucher un seul centime de la nation, quel que soit l’impact que l’épidémie a sur leurs activités. Sans parler de la question des ayant-droits (qui indemniser ? comment ? pourquoi ?), il y a la responsabilité morale que prennent ces artistes dans la dilapidation de nos maigres ressources.
Si cette histoire est vraie, il est temps alors pour nos amis du hip-hop de revoir leur positionnement social et leur rapport à l’argent. Cela voudrait dire qu’ils agiraient davantage en entrepreneurs capitalistes qu’en activistes militants. Cela voudrait dire qu’ils auront perdu leur honneur et leur crédibilité quelque que soit l’arrangement qu’ils feront avec leur conscience. Il serait temps pour eux de comprendre que ce qu’on leur demande, c’est d’inspirer notre jeunesse par l’action quotidienne, d’aider à bâtir un nouveau type de Sénégalais par le comportement, de montrer qu’il y a une autre manière de réussir sa vie que par l’argent. S’ils ne le comprennent pas ainsi, on leur dira que c’est criminel et qu’ils ne peuvent pas profiter de leur position pour compiler des avantages, qu’ils soient pécuniaires ou symboliques. Il n’y a pas pire perversion que de semer dans la tête de notre jeunesse que le Sénégal est une grosse entreprise et chaque citoyen en est actionnaire. En se positionnant dans tous les carrefours où il est question de financement et de pécule. En agissant ainsi, les leaders du hip-hop sénégalais font preuve de la même corruption morale que l’élite politique qu’ils dénoncent.
Avec toute l’affection que nous avons pour eux, nous appelons chaque rappeur ou rappeuse qui aurait fait la démarche pour toucher de l’argent de l’État de le rendre. Et de méditer sur Kennedy : « demandez-vous ce que vous pouvez faire pour le Sénégal et non pas ce que le Sénégal peut faire pour vous ».
Par Seybani SOUGOU
2020, CE N’EST PLUS 20/20 MAIS 00/20 !
Avec la multiplication des cas de COVID-19, de nombreux experts et professionnels de santé ont réclamé des mesures plus fortes, axées sur le confinement de la population pour contenir la propagation de la pandémie.
Dans son adresse à la Nation du 23 mars 2020, Macky Sall a déclaré l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire national à compter de lundi à minuit, assorti d’un couvre-feu de 20h00 à 6h00 du matin en vue de combattre l’épidémie du Coronavirus qui continue de se propager à une vitesse folle, dans le monde.
Tout le monde en convient : le coronavirus constitue une menace extrêmement grave pour tous les pays du monde. Il existe un consensus largement partagé sur le fait que la lutte contre la pandémie de COVID 19 nécessite des mesures drastiques et exceptionnelles pouvant allant jusqu’à la restriction des libertés publiques (pour une période temporaire motivée par des circonstances exceptionnelles).
Au Sénégal, un arrêté du Ministre de l’intérieur a été publié interdisant sur toute l’étendue du territoire, pour des raisons liées à la propagation de Covid19, toutes les manifestations et tous les rassemblements de personnes, dans des lieux ouverts ou clos, du 14 mars au 14 avril 2020 (un arrêté, violé par l’ex premier ministre Boun Abdoullah Dione qui a fait preuve d’une immaturité et d’une irresponsabilité innommable).
Avec la multiplication des cas de COVID-19, de nombreux experts et professionnels de santé ont réclamé des mesures plus fortes, axées sur le confinement de la population pour contenir la propagation de la pandémie. Disons-le sans détour : Macky Sall n’a pas été à la hauteur, avec un discours à côté de la plaque. Avant de déclarer l’état d’urgence : il y a un préalable, c’est le confinement. Or, ce terme est totalement absent du discours de Macky Sall.
Normalement, le couvre-feu devrait accompagner les mesures de confinement (sachant qu’avant de confiner une population, il faut pouvoir la nourrir). En réalité, l’état d’urgence assorti d’un couvre-feu de 20 heures à 6 heures du matin, sans confinement se révèle inutile et totalement inefficace pour enrayer la propagation de la pandémie de Covid-19.
La situation est de plus en plus claire maintenant, l’Afrique ira vers la récession de son PIB. Une récession arrive quand la valeur de la richesse produite dans l’année courante est inférieure à celui de l’année passée.
Les pays africains vont perdre de 3 à 5 points en moyenne de croissance en 2020, selon les dernières prévisions des organisations spécialisées (FMI, Banque Mondiale, BAD, Agences de notation).
Ceux qui avaient les meilleurs taux de croissance du continent (entre 5 et 6%) combinés à une certaine stabilité des structures de production échapperont peut-être à cette récession globale. Il s’agit probablement de l’Ethiopie, du Kenya, de l’Ouganda, du Mozambique, du Rwanda, des pays de la CEDEAO à l’exception du Nigéria, du Liberia, de la Guinée Bissau et dans une moindre mesure du Mali. Pour le Sénégal, les dernières estimations prévoient une décroissance jusqu’à moins de 3%.
Le problème majeur qui se situe dans toutes ces prévisions actuelles demeure l’impossibilité de savoir la fin exacte de la crise, malgré les énormes mesures de contingence sanitaire, sociale et économique prises partout dans le monde. Toutes les prévisions supposent une reprise timide de l’activité économique à partir de juillet 2020 et normale à partir de Septembre 2020.
A défaut, un prolongement de la pandémie au-delà de ces prévisions serait juste une catastrophe à tous points de vue pour nos économies.
Qu’entraîne une récession :
L’économie est une chaîne liée et connectée, les entreprises produisent, gagnent de l’argent, donnent une partie aux travailleurs, et partagent le reste entre elles et l’Etat. L’ensemble des trois entités utilisent cette richesse créée en le consommant ou en l’épargnant.
Quand les entités (Etat, travailleurs, entreprises) consomment, le cycle de production reprend de nouveau, les entités investissent leur épargne dans des facteurs de productions (matières premières, services, emplois, recherche et développement), créent de la richesse qui croit avec l’augmentation de la demande due en partie aux « nouveaux venus » dans le marché (naissances, progrès, progression, comportements).
