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27 avril 2025
Politique
DES PRÉTENDANTS ALÉATOIRES
Pour diverses raisons, les partis ou coalitions de partis qui se sont partagés les suffrages des citoyens, lors des dernières locales et législatives, voient leurs potentiels candidats trainer des boulets à 16 mois de la présidentielle
A moins de 16 mois de l’élection présidentielle de 2024, un véritable paradoxe semble se dessiner dans l’espace politique sénégalais. En effet, pour diverses raisons liées à la justice, à la loi électorale et à la Charte fondamentale du pays, les grands partis ou coalitions de partis qui se sont partagés les suffrages des citoyens, lors des dernières élections locales et législatives, voient leurs potentiels candidats trainer des boulets qui pourraient leur être fortement rédhibitoires. Et cela, du Président Macky Sall et sa tentation du troisième mandat au candidat de Pastef-Les Patriotes Ousmane Sonko englué dans l’affaire dite Adji Sarr, en passant par Khalifa Sall et Karim Wade, potentiels candidats de Taxawu Sénégal et du Pds, mais déchus de leurs droits civils et en attente d’une hypothétique amnistie, acceptée ou non, qui leur ferait retrouver leur éligibilité.
Scrutin national à forts enjeux, compte tenu du « mortal kombat » qui oppose le pouvoir et son opposition, mais surtout de l’exploitation imminente du gaz et du pétrole, la présidentielle de 2024 voit l’épée de Damoclès suspendue au-dessus des principaux porte-drapeaux des partis et coalitions les plus représentatifs lors des dernières élections organisées au Sénégal. A commencer par la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar.
En effet, après une décennie de gestion du pouvoir, le parti présidentiel (Apr) et ses alliés semblent à la recherche d’un candidat sans «aspérité». Le président Macky Sall à qui certains prêteraient la volonté de briguer un autre mandat, après un septennat et un quinquennat, n’est pas parti pour naviguer dans un long fleuve tranquille. Si jamais il tentait un troisième mandat ! Pour cause, la phobie générale contre la tentation du 3ème mandat semble la chose la mieux partagée dans le landerneau politique sénégalais, au sein de la société civile comme de la population générale. Qui plus est, des oppositions à cette candidature avérée ou non du Président Macky Sall se sont fait jour à l’intérieur même du camp présidentiel. Le cas le plus marquant est celui de l’ex-cheffe du gouvernement et tête de liste nationale de la coalition Benno Bokk Yaakaar aux dernières législatives, en l’occurrence Aminata Touré. Elle qui n’a jamais cessé de clamer urbi et orbi que le Président Macky Sall, comme il l’avait déclaré lui-même à maintes reprises, n’avait pas droit à un troisième mandat. C’est dire qu’au-delà de l’effritement progressif de son électorat lors des derniers scrutins au Sénégal, le potentiel candidat Macky Sall devra franchir l’écueil du troisième mandat, germe en puissance de perturbations et de désordre social. Le cas Me Abdoulaye Wade en 2011 en est un exemple patent : des mois de contestation politique, une dizain de morts et la perte du pouvoir pour l’ancien chef de l’Etat.
L’Apr, soutenue par ses alliés, n’est cependant pas le seul grand parti dont la candidature de son champion potentiel est entachée de vice de forme. Le Parti démocratique sénégalais (Pds) qui régna de 2000 à 2012, avant de perdre le pouvoir, voit lui aussi une épée de Damoclès au- dessus de la tête de son probable candidat, en l’occurrence Karim Wade. Et pour cause, le fils de l’ancien Président Wade est toujours à la recherche de son éligibilité, perdue suite à ses démêlés avec Dame justice.
Pour rappel, reconnu coupable d’enrichissement illicite et condamné à une peine de 6 ans de prison ferme et 138 milliards de FCFA d’amende par la Cour de répression de l’enrichissement illicite avant d’être gracié en juin 2016 par Macky Sall, Karim Wade a été déchu de ses droits d’électeur. Conséquence : le candidat du Pds à la présidentielle de 2019 n’a pas pu participer à aucun des divers scrutins qui se sont déroulés au Sénégal, depuis l’avènement du régime en place. Aujourd’hui, le fils de Me Abdoulaye Wade voit son avenir politique suspendu à une hypothétique amnistie qu’il refuse d’ailleurs, exigeant à tue-tête la révision de son procès.
Le cas de Khalifa Ababacar Sall, ancien maire de Dakar et patron de Taxawu Sénégal, n’est pas dissemblable de celui de Karim Wade. Comme le candidat du Pds, lui aussi est à la recherche de son éligibilité, suite à ses déboires judiciaires. Placé en détention dans la nuit du 7 au 8 mars 2017, avec cinq de ses collaborateurs pour détournement de fonds publics, l’ancien maire de la capitale sénégalaise écope, le 30 mars 2018, d’une peine de prison de cinq ans. Par suite, le président Macky Sall le révoque de ses fonctions de maire de Dakar par décret présidentiel, et cela après la confirmation par la Cour d’appel de sa condamnation qui va le priver de ses droits civiques et l’empêcher de se présenter à l’élection présidentielle de 2019. Comme Karim Wade, Khalifa Sall qui a été gracié par le président Macky Sall, le 29 septembre 2019, est dans l’attente d’une amnistie décidée par son principal adversaire politique pour retrouver le droit de participer à une élection présidentielle, en particulier celle de 2024. Toute chose qu’aucun observateur averti de la scène ne saurait lui garantir, compte tenu des atermoiements et autres louvoiements du maître du jeu politique.
L’épée de Damoclès suspendue au-dessus de ces diverses candidatures pouvant être portées par les partis et/mouvements politiques les plus actifs dans la scène, lors des dernières élections précédant la présidentielle de 2024, semble aussi voisiner aux abords de Pastef-Les Patriotes. Quoique son porte-étendard, Ousmane Sonko, ait déclaré ouvertement sa candidature à la prochaine présidentielle, rien ne garantit au candidat arrivé troisième à la dernière présidentielle de pouvoir valider sa candidature. En raison de l’affaire supposée de « viols et menaces de mort » dont l’accuserait une masseuse du nom d’Adji Sarr, en février 2021.
De fil en aiguille, cette sulfureuse affaire éclaboussant l’étoile montante de politique au Sénégal allait déboucher sur des émeutes sur l’étendue du territoire national, causant près de treize morts et une cassure profonde de la société sénégalaise. Même si la situation s’est calmée depuis lors, cette affaire apparait pour beaucoup de partisans de Sonko qui parlent d’instrumentalisation de la justice comme une menace froide contre la candidature de leur leader. L’affaire Sonko-Adji Sarr, pendante en justice, pourrait en tout moment déboucher sur un procès qui n’épargnerait pas le maire de Ziguinchor. D’une façon ou d’une autre ! Et quand on sait à quel point Dame justice a été diligente dans la déchéance des droits politiques des principaux concurrents de Macky Sall au fauteuil présidentiel, allez demander à Karim Wade et Khalifa Sall, on mesure à quel point la candidature d’Ousmane Sonko au scrutin présidentiel de 2024 est sous hypothèque.
