Si on laisse occuper les couloirs des pavillons, on ne pourra plus contrôler qui est étudiant et qui ne l’est pas. Ainsi s’exprime Khalifa Ababacar Diagne, chef du département de la gestion des cités universitaires du Coud qui est contre toute occupation des couloirs à l’Ucad.
Des étudiants qui squattaient les couloirs du Pavillon A ont été délogés. Pourquoi cette mesure forte ?
Nous avons pris cette décision par responsabilité. Il nous a été donné de constater que, depuis quelque temps, des étudiants, sous prétexte qu’ils n’ont pas de logement, sont allés chercher des tentes qu’ils ont installées dans les couloirs du pavillon A.
Les couloirs n’ont pas été faits pour être habités, ils servent à la circulation. En plus de cela, il y a une question de sécurité, parce que si on les laisse faire, on ne pourra plus contrôler qui est étudiant et qui ne l’est pas. Enfin, il y a une question d’hygiène et de santé publique.
Nous savons tous qu’il n’est pas décent de mettre des tentes dans les couloirs. D’ailleurs, nous avons reçu des rapports de notre service médical qui nous alertent dans ce sens.
Malgré tout, ces étudiants sont revenus et ont installé, à nouveau, ces tentes. Est-ce à dire qu’il n’y a pas eu de suivi ?
Il y aura un suivi. Quand nous avons fait l’opération, ils ont demandé à discuter avec les autorités. Nous avons entamé des discussions au cours desquelles nous leur avons marqué notre principe de ne pas les laisser s’y installer. Ils ont justifié leur acte en invoquant des questions sociales.
C’est la raison pour laquelle nous les avons invités à se rapprocher de notre service social qui va étudier leur situation au cas par cas et faire des propositions au directeur du Coud, qui, en définitive, va prendre une décision. C’est une approche allant dans le sens de les prendre en charge sur le plan social.
Mais, cela n’enlève en rien la décision et la volonté du Coud d’interdire, de façon catégorique, cette pratique. Il faut que les étudiants sachent qu’il n’est pas possible que le Coud discute de cette question. Cette pratique ne sera jamais autorisée. C’est une décision irrévocable.
Cette situation n’est-elle pas la conséquence du déficit de logement au sein du campus de Dakar ?
Absolument, c’est indéniable. Il suffit juste de voir les rapports en termes de capacité d’accueil et de la demande pour comprendre que c’est cela la source de ce problème. Nous sommes dans une université qui tourne autour de 80.000 étudiants et nous n’avons que 3891 lits. Mais, je dois rappeler que si la capacité d’accueil a baissé, c’est parce que des pavillons ont été démolis sur ordre du gouvernement, il y a deux ans.
Cette décision résulte d’un rapport de la Protection civile qui, en 2010, recommandait la démolition de ces pavillons au regard de leur état de décrépitude très avancé et qui constituait une menace pour les étudiants. Cette démolition a entraîné la perte de 1495 lits. Cependant, quand ces bâtiments ont été rasés, le rythme des travaux des pavillons qui étaient en cours de construction a été accéléré.
Ces pavillons ont été réceptionnés l’année dernière et mis dans l’actuelle capacité d’accueil. Ils sont au nombre de quatre, dont deux dans le grand campus, un à la Fastef et un à la cité Aline Sitoé Diatta. Ils ont chacun une capacité d’accueil de 200 lits.
La construction de ces pavillons avait connu un grand retard, mais l’actuel ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a fait preuve de beaucoup d’engagement pour qu’ils soient terminés et livrés. La construction de ces pavillons a été accompagnée par celle d’un nouveau restaurant qui est dans le circuit d’exploitation du Coud depuis le début de l’année avec une capacité d’accueil beaucoup plus grande que l’ancien restaurant Self.
Maintenant, nous attendons la livraison des trois pavillons en construction dans le stade du campus.
Pourquoi avoir choisi de construire ces trois nouveaux pavillons sur une partie du stade du campus ?
Tout d’abord, je tiens à préciser que le gouvernement a changé d’approche dans la construction des pavillons. Auparavant, le Coud n’était pas impliqué dans les projets. On ne faisait que réceptionner les infrastructures et les exploiter. Mais, depuis que le ministre Mary Teuw Niane est en place, à chaque fois qu’on doit construire des infrastructures sociales, le Coud, à travers ses techniciens, est associé en amont et dans toutes les phases.
Pour ces nouveaux pavillons en chantier, il s’agit de construction et d’équipement. Par le passé, il est arrivé que le Coud ait réceptionné des pavillons qui n’étaient pas équipés. On a choisi de construire ces nouveaux pavillons dans une partie du stade parce qu’il fallait anticiper, car au même moment, les autres pavillons étaient en cours de démolition.
