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26 avril 2025
Politique
Par Maya LY
JUSQU’OU LE PEUPLE PEUT ETRE SOUVERAIN?
Aucune incrimination ne peut valoir condamnation au nom de l’exigence de transparence ou de justice, au mépris d’éléments à charge satisfaisants et d’enquêtes contradictoires sérieuses
Seule la justice est gardienne de l’Etat de droit. La contestation politique de la justice dans le monde, particulièrement aux Etats-unis, en Israël en France, dans les démocraties illibérales, est une atteinte à la séparation du pouvoir, laquelle est un pilier de la démocratie. Il ne revient pas au peuple de décider qui est innocent et qui est coupable. La justice populaire est fondamentalement partiale et partisane. Flatter le peuple est une très mauvaise chose pour la démocratie. Aucune incrimination ne peut valoir condamnation au nom de l’exigence de transparence ou de justice, au mépris d’éléments à charge satisfaisants et d’enquêtes contradictoires sérieuses.
La mission première de la justice est la recherche de la vérité. La primauté du droit est un élément structurant de la vie collective. C’est la première garantie contre l’arbitraire et la loi du plus fort. Et très souvent, le démantèlement de l’Etat de droit commence par une absence d’indépendance de la justice et un musellement de la liberté d’expression (qui ne vaut à mon sens que dans le respect de la dignité d’autrui). Un Etat de droit se différencie d’un Etat autoritariste par le respect de la séparation des pouvoirs, l’égalité des citoyens devant la loi, le respect de la hiérarchie des normes juridiques, la garantie d’un procès équitable. Même en situation exceptionnelle dérogatoire et de possibilités d’atteinte aux libertés publiques, le droit n’est pas congédié.
Dans notre pays, certaines affaires en cours, en raison du non-respect des règles de droit, nourrissent le soupçon d’une recherche de coupables à moindre frais. Est-ce un leurre pour masquer les espoirs déçus? L’orientation politique est inquiétante. Pour beaucoup de Sénégalais qui ont qualifié l’arrivée au pouvoir de l’exécutif, de tournant majeur qui consacre une nouvelle ère politique avec un vrai retour aux vraies valeurs, le renouveau attend toujours. Le sera-t-il encore longtemps? Les jeunes répondent en continuant à partir, convaincus qu’ils n’ont aucun héritage à attendre. Dans le monde rural, de lourds nuages s’accumulent. Les maigres dispositifs de sécurité sociale et d’aides aux plus démunis sont en sursis.
Le gouvernement poursuit la politique du discrédit sur ses prédécesseurs, avec des partisans qui se posent en nouveaux chevaliers blancs de l’inquisition, qui attaquent en meute sur les réseaux sociaux pour faire taire toutes les voix contradictoires et discordantes. L’insulte, la calomnie et le mensonge sont devenus une rente. Sert-il à quelque chose de refiler sans cesse “sa patate chaude” aux autres? L’ancien gouvernement est-il coupable de tous nos maux ? La communication gouvernementale qui va dans tous les sens est calamiteuse et est faite d’une banalité et d’affirmations sans fondements. Les problèmes de la gouvernance ne disparaissent pas par le simple fait de vouloir les exorciser, les ignorer, les manipuler.
L’avantage d’un narratif séduisant est qu’il favorise la paresse et l’indigence intellectuelle. Les politiques savent vendre du vent et des merveilles. Pour autant, les gens, mêmes ceux qui choisissent de tourner le regard, finissent toujours par voir ce qui se voit par un œil non malade. Un pays en surplace creuse une distance entre la société et ses gouvernants, et ouvre un chemin de rejet devant des promesses mystificatrices et une pratique politique politicienne. Le chemin de la dette à la banqueroute, de la banqueroute à la révolte n’est pas très long. Le gouvernement est-il en mesure de fournir des solutions durables aux problèmes majeurs du pays? L’alternance, très loin de l’alternative. Elle portait un espoir immense de changement. Elle semble esquisser les contours d’une immaturité politique, et d’un véritable manque de préparation. Est-ce le signe d’un naufrage qui s’annonce? L’excès d’assurance, l’illusion de se croire à l’abri de tout, la logique d’accaparement, relèvent de la politique de l’angle mort. L’éthique de conviction sans éthique de responsabilité est un malheur. Gouverner, c’est avoir le courage de la nuance, faire preuve d’intégrité, tenir ses promesses. On ne gouverne pas comme ça vous arrange. Avec une classe politique souvent à la dérive, enchaînée dans le calcul et les manœuvres, l’homme politique n’est plus celui qui fait comme il doit. Par son propos malheureux sur l’autorité judiciaire, le président est le premier acteur de la démonétisation de la justice.
MACKY SALL VISÉ PAR UNE PROCÉDURE POUR HAUTE TRAHISON
Guy Marius Sagna vient de déposer une résolution accusant l'ancien président. L'initiative datée du 11 avril s'appuie sur le récent rapport de la Cour des comptes qui révèle selon l'auteur, une gestion ayant compromis la souveraineté financière de l'État
(SenePlus) - Un membre de l'Assemblée nationale du Sénégal a formellement déposé une résolution visant à mettre en accusation l'ancien président Macky Sall pour haute trahison. Selon les documents datés du 11 avril 2025, le député Guy Marius Sagna du groupe parlementaire Pastef les Patriotes accuse l'ancien président de graves malversations financières durant son mandat.
La résolution cite le récent rapport de la Cour des comptes du Sénégal qui aurait révélé :
Une dette publique non autorisée de 2 517 milliards de francs CFA contractée en dehors des circuits légaux et sans approbation parlementaire
Un usage massif et irrégulier des comptes de dépôt du Trésor (SNPE) totalisant 2 562 milliards de francs CFA, échappant totalement au contrôle parlementaire
Une représentation délibérément erronée de la situation financière du pays, le déficit réel de 2022 dépassant 10% du PIB contre les 6,5% officiellement annoncés
Une dette publique atteignant près de 100% du PIB, bien au-delà du chiffre officiellement présenté de 74%
La proposition de mise en accusation s'appuie sur l'article 101 de la Constitution sénégalaise, qui stipule que le président n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison. Le document soutient que la gestion financière de Sall constitue une "dissimulation systématique" et une "manipulation des chiffres publics" qui ont mis en péril la souveraineté financière de l'État.