LE MALI POSE DES CONDITIONS À UN APAISEMENT AVEC LA FRANCE
Le ministre malien des Affaires étrangères Abdoulaye Diop a indiqué mardi que le régime de Bamako dominé par les militaires posait comme condition à une restauration des relations avec la France le respect de sa souveraineté et de ses choix stratégiques
Le Mali a souhaité que notre souveraineté soit respectée, que nos choix stratégiques et nos choix de partenaires soient respectés, et que les intérêts vitaux des Maliens soient pris en compte", a affirmé M. Diop au 8e Forum international de Dakar, conférence sur la sécurité et la paix en Afrique, pour expliquer la brutale dégradation des relations entre les deux pays qui a conduit les militaires français à quitter le Mali en août après neuf ans de lutte contre les jihadistes.
"Si ces éléments sont observés, le Mali n'a de problème à traiter avec aucun partenaire, y compris la France", a-t-il assuré à des journalistes après une intervention publique au Forum.
Interrogé sur ses accusations contre la France dans une lettre adressée en août au Conseil de sécurité de l'ONU, dénonçant notamment des "violations répétitives et fréquentes" de l'espace aérien malien par les forces françaises, M. Diop a affirmé que son pays attendait la session spéciale qu'il réclame pour en produire les preuves.
"Le Mali n'est pas un enfant, nous sommes membres des Nations unies, nous connaissons les règles. Nous avons demandé une session spéciale pour pouvoir discuter de cette question", a-t-il dit.
"Ceux qui sont en face, de quoi ils ont peur ? Si on n'a pas de preuves, qu'on convoque la session", a lancé le chef de la diplomatie malienne.
Dans sa lettre, il affirmait que les autorités maliennes disposaient "de plusieurs éléments de preuve que ces violations flagrantes de l'espace aérien malien ont servi à la France pour collecter des renseignements au profit des groupes terroristes opérant dans le Sahel et pour leur larguer des armes et des munitions", des accusations catégoriquement démenties par la France.
"Ce qui est important, c'est vraiment que nos partenaires viennent dans l'état d'esprit de travailler avec nous pour des solutions, ne viennent pas nous dicter des solutions", a par ailleurs déclaré M. Diop.
"Il ne faut pas jeter l'anathème sur les gens, nous avons notre propre responsabilité", a-t-il néanmoins reconnu dans son intervention devant le Forum de Dakar.
"Nous avons failli par rapport à l'intégration du continent, nous avons failli par rapport au renforcement de la coopération entre nous, nous avons failli par rapport à notre responsabilité pour assurer notre propre sécurité et je crois que nous ne pouvons pas faire assumer ça par d'autres", a-t-il poursuivi.
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L AIR DU TEMPS DU 23-OCTOBRE
Appel téléphonique entre Wade et Diouf, cyberattque contre l'ARTP... L'émission d'Alassane Samba Diop reçoit Ousseynou Nar Gueye et Karim Diakhate
Appel téléphonique entre Wade et Diouf, cyberattque contre l'ARTP... L'émission d'Alassane Samba Diop reçoit Ousseynou Nar Gueye et Karim Diakhate.
par l'éditorialiste de seneplus, SERIGNE SALIOU GUÈYE
LE PÉRIL DE LA TROISIÈME CANDIDATURE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le projet du camp présidentiel est clair : crédibiliser la candidature illégale de Macky et invalider celle de Sonko. Les affidés du président veulent faire croire aux Sénégalais que le dernier mot revient au Conseil constitutionnel
Serigne Saliou Guèye de SenePlus |
Publication 25/10/2022
Il appert qu’il y a une part de vérité dans les propos de Sène lorsqu’il dit que les partisans de la 3e candidature ne songent qu’à la préservation des privilèges que leur procure voluptueusement le pouvoir. Mais connaissant la fermeté de Macky Sall, aucun d’entre eux n’a le courage de l’astreindre à une 3e candidature. Le principal initiateur de ces déclarations schizophréniques sur une possible 3e candidature, c’est Macky Sall himself. Tous les actes politiques qu’il pose corroborent la volonté de se présenter à la présidentielle de 2024. Tous ses partisans qui ont eu la témérité discursive de déclarer que l’actuel président, juridiquement, ne peut pas être sur la ligne de départ en 2024, ont été passés à la guillotine. Et de l’autre côté, ceux qui soutiennent le contraire ne sont nullement inquiétés s’ils ne bénéficient pas d’une nomination ou d’une promotion professionnelle. Moussa Diop, ex-patron de Dakar Dem Dikk, Sory Kaba, ex-directeur des Sénégalais de l’étranger et Moustapha Diakhaté ex-chef de cabinet de Macky Sall sont une illustration éloquente des auteurs de crime de lèse-troisième candidature.
Aujourd’hui, Macky veut réappliquer sa stratégie, voire son stratagème, mis en branle lors de la question sur la réduction du septennat en quinquennat. Partout dans le monde, il s’est enorgueilli, dès potron-minet, d’être le premier président élu qui réduit volontairement la durée de son mandat. Mais ce n’était que des paroles en l’air qui trouvent leur essence dans le flot de promesses de campagne tenues à l’endroit des citoyens pour conquérir leurs suffrages en février 2012. À partir de 2014, des roquets aboyeurs bien choisis ont fini par enquiquiner les Sénégalais de criailleries importunes avec l’impossibilité de réduire le mandat présidentiel. Le tapis déroulé par ses ouailles, Macky Sall finit par verser dans une palinodie discursive qui remit en cause la sacralité de la parole présidentielle. Il se rabattit laborieusement sur le Conseil constitutionnel qui, après un contorsionnisme juridique, finit par avaliser le vœu présidentiel.
Dans la même veine qu’Ibrahima Sène, Moustapha Kane, un des premiers compagnons de Macky Sall et actuel PCA de l’Asepex, pointe un doigt accusateur aux thuriféraires qui incitent le président Sall à une 3e candidature. Seulement le commanditaire de tout ce tapage médiatique sur le 2e quinquennat, c’est le président Macky Sall. S’il n’agréait pas de tels agissements en faveur de la 3e candidature, il aurait mis fin à ce polluant ramdam médiatico-politique que ses fédayins défendent sur tous les tréteaux et plateaux. Au Niger en 2018, quand deux acteurs de la société civile de Zinder avaient appelé, à travers des réseaux sociaux, le chef d’Etat nigérien Mahamadou Issoufou à se porter candidat pour un 3e mandat, ils avaient été interpellés par la police judiciaire avant d’être jugés et condamnés à une peine ferme. Mohamed Bazoum, l’alors président du parti au pouvoir et aujourd’hui président de la République du Niger, déclarait à cet effet : « Un troisième mandat au Niger signifie un coup d’Etat. Nous sommes un parti qui a comme ambition de stabiliser le pays pour progresser ». Et Issoufou de renchérir : « J’ai beau chercher, je ne trouve aucun argument qui justifierait que je me sente irremplaçable ou providentiel. Nous sommes 22 millions de Nigériens, pourquoi aurais-je l’arrogance de croire que nul ne peut me remplacer ? » Dès lors, plus aucun opportuniste ne s’est aventuré à demander le « tazarché » (la continuité, en langue haoussa).