On ne pouvait pas attendre la fin de la démolition pour commencer la construction des nouveaux pavillons. Il y avait urgence. Il fallait passer aux études de terrain et aux relevés géophysiques. Si on avait attendu, on n’aurait pas eu la possibilité de réceptionner bientôt ces trois nouveaux pavillons.
LES COULOIRS DU ‘’PAVILLON A’’ TRANSFORMÉS EN DORTOIR
Des étudiants ne disposant pas de chambres au campus de l’Ucad ont transformé les couloirs du « Pavillon A » en dortoir. Cette situation remet au goût du jour la problématique du logement dans cette institution universitaire.
En cette matinée de samedi, malgré le début du weekend, le campus grouille de monde comme à son habitude. Le flot d’étudiants allant ou revenant des amphithéâtres semble interminable. Après avoir serpenté parmi les files d'étudiants amassés dans les rues de cette « ville dans la ville », le pavillon A offre sa masse poussiéreuse à la vue.
Des étudiants gravissent les escaliers aux marches effritées, arpentent et se dispersent dans des couloirs bariolés d'annonces collées à la va vite. Ici, les chambres sont prévues pour deux, voire trois occupants. Mais, il arrive qu’une dizaine d’étudiants s’amassent dans une pièce.
Le plus grand pavillon de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), quelque 502 chambres, est avant tout un lieu où des milliers de personnes vivent l'année. Un véritable défi logistique. Mais, depuis quelques jours, un nouveau phénomène a vu le jour dans ce pavillon : le squattage des couloirs. Les étudiants qui n’ont pas trouvé de logement ont décidé, tout bonnement, d’installer des tentes dans les couloirs. Une cité dortoir dans un dortoir qui, lui-même, suffoque de promiscuité.
Dans l’un de ces couloirs, la carte postale est saisissante : des matelas disposés à même le sol, des tentes alignées, des lits en bois brinquebalants, des étudiants qui roupillent... Le spectacle est digne d’un site de réfugiés.
Et pourtant, le 1er juillet dernier, le service de sécurité du Coud (Centre des œuvres universitaires de Dakar) avait déguerpi tout ce beau monde. Mais, ils sont tous revenus dès le lendemain. Pour ces étudiants dont la plupart viennent de localités éloignées de la capitale, il n’est pas question de quitter les lieux.
Cela, malgré les conditions d’hébergement rudimentaire avec tous les problèmes d’hygiène, de santé et de sécurité que cela implique. « On n’a pas où aller ». Tel est le maître-mot. Alioune Fall Guèye, étudiant à la Faculté des Lettres, est l’un des squatteurs. Sous sa tente, il est plongé dans ses cours de philosophie. Cet originaire du Sud-Est du pays a l’air timide.
Il est bien conscient qu’il est dans l’illégalité, mais sa réponse tombe sèche quand on l’interpelle sur la question : « Que voulez-vous ? Il nous faut bien trouver un endroit où dormir. Je n’ai aucun parent à Dakar et je n’ai pas les moyens de me payer une chambre à 50.000 FCfa le mois ».
Même son de cloche chez son voisin, qui, lui, préfère garder l’anonymat. Il confie : « Vivre dans les couloirs, ce n’est pas un choix, c’est une contrainte. Ne croyez pas que nous sommes heureux de vivre à l’air libre, à la merci du soleil, du vent et de la poussière ».
Pour ces deux étudiants, comme pour leurs autres camarades qui passent la nuit à la belle étoile, la vie au campus est devenue une épreuve quotidienne avec laquelle ils composent en attendant de trouver un jour un logement.
« C’est aux autorités de faire en sorte qu’il y ait assez de chambres pour le maximum d’étudiants. Il y a assez d’espace dans le campus pour construire de nouveaux pavillons », fait remarquer Alioune.
DES EXPLOITANTS FORESTIERS ENLEVÉS PAR UNE BANDE ARMÉE EN CASAMANCE
Kolda (Sénégal), 10 juil 2015 (AFP) - Des exploitants forestiers sont retenus depuis mercredi en Casamance, région du sud du Sénégal, par des trafiquants de bois constitués en bande armée, a appris vendredi l'AFP de sources militaire et administrative.
Un responsable de l'armée dans la zone a parlé de quatre employés d'une scierie locale enlevés dans la forêt de Sansamba, à l'ouest de Kolda, une des principales villes de la Casamance, tandis qu'une autorité administrative locale a évoqué plusieurs otages, sans préciser de nombre.
Selon le responsable militaire joint de Kolda, les ravisseurs sont dirigés par un ancien employé de la scierie devenu trafiquant de bois et ne semblent pas avoir de lien avec le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), rébellion indépendantiste active depuis 1982.
Des médias locaux, ayant rapporté les enlèvements, croyaient cependant savoir que les otages étaient aux mains d'hommes du mouvement rebelle, divisé en plusieurs factions politiques et militaires dont les rivalités compliquent les tentatives de règlement du conflit.