La résolution a été soumise au président de l'Assemblée nationale, Malick Ndiaye. Si elle est approuvée par une majorité des trois cinquièmes des membres de l'assemblée, l'ancien président devra faire face à une procédure devant la Haute Cour de Justice, une procédure exceptionnelle qui n'a jamais été menée à son terme dans l'histoire politique du Sénégal.
Par Mohamed GUEYE
MABOUBA A HUE, SERIGNE GUEYE À DIA
La séance des Questions au gouvernement, hier à l’Assemblée nationale, a été une bonne occasion pour se rendre compte que jusqu’à présent, le gouvernement de Premier ministre Sonko ne donne pas d’indications claires sur ses objectifs de développement
La séance des Questions au gouvernement, hier à l’Assemblée nationale, a été une bonne occasion pour se rendre compte que jusqu’à présent, plus d’un an après sa formation, le gouvernement dirigé par le Premier ministre Sonko ne donne pas d’indications claires sur ses objectifs de développement. Il suffisait d’entendre le ministre de l’Agriculture débiter la liste des efforts que son département est en train de fournir pour assurer la sécurité et «la souveraineté alimentaire du pays» pour s’en rendre compte. Comme tous ses collègues et son Premier ministre, M. Diagne a rappelé, comme il l’avait déjà fait sur le plateau de la télévision nationale, que «le Sénégal importe 1070 milliards de denrées alimentaires». Même si ces chiffres sont contestés, il en est le seul responsable. M. Diagne les décline par produits pour affirmer que pour le riz, le Sénégal importe 1, 4 million de tonnes, 860 mille tonnes de blé, 450 mille tonnes de maïs, 347 mille tonnes de fruits et légumes, 200 mille tonnes d’huile, 210 mille tonnes de sucre et plus de 100 millions d’euros de lait.
Ces propos montrent à quel point la sécurité alimentaire est, à ce jour, toujours sous hypothèque. Les efforts entamés lors des coups de rappel des crises du Covid-19 en 2020-21, et de la guerre entre la Russie et l’Ukraine qui lui a succédé, qui ont mis fortement en évidence la dépendance du Sénégal au marché extérieur pour se nourrir, n’ont pas encore produit de résultat. Il faut néanmoins louer les efforts du ministre de l’Agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage pour casser les goulots d’étranglement qui ont longtemps bloqué le développement de certains secteurs de son département.
Il a ainsi cité, hier, le paiement d’une grande partie de la dette due aux opérateurs, l’augmentation du budget de l’agriculture de 25% et la fourniture des engrais et des semences à temps. Entre autres efforts.
Si l’on peut, sans ironie aucune, constater que «l’hivernage de Macky Sall» n’a pas vraiment récompensé leurs efforts lors de la campagne agricole écoulée, on doit reconnaître à Mabouba d’être persévérant dans l’effort. Son plus grand adversaire, dans la réalisation de ses ambitions, partage la table du Conseil des ministres.
En effet, autant Mabouba Diagne donne le sentiment de vouloir remporter la bataille de l’autosuffisance alimentaire dans ce pays, autant son collègue, le ministre chargé du Commerce, Serigne Guèye Diop, semble avoir reçu pour consigne de transformer le Sénégal en immense souk. Sa ligne politique semble être de vouloir réduire les prix des denrées alimentaires, quoi qu’il puisse en coûter. Son dernier exploit a été de s’allier avec des négociants pour importer du riz de qualité inférieure, que le ménage sénégalais moyen n’aime pas consommer, pour pouvoir claironner à grand renfort de publicité médiatique, que le gouvernement a réussi à baisser le prix du riz.
On peut bien se demander à qui aura servi ce coup de pub, si l’on sait, comme dit plus haut, que le riz ordinaire importé dans l’espoir de faire baisser les prix n’est pas celui préféré par les familles sénégalaises, qui ne vont donc pas prendre d’assaut les échoppes pour s’approvisionner. Or, ce déchet de riz, que les esprits chagrins qualifient d’aliment de volaille, est entré sur le marché national en toute exonération de droits de douanes et de Tva. Et l’on a entendu le commerçant qui a servi de chef de file des importateurs qui ont amené ce produit, promettre aux Sénégalais de nouvelles baisses sur des produits comme l’huile, le sucre, ou d’autres encore.
Juste pour rappel, ce commerçant est poursuivi pour des questions de détournements d’engrais. Il a dû payer une forte caution pour ne pas se retrouver derrière les barreaux, comme d’autres qui ont été interpellés pour des motifs bien moins graves. En plus de cela, l’individu a été longtemps soupçonné de collusion avec des dignitaires du régime précédent pour des questions relatives à des manœuvres frauduleuses sur les produits alimentaires. Ce passif n’a pas empêché le ministre du Commerce de faire du «business» avec lui.
Il a tout simplement négligé le fait que la levée des taxes sur les produits alimentaires importés a un impact certain sur la production nationale qui, elle, ne bénéficie pas de tant de faveurs. Même si le riz ordinaire importé n’est pas celui prisé par les ménages, on peut croire que la conjoncture difficile que connaît le pays pourrait pousser les Sénégalais les moins nantis à s’en contenter, au détriment de la production locale.