Si le président sortant entretient encore un clair-obscur antinomique sur sa position binaire de « ni oui ni non », c’est parce qu’il mijote le plan et le temps opportuns qui lui permettront de déclarer sa candidature inconstitutionnelle et de préciser que c’est le Conseil constitutionnel, l’arrière-cour présidentielle acquise à sa cause, qui tranchera cette question. Le piège dans lequel les roquets aboyeurs du président veulent plonger insidieusement les Sénégalais, c’est de leur faire croire que le dernier mot reviendra au Conseil constitutionnel, seule juridiction électorale habilitée à décider de la validité et de la constitutionnalité de toute candidature à la présidentielle. Macky Sall ne doit pas et n’a pas le droit de déposer sa candidature chez les « Sages » à qui il a accordé tous les passe-droits. Par éthique, Macky Sall, le constituant et l’inspirateur de la réforme constitutionnelle de mars 2016, ne devrait même pas entretenir cette ambiguïté et cette confusion qui plongent le pays dans un climat délétère.
Aujourd’hui le budget de 380 milliards prévu dans la loi de finance 2023 pour le contrôle et le maintien de l’ordre laisse croire pour certains que le président se prépare éventuellement à un rude combat contre ce peuple rétif qui ne lui accordera pas ce qu’il avait refusé à Abdoulaye Wade en 2012. Mais nous, nous osons profondément croire que cette croissance exponentielle des moyens des forces de défense et de sécurité (FDS) sert surtout à lutter contre le péril djihadiste transfrontalier et le grand banditisme qui compromettent la sécurité des honnêtes citoyens.
Le renforcement matériel de la police et de la gendarmerie républicaines ne peut pas diluer l’ardeur d’un peuple qui ne jure que par sa Constitution. La puissance matérielle des FDS ne peut pas surplomber la vaillance déterminante d’un peuple chevillé à sa Loi fondamentale. Moubarak et Ben Ali ne l’avaient malheureusement pas compris. Pourvu que le président Macky avec lucidité puisse le comprendre à temps !
SONKO REPRÉSENTE UN DANGER POUR LA DÉMOCRATIE
Hamidou Anne, essayiste, chroniqueur et auteur de “Panser l’Afrique qui vient” perçoit une menace pour l’avenir du Sénégal à travers l’ascension et les idées du leader de Pastef - ENTRETIEN
Alors que le leader de PASTEF est en plein Nemeku Tour, Seneweb poursuit sa série d’entretiens pour décrypter le phénomène Sonko. Après Siré Sy, c’est au tour de Hamidou Anne, essayiste et chroniqueur de se pencher sur le cas du Maire de Ziguinchor. L’auteur de “Panser l’Afrique qui vient” perçoit l’ascension et les idées de Sonko comme une menace pour l’avenir du Sénégal. Entretien.
Pour débuter cette série, nous avons donné la parole à Siré Sy qui pense que Sonko, en résumé, est l’héritier des Majmouth Diop, Dansokho, Bathily. Un épigone de la famille de la gauche sénégalaise. Vous vous revendiquez de gauche. Percevez-vous Sonko comme un membre de votre famille politique ?
Je ne le classe pas comme un homme de gauche et lui-même ne s’en réclame pas. Déjà je me méfie d’un homme qui se revendique de Cheikh Anta Diop et de Mamadou Dia avec la même verve. Ces deux figures de la politique sénégalaise, même si elles ont à un moment donné cheminé ensemble pour des raisons tactiques face à Senghor, avaient des visions antagoniques. En témoignent, les querelles idéologiques de leurs héritiers respectifs qui prennent soin, contrairement à d'autres, de ne pas dévoyer leurs héritages.
En réalité, même les proches de M. Sonko ne savent pas ce qu’il est. Le chargé de la communication de son parti, dans une récente interview, le qualifie de libéral et Madièye Mbodj, nouveau vice-président de Pastef, considère dans une touchante insistance que M. Sonko incarne la gauche au Sénégal. L'homme renvoie à une forme d’opportunisme politique propre aux populistes. Il me fait penser aux dirigeants des partis attrape-tout de l’Après Seconde guerre mondiale. La gauche pense le monde dans une perspective émancipatrice. Elle est née de la haine de la tyrannie et prétend mettre en place un triptyque autour de l’égalité, la justice sociale et la liberté. Elle fait le serment de protéger les faibles contre les forts et de rééquilibrer les rapports sociaux autour du progrès social et de l’émancipation de ceux qu’on appelait hier les masses et qui sont désormais pour moi les dominés et les victimes de différentes formes de vulnérabilisation. Le PAI né en 1957 et ses excroissances ensuite, comme le PIT et la LD, ont mené un combat important autour de la souveraineté, la décolonisation, le panafricanisme et le soutien aux plus précaires dans la société. Ils ont surtout mené un combat pour le renforcement de la démocratie et ont obtenu des acquis face à Senghor et Abdou Diouf qui ont permis l’alternance historique de 2000.
Il y a eu un courant émancipateur fort dont les ramifications étaient insoupçonnées même au cœur de l’appareil d’État. Cette histoire de la gauche sénégalaise est belle et riche d’enseignements pour les nouvelles générations. Elle est écrite sous le prisme de la pensée pour le progrès.
M. Sonko ne semble pas aimer le progrès. C’est un individu sans idées qui ne fait pas montre jusqu’ici d’un outillage intellectuel capable de produire une pensée politique dépouillée de la violence. Son logiciel primaire est le populisme autoritaire générateur d’un clivage stérile qui prône le dégagisme, le repli sur soi, l’outrance et la haine de l’autre. Il s’agit de l’incarnation d’un nationalisme éculé incapable de penser dans la complexité et la hauteur. Des politiciens comme lui sont incapables de regarder notre pays comme un élément d’un ensemble plus large qu’est l’humanité et de proposer une esthétique de la rencontre chère à des penseurs comme Bachir Diagne ou Glissant. Or on ne peut pas être de gauche si on est contre l’internationalisme, si on ne pense pas les conditions sociales des hommes et des femmes comme universelles avec des sujets communs liés aux désordres du capitalisme, à l’économie financiarisée, aux inégalités de classe et de genre et aux défis climatiques. Ces sujets touchent tout le monde et les classes populaires en sont les principales victimes. Une pensée et une action de gauche doivent être conformes à l’universalisme du genre humain.