L’Etat, sur ce qu’il gagne dans ce processus permet de soigner tout le monde y compris lui-même, de garder la paix, de favoriser les conditions accrues et stables de création de richesse (formation, régulation, infrastructures et au secours quand tout va mal). (Etat gendarme-Etat providence).
Si une récession surgit, elle entraîne une réduction de la taille du gâteau, les travailleurs reçoivent moins (Licenciement, chômage partiel), L’Etat aussi (moins de dépenses pour soigner, éduquer, garder la paix…), itou pour l’Entreprise (pas d’épargne, pas d’investissement, pas d’achat de services, ni de matières premières et…de nouveau recrutement).
En gros, une récession entraînera une augmentation du taux de chômage, une baisse de la consommation, des dépenses publiques et tout ce qui s’en suit en conséquence sociale.
Quand ces cas arrivent les Etats ont dans leur rôle de maintenir la meilleure situation possible (sauvegarde de l’emploi, de la consommation et des capacités d’investissement des entreprises) tout en se maintenant en vie, étant lui-même un agent de l’entité et garant du bon fonctionnement de tout l’écosystème, c’est ce qui entraîne les plans d’assistance ou plans de soutien.
Pour survivre actuellement, l’Etat du Sénégal a prévu d’injecter 1000 milliards permettant de faire face, son « bras de financement de l’Economie », la Banque centrale a accru les ressources monétaires (pour les 8 pays quand même) de 340 milliards par semaine pour un total de 4750 milliards, assouplit certaines règles de financement, de faire reporter des échéances en cours, etc. (Sic).
Le perfusion de l’Etat devrait permettre de faire face aux lourdes dépenses sanitaires contre la maladie (69 Mds), à maintenir la consommation des ménages quasi-intacte (survie, aides sociales) pour 100 milliards, de vacciner les entreprises à 657 Mds et de se soigner lui-même (couvertures des pertes de recettes) à 178 Mds.
Cette intervention, adossée à des conditions, permettra à la structure de production de ne pas totalement flancher, à défaut, on se remettrait des années à le relever.
Seulement, toutes ces mesures n’empêcheront pas une baisse de la croissance, parce que les entreprises sont connectées au niveau mondial, ils ont besoins du cultivateur ukrainien qui leur fournissent du blé, confiné chez lui, du riziculteur indiens, confinés chez lui également, de l’ouvrier des champs pétroliers d’Aramco Arabie saoudite, également confiné chez lui, et de la main d’œuvre du sénégalais lambda à qui on de demande de « rester aussi chez lui sagement ».
Mais elles permettront (ces mesures) de ne pas amener samba Khoule au chômage, lui donnera sa part, même réduite, du Gâteau qui n’est pas ou peu produit, et favorisera à Samba de continuer à acheter…entraînant la continuité du cycle de production. Aucune chaine ne doit se casser entre la production et la consommation, c’est la règle principale de résilience d’une économie.
Enfin, pour financer ces 1000 milliards, l’Etat n’avait besoin que de chercher 783 Mds en liquide, le reste étant des renonciations de recettes effectives (remises de dettes fiscales, exonération, suspension TVA).
Il a bénéficié d’un apport externe de ses bailleurs de fonds principaux à hauteur de 586 Mds (74% des besoins) [Fonds monétaire international (264 milliards), la Banque mondiale (138 milliards), la Banque ouest africaine de développement (26 milliards 749 millions), la Banque islamique de développement (98 milliards), la Banque africaine de développement (60 milliards).]
Les Sénégalais eux-mêmes (individus et entreprises compris) ont apporté 15 Mds dans l’escarcelle (en moyenne 800 FCFA par personnes).
Pour le reste des coupes et réduction budgétaires le comblera, il s’agit pour ces coupes et sans suspenses les frais de voyages en première ligne et des dépenses courantes principalement. On touche en dernier ressort les investissements et les salaires.
Ces mesures, bonnes ou mauvaises, acceptables ou faibles, sont adossées déjà à d’énormes contraintes, dont la principale est la perte de recette de l’Etat, et des critères macroéconomiques à surveiller (niveau de la dette, pression fiscale limitée, déficit budgétaire) tout un casse-tête et…Le pire est que tout est bâtis sur des hypothèses d’une fin de crise dont on ne connait quasiment pas l’issue.
NB : Quelque chiffre pour se faire une idée des …chiffres de notre économie.
Le Sénégal c’est en moyenne (référence 2019) :
- 1177 milliards CFA de richesses produits par mois, 38 Mds par jour, 1.6 Mds/heures
- 9 millions de personnes en âge de travailler et 7,7 millions environs qui ont une occupation rémunératrice. Un taux de chômage officiel de 15%. Environ 4 personnes sur 10 ont un emploi salarié.
- Chaque personne active au Sénégal apporte en moyenne 152.000 F de richesse à l’économie, en comparaison, la moyenne mondiale est d’une personne contribuant 1,859 millions de FCFA à l’économie (sources BM) soit un taux de productivités de 8% par rapport à la capacité moyenne mondiale. (92% d’oisiveté économique).
- L’Etat a gagné en 2019 en moyenne par mois 213 Milliards de recette, a dépensé 332 milliards et a consommé 119 milliards d’emprunt. 62 des 332 milliards dépensés par l’Etats ont été en salaire pour environs 143 milles fonctionnaires et Cie.
- Ces chiffres rapportaient à un niveau plus bas permet de comprendre notre immense retard : L’Etat paie en moyenne 433.000 FCFA à ses supports pour permettre au Sénégal de produire 152.000 de richesse par travailleur. En comparaison avec la France, leur Etat paye en moyenne 1,464 millions de FCFA à ses supports pour garantir une production de richesse de 5 millions par travailleur. Cela ne signifie nullement qu’on ait un trop plein de fonctionnaires, nous en avons que 8 pour 1000 habitants, là où les pays développés ou émergeant pointent à plus de 50 pour 1000 et des pics de 150 pour les pays scandinaves.