De même, quand Mabouba Diagne déclare que le Sénégal importe 210 mille tonnes de sucre par an, cela se fait au détriment de la production nationale. En ce moment, la Compagnie sucrière sénégalaise, la seule entreprise sénégalaise qui produit du sucre, a 80 000 tonnes de sucre stockées dans ses entrepôts, depuis la dernière campagne agricole. Cela représente environ la moitié de sa production. Si le Sénégal est déficitaire en sucre et qu’il ne parvient pas à vendre son produit, c’est parce que le ministre du Commerce et ses services distribuent des Déclarations d’importation de produits alimentaires (Dipa), en veux-tu en voilà, à des commerçants qui vont s’en servir pour inonder le marché au détriment du producteur national. L’ironie de l’histoire est que ces importations, malgré toutes les faveurs qui leur sont faites, ne bénéficient pas au consommateur sénégalais, qui paie toujours son sucre au prix fort. Et tout cela, le ministre le sait, qui connaît également la situation difficile des huiliers, auxquels la hausse de production déclarée sur l’arachide n’a pas bénéficié, parce que sur le marché, c’est toujours l’huile végétale qui règne en maître, et qui s’achète au prix fort.
Sans doute pour limiter les dérives de ses décisions, le ministre Serigne Guèye Diop a sorti de son chapeau, la trouvaille des «Volontaires de la consommation», à savoir 1000 jeunes gens, payés au lance-pierre, pour contrôler les prix des denrées dans les boutiques. Depuis l’annonce de cette décision à ce jour, les ménagères sénégalaises n’ont pas encore vu les boutiquiers des quartiers afficher des prix à la baisse pour les produits de consommation courante.
En plus de tous les efforts financiers que le gouvernement déclare avoir déployés pour non seulement combattre les pénuries, mais surtout lutter contre les hausses intempestives des produits alimentaires, on pourrait suggérer au Premier ministre, qui semble s’être pris de passion pour les vertus du dialogue, d’organiser un dialogue entre ses deux ministres Mabouba Diagne et Serigne Guèye Diop. Il est important que ces deux se comprennent pour qu’enfin, les efforts des paysans pour nourrir les Sénégalais puissent se remarquer d’abord dans les étals des marchés, ensuite dans les paniers des ménagères. Sans cela, le discours de ces deux se résumera à un dialogue de sourds.
par Amadou Thiourou Barry
FOSSOYEURS DE LA VERITE, QUAND L’AIGREUR SE FAIT PAMPHLET
EXCLUSIF SENEPLUS - Macky Sall n’est pas un héros. Mais il n’est pas non plus le bourreau qu’on veut faire croire. L’accuser d’avoir "enterré" la démocratie sénégalaise, c’est faire preuve d’une amnésie sélective
Il y a quelque chose de presque théâtral dans cette obsession qu’ont certains à vouloir constamment noyer la vérité, dans le ressentiment. Le récent article, intitulé « Macky Sall, fossoyeur de la démocratie sénégalaise et caution morale de la fondation Mo Ibrahim » s’inscrit dans cette veine. Présenté comme une analyse politique, il n’est en réalité qu’un acte d’accusation rageur, bâti sur une série de jugements à l’emporte-pièce et de conclusions expéditives. Un pamphlet dicté non par l’amour de la démocratie, mais par une frustration politique difficile à cacher. Un brûlot rédigé non pour éclairer, mais pour salir ; non pour débattre, mais pour détruire. Les auteurs de ce brûlot se présentent comme des vigies de la République, des défenseurs de la démocratie bafouée. Mais leur texte transpire davantage l’aigreur que la lucidité. Leur cible ? Macky Sall, un homme qu’ils détestent plus qu’ils ne comprennent, et dont ils caricaturent l’action pour mieux satisfaire leurs fantasmes de rupture.
Soyons clairs : critiquer un dirigeant est sain, nécessaire, démocratique. Mais encore faut-il que la critique repose sur des faits, une logique, un minimum d’honnêteté intellectuelle. Ici, rien de cela. Juste une colère froide, une frustration à peine dissimulée d’avoir perdu le monopole du discours politique. Les auteurs, sans nuance ni retenue, livrent un procès à charge contre un homme qu’ils n’ont jamais vraiment voulu comprendre, préférant caricaturer sa gouvernance plutôt que d’en analyser les effets.
À les lire, Macky Sall n’aurait eu pour seule ambition que de briser la démocratie sénégalaise. Rien que ça. L’accuser d’avoir "enterré" la démocratie sénégalaise, c’est faire preuve d’une amnésie sélective. En deux mandats, son gouvernement a assuré la tenue régulière d’élections pluralistes, dans un contexte régional marqué par les coups d’État à répétition (Mali, Guinée, Burkina Faso, Niger). Il a consolidé des institutions comme le Conseil constitutionnel, maintenu la liberté de la presse — malgré les critiques — et renforcé la digitalisation de l’administration publique pour plus de transparence. Mais tout cela est sans importance pour nos justiciers autoproclamés.
Dans leur vision, la démocratie ne se résume pas à des institutions fortes ou à un État de droit, mais à la capacité de l’opposition à faire ce qu’elle veut, quand elle veut, sans rendre de comptes. Le vrai scandale, pour eux, c’est que Macky Sall ait gouverné sans leur permission, sans leur validation idéologique. Leur démocratie est à géométrie variable : ils la défendent quand elle les sert, la dénoncent quand elle les expose.
Peut-on débattre de certaines dérives dans la gestion du pouvoir ? Bien sûr. Mais parler de “fossoyeur” de la démocratie, dans un pays où la passation de pouvoir est demeurée pacifique et l’armée fidèle à sa neutralité républicaine, relève d’une exagération outrancière. Il ne s’agit plus ici d’analyse, mais d’un règlement de comptes déguisé en manifeste.
L’un des passages les plus révélateurs du texte est sans doute celui qui attaque la Fondation Mo Ibrahim pour avoir salué le refus de Macky Sall de briguer un troisième mandat. Il faut croire que pour ses détracteurs, reconnaître un mérite, même symbolique, c’est déjà trahir leur croisade. Ce que leur prose ne digère pas, c’est que Macky Sall ait su — contre toutes les suspicions, les rumeurs, les pressions — se retirer sans crise majeure, là où tant d’autres se sont accrochés au pouvoir. Ils auraient voulu un scénario de chaos. Ils espéraient une rupture brutale, une confiscation du pouvoir, une tentative de passage en force pour pouvoir s’ériger en résistants. Le calme les a pris au dépourvu. Et dans ce silence politique qu’ils n’avaient pas anticipé, ils hurlent plus fort encore leur rage.