Dans certaines de vos publications, vous le classez dans le registre des populistes identitaires. Pourquoi ?
M. Sonko est le produit de son époque, celui d’un effondrement de l’école, de la formation d’un esprit critique, et de l’idéal politique adossé à un journalisme de bas étage. Il incarne avec un certain talent ce temps d’abaissement que nous traversons. Il n’est pas un sujet politique intéressant. Il n’a pas lu grand-chose et fait preuve à chaque prise de parole d’une inculture sidérante. Son niveau de langue et de réflexion se reflète dans ses livres et ses discours qui rappellent assez bien le caractère ordinaire de l’homme qui n’incarne aucune hauteur de vue sur des sujets techniques, intellectuels et politiques hormis la petite artisanerie fiscale qu’il maîtrise. C’est un homme vulgaire à la différence de l’intellectuel en politique qu’ont incarné Senghor, Cheikh Anta, Abdoulaye Ly, Assane Seck ou Amadou Mahtar Mbow. La personne de M. Sonko est banale, c’est un hâbleur compulsif, mais il incarne en revanche quelque chose d'intéressant, à certains égards, qui accroche les foules et le propulse en bonne place dans la vie politique nationale.
Il représente un populisme démagogique qui s’est emparé de l’époque et voue aux gémonies les élites accusées d’être corrompues et malhonnêtes. La mesure, la rigueur et le débat de fond ne l'intéressent pas. La pensée structurée et la convocation de la raison au détriment des affects deviennent suspectes. Internet arrive aussi comme un formidable outil de manipulation et de désinformation dont le contrôle permet de prendre possession des esprits, notamment chez les plus jeunes. L’obscénité et le mensonge sont devenus des armes destructrices dont se servent une catégorie d’hommes politiques pour arriver à leurs fins. M. Sonko a appris à l’école de Trump, Bolsonaro, Orban. N’ayant pas lu les grands penseurs panafricanistes ni le reste de la pensée postcoloniale ou décoloniale, il s’en limite à des diatribes racialistes, anti-impérialistes et souverainistes, notamment sur le Franc CFA, les hydrocarbures sans grand sérieux. Ainsi il flirte avec la notion d’identité, la religion, le complotisme et les bas instincts réductionnistes pour bricoler un programme politique qui séduit dans un moment où je le rappelle la complexité est délaissée et considérée comme démodée. Par exemple, quand il appelle à la mobilisation 200 000 personnes pour aller déloger le chef de l'État, ça rappelle l’univers funeste de Trump qui demande à ses partisans nourris au complotisme, aux mensonges et à la haine d’envahir le Capitole. On a vu la suite.
Les théories fascisantes de M. Sonko sont illustrées par l’attitude de désacralisation permanente des institutions républicaines. Nous avons observé le caractère chaotique de l’installation du nouveau parlement. Nous avons vu des députés de Pastef et leurs alliés faire le mariole au sein de l’hémicycle, saccager les bancs, jeter des bouteilles d’eau, arracher les micros et s’en glorifier ensuite. Le chaos ne peut constituer un projet politique, il ne change pas la vie des gens, or les Sénégalais veulent de meilleures conditions de vie. Leur attitude relevait du vacarme puéril et insupportable et par surcroît, elle était honteuse pour notre pays.
Dans une tribune publiée le 27 juin 2022, des personnalités telles que Landing Savané, notamment, alertaient sur “la vague dévastatrice que nous promettent les groupes fascisants de l’opposition radicale”. Sonko était clairement visé. Diabolisation ou réelle menace pour la nature démocratique du Sénégal ?
Je pense que M. Sonko n’est pas un démocrate et par conséquent il représente un danger pour la démocratie, la république et la survie de la nation comme bloc homogène solide. Je rappelle ses propos sur la haine supposée du chef de l’État vis-à-vis de nos concitoyens en Casamance. Ce propos aurait dû le disqualifier définitivement pour aspirer à la charge de président de la République et par conséquent garant de l’unité nationale. Permettez-moi de revenir sur des choses factuelles. Il a appelé à attaquer les sièges de médias qui donnaient des résultats qui ne lui étaient pas favorables et à fusiller nos anciens présidents. Il a incité ses partisans au pillage de domiciles de responsables publics. Il a menacé ouvertement des magistrats et des généraux et accusé l’armée de complot politicien. Il a appelé à déloger un président élu avant le terme de son mandat. Il est pour la peine de mort. Instrumentalisant une série de meurtres d'enfants, il a appelé à torturer des suspects bénéficiant de la présomption d’innocence afin je le cite « qu'ils balancent leurs commanditaires ».
Je suis d’accord avec les auteurs de la tribune sur la menace fascisante mais je ne soutiens pas leur démarche car elle n’est ni sincère ni honnête. Il s’agit d’une tribune politicienne dont la motivation n’est en rien de lutter contre les idées fascistes qui ont pénétré le corps social sénégalais. En jetant un œil sur les signataires, on voit toute la panoplie de gens qui ont sabordé l’héritage et les combats de la gauche. Ils portent une responsabilité dans l’émergence de M. Sonko comme force motrice de l’opposition. Le populisme prospère sur les renoncements des démocrates, la mauvaise gestion et l’aridité de la pensée libératrice dans la société. Quelle pensée doctrinale ces gens ont-ils proposé depuis vingt-ans ? Quel horizon émancipateur suggèrent-ils face aux parades quotidiennes du mouvement conservateur et des hordes de M. Sonko favorables à une restriction des libertés et à la mort de la liberté ? La gauche ne pense plus. Elle est soit anesthésiée par le confort du pouvoir soit par la tentation de la revanche aux côtés de M. Sonko. Regardez l’état de mouvements historiques comme le PS, le PIT, RTA/S. Le Parti socialiste a été un formidable outil de production de la pensée avec son école de formation, ses clubs, ses groupes de réflexion et ses débats internes riches. Qu’est-il devenu ? Un mouvement de lutte pour de petits privilèges arrimé à l’APR ? La LD depuis son congrès de 2008 durant lequel elle a abandonné ses référentiels marxistes pour devenir un ersatz de parti démocrate américain, sombre et va inexorablement disparaître.
Et de l’autre côté, c’est encore pire. M. Sonko a trouvé en des hommes politiques qui le dépassent et le surpassent un formidable marchepied pour les écraser et les utiliser dans son ascension. Ces derniers, dans leur face-à-face avec Macky Sall, sont prêts à soutenir ce qu’ils savent être le pire pour notre pays. Nous observons un renoncement des élites qui laisse croire que ceux qui s’agitent sont les meilleurs d’entre nous. Ceci appelle à un sursaut pour réinvestir le mot patriote que partout les populistes subtilisent aux démocrates. Il nous faut inventer des alternatives et un imaginaire nouveau issus des entrailles du génie du peuple sénégalais.