Bachir Diop est Diplômé d’Analyse et Politiques économiques
FASEG/UCAD 2006
Par Cheikh Hajibou Soumare
LE NOUVEL ORDRE MONDIAL, UNE CHANCE POUR L’AFRIQUE ?
L’Afrique unie ne doit pas revendiquer cette place mais l’arracher au besoin !
Depuis des décennies, l’Afrique peine à trouver sa voie dans un processus de mondialisation, pensé et conduit par des puissances d’argent, avec comme conséquence, un creusement de plus en plus prononcé des inégalités : plus de prospérité pour une infime minorité et plus de pauvreté pour le plus grand nombre. Le monde semble aller vers une déshumanisation progressive. L’’accomplissement de l’homme n’est plus la préoccupation majeure, mais le renforcement du Capital à travers une accumulation sans fin apparaît comme l’objectif prioritaire. Comme une machine hors de contrôle, le monde des hommes s’est emballé dans une course effrénée vers plus de profit. Une course menée par des hommes qui seront, eux-mêmes, oubliés à la fin de chaque processus de transformation. La production est localisée avec comme objectif la recherche de gains de productivité et de rentabilité. Des sites de profits tout trouvés deviennent les centres de création de la richesse mondiale, ce bien qui devait être le mieux partagé pour le plus grand bonheur de l’humanité.
Loin d’être un humaniste, dogmatisme en bandoulière, je souhaite à travers cette réflexion, et en ces moments difficiles que traversent toutes les Nations, interpeller l’Afrique, à travers ses dirigeants et notre Union (l’Union Africaine) a travers ses Organes, sur la posture à adopter et sur notre partition à jouer en tant que continent à part entière. Je devrais dire en tant que Nation Africaine. Au moment où se construit sous nos yeux, un nouveau monde qui va donner naissance à un nouvel ordre mondial, l’Afrique que nous aimons tant, doit être un acteur de premier plan dans ce processus. Je dis bien acteur et non spectateur. L’Afrique unie ne doit pas revendiquer cette place mais l’arracher au besoin ! Je me permettrais de citer le Président Emmanuel Macron dans son discours du 13 avril « . Je comprends ici la « Responsabilité » au sens inclusif du terme (les dirigeants Africains), car il venait de parler en d’autres termes empreints de sincérité, de la nécessité ». Cette posture du President Macron est à saluer à sa juste valeur. Il revient aux dirigeants Africains de jouer pleinement leur rôle en parlant d’une seule voix, celle de l’Afrique, celle que notre jeunesse attend. Avec tous les atouts désormais en main, nous ne devons pas démériter de cette jeunesse qui nous regarde !
L’Afrique a son mot à dire dans cette nouvelle mondialisation, dans cette globalisation de l’économie. A quelque chose malheur est bon ! Les temps actuels et surtout à venir seront certainement parmi les plus tristes et peut être les plus déchirants de l’histoire de l’humanité. Mais avec un grand espoir qu’un nouveau monde, plein d’espérance et de renouveau va s’ouvrir. L’Humanité est saisie de doute, à cause d’un virus invisible qui est en train de traverser le monde, de semer la désolation. Les pays « puissants » se disputant le leadership avec les pays pauvres tous les soirs à l’heure du bilan journalier et macabre des ravages de la maladie à l’échelle planétaire. Le fossé entre pays riches et pays pauvres est subitement « car la conséquence est la même pour tous riches comme pauvres, la solution jusqu’ici est restée introuvable et l’impuissance des peuples continue de s’affirmer tous les jours. J’ai dit que l’Afrique à son mot à dire, oui! l’Afrique à son mot à dire, l’Afrique doit agir ici et maintenant, en toute responsabilité, en prenant toute sa place déchargée de ce fardeau du complexe d’infériorité.
L’Afrique n’aura plus cet alibi, après cette période de l’histoire contemporaine des peuples, de faire comprendre que tout ce qui lui arrive est du fait des autres...L’Afrique est face à son destin. C’est là où l’idée de Nation Africaine à travers une solidarité toute Africaine aura tout son sens. L’Afrique se doit de réfléchir vite et bien, elle en a les moyens, les compétences et le soutien de pays amis autour de quelques problématiques majeures non limitatives. 1/ Quelle sera la place de notre continent dans cette nouvelle gouvernance socio économique mondiale avec un modèle qui vient de montrer ses limites? Quelle gouvernance enfin! qui mettra l’épanouissement de l’HUMAIN au sens large du terme au cœur de toutes les préoccupations et non l’épanouissement de L’HOMME au sens individuel.
Selon les rapports de la Banque Mondiale et de OXFAM il est mentionné que du fait de la Pandémie du Corona virus
L’Afrique Subsaharienne :
• va vers sa première récession depuis 25 ans;
• la croissance devrait se rétracter entre 2019 et 2020 passant de 2,4 % à une fourchette comprise entre -2,1% et -5,1%;
• la contraction de la production agricole entre 2,6% et 7% (scénario blocage commerciaux) avec des pertes entre 37 et 79 milliards de dollars en 2020 ;
• une crise alimentaire sans précédent
• un recul de 10 voire 30 ans dans la lutte contre la pauvreté (OXFAM);
• les importations de denrées alimentaires vont reculer de 13 à 25% (pour des pays qui ne sont pas autosuffisants);
• le désastre c’est que un demi milliard de personnes pourraient basculer dans la Le G20 vient de se réunir, avec tout le respect que je dois aux autorités du G20, je crains que ce ne soit un autre rendez vous manqué avec <> selon le dernier rapport triennal de la Banque mondiale sur <>.