Les auteurs du texte adoptent une posture qui, sous couvert de défense des libertés, justifie l’impunité. Toute décision judiciaire qui n’est pas allée dans le sens de leur camp a été automatiquement qualifiée de “politique”. Toute sanction contre un leader de l’opposition est devenue “répression”. Et pourtant, ces mêmes auteurs n’ont jamais proposé de modèle alternatif crédible, ni de garanties institutionnelles supérieures à celles qu’ils dénoncent. On est ici dans une logique binaire : le pouvoir est par nature corrompu, l’opposition par nature pure. Cette vision manichéenne, loin de servir la démocratie, l’appauvrit. Car elle empêche tout débat sur le fond, toute critique honnête, toute reconnaissance des avancées.
Il est aussi frappant de constater que ces mêmes auteurs, si prompts à dénoncer la “répression” ou la “dictature”, sont restés muets face à l’appel à la violence de certains leaders politiques. Ils n’ont vu aucun problème à ce que des responsables politiques appellent à brûler des bâtiments publics, attaquent les forces de l’ordre, ou refusent de se présenter devant la justice. Leur indignation est sélective, leur conception de la justice profondément biaisée : tout verdict qui condamne leur camp est politique, toute relaxe de l’autre camp est une manipulation.
Ils veulent une justice à leur image : partisane, instrumentalisée, soumise. Et ils osent ensuite parler de démocratie ?
Ce pamphlet révèle aussi une autre crise : celle d’une partie de l’intelligentsia sénégalaise, qui a renoncé à l’exigence de complexité. Nombreux sont ceux qui, par calcul ou conformisme, se sont alignés sur le discours dominant d’une opposition radicalisée. Ils disent parler au nom du peuple, mais ne rendent jamais compte à ce peuple. Et lorsqu’ils se heurtent à la réalité – celle d’un président qui part volontairement, d’un processus électoral apaisé, d’une transmission républicaine du pouvoir – ils perdent pied. Alors, ils écrivent. Non pas pour comprendre, mais pour se venger. Les véritables fossoyeurs de la démocratie se cachent parfois dans les colonnes de tribunes enflammées, dans les invectives des réseaux sociaux, dans les ambitions mal dissimulées de ceux qui rêvent d’un pouvoir sans garde-fous. Ils manipulent, travestissent, exagèrent… et se font passer pour des résistants.
La politique n’est pas une scène de théâtre, et le peuple sénégalais n’est pas un public à manipuler. Les citoyens méritent mieux que des pamphlets aigris et des indignations de façade. Ils méritent une « intelligentsia » responsable, capable de critiquer sans haïr, de proposer sans détruire, d’analyser sans déformer. Macky Sall n’est pas un héros. Mais il n’est pas non plus le bourreau de la démocratie qu’on veut faire croire. Il a gouverné, parfois avec fermeté, parfois avec maladresse. Mais il a aussi refusé la tentation du pouvoir perpétuel, et c’est là une victoire que ses contempteurs ne lui pardonneront jamais. Macky Sall n’est pas exempt de critiques. Des erreurs ont été commises, des décisions ont parfois manqué de pédagogie, des tensions ont existé, parfois nourries par son propre camp. Mais cela ne justifie pas qu’on le réduise à une caricature. Son héritage est complexe, comme celui de tout chef d’État.
L’histoire jugera, avec sérénité. En attendant, qu’on cesse de faire passer la colère pour du courage, et le pamphlet pour de la pensée.
L'UE SE MÉFIE DES SERVICES SECRETS AMÉRICAINS
L'institution fournit désormais des téléphones jetables et des ordinateurs basiques à ses fonctionnaires, une pratique jusqu'alors réservée aux voyages en Chine et Ukraine. Un signe supplémentaire de la détérioration des relations transatlantiques
(SenePlus) - La Commission européenne a récemment pris des mesures de sécurité inhabituelles pour ses fonctionnaires se rendant aux États-Unis, reflétant une détérioration significative des relations transatlantiques depuis le retour de Donald Trump à la présidence américaine.
Selon des informations rapportées par le Financial Times, l'institution européenne fournit désormais des "téléphones jetables" et des ordinateurs portables basiques à certains membres du personnel se rendant aux États-Unis, une pratique jusqu'alors réservée aux déplacements en Chine et en Ukraine.
Les commissaires et hauts fonctionnaires qui participeront aux réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale la semaine prochaine ont reçu ces nouvelles consignes, selon quatre personnes familières avec la situation citées par le quotidien britannique. "Ils craignent que les États-Unis n'accèdent aux systèmes de la Commission", a confié l'un des responsables au Financial Times.
D'après le journal, les recommandations adressées à l'ensemble du personnel voyageant aux États-Unis comprennent également des conseils pour éteindre leurs téléphones à la frontière et les placer dans des pochettes spéciales afin de les protéger contre l'espionnage s'ils sont laissés sans surveillance.
La Commission européenne a confirmé au Financial Times avoir récemment mis à jour ses conseils de sécurité pour les États-Unis, tout en précisant qu'aucune instruction spécifique concernant l'utilisation de téléphones jetables n'avait été donnée par écrit. Le service diplomatique du bloc a été impliqué dans cette mise à jour, comme c'est généralement le cas.
Cette décision de traiter les États-Unis comme un risque potentiel pour la sécurité souligne la dégradation des relations depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier. "L'alliance transatlantique est terminée", a déclaré un cinquième responsable européen au Financial Times.