Regardez le RND et Yoonu Askan Wi qui ont fondu dans Pastef et soutiennent ouvertement un leader au projet dangereux. Ils ont liquidé la gauche. En disparaissant dans cette nouvelle organisation, ils ont accepté de perdre la lutte finale et sabordent un héritage vieux de plus d’un siècle. Ils insufflent à leurs jeunes l’esprit de la défaite et font preuve d’opportunisme pour accompagner un mouvement ascendant qu’ils pensent capables de les mener au pouvoir. L’histoire jugera ces gens et son verdict pour eux sera implacable.
Au lieu de ranimer la figure de peuple, de penser le politique dans une dimension agonistique comme le suggère la politiste Chantal Mouffe et d’arrimer les préoccupations économiques et sociales aux défis sociétaux, ils en sont réduits à des logiques infantilisantes qui nourrissent nos adversaires et renforcent leur centralité.
Les formations politiques ont la responsabilité d’être des creusets de savoir, de culture et d’espérance pour ceux qui aspirent à servir leur pays à travers l’action politique. Ils doivent aussi propulser de nouvelles représentations qui produisent un horizon d’où découle la promesse républicaine de transformer la vie des citoyens.
Sonko semble avoir des chances raisonnables de devenir président. Qu’est-ce qui explique l’adhésion du public à son discours ?
Son arc de sympathie voire de soutien va d’un intellectuel comme Boubacar Boris Diop à un islamiste conspirationniste comme Cheikh Oumar Diagne en passant par des amuseurs publics, des cadres, des journalistes, des universitaires, des étudiants, des intellectuels précaires et des sans-emplois. Regardez la galaxie de ses soutiens : on y trouve tout et toutes les catégories sociales et cela dit quelque chose de son discours et de notre époque qui font peur. L’avènement de M. Sonko est le symptôme d’une asthénie démocratique qu’il faut interroger si nous ne voulons pas basculer dans le précipice. M. Sonko s’est érigé comme le réceptacle des colères et des haines vis-à-vis de Macky Sall. Il est aussi le visage d’une révolution conservatrice qu’incarnent des mouvements islamo-conservateurs, des opposants irréductibles à la laïcité qui s’arriment à des syndicats, des fonctionnaires précaires, des conspirationnistes et des nouveaux activistes issus pour certains du mouvement hip hop dont le propre est de ne s’ériger aucune limite. Ce alliage curieux fait de sans diplômés ignorés des radars étatiques et de ceux que mon ami le sociologue Gaël Brustier appelle les « intellectuels insérés » est le visage d’un pays où on ne pense plus et où les appareils politiques ont renoncé à propulser une vision à long terme et un imaginaire de transformation sociale.
Je pense depuis la fin de l’année 2018 que M. Sonko a de réelles chances de devenir un jour président. Il le souhaite et depuis son élection comme député en 2017, il s’est attelé à la recherche de deux choses : l’argent et un appareil. Il a les deux et s’affranchit de toutes les limites de la décence, ne s’embarrasse ni de la vérité ni de la démocratie interne pour arriver à ses fins. Il est devenu mouride par intérêt et s’éloigne publiquement de son substrat wahhabite. Il est obnubilé par le pouvoir en vérité et rêve, lui aussi, d’arriver au contrôle du butin national. Regardez même les symboles de son ascension : gros bolides, des dizaines d’hommes de main, etc. Je me souviens d’une image qui m’avait interpelé. Des femmes de son parti étaient venues le soutenir lors des événements de février/mars 2021, il s’était assis dans un grand fauteuil et trônait sur ces femmes toutes assises par terre, voilées, têtes basses. On aurait dit la cour d’un marabout qui règne sur ses disciples.
Son discours parle aux gens parce qu’il est simple et dépouillé de toute complexité. Il accuse à tout va les dirigeants de tous les maux, ment, diffame et propose des choses irréalisables qu’aucun journaliste ou intellectuel sérieux ne questionne car son armée de harceleurs sur internet a imposé une tyrannie dont la majorité refuse de s’affranchir. Il indexe la France, invente des choses et flatte les instincts populaires. Comme Trump ou Bolsonaro. Ces deux personnages n’étaient évidemment pas qualifiés pour diriger un pays. Pourtant des millions de gens ont voté pour eux. L’émergence de M. Sonko est aussi à mettre au crédit de ceux qui nous gouvernent, de certains de leurs choix erratiques et de l’incapacité à articuler une gouvernance qui change le narratif et à prendre en charge la question cruciale de la bataille culturelle qui comme le disait Gramsci est de loin supérieure au combat électoral. Les infrastructures, le retour de la croissance sont des choses positives mais que le peuple oublie le lendemain de leur réalisation. Gouverner, c’est l’art de formuler un rêve collectif, c’est produire du commun et inaugurer de nouveaux horizons de succès. C’est ainsi qu’on ancre un pays dans l’histoire et qu’on fait face aux populistes dont le rêve est le chaos.
Il ne faut pas non plus oublier la crise multiforme dans laquelle nous nous situons. Plus récemment la pandémie, la guerre en Ukraine, l’insécurité dans le Sahel, l’inflation sont des défis majeurs pour ceux qui gouvernent. Ils fournissent des efforts mais le temps de la gouvernance est décalé du temps de l’opinion qui notamment avec les réseaux sociaux veut tout et tout de suite. Cette crise appelle à un renouvellement des pratiques et des formes politiques pour faire barrage aux populistes. Mais peut-être qu’il est trop tard.
Pour finir, une petite pierre dans votre jardin : n’êtes-vous pas devenu conservateur au point peut-être de rater le projet “révolutionnaire et souverainiste” de Sonko ?
Penser pour un intellectuel, c’est se mettre en danger, c’est arriver à oublier son idiosyncrasie. J’ai des amis et camarades avec qui j’écrivais et publiais des textes, avec qui je nourrissais de formuler une offre résolument progressiste et donc de gauche qui sont partis chez M. Sonko ou en tout cas qui ont une vraie sympathie pour son action. Je vois partout ces soutiens, qui sont souvent des gens aux propos extrêmes, réfractaires à la moindre critique ; à l’université, dans la rue, durant mes déplacements à l’étranger. Le nombre d’insultes et de menaces que je reçois quand je parle de lui, etc. Tout ceci évidemment m’interroge.