"Le mode opératoire des éléments du MFDC n'est pas le même que celui des ravisseurs", menés par un homme originaire de Diango, localité où se trouve la scierie, a expliqué la source militaire.
Des informations de presse ont évoqué entre trois et quinze personnes enlevées dans la forêt de Sansamba. "A notre niveau, pour l'instant nous pensons que les otages seraient tout au plus au nombre de quatre", a précisé la source militaire.
Selon cette source, le chef de la bande a exigé du propriétaire de la scierie le paiement d'une rançon: "Il réclamait au départ 10 millions de FCFA, il est passé à 5 millions puis à 700.000 FCFA (de plus de 15.000 à 7.600 puis à 1.000 euros)".
La source administrative a de son côté indiqué que tout était mis en oeuvre par les autorités locales et la gendarmerie pour obtenir la libération des otages, sans plus de détails.
Selon la radio privée RFM, depuis les enlèvements, l'armée et la gendarmerie ratissaient dans la forêt de Sansamba. Jusqu'à vendredi soir, aucun commentaire n'avait pu être obtenu auprès de la Direction de l'information et des relations publiques de l'armée à Dakar, un de ses responsables assurant être toujours dans l'attente de "rapports du terrain".
La Casamance est dotée d'immenses ressources naturelles dont de nombreuses forêts denses où, selon des sources concordantes, sont installées de nombreuses scieries clandestines.
Des trafiquants de bois y opèrent, profitant du climat d'insécurité créé par le conflit, qui a fait de très nombreuses victimes, notamment de mines anti-personnel, même si aucun bilan précis n'est disponible.
LE MYTHE DE SISYPHE DES AUTORITÉS DAKAROISES
DÉGUERPISSEMENT DES MARCHANDS AMBULANTS
El Hadji Fallilou Fall - Ousmane Laye Diop |
Publication 10/07/2015
Face à plusieurs tentatives de déguerpissement, les marchands ambulants résistent toujours aux autorités municipales. De 2007 à maintenant, ils tiennent le coup et reviennent à chaque fois sur les lieux où ils ont été chassés. Suffisant pour que le maire des Parcelles Assainies y voie la main de l'État central.
Le maire de Dakar Plateau, Alioune Ndoye, a été auditionné ce mercredi par la police. Cette convocation est liée à une opération de désencombrement menée, il y a moins d'un mois, par ses hommes au marché Petersen. Cependant, force est de constater qu'aujourd'hui, les marchands ambulants sont de retour sur les lieux.
C'est de nouveau un énième processus de déguerpissement raté par les autorités locales de Dakar. En effet, les marchands ambulants et les autorités (étatiques et/ou municipales) ont toujours eu des relations très tendues. Le premier évènement date de 2007. A ce moment, l'État avait ordonné à la police et la gendarmerie d'entamer des opérations pour vider les trottoirs de Dakar de leurs traditionnels occupants que sont les marchands ambulants ou tabliers, les mendiants et les cireurs de chaussures.
L'État avait été obligé de reculer parce que quatre jours plus tard, des échauffourées ont opposé marchands ambulants et forces de l'ordre. Ils ont allumé des feux à l'aide de pneus, de poubelles, d'étals de bois dans certains carrefours de Dakar notamment aux alentours du marché Sandaga. Les protestations se sont étendues au quartier de la Médina où les vitres de la mairie ont été brisées à coup de pierres et trois voitures y ont été détruites. Dans le même quartier, les commerçants en colère ont pris d'assaut le siège de la Senelec où ont causé beaucoup de dégâts matériels.
Au sortir de cet évènement, les négociations entre l'État et les représentants des marchands ambulants ont permis de dégager un certain nombre de mesures. Le gouvernement avait prévu de les reloger dans différents sites. Ainsi la construction de 4 570 cantines était prévue au marché Thiaroye, Sicap Bao, Unité 20 et Unité 17 des Parcelles Assainies ainsi que dans d'autres lieux. Pour cela, un financement de 3 milliards Cfa a été dégagé par les autorités.
L'achat des cantines devaient se faire en crédit avec un mode de paiement étalé sur trois ans, à des prix variant selon le type de cantine, choisi (entre 2 millions 700 et 3 millions Cfa). La mairie de Dakar, de son côté, avait acheté un terrain de 2 590 m2 pour une valeur de plus d'un milliard Cfa.
S'en est suivie la création de la Synergie des Marchands ambulants pour le Développement (SYMAD), de la Commission nationale d'Assistance aux Jeunes Marchands (CONAJEM) et de l'Agence Nationale d'Appui aux Marchands Ambulants (ANAMA). Toutes ces entités n'ont pas permis de résoudre l'équation des marchands ambulants. D'ailleurs en 2014, l'ANAMA a été dissoute dans l'Agence Nationale pour la Promotion de l'Emploi des Jeunes (ANPEJ).