Le président américain a notamment accusé l'UE d'avoir été créée pour "arnaquer les États-Unis" et a annoncé des droits de douane dits "réciproques" de 20% sur les exportations du bloc, qu'il a ensuite réduits de moitié pour une période de 90 jours.
Dans ce contexte tendu, plusieurs commissaires européens se rendront à Washington pour les réunions du FMI et de la Banque mondiale du 21 au 26 avril : Valdis Dombrovskis, commissaire à l'économie, Maria Luís Albuquerque, responsable des services financiers, et Jozef Síkela, chargé de l'aide au développement.
Pour Luuk van Middelaar, directeur de l'Institut bruxellois de géopolitique cité par le Financial Times, cette attitude prudente n'est pas surprenante : "Washington n'est pas Pékin ou Moscou, mais c'est un adversaire qui a tendance à utiliser des méthodes extra-légales pour faire avancer ses intérêts et son pouvoir."
L'expert rappelle que l'administration du président Barack Obama avait déjà fait l'objet d'allégations d'espionnage du téléphone de la chancelière allemande Angela Merkel en 2013. "Les administrations démocrates utilisent les mêmes tactiques", a-t-il ajouté. "C'est une acceptation de la réalité par la Commission."
Le journal britannique note également que les fonctionnaires de la Commission ont reçu pour instruction de s'assurer que leurs visas figurent dans leurs documents diplomatiques "laissez-passer" plutôt que dans leurs passeports nationaux, une précaution supplémentaire dans ce climat de méfiance croissante.
TRUMP COUPE LES VIVRES À HARVARD
Washington suspend 2,2 milliards de dollars d'aides à la prestigieuse université, qui refuse de modifier ses politiques sur le recrutement et l'inclusion. Un conflit qui pourrait faire jurisprudence pour l'ensemble du système universitaire américain
(SenePlus) - L'administration Trump a gelé lundi 2,2 milliards de dollars d'aides fédérales destinées à Harvard, après que la prestigieuse université a refusé de se plier aux exigences du gouvernement concernant sa gouvernance interne et ses politiques de recrutement, selon les informations rapportées par Le Monde et relayées par plusieurs médias américains.
Cette prise de position ferme fait suite à une lettre de l'administration Trump datée du 11 avril, dans laquelle une task force gouvernementale accusait Harvard de ne pas respecter "les conditions de droits intellectuels et civiques justifiant un investissement fédéral". Cette équipe spéciale, théoriquement chargée de lutter contre l'antisémitisme, regroupe les ministères fédéraux de la santé et de l'éducation.
La réaction présidentielle ne s'est pas fait attendre. Dans un communiqué publié lundi soir, le gouvernement a annoncé le gel immédiat de 2,2 milliards de dollars d'aides, sur un total de 9 milliards promis à l'université et à son hôpital pour les prochaines années.
Parmi les demandes adressées à Harvard, le gouvernement fédéral exige notamment :
La réforme du recrutement des étudiants internationaux "afin d'empêcher l'admission d'étudiants hostiles aux valeurs américaines"
L'abandon des politiques de diversité et d'inclusion dans le recrutement des élèves
Un audit de la "diversité idéologique" au sein du corps enseignant
La suppression de toute "préférence fondée sur la race, la couleur, la religion, le sexe ou l'origine nationale" dans les pratiques d'embauche
Cette offensive s'appuie sur un double prétexte : d'une part, l'accusation de ne pas avoir lutté efficacement contre l'antisémitisme lors des manifestations propalestiniennes qui ont suivi les événements du 7 octobre 2023 ; d'autre part, le rejet des politiques d'inclusion de l'université, déjà condamnées par un arrêt de la Cour suprême à l'été 2023.
Le personnel de Harvard, plus ancienne université des États-Unis fondée en 1636, avait fortement incité sa direction à résister. En avril, plus de 800 membres du corps enseignant ont signé une lettre exhortant l'établissement à "monter une opposition coordonnée à ces attaques antidémocratiques", rapporte Le Monde.
Larry Summers, ancien président de Harvard et ancien secrétaire au Trésor sous Bill Clinton, a publiquement soutenu cette résistance sur son compte X : "Je suis très heureux de voir le président Garber diriger Harvard et j'espère que toutes les universités résisteront aux demandes extrajudiciaires et déraisonnables du gouvernement fédéral."
Face à cette situation, Harvard a anticipé d'éventuelles difficultés financières en émettant 750 millions de dollars d'obligations, qui pourraient servir de trésorerie en cas de coupure prolongée des subventions fédérales.
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SONKO SE DIT POLITIQUEMENT INDESTRUCTIBLE
Lors des questions d'actualité au gouvernement ce lundi, le Premier ministre a regretté une opposition qui, selon lui, privilégie les attaques personnelles au détriment des véritables défis du pays, appelant à un débat républicain sur le fond
(SenePlus) - Le Premier ministre Ousmane Sonko a affirmé sa détermination face aux attaques personnelles, se déclarant "politiquement indestructible" lors de la séance plénière sur les questions d'actualité du gouvernement à l'Assemblée nationale ce lundi.
"Je ne m'intéresse pas aux attaques crypto-personnelles. Je suis politiquement indestructible. Je rends grâce à Dieu pour cela", a déclaré le chef du gouvernement, répondant ainsi aux critiques formulées par certains opposants.
Sonko a déploré l'attitude d'une opposition qui, selon lui, cherche à "enfermer le pays dans des débats de personnes" plutôt que de se concentrer sur les véritables priorités nationales comme l'élevage, les ressources naturelles ou les objectifs économiques.
"À une certaine opposition, je dis que la haine ne peut pas être un moteur politique. Surtout lorsqu'elle est dirigée contre une personne qui ne vous a rien fait", a-t-il souligné, ajoutant qu'il occupe son poste "par la volonté divine" et qu'il est "honoré de l'amour" que lui portent de nombreux compatriotes.
Le Premier ministre a appelé à un débat d'idées centré sur les enjeux nationaux et non sur les personnalités. "Ce qui m'importe, c'est l'avenir d'un pays prospère. Si nous avons une opposition républicaine, qu'elle s'oppose de manière républicaine", a-t-il affirmé.