Mais la politique publicitaire, la brutalité des pratiques, la violence discursive, l’injure permanente, le soutien à des putschistes, la sympathie à des régimes autoritaires, le positionnement douteux sur la crise casamançaise, l’absence de références liées aux arts et la culture dans le propos, le mensonge permanent sont autant de raisons qui ne peuvent que m’éloigner de l’homme. Un homme de gauche ne peut pas tenir les propos qu’il tient. Un humaniste tout court ne peut être constamment dans la convocation de la rhétorique de la guerre civile. Où sont les concepts de paix, d’amour, de bonheur, de tolérance, de culture dans le référentiel de M. Sonko ? Il n’est pas non plus dans la colère qui elle a un soubassement politique. Sonko, c’est le bruit et le jacassement vide de sens permanent.
Mais je remarque une chose très intéressante : pour aller chez M. Sonko, le sas est souvent la France avec qui nous avons un rapport irrationnel. Le rejet de ce pays est souvent le point d’ancrage des divers soutiens de M. Sonko et fait perdre la lucidité à beaucoup, notamment chez les vieux militants de gauche. En ce sens, Pastef est le parti le plus colonialiste de notre champ politique. Car on n’y pense jamais en toute indépendance, la France est toujours une béquille pour ces gens qui s’en servent pour attirer des foules et pour masquer une indigence théorique manifeste. Ils sont obnubilés par un pays qui dans la géopolitique stagne et se fait dépasser par d’autres puissances. Or je pense qu’il faut articuler une pensée et une pratique en lien avec le décentrement, la rencontre des ailleurs, la créolité et promouvoir un universel qui rompt avec le face-à-face permanent avec la France. Il faut apaiser la relation en élargissant la focale, en faisant preuve ni d’indifférence ni de soumission. Le monde est si vaste, les potentialités infinies, pourquoi l’Afrique francophone devrait-elle se donner comme injonction de limiter son champ de vision à la France ?
Mais pour en revenir spécifiquement à votre question, je pense que M. Sonko est souverainiste mais il a un souverainisme conservateur, d’extrême-droite comme un Zemmour, une Meloni des tropiques, un souverainisme étroit qui n’articule pas une pensée de la souveraineté populaire mais qui est un repli sur soi. Mais il n’est pas révolutionnaire. Celle-ci est une fibre dont l’âme est le renversement d’un ordre injuste pour faire advenir un printemps progressiste porteur de justice et d’égalité. M. Sonko, au contraire, ne se soucie des pauvres que pour des visées électoralistes. Regardez comment lui et ses partisans traitent une jeune femme pauvre avec qui il a un contentieux judiciaire. Et ceci m’interpelle particulièrement car je viens d’un milieu populaire. Le sort des précaires me préoccupe et il est le fil rouge de ma pensée et de mon travail. M. Sonko ne souhaite aux pauvres que la mort dans un temps court et dans un temps long. Dans un temps court car il s’agit de sa propension à appeler les jeunes de familles pauvres à constituer un bouclier humain pour le protéger, lui face à ses problèmes judiciaires et sa carrière politique. Il y a eu 14 jeunes tués en 2021 et d’autres cette année, et les autorités compétentes semblent s'être résolues à ce qu'il n’y ait aucun procès. Leurs familles ont perdu des enfants et aucun responsable ne sera jugé. Dans le temps long, le projet démagogique et populiste qu’il propose va être fatal à des milliers de gens car ses décisions puériles une fois au pouvoir vont priver des millions de Sénégalais de manger à leur faim, de s’éduquer et de se soigner.
MACKY SALL FUSTIGE LA CONDESCENDANCE OCCIDENTALE
Ingérences dans les affaires africaines, léthargie du Conseil de sécurité de l'Onu, manque de considération du G20 envers l'afrique... Le chef de l'état a longuement remis en cause lundi les soubassements des relations entre le continent et l'Occident
Le président Macky sall était venu hier au Forum sur la paix et la sécurité pour remettre en cause les soubassements des relations entre l'Afrique et l'Occident. Ingérences dans les affaires africaines, léthargie du Conseil de sécurité de l'Onu, peu de considération du G20 à l'égard de l'afrique... Le chef de l'état sénégalais a tout remis en cause.
Le chef de l'Etat a été sans langue de bois pour analyser les causes de la fragilité du continent sur le plan sécuritaire. Profitant de l'ouverture de la huitième édition du Forum de Dakar sur la Paix et du panel de haut niveau sur les enjeux sécuritaires, le président en exercice de l'UA a plaidé pour une réforme des termes du multilatéralisme. «Il nous faut refuser de servir de relais aux ingérences étrangères sur le continent, ce qui participe à fragiliser nos Etats et à rendre inefficace l'action de nos institutions régionales», a déclaré le président Sall dans sa communication.
Dans le même ordre d'idées, il a fait savoir à qui veut l'entendre que la relation de l'Afrique avec les partenaires extérieurs doit se faire sur la base de la demande de l’Afrique. «Nous avons dans l'Union Africaine par exemple une architecture de paix, nous avons mis en place des forces africaines en attente dans les cinq régions. On dit à chaque région de pouvoir mobiliser à tout moment 5 mille soldats équipés, capables d'intervenir. La volonté de combattre existe mais le seul frein, c'est le financement de ces opérations», lance-t-il avant d’insister que l'Afrique ne peut résoudre ce problème sans la solidarité internationale.
Macky Sall, un antisystème mondial
Macky Sall prône ainsi le changement de la gouvernance mondiale, parce que les pays africains ne sont pas pauvres en réalité, mais sont appauvris par le système qui ne leur permet pas de tirer profit des ressources naturelles. «Il y a des raisons internes, mais pour l'essentiel, c'est le système qui ne nous permet pas d'être efficient», clame-t-il. Plaidant en outre depuis son accession à la présidence de l'UA pour que l'Afrique ait des sièges au Conseil de Sécurité de l'Organisation des Nations Unies (ONU), le chef de l'Etat, telle une antienne, est revenu sur cette doléance visiblement ''pressante''. «Nous estimons que le combat pour la représentation du continent au Conseil de sécurité, pour y avoir des sièges comme membre permanent, est un combat fondamental», trouve-t-il.