Les relations entre marchands ambulants et autorités locales se sont exacerbées quand Khalifa Sall est devenu maire de Dakar en 2009. Dans sa volonté de faire de Dakar "une ville moderne", le socialiste s'est heurté aux marchands ambulants qui ont refusé de libérer la chaussée pour le pavage des routes.
C'était la guerre totale entre les volontaires de la mairie de Dakar et les "tabliers". Avec l'acte 3 de la décentralisation, Alioune Ndoye a pris aujourd'hui le flambeau dans la commune de Plateau et l'occupation de la voie publique par les marchands ambulants persiste toujours.
Moussa Sy indexe l'État
L'échec du déguerpissement des marchands ambulants est dû à l'État, selon le maire des Parcelles Assainies, Moussa Sy. "L'État ne joue pas le jeu. Il y a des décisions politiques qui sont prises au haut niveau qui font que les mesures prises par les municipalités ne peuvent pas être appliquées.
Quand nous devons passer à l'action, les gens s'absentent. Ce qui s'est passé à Petersen en est une parfaite illustration. La police a reçu l'ordre de ne pas aller sur le terrain. Quand on envoie une camionnette avec un agent de la police et deux agents de sécurité de proximité (Asp), cela veut dire qu'on n'a pas voulu accompagner le maire (Alioune Ndoye)", déclare-t-il au bout du fil.
Moussa Sy souligne qu'il y a une prise en charge de la question liée aux marchands ambulants depuis 2009. "Le maire de Dakar a déjà investi 5 milliards Cfa pour acheter des terrains et construire un centre commercial à Félix Eboué où 3 500 tabliers seront recasés. Entre Kermel, Félix Eboué et Sandaga, il y a 1 200 cantines pour loger les marchands ambulants. Donc, on ne les a pas mis dans la rue", note-t-il.
Le maire des Parcelles Assainies affirme que les Dakarois ont salué l'idée de mettre tous les ambulants dans des sites provisoires en attendant que les équipements collectifs prévus pour eux soient terminés. Il dénonce en même temps ceux qui manipulent les marchands ambulants.
Idrissa Diallo : "C'est un faux débat"
Mais aux yeux du maire de Dalifort, la question du déguerpissement des marchands ambulants ne devait même pas se poser. Joint au téléphone, il déclare que l'État de droit a déjà réglé ces genres de question. "C'est un faux débat. Il y a des endroits où les gens sont autorisés à s'installer et il y a d'autres qu'on leur interdit. On a qu'à faire respecter la loi. Et dans ce cas-ci, c'est le maire qui doit s'en charger", dit-il.
Poursuivant son propos, Idrissa Diallo précise que les maires n'ont pas que les marchands ambulants à gérer mais, ils doivent s'occuper aussi du bienêtre de la population. Ce qui fait que, selon lui, si des gens occupent la voie publique, l'autorité doit intervenir pour les rappeler à l'ordre. "L'État doit aménager des espaces qui vont permettre aux commerçants d'écouler leurs marchandises sans porter préjudices à la population", conseille le maire socialiste de Dalifort.
DÉSENCOMBREMENT DE PETERSEN
Retour en zone des "ambulants"
On prend les mêmes et on recommence. L'action d'envergure initiée par la mairie de Dakar-Plateau pour libérer les artères de Petersen est présentement réduite à sa nullité la plus incompréhensible : les marchands ambulants sont de retour.
"Grand vous voulez quoi ? J'ai toutes sortes de marchandises. Dites-moi tout simplement ce qui vous ferait plaisir et je vous le procure", débite un jeune vendeur ambulant à un rythme rapide. Plongeant ses bras bardés de sa camelote dans l'habitacle de notre voiture, il affiche un sourire aguicheur.
Pompes insecticides, kit pour la manucure, couverture pour volant, lampes torches et tout un tas innommable de bric-à-brac constituent une denrée à écouler. Devant notre mutisme, le jeune homme s'est finalement résolu à proposer sa marchandise au véhicule de derrière, littéralement pris d'assaut par ses congénères, devant l'intérêt manifesté par le conducteur.
Allées Papa Guèye Fall et environs. Petersen renoue avec l'effervescence qui l'a toujours caractérisé avant le désencombrement initié par le maire Alioune Ndoye il y a deux semaines. C'est même à se demander si les marchands ambulants ont été " chassés " de ces artères il y a deux semaines avec l'incendie anonyme de plusieurs magasins à la clé.
L'effet feu de paille est manifeste. Le marché a renoué avec cette effervescence qui le caractérise. Circulation automobile rampante mais intense au rond-point, trottoirs débordant sous le poids des caissons de marchandises, étals en bois où pendaient les vêtements bon marché achetés aux fournisseurs chinois, porte-voix jouant en boucle les paroles préenregistrés ; un énorme engorgement a salué le retour en zone des vendeurs à la sauvette dans cette partie de la capitale.