Sonko s'est dit "ouvert au dialogue et aux débats contradictoires", rappelant son attitude passée à l'Assemblée nationale lorsqu'il siégeait dans l'opposition.
PÉRIL SUR LA LIBERTÉ SYNDICALE
Dans un pays où le chômage sévit, les représailles contre les délégués syndicaux sont devenues monnaie courante, transformant l'exercice d'un droit constitutionnel en acte de bravoure parfois suicidaire
Bien que garantie par la Constitution, le Code du travail et les traités internationaux, la liberté syndicale est de plus en plus menacée au Sénégal, au vu et au su de tous.
“Tout travailleur peut adhérer librement à un syndicat dans le cadre de sa profession.” Ce droit du travailleur garanti par la Constitution et les traités internationaux n'a jamais été autant foulé aux pieds au Sénégal. Dans certaines entreprises, les employeurs étouffent systématiquement toute tentative des travailleurs à se regrouper et à créer un syndicat. Ceux qui bravent l'interdiction sont souvent victimes de représailles, qui peuvent aller jusqu'au licenciement. Journaliste, Ankou Sodjago a été licencié de son entreprise, à la suite de la mise en place d'un syndicat. Il revient sur les péripéties ayant mené à la création d'un syndicat dans leur boite.
‘’Pendant deux ans, tout était bloqué, jusqu’à ce que trois d’entre nous prennent leurs responsabilités. Mais beaucoup de collègues refusaient de se joindre à nous, par peur ou par loyauté envers l’employeur’’, raconte-t-il.
Avec ce syndicat, ils espéraient défendre leurs droits dans leur entreprise, œuvrer pour l'amélioration de leurs conditions. Finalement, cela s'est révélé être source de problème. Par des subterfuges, l'employeur a fini par licencier deux d'entre eux. Ankou s'est senti désabusé, abandonné par les siens. Le Syndicat des professionnels de l'information et de la communication (Synpics), souligne-t-il, les a certes soutenus, mais c'était d'un soutien très faible. ‘’Ils nous ont pris un avocat, ont fait un communiqué, mais j'ai l'impression qu'ils nous ont abandonnés en cours de route. Ils ne sont pas allés jusqu'au bout, à mon avis”, lâche-t-il un peu amer.
La crainte de représailles étouffe la liberté syndicale
Les représailles contre l'exercice de la liberté syndicale ne se limitent pas au secteur de la presse. C'est valable dans presque tous les secteurs de la vie professionnelle. Dans l’enseignement privé, par exemple, les syndicats sont rares ou dormants quand ils existent. Les enseignants ne s’y rallient que lorsqu’ils sont en difficulté avec leur établissement, souvent trop tard, renseignent certaines sources. Même situation dans le secteur de la santé, de l’industrie ou des transports où les travailleurs évoluent dans l’informel ou dans des zones grises du droit du travail. Isolés, sans contrat, soumis à des horaires épuisants et à des rémunérations aléatoires, ces derniers sont à la merci des propriétaires de véhicules. ‘’Il faut être prêt à tout perdre pour s’engager’’, soupire un délégué syndical du secteur, lui-même sous pression.
Face à cette tyrannie des employeurs, certains renoncent tout bonnement à exercer ou même à revendiquer ce droit constitutionnel. Victime de l'exercice de ce droit, Pape Amadou Sy semble parfaitement comprendre le pourquoi la réticence des travailleurs à s'engager des secteurs comme celui de la presse. Il déclare : ‘’Qui a envie de prendre le risque de se faire licencier dans un pays où trouver un emploi est un chemin de croix ? Pour beaucoup, il faut juste gagner sa vie, peu importe les conditions.”
Ainsi, analyse-t-il, la logique de survie l’emporte de plus en plus sur les idéaux de lutte collective ; ce qui érode la liberté syndicale.
Un droit pas assez protecteur contre les licenciements
Secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal/Forces du changement (CNTS/FC), Cheikh Diop reconnait les difficultés dans l'exercice de ce droit syndical. Il donne l'exemple des Ciments du Sahel, où les travailleurs rencontrent plusieurs entraves à l'exercice de la liberté syndicale. De telles violations, explique-t-il, sont assez fréquentes et il faut être tenace pour y faire face, en saisissant les instances habilitées. Mais on n’est jamais totalement à l'abri, prévient M. Diop. “Quand un employeur est hostile à l'action syndicale, tous ceux qui prennent l'initiative sont ciblés de façon sournoise. Soit on leur cherche la petite bête avec des demandes d'explication par-ci et par-là, soit, s'ils ont un CDD, on ne leur renouvelle pas à la fin du contrat. Ils cherchent tous les moyens pour liquider les travailleurs qui prennent l'initiative d'exercer leur liberté”, constate-t-il pour le regretter.
Le plus désolant, c'est que quand ils ont l'intention de licencier, difficile de les en empêcher. Le tribunal, s'il s'agit d'un travailleur ordinaire, ne peut que condamner l'entreprise à payer des dommages et intérêts, s'il estime que le licenciement est abusif.
L'autre problème, c'est que souvent, les procédures sont très longues et embarrassantes pour les travailleurs sans soutien. “La loi sénégalaise protège effectivement le travailleur, mais dans des dossiers de ce genre, la procédure peut durer un, deux ans ou même plus. Mais l'employeur est souvent condamné à payer des dommages et intérêts”.
En ce qui concerne les délégués du personnel, le tribunal peut aller jusqu'à demander leur réintégration, en cas de licenciement abusif. “Le délégué ne peut être licencié que sur autorisation de l'inspection du travail”, explique le SG de la CNTS/FC, non sans rappeler l'obligation pour les entreprises et pour l'État de respecter les conventions de l'Organisation internationale du travail sur la liberté syndicale et sur la négociation collective.