Le réaménagement et l’assouplissement des conditions de paiement de la dette n’ont pas la même portée que l’effacement de la dette. Devant un tel schéma apocalyptique l ‘Afrique attendait du G20 une réponse plus audacieuse, non équivoque pour soutenir l’effort BUDGÉTAIRE des États. Plusieurs chercheurs et analystes l’ont dit. Monsieur Hafez Ghanem Vice Président de la Banque mondiale appelle les créanciers bilatéraux officiels au moratoire du service de la dette ...pour libérer des liquidités....et sauver des vies. Moi je dirais que vous devez oser aller plus loin, vers une annulation de la dette comme l’avait suggéré le Président Macky Sall à côté d’autres dirigeants Africains, et comme vient de le réitérer le Président Macron, pour ne pas être dans une perpétuelle fuite en avant qui va tôt ou tard nous rattraper. Nous le savons tous la réponse face à un telle crise ne peut plus être seulement budgétaire quelle que soit la volonté des États . Il faut une injection de liquidités dans les économies pour soutenir non seulement les ménages en difficulté mais aussi les Entreprises et le secteur informel. Le secteur informel en Afrique c’est connu de tous , est un des piliers les plus importants dans la lutte contre la pauvreté au vu de la structure de notre modèle social. Si nous voulons le redémarrage de l’économie Africaine dans des conditions de vraie résilience, tous les intellectuels honnêtes savent, que l’annulation de la dette est la SEULE ALTERNATIVE.
Les institutions de Bretton Woods (comme du reste le G20) ne doivent pas nous engager vers une autre voie qu’après la levée de ce préalable en s’appuyant sur tous les instruments à leur disposition. C’est pourquoi je salue l’initiative prise le 13 avril 2020 par le Conseil d’Administration du FMI avec l’allègement de la dette en faveur de 25 pays dont 6 pays de L’UEMOA même si elle reste insuffisante (six mois), en attendant l’initiative lancée pour trouver les ressources pour compléter pour les deux années à venir.
Je me questionne cependant, à la lecture complète de la liste des bénéficiaires, et compte tenu de l’horizon temporel (2 ans), sur l’exclusion de la Côte d’Ivoire et du Sénégal, pour une initiative qui veut fournir <>. Espérons que cette exclusion ne concernera que les 6 premiers mois au risque de voir s’instaurer un débat technique et démocratique autour de la pertinence de cette décision. Je ne nie pas les efforts fournis par la FMI au Sénégal à travers les instruments que sont l’instrument de facilité rapide (IFR ) et la facilité de crédit rapide (FCR) pur près de 277 milliards.
Cependant, allègement n’est pas synonyme d’endettement même à des conditions plus douces et moins contraignantes dans la mise à disposition. L’objectif c’est non seulement de contenir le choc, mais de revoir le profil et le poids de la dette sur nos économies. Ceci permettra de libérer des espaces dans l’espoir d’une vraie résilience de nos faibles économies à la reprise de l’activité économique. L’Afrique en général et les pays de l’UEMOA en particulier ont besoin aujourd’hui d’une injection massive de liquidités, même avec le risque de libérer un peu l’inflation de manière responsable, pour soutenir les secteurs productifs dans le cadre des activités.
Il faudrait en profiter pour mettre aux normes de notre système de santé , celui de l’éducation et de la RECHERCHE que nous avons souvent tendance à négliger jusqu’à pousser nos chercheurs à l’expatriation. Certains pays et pas des moindres étaient incapables de mettre à la disposition des services d’urgence (s’ils existent ) un minimum de respirateurs, de masques et d’habits de protection pour le personnel du service médical, au moment où les commandes dans le nord se faisaient par milliers. Je salue au passage le grand sacrifice et le comportement hautement citoyen, du personnel santé qui a travaillé dans des conditions désastreuses pour gérer cette pandémie. Ces personnes ayant données leur vie pour sauver celle d’autres (dans tous les pays du monde) mériteraient au delà des décorations (s’ils en ont) d’être citées en martyres.
L’Afrique et le monde en général attendent de nous de revoir ce modèle de la globalisation qui tout le monde le sait a atteint ses limites. Et la démonstration la plus éclatante a été donnée par l’absence de réponses (immédiates coordonnées et solidaires) à des demandes les plus élémentaires pour lutter contre cette pandémie......avec l’impossibilité de satisfaire les demandes urgentes à cause d’une excessive centralisation (régionale) de la production par centre de profit.
La conséquence à été une cacophonie indescriptible et un égoïsme d’Etat sans précédent face à la souffrance d’à côté, malgré tous les «bienfaits» supposés de la mondialisation qu’on nous a toujours vantés. Pour plus de justice, cette économie intégrée par la mondialisation ne peut plus être une couloir aménagé pour que la recherche de la prospérité pour le plus petit nombre soit le seul objectif même inconscient. Les centres de profits ne devront plus être concentrés dans une seule région pour le plus grand bénéfice du plus grand nombre.
2/ Quel nouveau lien avec les institutions de Bretton Woods pour rendre un peu plus flexible leur mode d’intervention dans les <>.
Les incitatives du FMI telles que l’IFR et le le FCR sont à saluer. Les critères de convergence ont été mis à rude épreuve. Le dogmatisme du déficit budgétaire à 3%, l’inflation (francophone) à moins de 3% dans des économies comme les nôtres, en construction, confrontées chaque jour aux urgences doivent ils rester les mêmes même si on sait que face à la crise l’étau s’est un peu desserré autour du déficit budgétaire. Même si on sait l’effort de tempérance des taux d’intérêt qui ne manquera pas de stimuler la demande et de maintenir les Entreprises dans une situation de risque contrôlé.
3/ Quelles nouvelles orientations (à) donner aux institutions spécialisées des Nations Unies pour une plus grande réactivité même si on peut leur laisser le bénéfice du doute à cause de la spontanéité (soudaineté) et de l’ampleur de la crise. Une grande réflexion doit être menée dans ce sens avec des réformes profondes du côté des institutions, mais également des États, pour qu’ à ces derniers, en cas de divergence d’intérêts au profit du plus grand nombre, que leur soit laissée la latitude de surseoir à leur obligation d’Etat partie.
4/ Enfin quelle relation d’amitié véritable avec les << Grandes Nations>> en écartant (mettant en veilleuse) l’adage qui veut que << les Nations n’ont pas d’amis mais que des intérêts>>.