Tout au bonheur d'Adama Seck, un vendeur baol-baol qui époussète la fine pellicule de poussière sur les chaussures pour enfants qui constituent sa marchandise. "Le maire Alioune Ndoye s'est complètement déchiré dans sa vision. Il n'aurait pas dû appeler des civils pour faire déguerpir d'autres civils.
Maintenant c'est un justiciable comme tout le monde, il faut qu'il réponde de la destruction de nos biens", déclare-t-il, regrettant toutefois que les choses en soient arrivés à cet extrême. Bonnet noir sommairement posé sur sa tête et tee-shirt en camouflé militaire, le jeune vendeur baol-baol qui évite tout pronostic se dit totalement confiant sur la marche de la justice.
Son étal est assailli par les clientes qui examinent les nu-pieds de petites filles avant que les billets roses de mille francs Cfa changent de main. L'euphorie était le sentiment le plus partagé par les ‘ambulants' à l'annonce de la convocation d'Alioune Ndoye à la Sûreté urbaine de Dakar.
Camouflet
Le 13 juin passé le maire de la commune de Dakar-Plateau affichait pourtant une détermination sans faille pour désencombrer les artères de Petersen. Camouflet avec le come-back des ambulants ou entente tacite pour les besoins de la fête de Korité ? "C'est archi-faux, je n'ai autorisé personne à se réinstaller et à rester là-bas. Ils ont déjà été sommés et ne le seront pas une seconde fois.
Quand nous arriverons, ce sera dans la continuité de l'action déclenchée qui est toujours en cours", lançait Alioune Ndoye au sortir de son interrogatoire à la Sûreté urbaine avant-hier. Le délégué du marché Petersen, Dame Badiane, confirme mais est d'un tout autre avis.
"Nous n'avons reçu aucune autorisation de la mairie. Nous nous sommes réinstallés car l'envie de travailler est plus fort que tout", se défend-il. Selon le dernier recensement effectué par l'huissier que son collectif a engagé, plus de 200 étals ont été détruits. Le délégué s'est également félicité de la bonne marche de la justice en laquelle il dit avoir toute confiance.
Selon lui, la mairie recommence avec ses incongruités : "Un agent nommé Babacar récupère les patentes depuis notre réinstallation. Nous les avons toujours payé d'ailleurs", fait-il savoir. Quant au soutien des maires à leur collègue, le délégué critique l'édile de Mermoz Sacré-Cœur. "Que Barthélémy Dias se tienne tranquille, on l'a entendu proposer un coup de main à Alioune Ndoye pour des nervis. Ce pays a besoin de consensus, pas de confrontations", brocarde Dame Badiane.
Pour le moment les vendeurs ont repris ‘possession' d'un territoire qu'ils prennent comme leur terrain naturel de prédilection. Rejoindre la rue Félix Eboué, le site de recasement proposé par la mairie, est hors de prix car "il faut une caution de 150 mille F CFA et 30 mille F CFA mensuels pendant 30 mois", fait savoir le délégué.
Pour lui, seule l'intervention de l'Etat peut garantir un règlement définitif de cette question d'autant plus que le précédent chef d'Etat leur avait octroyé le site de Petersen. Pour le moment, un gentleman's agreement, tacite, semble s'être noué entre la mairie et les marchands ambulants dont la fête de la fin du ramadan marque le deadline.
"Je ne crois franchement pas qu'ils reviendront après la Korité", s'exclame Dame Badiane, optimiste. En attendant, la volonté d'Alioune Ndoye de poursuivre, en l'occurrence de reprendre le désencombrement ; et l'attachement des ‘ambulants' à Petersen, semblent ne trouver aucune plage de convergence.
"LE PNUD N'A PAS POUR VOCATION D'EXÉCUTER DES PROGRAMMES AU SÉNÉGAL"
AMACODOU DIOUF, PRÉSIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DU CONGAD
La décision du chef de l'État de confier l'exécution du programme d'urgence de développement communautaire (Pudc) au Pnud n'agrée pas le président du Conseil d'administration du Conseil des organisations non gouvernementales d'appui au développement (Congad). Dans cet entretien, Amacodou Diouf souligne que la structure des Nations unies n'est pas spécialiste du développement communautaire et n'a ni les moyens en ressources humaines ni ceux financiers pour mener ce programme.
Le président de la République a confié l'exécution du Programme d'urgence de développement communautaire au PNUD. Un choix que vous contestez. Pourquoi ?