"Il faut avoir le courage de faire des réformes"
Pour Macky Sall, l'Afrique doit être membre à part entière du G20 en tant que septième économie mondiale pour montrer une perspective de solidarité. Dans sa logique de secouer les normes de multilatéralisme et de ce qu'il appelle le système, il lance : «Je prends l'exemple des Nations unies après la seconde guerre, les pays vainqueurs, les institutions de Bretton Woods et les Nations unies. Mais les règles ont été fixées dont les organes de gouvernance ; et le plus important est le Conseil de sécurité. On a des pays qui ont des statuts bien particuliers, ce sont les membres permanents qui ont le droit de veto. Mais c'est une résultante de la seconde guerre mondiale et 75 ans après, on veut garder les mêmes règles alors que le nombre de pays membres a été multiplié par trois. Il faut avoir le courage de faire des réformes parce qu'il ne répond plus aux besoins actuels du monde», ajoute le président Macky Sall qui souligne que c'est une revendication plus que révolutionnaire. A l’en croire, les Européens doivent savoir qu'ils sont d'égale dignité que les Africains. «Nous ne sommes plus à l'époque coloniale, nous sommes en 2022», prévient-il. S'exprimant en outre sur la guerre en Ukraine, il indique que l'Afrique n'est pas contre ce pays. «Beaucoup de pays africains ont soutenu toutes les résolutions. Mais les Africains disent qu'au même
moment où l'Ukraine est en guerre, est envahie, agressée, au même moment l'Afrique est de manière permanente agressée par le manque de financement, par les maladies», s'insurge-t-il de manière décomplexée. Et d'ailleurs pour lui, les acteurs concernés par la guerre doivent se parler, parce que cette guerre est en train de détruire le monde», indique le président de l'UA lors du panel qui a suivi la cérémonie officielle du Forum
sur la Paix et la Sécurité.
LA COUR DES COMPTES, SOURCE DU BLOCAGE ?
La Cour des comptes serait à l’origine de la non-transmission du projet de loi de règlement pour l’année 2021 aux députés lors de l’ouverture de la session ordinaire unique de l’année 2022-2023 de l’Assemblée nationale, le vendredi 21 octobre dernier.
La Cour des comptes serait à l’origine de la non-transmission du projet de loi de règlement pour l’année 2021 aux députés lors de l’ouverture de la session ordinaire unique de l’année 2022-2023 de l’Assemblée nationale, le vendredi 21 octobre dernier. En effet, selon les décharges que nous avons reçues du porte-parole du gouvernement, le ministre Abdoul Karim Fofana, ce projet de loi a été, effectivement, transmis depuis le 27 juin dernier à cette juridiction chargée d’approuver ou de récuser les chiffres.
On en sait un peu plus sur les raisons à l’origine de la nontransmission du projet de loi de règlement pour l’année 2021 aux députés, lors de l’ouverture de la session ordinaire unique de l’année 2022-2023 de l’Assemblée nationale. Cela pour permettre aux 165 députés d’effectuer leur travail de contrôle parlementaire des actions du gouvernement. Toute porte à croire que c’est au niveau de la Cour des comptes que se trouve le blocage de ce texte.
En effet, suite à notre article sur cette question publié, le vendredi 21 octobre, le ministre du Commerce et Porte-Parole du Gouvernement, Abdou Karim Fofana, qui avait dégagé la responsabilité du gouvernement dans cette situation, nous a fait parvenir des décharges attestant le dépôt effectif par le gouvernement de ce document depuis juin 2022. Il s’agit notamment d’un bordereau d’envoi composé de 200 documents déposé le 27 juin dernier au niveau de la direction des services législatifs de l’Assemblée nationale et d’une lettre de transmission de ce texte également déposé au niveau du bureau du greffe central de la Cour des comptes le 29 juin dernier.
Ce courrier est accompagné de plusieurs annexes dont entre autres, le Compte général de l’Administration des Finances ; le Compte administratif de l’Ordonnateur rendu au titre de 2021 mais aussi des copies des actes modificatifs pris au cours de ladite gestion.
Il s’agit entre autres, de trois (3) arrêtés portant annulation de crédits sur la gestion 2021 ; cinq (5) arrêtés portant constatation de recettes et ouverture de crédits sur fonds de concours sur la gestion 2021; cent quarante (140) arrêtés portant transfert de crédits du budget de la gestion 2021; quatre cent quarante et un (441) arrêtés portant virement de crédits globaux sur la gestion 2021; cinq (5) décrets portant ouverture de crédits à titre d’avance sur la gestion 2021; et cinq (5) décrets portant report de crédits du budget général de la gestion 2020 sur 2021; une clé USB contenant les actes sus mentionnés.
Pour rappel, selon les dispositions de l’article 62 de la Loi N°2011-15, LOI portant loi organique relative aux lois de finances : « Le projet de loi de règlement est déposé sur le bureau du Parlement et distribué au plus tard le jour de l’ouverture de la session ordinaire de l’année suivant celle de l’exécution du budget auquel il se rapporte. Il est accompagné des documents prévus aux articles 49 et 50 de la présente Loi organique. Le rapport sur l’exécution des lois de finances, la déclaration générale de conformité et, le cas échéant, l’avis de la Cour des comptes sur la qualité des procédures comptables et des comptes ainsi que sur les rapports annuels de performances prévus à l’article 50 de la présente Loi organique sont remis au Parlement sitôt leur adoption définitive par la Cour des comptes ».
LE GROUPE PARLEMENTAIRE YEWWI ASKAN WI EXIGE LE PROJET DE LOI DE REGLEMENT DE 2021
Va-t-on vers un report de l’examen du projet de loi de finances initiale de l’année 2023 dont le démarrage est prévu ce jour, en commissions?
Le groupe parlementaire Yewwi Askan wi a tenu hier, lundi 24 octobre, un point de presse pour réclamer une distribution sans délais du projet de loi de règlement pour l’année 2021 aux députés. Cette sortie intervient quelques jours après celle du groupe parlementaire « Libertés, Démocratie et Changement » qui a exigé la déclaration préalable de politique générale du Premier ministre avant tout débat sur le projet de budget 2023.
Va-t-on vers un report de l’examen du projet de loi de finances initiale de l’année 2023 dont le démarrage est prévu ce jour, en commissions. En effet, après l’exigence de la déclaration préalable de politique générale du Premier ministre avant tout débat sur le projet de budget 2023 formulée par le groupe parlementaire « Libertés, Démocratie et Changement », c’est au tour du groupe parlementaire Yewwi Askan wi de monter au créneau pour taper également sur la table.
Face aux journalistes hier, lundi 24 octobre, lors d’un point de presse, Biram Souley Diop, président dudit groupe parlementaire de l’opposition et ses camarades ont réclamé la distribution sans délais aux députés du projet de loi de règlement pour l’année 2021 qu’ils avaient demandé lors de la réunion de la Conférence des Présidents du jeudi 20 octobre dernier.
Estimant que « ni la Constitution ni la loi organique relative aux lois de finances n’autorisent le report de l’examen et du vote de la loi de règlement », Biram Souley Diop porte-parole du jour des députés de Yewwi Askan wi a précisé que son groupe est plus que jamais déterminé à faire respecter la loi en ce qui concerne le vote de ce projet de loi de règlement 2021. « Le Groupe parlementaire Yewwi Askan Wi tient à rappeler que les prérogatives constitutionnelles de l’Assemblée nationale en matière de contrôle budgétaire ne sauraient être suspendues du fait des manquements du Gouvernement et de la Cour des Comptes.