CHEIKHE HADJIBOU SOUMARE
ACIEN PREMIER MINIStRE DU SENEGAL
ANCIEN PRESIDENt DE LA COMMISSION DE L’UEMOA
Par CHEIKHE HADJIBOU SOUMARE
par Jean Pascal Corréa
LA GLORIOLE : MONSIEUR LE MINISTRE, PROFESSEUR-SAIT-TOUT !
Pourquoi aime-t-on l’espace public en Afrique ? Pourquoi certains aiment-ils surtout la « titrisation » ? Est-ce la faute à la Presse ? S’y agit-il d’une méconnaissance ou une confusion des genres ?
Comme avec l’équipe nationale de football, l’expertise-de-grand-place n’est manifeste que dans les situations hyper-médiatiques. Peu concrète et factuelle, elle se déploie sur tout, quitte à occuper le devant de la scène pour un temps de gloire. Mais, plus généralement, pourquoi aime-t-on l’espace public en Afrique ? Pourquoi certains aiment-ils surtout la « titrisation » ? Est-ce la faute à la Presse ? S’y agit-il d’une méconnaissance ou une confusion des genres ?
A tout universitaire-enseignant, il est presque automatiquement flanqué le titre (non pas le statut, heureusement) de « professeur ». Comme si tout enseignant recruté à l’université acquérait de facto le grade de professeur sans prouver ses compétences et la qualité de son travail à coups de publications scientifiques, pour les rares qui sont, effectivement, enseignants-chercheurs.
Pour décrypter l’actualité ou des faits de société, des journalistes ont souvent tendance à solliciter les « analyses » de sociologues ou de politologues, parce que ceux-ci donneraient des cours dans ces disciplines. Par défaut, le profane a tendance à croire que tout enseignant dans une branche universitaire peut répondre à des questions potentiellement « étudiées » par ladite discipline ou branche. De ce présupposé, il découle également cette présomption selon laquelle dès qu’on est qualifié de sociologue ou de politologue (et cela concerne aussi d’autres disciplines !), l’individu a connaissance et capacité à traiter de toutes problématiques intéressant ladite discipline. Cet abus innocent, rares sont les « experts » qui convoquent l’éthique de conviction pour faire observer leur proximité ou la distance intellectuelle qui les sépare de l’objet sur lequel la presse les invite à se prononcer. Dire « Désolé, je n’ai pas moi-même travaillé sur cette question ; c’est plutôt un champ investi par ma/mon collègue une-telle/un-tel que vous pourriez joindre au… » est-il à ce point difficile ? Malheureusement, c’est plutôt la course à la visibilité, à la médiatisation potentielle source de sollicitations extra-universitaires.
Bien souvent, nous entendons le ou la même « expert(e) » intervenir à travers des émissions radiophoniques ou à la télévision pour parler, un jour, du Sida, un autre jour, du banditisme, un soir, des malades mentaux, trois mois après, du chômage des jeunes ou des tensions entre le pouvoir politique et l’opposition. C’est à croire que ces savants ont effectué des recherches sur tout et connaissent tellement les sociétés dans lesquelles ils vivent qu’en principe – si on les écoutait –, tout phénomène de société devrait être anticipé.
Dans nos pays africains francophones, l’héritage de l’administration coloniale française nous a fait sublimer les attributs du genre « Monsieur le directeur ! », « Monsieur le Ministre ! », Madame la Ministre, Monsieur la Députée (même après une seule législature) ! Cette boulimie de reconnaissance a trainé à un seuil tel que, même après avoir quitté la fonction de ministre, certains se voient encore rehaussés d’un monsieur le ministre lorsqu’on s’adresse à eux. C’est là un abus véhiculé par la presse (complexe d’infériorité ou déférence non nécessaire ?) ; mais aucun de ces anciens ministres ne daignera le relever, ne serait-ce que pour (se) rappeler qu’être ministre, ce n’est guère plus qu’une fonction (non élective) occupée pour un certain temps, au travers d’un choix opéré par une autorité légitimite.
Dans d’autres contextes, l’individu – quelle qu’ait été sa trajectoire – est simplement désigné par Monsieur untel ou Madame unetelle, en donnant son nom de famille, voire en prononçant son prénom et son nom. Et cela ne constitue aucunement un acte irrévérencieux dès l’instant où le respect dû à l’individu est considéré comme allant de soi. De même qu’il ne traverse pas l’esprit d’une personne de regarder l’autre en le dévalorisant, de même cela n’a-t-il aucun sens de sur-valoriser l’autre, uniquement parce qu’il a occupé telle ou telle position. Ainsi, c’est la confusion entre fonction et statut qui semble être problématique, au-delà des habitudes sédimentées par l’héritage dans la sphère publique.
Dans un pays comme le Sénégal, cette confusion prend des déclinaisons bien diverses. Ces sur-valorisations persistent clairement dans la sphère publique et, surtout, dans les interactions entre les politiques et la presse. La boutade populaire va jusqu'à considérer que "l'épouse du député est elle-même députée". Cela prévaut aussi dans de nombreux villages où la première épouse du chef de village exerce aussi un leadership de fait et par translation. Idem pour le Mali. Qu’elle ne fut ma surprise d’y voir que même un responsable d’ONG a la prérogative de se faire ouvrir la portière de son 4x4, avec un gardien de bureaux qui accoure pour prendre le sac du boss. Au Niger, on va jusqu’à inscrire « Député » sur le véhicule de fonction afin de bien singulariser cette personnalité. En Côte d’Ivoire, le fait de « reconnaître » la trajectoire d’une « autorité » n’en est pas moins nuancé par le plaquage amusé d’une image de cocostratégique qui cherche à être identifié pour ce qu’il veut « représenter » et non ce qu’il est. Au Burkina Faso (BF), le long passage de Compaoré n’a pas su totalement faire fondre l’héritage sankariste d’un peuple qui croit en lui-même et qui n’a pas forcément besoin de l’héritage de l'administration coloniale française (pour ne pas évoquer l'influence houphouëtiste). Il est vrai que les « cadres » de l’administration publique burkinabè se la jouent de temps en temps, mais la hiérarchie est vite calmée par un niveau supérieur, au point que « l’obligation d’humilité » ne demeure jamais loin de l’individu. S’y ajoute le fait que les mutations dans les mentalités et dans le cadre de vie s’opèrent plus lentement dans ce pays, contrairement à ce qui est facilement observé dans un pays comme le Sénégal ou encore la Côte d’Ivoire. Au BF, les « nouvelles » villes ne pullulent pas encore, avec leurs lots de défauts d’assainissement et de conditions minimales de sécurité et de confort. Les gens demeurent encore "sobres" sans manquer d'ambition.