On ne conteste pas un choix d'un président de la République, on donne notre avis par rapport à un choix qui a été fait. Peut-être que le Président ne disposait pas de tous les éléments pour pouvoir mieux apprécier la question. L'objectif est louable car il consiste à réaliser un programme aussi ambitieux. Malheureusement, dans la vie, quand il s'agit d'exécution de programmes de développement économique, on est souvent confronté à des difficultés de toute sorte afin de pouvoir prendre une décision qui pourrait créer un consensus. Quand on travaille sur un programme de cette envergure, il est recommandé que ça fasse l'objet d'une concertation très élargie, en rapport avec les communautés qui doivent en bénéficier d'abord, mais aussi en rapport avec tous les acteurs du développement impliqués dans le développement communautaire. Le développement communautaire est tout à fait différent, du point de vue de la complexité, du programme global articulé par rapport à ces programmes de l'État du Sénégal, c'est-à-dire des choses que l'État peut articuler, en terme de programmes économiques ou en terme d'initiatives économiques. Le développement communautaire est l'ensemble de ces besoins à satisfaire des communautés à la base, au regard de leur dimension territoriale, au regard de leur complexité, au regard aussi de leur besoin sociologique. Et cela, ce sont les spécialistes qui doivent le faire.
Donc le choix du Pnud n'est pas approprié ?
On n'a pas trouvé le Pnud comme étant un spécialiste du développement communautaire. Nous pensons aujourd'hui que le Pnud devrait travailler sur les problèmes de stratégie de développement économique de notre pays. Le Pnud ne peut pas entrer dans la micro-économie ou l'économie communautaire ou l'économie populaire. Ce n'est ni sa vocation, ni ses préoccupations majeures. Donc il n'y a pas un manque à gagner du Pnud en terme de contribution dans les efforts de réflexion sur les questions de développement économique. Le Pnud n'a pas pour vocation de s'attarder sur les questions de développement populaire. Là aussi, nous ne pensons pas que ça soit utile au regard de l'existence de structures mieux habilitées. La vocation du Programme des Nations unies pour le développement, c'est de renforcer les capacités des États, en mobilisant des ressources au profit de ces États, à suivre, à accompagner et à conseiller les États pour pouvoir effectivement prendre une direction de progrès économique, social et environnemental.
Selon vous, le président de la République devrait mener des concertations avant de faire son choix. Mais est-ce la bonne option face aux urgences de l'heure ?
Nous pensons qu'il était utile de réfléchir stratégiquement avec les acteurs en présence sur le terrain sur la mise en œuvre des programmes communautaires. C'est ça aussi la rupture de paradigmes. La rupture de paradigmes va jusqu'à la capacité de l'État à pouvoir évaluer, en réalité, les besoins en acteurs pour mener son développement ou à pouvoir les identifier, de pouvoir dire voilà les acteurs que je vais mobiliser pour booster le développement de mon pays. Si on ne peut pas identifier ces acteurs, il serait extrêmement difficile de traduire un programme d'urgence pour le développement communautaire en une réalité économique et sociale. Par voie de conséquence, nous avons dit qu'on n'est pas tenu de réaliser ça mais on est tenu d'être pris en compte dans la dimension réflexion comme aussi dans la dimension exécution s'il le faut.
Est-ce que les agences et autres structures présentes sur le terrain sont à la hauteur ?
L'État a créé des institutions et des agences pour l'exécution des programmes et projets au bénéfice des communautés. Je pense que nos gouvernants ont agi par le passé sans se référer au programme des Nations unies pour le développement. Pour des structures comme le Pnud, l'État gagnerait à faire l'évaluation de la contribution du Pnud dans la marche de ses programmes. Il y a plusieurs structures qui sont là, mieux habilitées que le Pnud. Donc, le Pnud ne peut pas être pris comme une simple structure qui va exécuter un programme de plusieurs milliards. Il s'agit de l'argent du contribuable sénégalais. Et dans ce sens, nous pensons qu'il y a un travail d'évaluation à faire par rapport à ce que le Pnud a réalisé en termes de conduite de programmes ou de suivi de programmes. Le grand problème aujourd'hui réside dans le fait que le Pnud veut se substituer à des structures créées par l'État et qui ont la vocation de faire ce qu'on a demandé au Pnud de faire. Ça pose problème. Nous pensons qu'au Sénégal, il existe des structures de plus de 50 ans qui ont eu à travailler dans ce secteur du développement communautaire. Il y a des gens qui ont fait leurs preuves dans le cadre de la mise en œuvre de programmes, et avec des résultats probants.
Vous pensez donc que le Pnud n'est plus dans son rôle ?
Non du tout. Je ne pense pas que le rôle de facilitateur, le rôle d'accompagnement dans la direction du développement de notre pays doit s'assimiler à une exécution. C'est-à-dire que le Pnud se transforme en agence d'exécution de programmes. Je pense que c'est une première dans le monde. Nous allons saisir les communautés des autres pays avec lesquelles nous travaillons pour qu'elles nous disent leur expérience par rapport à cette question, parce que c'est du jamais vu en tout cas. Nous ne pensons pas que ça soit efficient, que ça puisse encourager tous les acteurs du développement qui tournent autour du développement communautaire. Le programme d'urgence de développement communautaire (Pudc) est un programme extrêmement important, extrêmement positif, un programme qui peut être réalisé par des Sénégalais et avec des résultats satisfaisants. Mais est-ce qu'avec le Pnud, on peut avoir ces résultats ? Le Pnud n'a ni les moyens en ressources humaines, ni les moyens financiers pour le faire. S'ils avaient les moyens financiers, ils n'allaient pas solliciter l'argent de l'État. L'autre question qu'on se pose est de savoir si le personnel international, recruté par le Pnud, sera financé par l'argent du contribuable sénégalais alors que c'est une charge financière qui n'est pas dévolu au peuple sénégalais. C'est une question importante qu'on ne peut pas occulter. Il est temps de réfléchir davantage sur la mise en œuvre de ce programme.