Les longues procédures judiciaires : l'autre difficulté
Engagé dans une bataille judiciaire contre son ancienne entreprise depuis des années, Pape Amadou Sy est témoin des batailles longues, couteuses, éprouvantes, et parfois vaines. ‘’On a gagné en première instance, mais l'employeur a fait appel. L’affaire est toujours pendante. Peut-être que ça se réglera dans les semaines à venir”, rapporte-t-il optimiste.
Autant de facteurs qui finissent par décourager toute initiative syndicale. Le secteur de la presse n'échappe pas à la règle. Sur plus de 200 entreprises reconnues par le ministère de la Communication, seules 16 disposent aujourd’hui d’une section syndicale du Synpics. Une sous-représentation qui est révélatrice d’un malaise profond : peur des représailles, culture syndicale faible, précarité des statuts...
Ils sont d'ailleurs nombreux les grands groupes qui n'en disposent pas. Ce qui est incompréhensible aux yeux de certains interlocuteurs. ‘’Il est de la nature du journaliste de mettre la plume dans la plaie. Donc, il est incompréhensible que les journalistes aient peur de se syndiquer”, regrette un confrère qui tente de tempérer : “La non-syndicalisation de beaucoup de confrères est liée à la peur des représailles. Le syndicalisme est perçu comme un bras de fer. Il faudrait des règles claires pour protéger ceux qui s’engagent.’’
Interpellé, ce patron de presse dit regretter surtout l'absence de culture et de formation syndicale chez les jeunes. “Je ne suis pas contre l'exercice de cette liberté syndicale, mais je pense que les gens doivent aussi essayer de se mettre à la place de l'employeur”, se défend-il. Certains, selon lui, s'endettent jusqu'au cou pour payer des salaires. “Personne n'est pas sans savoir les difficultés que les entreprises traversent. Si les patrons n'avaient pas l'esprit de sacrifice, beaucoup de travailleurs allaient se retrouver dans la rue. Je pense que parfois il faut savoir raison garder”, a-t-il plaidé.
par Cheikh Thiam
LES SOPHISTES DE LA POSTCOLONIE
Macky Sall ne devrait pas siéger au conseil d’administration de Mo Ibrahim. Ce jugement peut déplaire. Mais il a le mérite d’être fondé sur des faits. Le texte de Hamidou Anne est certes beau, mais il ne dit absolument rien
Les sophistes ont toujours été les éléments les plus dangereux de l’époque moderne. La maîtrise de la belle phraséologie est un bel outil — mais tout ce qui brille n’est pas or. Voilà ce que montre et représente le texte d’Hamidou Anne : un mélange de tournures élégantes mais vides. Dans la postcolonie, la maîtrise du français est souvent confondue avec l’intelligence. Voilà ce que le texte de Anne donne à voir. Voyons pourquoi.
Le texte commence par une mention des 56 universitaires ayant signé une lettre ouverte, qualifiés d’“intellectuels” — entre guillemets. Ces guillemets en disent long. Pas besoin de commentaire. Juste après, Anne les présente comme rageux, haineux, aigris face à un président qui accumule les honneurs. L’attaque ad hominem est manifeste. C’est la première preuve d’un manque de rigueur dans la pensée. Les étudiants de première année de philo ou de math le savent déjà.
Les trois paragraphes suivants ne sont guère plus intéressants. Une avalanche de mots, tous plus méprisants les uns que les autres, dépeint ces universitaires comme engagés dans une guerre fangeuse, guidés par la jalousie envers la prestance et les succès de Macky Sall. Aucun argument. Des propos creux, sans retenue, qui pourraient être lancés à n’importe qui, à propos de n’importe quoi. À ce niveau, il ne s’agit plus d’un débat, mais d’un règlement de comptes de borne-fontaine. La réponse de Anne nous rappelle une tradition puérile : face à la critique, répliquer “tu es jaloux”.
Au quatrième paragraphe, enfin un changement… mais l’auteur change de sujet. Alors que les universitaires critiquent la nomination de Macky Sall au conseil d’administration de la Fondation Mo Ibrahim — en tant que symbole de la démocratie — le texte bifurque vers les réalisations du président et les promesses non tenues de Pastef. Soit. On pourrait avoir un débat sur cela aussi. Mais ici, ce n’est pas la question. Et comme un enfant surexcité, M. Anne perd le nord et s’égare dans un hors-sujet, enrobé de belles phrases. Il oublie que, contrairement à lui, ces intellectuels savent au moins rester sur le sujet.
S’ensuit une attaque tous azimuts, qui finit par présenter ces universitaires comme des calomniateurs méprisés par les Sénégalais. Encore un texte fait de beaux mots, qui sera célébré par certains… mais qui, au fond, ne dit rien. Aucune réflexion, aucun argument, rien sur la question soulevée par les universitaires. Juste du bruit. Et c’est ainsi que l’on confond l’éclat des coquilles avec la substance de la moelle. Quant à celle-ci, Hamidou Anne n’en donne aucune. Il ne dit absolument rien.
Mais waaye nag, comme on dit dans le Kajoor, "leketi kese naxuli bèy" te "fentarloo ajoo ju fajuwul doy na cay duma."
Quant à la question centrale, celle que ces universitaires posent — et à laquelle Anne ne répond jamais — elle est pourtant simple. La Fondation Mo Ibrahim est un symbole de démocratie. Ses administrateurs doivent incarner cette valeur.
Or, comment comprendre la nomination de celui qui, pour s’accrocher au pouvoir, a mené le pays dans une situation délétère ; qui a emprisonné plus de 1000 personnes pour avoir contesté ses dérives antidémocratiques ; qui a avoué avoir “mis le coude” sur des dossiers de corruption ; et qui, pour couronner le tout, a repoussé les élections, craignant une défaite annoncée ? Celui-là même qui, malgré ses déclarations de renoncement au troisième mandat, avait déjà discrètement consulté le Conseil constitutionnel, lequel — dans la plus grande discrétion — lui avait signifié qu’il n’était pas éligible. Ce président ne devrait pas siéger au conseil d’administration de la Fondation Mo Ibrahim.