Par contre, dans des pays comme le Bénin, le Togo, le Cameroun, être ou avoir été chef, patron, ministre, waouh, que des avantages ! C’est presque éternel, si l’on sait « s’adapter » et retourner sa « veste toujours du bon côté ». Le chauffeur ou le garde-du-corps accoure pour ouvrir la portière. Les « subalternes » ne te regardent jamais dans les yeux. Tout ce que le boss a dit est vrai et sans date de péremption autre que l’arrivée d'un nouveau chef. Le journaliste de la chaine publique qui t’interroge ne t’interrompra jamais (du déjà vu !) ; c’est l’invité qui lui indiquera quand poser la question suivante. Seulement, quand poindra la déchéance, c’est ce jour-là aussi que l’on saura que les autres en ont « gardé » contre toi. Plus aucun ami, et tous les péchés d’Israël seront accolés à toi. La presse évoquera ton nom au passé « l’ancien ministre… », « l’ex-directeur général de… ». Ta famille te traitera « d’idiot-qui-n’a-pas-su-en-profiter ». Il faut tout faire pour reconquérir le cœur du grand patron. Vaille que vaille ! Quitte à le retrouver dans des cercles occultes que d'aucuns ennoblissent par le terme "réseau".
Si cette « titrisation » pouvait s’avérer une émulation pour avoir le plus grand nombre de « docteurs » dans divers domaines scientifiques, l’évocation de la personnalité constituerait là une reconnaissance méritée pour les efforts investis dans l’ascension sociale ou intellectuelle. Pour autant, ce besoin d’exister par un titre est une forme de corruption émotionnelle (auto)suggérée qui s’avère aussi passive que l’acte de l’agent ou l’officier d’un corps habillé qui place bien en évidence son képi dans une voiture à usage privé.
Et si la presse sénégalaise et africaine traitait définitivement les individus sur un même pied d’égalité ? Pourquoi ne pas se limiter à l’identité nominale avec, au besoin, une présentation complémentaire du facteur de singularité ? Cela permettrait à certains de garder les pieds sur terre et cesser de se donner des statuts, pour des fonctions qu’ils n’exercent plus, quelle que soit la raison.
Si l’individu a honte de se reconnaître « ancien » ministre, alors il faut s’inquiéter de sa capacité à manœuvrer pour toujours rebondir. Il faut aussi se demander si la nation doit nécessairement recycler le même personnel politique et intellectuelle, décennie après décennie. Comment prôner l’humilité lorsqu’on est sûr de ne jamais prendre le vélo pour aller au boulot ?
Par Calame
INDIGNITÉS
Comment comprendre qu’un seul individu, dont la réputation ne s’est pas faite sur l’approvisionnement en riz de notre pays, puisse capter les deux-tiers du marché de fourniture de cette denrée, en procédure d’urgence ?
Ce que bon nombre de Sénégalais et d’observateurs craignaient, pire que le coronavirus, est en train de se dérouler sous nos yeux ébahis et nos oreilles abasourdies. Non, jamais au grand jamais, on aurait imaginé qu’ils oseraient, sitôt, si vite, sur une telle échelle, avec un tel cran qu’on ne retrouve d’habitude que chez les parrains et les dictatures sangsues.
La manœuvre est à la fois ignominieuse et grossière, cousue de fil blanc. Mais plus c'est gros, mieux ça passe, l'occasion faisant le larron n'est-ce pas ? Ainsi, la belle affaire pour profiter de la détresse des populations pour les détrousser, mettre l'économie en coupe réglée pour être l'unique pourvoyeur et bénéficiaire des ressources capturées sous couvert d'urgences sanitaires et sociales, après avoir mis en quarantaine les libertés, les critiques sous le boisseau, la conscience en berne, voilà que l'imaginé inimaginable surgit des tréfonds de l'âme de prédateurs compulsifs. La galaxie des gens d’affaires spécialisés dans l’importation de denrées alimentaires, principalement le riz, remballant craintes et suspicions légitimées par un vécu défavorable et culpabilisant, est systématiquement mise à l’écart.
Pourtant ces véritables opérateurs privés nationaux, ont démontré non seulement leurs capacités financières et d’approvisionnement, mais aussi leurs savoir-faire et leur patriotisme. Des affairistes associés, casting bureaucratique et compradore, frappent le «grand corps malade» de notre société, avec une froide et incroyable cruauté.
Comment comprendre qu’un seul individu, dont la réputation ne s’est pas faite sur l’approvisionnement en riz de notre pays, puisse capter les deux-tiers du marché de fourniture de cette denrée, en procédure d’urgence avec toutes les facilités et exonérations accordées en la circonstance ? La proximité avec l’Autorité, justifierait-elle ces faveurs?
Les fonctionnaires en charge de ce dossier, comme de celui du transport de ces denrées à l’intérieur du pays doivent des explications aux Sénégalais et à tous ceux qui, nationaux comme étrangers, ceux parmi eux qui manifestent une solidarité bienveillante, faite d’empathie et de compassion, les partenaires institutionnels, bilatéraux et multilatéraux.
Les ministres concernés et ou/impliqués doivent édifier l’opinion, le chef de l’Etat illustrer la transparence opérationnelle et, le cas échéant, faire jouer la compétence juridictionnelle pour débusquer et traiter les actes de prévarication et de concussion. Les corps de contrôle dont l’Ofnac, la Cour des Comptes, l’IGE et bien entendu une commission de veille citoyenne multipartisane, pluridisciplinaire devraient accompagner le processus, avec des rapports d’étapes au chef de l’Etat, communiqués au public au fur et à mesure.