Le président soutient avoir fait ce choix par souci de vouloir aller très vite dans la réalisation des projets...
Dans la science du management du projet, il ne s'agit pas d'aller vite ou d'aller loin. Non. Ça va à partir des principes de planification des activités du projet, selon un cycle bien indiqué, que tout agent d'exécution ou agence d'exécution devrait respecter. Que ça soit le Pnud ou toute autre structure, il y a un cycle qui est là, qui est défini par le projet et il doit s'exécuter par rapport à ça. C'est justement cette cadence qu'il faudra respecter. Et c'est valable pour toutes les structures et le Pnud ne saurait constituer une exception.
Mais il y a d'autres mécanismes de blocages comme les procédures de passation des marchés ?
Il n'y a aucun mécanisme de blocage quant au déroulement des activités de Pudc, selon le cycle qui lui a été donné. Dans ce cas précis, il y a tout un mécanisme de planification de projets qui est là. Je ne pense pas qu'on puisse avoir des difficultés dans ce sens. On peut accélérer avec ou sans le Pnud. Maintenant, l'État, c'est l'État. C'est lui qui a créé les mécanismes d'accélération ou de blocage ou de freinage. L'État n'a qu'à donner un peu de temps à sa propre "personne ‘pour pouvoir mener une réflexion afin d'accélérer le processus. Cela n'a rien à voir avec le code des marchés publics. Les spécialistes dans ce pays ont réfléchi tout récemment pour apporter des modifications au code des marchés publics du Sénégal. Dans ces modifications, l'élément le plus important a été la réduction des délais. Les analystes sont allés beaucoup plus en profondeur en disant que, quelque part, là où se pose le problème des délais, c'est un problème de comportement du facteur subjectif. Pourquoi les gens n'attaquent pas le facteur subjectif ? La force d'un État aussi, c'est dans sa capacité à pouvoir maîtriser son personnel, à pouvoir placer son personnel dans un dispositif de délais et dans le respect de ces délais. Les procédures ont été réduites et je suis convaincu qu'on peut aller beaucoup plus loin. Dans le cadre de la réalisation de projets, il y a d'autres mécanismes qui peuvent permettre à ce que le déroulement des décaissements se fasse rapidement. Il y a les procédures d'exception pour exécuter un projet.
Lors du lancement officiel du Pudc, le chef de l'État a même souligné que si le programme confié au Pnud marche et que les autres projets gérés par certains ministères et agences ne décollent pas, il va tout confier au Pnud. Quel commentaire cela vous inspire ?
Le président de la République est libre de confier une de ses prérogatives ou une de ses compétences à qui il veut. Ce qui nous intéresse dans cette affaire, c'est de voir comment ce projet peut aider le Sénégal. Et nous pensons être dans notre devoir de lui donner notre point de vue sur la question afin qu'il améliore sa décision. Nous avons toujours pensé que dans leur fonctionnement, les États qui ont prêté une oreille attentive à leurs experts, à leurs agents, à leurs populations, ont davantage le mieux gagné. Maintenant, je suis entièrement d'accord que la réalisation du Pudc se fasse sur la base d'une évaluation des performances de réalisation. Il ne s'agit pas uniquement de décliner des indicateurs, on a fait tant de classes, tant de routes. Il faut aller au-delà, c'est-à-dire avoir des indicateurs courageux, perspicaces qui iront jusqu'à la qualité de la réalisation du programme. Libre au président de donner à qui il veut mais une chose est certaine : ce n'est ni la vocation, ni la mission du Pnud de venir exécuter des programmes au niveau du Sénégal. Par voie de conséquences, nous pensons que ce pays dispose de structures créées par l'État, de structures qui ne sont pas créées par l'État et qui ont fait leurs preuves dans le cadre de l'exécution de programmes 10 000 fois plus ambitieux que les 113 milliards de F Cfa du Pudc.
LES DESSOUS D'UN PLÉBISCITE
ÉLECTION DE ME MBAYE GUÈYE COMME PROCHAIN BÂTONNIER
Dans un an, Me Mbaye Guèye sera le nouveau Bâtonnier de l'Ordre des avocats en remplacement de Me Ameth Bâ. Il a été élu dauphin du Bâtonnier. Sa victoire est considérée comme "un vote contre le mépris"
Quatre candidats étaient en lice pour l'élection du dauphin du Bâtonnier de l'Ordre des avocats, qui dans un an sera à la tête du bâtonnat pour un mandat de 3 ans non renouvelable. Au décompte des voix, hier, c'est Me Mbaye Guèye qui a été plébiscité par ses confrères.