Ce jugement peut déplaire. Il peut même être interprété comme “rageux” ou “jaloux”. Mais il a au moins le mérite d’être fondé sur des faits précis. Le texte de M. Anne est certes beau. Il écrit vachement bien. Mais je lui aurais tout de même donné un zéro pointé, car il ne convaincra que ceux qui, comme lui, se contentent de la forme au détriment du fond.
Cela dit, si M. Anne souhaite que certains d’entre nous répondent aux questions qu'il évoque, je ne peux répondre qu’en mon nom.
Où étions-nous lorsque l’Université de Dakar a été brûlée ? Nous avions parlé. Mieux : nous avions organisé une conversation à ce sujet, où nous avions invité des critiques honnêtes de Pastef, comme le professeur Hady Ba. Il y avait aussi d'autres collègues comme le professeur Yankhoba Seydi, des étudiants, et moi-même. Certains, comme Ba et Seydi, y avaient vu un acte de barbarie. Pour ma part, je l’ai lu comme un moment crucial de notre histoire. Que se passe-t-il dans la tête d’un étudiant qui brûle sa propre fac ? Je le vois comme un acte suicidaire profondément fanonien.
Et sur la justice, notamment le cas Mansour Faye ? Voici ce que j’écrivais ce matin sur Facebook :
“Certaines choses doivent être sacrées dans un État de droit, quel que soit le bord politique. Au Sénégal, nous avons cependant tendance à nous focaliser sur les anecdotes, au lieu des principes. Quand nous nous indignions de l’arrestation arbitraire de journalistes il y a un an, ce n’était pas pour les beaux yeux d’un tel ou d’un autre. Quand nous nous indignions que Sonko soit assigné à résidence, c’était parce que cela n’était pas légal. Aujourd’hui, je m’indigne tout autant que des journalistes soient arrêtés. Je m’indigne que Mansour Faye (pour qui je n’ai aucun respect, soit dit en passant), ou tout autre Sénégalais, soit interdit de quitter le territoire sans décision d’un juge. Aujourd’hui c’est lui, demain ce sera nous. La jurisprudence est un principe de droit. Sénégal rekk moo nu wara ñor.”
Les autres questions que vous évoquez sont importantes. Elles méritent d’être débattues. Mais faisons-le avec honnêteté. Et cessons d’utiliser des mots creux pour dire des âneries fondées sur… absolument rien.
L'institution refuse, dans deux lettres consultées par SenePlus, de se plier aux exigences jugées inconstitutionnelles concernant sa gestion de l'antisémitisme sur le campus, au risque de perdre des milliards de dollars de financements fédéraux
(SenePlus) - Dans un bras de fer d'une ampleur sans précédent, l'université Harvard a formellement rejeté à travers deux correspondaces adressées à l'administration et consultées par SenePlus, les exigences du gouvernement fédéral américain concernant la lutte contre l'antisémitisme sur son campus, dénonçant une tentative d'ingérence dans son autonomie académique.
Le président de Harvard, Alan M. Garber, a informé la communauté universitaire lundi que l'institution refusait de se plier aux demandes gouvernementales reçues vendredi dernier. "La prescription de l'administration va au-delà du pouvoir du gouvernement fédéral. Elle viole les droits garantis à Harvard par le Premier Amendement et dépasse les limites statutaires de l'autorité gouvernementale selon le Titre VI", écrit Garber dans sa lettre.
Les représentants juridiques de Harvard, William A. Burck et Robert K. Hur, ont officiellement notifié le gouvernement de ce refus, affirmant que "l'université ne cédera pas son indépendance ni ne renoncera à ses droits constitutionnels."
Les documents révèlent l'étendue des demandes gouvernementales, qualifiées d'"inédites" par Harvard. Parmi elles:
Une restructuration de la gouvernance visant à "réduire le pouvoir" des étudiants, professeurs non titulaires et administrateurs "plus engagés dans l'activisme que dans l'érudition"
Un audit complet des "points de vue" politiques et idéologiques au sein du corps étudiant, du corps professoral et du personnel administratif
La fermeture immédiate de tous les programmes de diversité, équité et inclusion (DEI)
Des réformes drastiques des procédures disciplinaires, notamment l'interdiction totale du port de masques lors des manifestations
L'interdiction et la sanction des organisations étudiantes ayant participé à des activités jugées antisémites depuis octobre 2023
Un contrôle gouvernemental des admissions d'étudiants étrangers pour éviter l'entrée de personnes "hostiles aux valeurs américaines"
L'enjeu est considérable : le gouvernement menace de couper des milliards de dollars de financement fédéral à Harvard si l'université ne se conforme pas. Ces fonds soutiennent des recherches cruciales dans des domaines comme la médecine, l'intelligence artificielle et les sciences quantiques.
"Pour le gouvernement, se retirer de ces partenariats maintenant risque non seulement la santé et le bien-être de millions d'individus, mais aussi la sécurité économique et la vitalité de notre nation", souligne Garber.
Cette confrontation s'inscrit dans le sillage des tensions qui agitent les campus américains depuis les événements du 7 octobre 2023 et l'escalade du conflit israélo-palestinien. Harvard, comme d'autres universités d'élite, a été secouée par d'importantes manifestations pro-palestiniennes.
Dans sa lettre, Garber affirme que Harvard s'engage à combattre l'antisémitisme et a déjà pris "de nombreuses mesures" en ce sens au cours des quinze derniers mois. L'université prévoit "d'en faire beaucoup plus", tout en refusant que "le gouvernement, quel que soit le parti au pouvoir, dicte ce que les universités privées peuvent enseigner."
"La liberté de pensée et de recherche, ainsi que l'engagement de longue date du gouvernement à la respecter et à la protéger, a permis aux universités de contribuer de manière vitale à une société libre", rappelle Garber.