Le Gouvernement le fait quotidiennement pour rendre compte de l’évolution de la situation de la pandémie, un contrôle ex-post ne fera que constater les dégâts alors que le mal est déjà fait, l’impunité faisant le reste. Qui peut le plus, peut le moins! Ces vérifications devraient également concerner la distribution et la répartition des vivres de soutien et de soudure -l’hivernage approche - des crédits de campagne, des semences et des engrais, afin de s’assurer que ce qui est prévu et annoncé est conforme à ce que reçoivent les ayants-droits et destinataires légitimes.
Autrement, on risque de sentir le ciel nous tomber sur la tête avec ce qui s’annonce comme pouvant déboucher, si on n’y remédie pas, tout de suite, sur le scandale du siècle, compte non tenu des éléments de controverse dans le secteur des hydrocarbures.
Au-delà des légitimes suspicions, le discrédit de la classe politique sénégalaise (et africaine) risque de porter un coup fatal à nos démocratures tropicales, quand toutes les digues institutionnelles, notamment les partis politiques et les organisations de la société civile, auront cédé. La sarabande des professionnels et autres intermittents du spectre politique de notre pays, tenaillés entre connivence et collusion, dialogue ou petits arrangements entre soi, est sujette à caution -et à questions.
Le silence assourdissant de certains ténors qui nous avaient habitués à donner de la voix sur tous les sujets majeurs ou mineurs, ne laisse d’interpeller quant à une complicité tacite ou active lourdes de menaces sur le cours politique.
Plus que le coronavirus qui sera sinon vaincu, du moins confiné en attendant que les multinationales pharmaceutiques et les oligarchies financières lui fassent -et nous fassent-un sort, nos sociétés déstructurées, précarisées, vulnérables et friables sont plus que jamais exposées au danger d’un grand remplacement à l’envers. Le monde d’après coronavirus ne sera plus le même. Certains sont en train de redessiner la carte du monde, un nouveau Yalta dans un contexte post mondialisation. Alors, penser qu’il est possible de tirer son épingle du jeu en faisant du «business as usual», en éliminant les garde-fous et les facteurs de contrôle social, c’est comme qui dirait, se fourrer le doigt dans l’œil, jusqu’au coude !
Calame
par Latyr Diouf
VIDES ET COVID-19 : NOUS SOMMES EN GUERRE !
La société post-Covid-19 sera forcément marquée du sceau de l’impréparation globale de cette guerre dont on expérimente actuellement les effets. Mais, quand la paix sera revenue, la pire des désillusions serait de réendosser notre hébétement de plus belle
Cette sentence a été, en substance, le sommet des allocutions présidentielles prononcées à la télévision, du reste, sans le panache gaullien, le souffle castriste ou encore le doux tragique senghorien. L'époque a changé. La duplication massive des déclarations et les multiples commentaires, qui les ont accompagnées, ont dilué l'aura qu'elles devaient tirer du désarroi mondial. Tout paraît tellement désincarné par la prééminence de l'accessoire et du faux-semblant sur l'essentiel. Il est heureux, soit dit en passant, que l’Africain Macky Sall et non moins président de la République du Sénégal partageât ses réflexions écrites face à la situation. Pour se ressaisir, les paroles officielles avaient tenté d'abord de caractériser avec gravité le fléau qui a pris le monde au dépourvu. Dans un florilège de curieux portraits-robots, l'ennemi public numéro 1 est décrit comme infiniment petit, invisible, sans passeport ni visa, ignorant les frontières et frappant, de manière rapide, brutale et indifférenciée, riches et pauvres. Et pour ne rien arranger, cet insolent microscopique avait déjà fait vaciller de puissants pays aux dispositifs sanitaires réputés très performants.
C'est, manifestement, la virulence létale du virus qui justifia les sorties vigoureuses de la fin de la première quinzaine de mars et leur sémantique martiale. En effet, de son foyer wuhanais en Chine, le mal s'était déjà propagé, de manière vertigineuse, aux quatre coins du monde. Personne n’en avait, véritablement, pris la mesure. Il est désormais communément identifié sous le nom de Covid-19, acronyme anglais signifiant en français maladie à coronavirus 2019. Malgré les nombreuses explications savantes qu’elle a suscitées, elle reste mal connue. Point de vaccin ; point de médicament, à ce jour. Les masques et tests, qu’on pouvait espérer élémentaires au regard des grands progrès d’une humanité à l’heure de l’intelligence artificielle, ont pu faire défaut dans des pays parmi les plus structurés et les plus aisés.
Des mesures spectaculaires furent prises : fermeture des écoles, des frontières et de certains commerces, annulation de grandes rencontres internationales et de grands événements scientifiques, culturels et sportifs, confinement, état d’urgence, couvre-feu… Les États recouvrèrent leurs puissants monopoles sans, toutefois, disposer du moindre antidote pour contenir la pandémie. Il fallait vite sublimer cette remarquable impuissance et rassurer les populations : le Léviathan les protège et les couvre de sa bienveillante autorité. Cependant, il ne serait pas malsain de songer furtivement à deux avatars : la populaire expression de la carotte et du bâton ou l’incontournable Surveiller et punir de Foucault. Car, oui, l’injonction « restez chez vous ! », d’une part, a été accompagnée d’une campagne de sensibilisation proche de la propagande totalitaire. La mise en scène de gestes dit barrières devint virale. Se laver les mains avec du savon ou une solution hydroalcoolique, éternuer ou tousser dans le creux de son coude, utiliser un mouchoir jetable, observer une distance sociale étaient érigés au rang de trouvaille brevetée. D’autre part, faute d’attestation dérogatoire pertinente, tout déplacement est interdit, sous peine d’amende. Cependant, dans de nombreux pays, le nouvel ordre est imposé à coup de matraque. Gare à ceux qui ne respectent pas le confinement et les couvre-feux !