Cette dernière dispose d’un budget substantiel, le plus important parmi les cours et tribunaux, pour réaliser les missions fondamentales qui lui sont assignées par la Constitution et la loi organique. Sur le vote de la loi de règlement, l’Assemblée nationale, en vertu de l’article 57 alinéa 2 de la loi organique relative aux lois de finances dispose de soixante jours », a-t-il martelé.
Poursuivant son propos, le député-maire de la commune de Thiès nord a rappelé que le vote de la loi de règlement dans les délais requis est un impératif de transparence dans la gestion des deniers publics et que son groupe veillera durant toute la législature à la certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l’Etat. Sous ce rapport, il a ainsi annoncé la saisine du « président de l’Assemblée nationale aux fins de réclamer copie du projet de loi de règlement qui aurait été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, le 27 juin 2022 ». Mais aussi de la Cour des Comptes pour s’informer auprès de son Premier Président sur la transmission ou non à l’Assemblée Nationale des documents de contrôle budgétaire nécessaires à l’examen de ce projet de loi de règlement pour l’année 2021.
LES RÉSEAUX SOCIAUX SONT DEVENUS UNE FABRIQUE DE FAKE NEWS
Dans son discours d’ouverture de la 8e édition du Forum de Dakar sur la paix et sécurité en Afrique, le Chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall, a encore évoqué lundi les dérives sur les réseaux sociaux
Dans son discours d’ouverture de la 8e édition du Forum de Dakar sur la paix et sécurité en Afrique, le Chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall, a encore abordé lundi les dérives sur les réseaux sociaux, estimant que ceux-ci sont devenus « une fabrique massive de Fakenews et de manipulation ».
« Les dérives du numérique constituent aujourd’hui une des menaces les plus sérieuses à la paix à la sécurité et à la stabilité de nos pays. Menaces d’autant plus difficiles à combattre qu’elles sont diffuses et multiformes. À la cybercriminalité classique, s’ajoute la frénésie quotidienne des réseaux sociaux devenus une fabrique massive de Fakenews et de manipulation. Le monde réel est à la merci du monde virtuel qui reprend à haut débit la tromperie, le populisme, la haine et la violence. Autant de pratiques malsaines qui ne peuvent relever de la liberté d’opinion ou d’expression (…)
Il y a urgence à réformer les moyens de lutte contre la cybercriminalité. C’est la vocation de l’école de cybersécurité à vocation régionale, qui est un produit du forum de Dakar. Nous l’avons mise en place avec la France. Une école qui travaille pour former les experts dans ce domaine. D’ailleurs, les insulteurs publics savent très bien qu’ils sont retrouvés immédiatement aujourd’hui et traduits devant la justice.
Dans le même esprit, il est temps de règlementer les réseaux sociaux pour en limiter les abus. Il n’est pas question de règlementer quelles que libertés que ce soit, on parle de limiter les abus qui sont des facteurs de promotion de la violence et de haine dans nos pays.»
L'AFRIQUE N'EST PAS CONTRE L'UKRAINE, PAYS AGRESSÉ, SELON MACKY SALL
Le président de l'Union africaine a expliqué lundi le refus de nombreux pays africains de prendre parti dans la crise comme une réaction à l'indifférence internationale face aux agressions visant le continent
Le président de l'Union africaine Macky Sall a assuré lundi que l'Afrique n'était "pas contre l'Ukraine", pays "agressé", mais a expliqué le refus de nombreux pays africains de prendre parti dans la crise comme une réaction à l'indifférence internationale face aux agressions visant le continent.
"L'Afrique n'est pas contre l'Ukraine, il ne faut pas qu'on ait l’impression que les Africains sont insensibles à la situation de l’Ukraine. Ce n'est pas ça du tout", a déclaré le chef de l'Etat sénégalais lors de la 8 édition du Forum international de Dakar, conférence de dirigeants et d'experts sur la sécurité en Afrique.
"Mais les Africains disent qu’au même moment où l’Ukraine est en guerre, est envahie, est agressée, l'Afrique est permanemment agressée par le terrorisme", a-t-il dit. Il a aussi cité l'absence de solidarité internationale face à la crise économique qui éprouve le continent et face aux maladies.
"Nous sommes en 2022, nous ne sommes plus pendant l’ère coloniale. Nous sommes en 2022, donc les pays, même s'ils sont pauvres, sont d'égale dignité. Il faut qu’on traite leurs problèmes avec le même respect", a-t-il renchéri.
Il a renouvelé son appel à une meilleure représentation africaine au sein des organisations internationales comme le Conseil de sécurité de l'ONU ou le G20. L'emploi du mot "agressée" pour l'Ukraine est significatif de la part du président de l'Union africaine.
L'invasion de l'Ukraine par la Russie a divisé les pays africains, ainsi que l'ont montré plusieurs votes aux Nations unies depuis février 2022. Près de la moitié d'entre eux se sont encore abstenus ou n'ont pas pris part au vote le 12 octobre quand l'Assemblée générale de l'ONU a condamné l'annexion par la Russie de territoires ukrainiens.
Le Sénégal, aux relations fortes avec les pays occidentaux, avait surpris le 2 mars en s'abstenant lors d'un vote de l'Assemblée générale en faveur d'une résolution qui exigeait "que la Russie cesse immédiatement de recourir à la force contre l'Ukraine".
"Solidarité"
Le Sénégal avait en revanche voté le 24 mars une seconde résolution exigeant de la Russie un arrêt immédiat de la guerre. Il a aussi voté le 12 octobre pour la condamnation de l'annexion.
M. Sall a plaidé pour l'ouverture de négociations entre les protagonistes de la crise ukrainienne. "Nous devons être capables d'arrêter cette guerre qui est en train de détruire le monde", a-t-il dit.
Peu auparavant, la secrétaire d'Etat française Chrysoula Zacharopoulou avait plaidé pour la "solidarité" du continent avec les Européens face à l'offensive russe.
Celle-ci représente une "menace existentielle pour la stabilité et l'intégrité de notre continent", a dit la secrétaire d’État française auprès du ministère des Affaires étrangères.
"Tous les Européens le vivent ainsi. C’est pourquoi nous exprimons une attente de solidarité à l'égard de l'Afrique", a-t-elle dit en présence du président sénégalais, de deux autres chefs d'Etat africains et d'un certain nombre de ministres des Affaires étrangères.
"Nous ne le dirons jamais assez: la Russie et la seule responsable de cette crise économique, énergétique et alimentaire", a-t-elle renchéri. L'Afrique a été durement affectée par les effets de la crise ukrainienne et son impact sur les prix et les approvisionnements, en céréales par exemple.
Face aux critiques qui trouvent un large écho en Afrique contre une propension de la France ou de pays occidentaux à vouloir dicter leur loi à leurs partenaires africains, la responsable française a assuré que la France, quand elle déploie des missions comme la force antijihadiste sahélienne Barkhane, n'intervenait pas "en substitution" aux armées nationales, mais "en appui".