L’adhésion massive des nations à la guerre mondiale contre la Covid-19, avec des armes aussi dérisoires, prêterait à sourire, si le bilan macabre n’était pas aussi vulgarisé. Ce 14 avril 2020 à 19h30, la Covid-19 a fait 121 897 morts dans le monde. De plus, des personnalités fort sympathiques et très inspirantes nous ont quittés, sans que l’hommage qui sied à leur séjour terrestre puisse leur être rendu. Les drames, qui frappent actuellement des millions de personnes à l’échelle du monde, sont incommensurables. Ils sont couverts de ces pudeurs typiques des détresses muettes et voisines du désespoir. Car au-delà de la mort, des inhumations sommaires, des deuils solitaires et des risques de contagion, l’isolement généralisé exacerbe toutes les précarités matérielles et morales, en mettant à nu la terrible angoisse de l’impuissance devant son propre sort, si ce n’est celle de la résignation face au désarroi d’un être cher.
L’Etat du Sénégal s’est montré bien inspiré dès les premiers effets de la pandémie sur son territoire, voire depuis le très pertinent refus du président de la République de faire rapatrier nos compatriotes d’un Wuhan au pic de la contagion. Avec son programme dit de résilience économique et sociale, des mesures sont prises dans l’esprit de soutenir la santé et les ménages, assurer la stabilité économique et financière et sécuriser l’approvisionnement du pays. Une union sacrée s’est également déclarée autour de l’élan national de riposte contre la maladie. A cela s’ajoute un nombre de cas identifiés et de décès encore relativement peu élevé en comparaison avec les pays les plus affectés. Beaucoup d’hypothèses ont été avancées pour expliquer le taux de morbidité faible en Afrique subsaharienne. Les plus scientifiquement plausibles semblent d’ordre immunologique ou en lien avec la jeunesse de la population du continent. C’est, du moins, l’avis d’un ami médecin actuellement au cœur de la prise en charge de patients atteints du Covid-19 dans une région très impactée. Il se dit peu convaincu par les suppositions liées à une barrière climatique tropical et balaye les considérations génétiques évidemment racistes. Quant à la prétendue compétitivité subite de notre système de santé, il la trouve franchement agaçante. Il serait indécent, pense-t-il, d’ignorer les nombreuses autres morts non imputables au Covid-19 et de feindre d’oublier nos immenses défis en matière de santé.
L’autre indécence s’est manifestée dans les solidarités ostensibles, qui consiste essentiellement en denrées alimentaires et en produits hygiéniques pour des présumés plus démunis. La démence politicienne, démagogique et effrontée, qui gangrène le pays, a trouvé là un nouveau cheval de bataille et parvient à nous indisposer jusqu'aux confins de nos confinements. La cause de l’entraide pouvait être noble, si elle était exempte de calcul et de mise en scène autocentrée. Elle pouvait être salutaire, si elle prolongeait qualitativement et quantitativement la résilience des bénéficiaires. Elle pouvait, enfin, être légitime, si elle n’autorisait aucune interrogation sur les moyens des généreux bienfaiteurs. Mais, elle a été empressée, indiscrète, dérisoire et soucieuse de reconnaissance populaire. La solidarité est indispensable dans les moments que nous traversons. Nul n’en disconviendrait. En priorité, elle doit être le fait des pouvoirs publics qui, reconnaissons-le, font de leur mieux avec les contraintes inhérentes au fonctionnement de nos administrations. L’Etat du Sénégal, à travers la Force Covid-19, a pris d’importantes mesures dont le détail a fait l’objet d’une large diffusion. Les efforts individuels, auxquels chacun est socialement sommé de consentir, doivent se passer de démonstration grotesque d’égo. On remarquera que sur la liste des donateurs du Fonds Force Covid-19 établie par la Direction générale de la comptabilité publique et du trésor, les montants vont de 2000 (moins de 4 euros) à 1 milliards CFA (plus d’1,5 million €) et concernent, à ce jour, moins de 500 personnes. Tout Sénégalais, doté du moindre et quelconque revenu, a, dans son entourage, des parents, des amis et des connaissances fort dépourvus qu’il tient parfois en respect pour sa propre survie. Aucune fortune privée n’est en mesure de venir définitivement à bout de la précarité par la charité. Tout secours doit donc rappeler au donateur que sa supériorité n’est pas figée et qu’il peut se retrouver à la place de l’assisté, en situation de nécessiteux. Beaucoup d’adages, marqueurs de l’interdépendance communautaire, professent cette sagesse existentielle implacable. La gratitude reçue (ou donnée) ne doit pas créer des obligations dont on tirerait un ascendant définitif.
Les carences que révèle cette pandémie sont nombreuses et insoupçonnables. Elles se nichent, par exemple, dans les félicitations amplement méritées au personnel médical et paramédical. Le fait d’applaudir tous les soirs des travailleurs en mission de service public est bruissant de symboles. Des images et audios de soignants terrassés de fatigue et dépités par des manquements et des pénuries incroyables ont, pour sacrifier au lieu commun, ému la toile. Sur le plan économique, l’incertitude des prévisions du FMI et la récession déjà qualifiée d’historique en France préfigurent les déficits abyssaux à combler. Le jour d’après sera plein de ces vides. De cette drôle de guerre, la stratégie prospective ne saurait se limiter, après l’urgence de trouver un remède, à un retranchement dans le beau temps proverbial qui succède nécessairement à la pluie. Une locution latine célèbre nous dit : « Si vis pacem, para bellum » (littéralement « Si tu veux la paix, prépare la guerre »). La société post-Covid-19 sera forcément marquée du sceau de l’impréparation globale de cette guerre dont on expérimente actuellement les effets. Mais, quand la paix sera revenue, la pire des désillusions serait de réendosser notre hébétement de plus belle. Car, après avoir redécouvert le rôle de l’agriculteur, du pécheur, du soignant, de l’enseignant, de l’éboueur et de toutes les petites mains indispensables et peu valorisées, il restera si peu de fierté à tirer des privilèges d’une réussite confinée, insolente et spéculative dans un monde fragile et aliénant.