Sur les 260 suffrages valablement exprimés, puisqu'il y a eu 5 bulletins nuls, alors que 265 avocats ont voté, le désormais ex-secrétaire général du Conseil de l'ordre des avocats a obtenu 144 voix. Il est ainsi passé au premier tour, car ayant obtenu plus que la majorité requise fixée à 134 voix. Ses adversaires ont totalisé 112 voix. Il s'agit de Me Bacre Waly Ndiaye qui a totalisé 58 voix. Candidat pour la 3ème fois, Me Mbaye Sène a obtenu 28 voix, tandis que son confrère et Me Massata Mbaye en a eu 26.
Alors qu'on pouvait s'attendre à un vote serré, finalement, on a assisté à un plébiscite. Ce très grand écart entre le vainqueur et les autres candidats s'explique par une réaction de défiance. Selon nos sources, les "électeurs" n'ont pas vu d'un bon œil la candidature de Me Bacre Waly Ndiaye.
Nos interlocuteurs ont avancé le fait qu'ils ne le connaissaient pas, car le candidat travaillait, depuis près d'une vingtaine d'années, à la commission des droits de l'Homme des Nations unies. "Non seulement nous ne le connaissons pas, mais il ignore les réalités du barreau. C'est pourquoi les jeunes se sont mobilisés pour lui barrer la route", a confié un avocat.
"Des anciens bâtonniers ont voulu caporaliser le Bâtonnat"
L'autre facteur qui, d'après nos sources, a poussé les avocats à "voter utile" et massivement pour Me Mbaye Guèye, c'est le fait que l'ancien agent des Nations unies, considéré comme un candidat de l'Etat, ait été parachuté par certains ex-Bâtonniers. "Ils ont voulu caporaliser le Bâtonnat, c'est pourquoi ils l'ont convaincu de déposer sa candidature.
Mais c'est une victoire contre l'Etat et certains anciens bâtonniers", a expliqué un avocat sous le sceau de l'anonymat. La preuve, argue notre interlocuteur, "dans sa profession de foi, datée du 25 juin, il a clairement fait savoir qu'il ne voulait pas revenir au Barreau, mais qu'il voulait faire de la consultance internationale". Candidat de l'Etat ou pas, nos interlocuteurs ont affirmé à l'unanimité avoir voté contre le mépris pour ceux qui sont là et qui maîtrisent mieux les réalités du barreau.
Sur ce point, son futur prédécesseur n'a pas de souci à se faire. Me Ameth Bâ ne doute pas un seul instant de la "compétence" de celui qui fut au début des années 2000 président de l'Association des jeunes avocats du Sénégal (AJAS). A en croire Me Bâ, son confrère "a le profil pour avoir évolué dans le conseil de l'ordre".
Néanmoins, il lui conseille "de garder le cap et de ne privilégier que les intérêts des avocats". Elu Dauphin, Me Mbaye Guèye entrera dans ses fonctions de Bâtonnier dans un an, date à laquelle prendra fin le mandat de Me Bâ. Qui a expliqué que la pratique de dauphinat a été instaurée dans le but de permettre à un futur bâtonnier de s'imprégner de sa mission, surtout au cas où celui-ci n'a jamais été membre du Conseil de l'ordre.
DES RESTAURANTS, DIBITERIES ET FAST-FOODS À... JEUN
Comme à chaque mois de Ramadan, les restaurants, dibiteries, gargotes, fast-food et autres lieux de restauration connaissent une baisse de leur chiffre d’affaires. 2015 n’a pas dérogé à la règle. De la rue 5 X 6 de la Médina à la Gueule-Tapée, en passant par le quai de pêche de Soumbédioune, les gérants et autres tenanciers entonnent la même chanson : les clients se font rares. Pour ne pas peut-être connaître de grosses pertes, certains ont réduit leur offre culinaire.
Une heure avant la rupture du jeûne à Dakar. A cette heure, beaucoup de va-et-vient dans les rues de la Médina. Les jeûneurs pressent le pas pour trouver quelque chose à mettre sous la dent, après une longue et dure journée passée sans manger,niboire. A la rue 5X6 de la Médina, le jeune Mama Fall, l’air épuisé avec une coiffure en vogue, habillée en maillot de couleur noire, tient un couteau.
Il porte des sandales et coupe la viande bien cuite en morceau sur une table destinée à une cliente. Son patron, Abdourahmane Fall, confie que leur chiffre d’affaires a baissé avec le Ramadan. A titre d’illustration, il fait étalage de quelques chiffres en termes de bénéfice durant la période qui avait précédé le mois béni et la période actuelle.
«Avant ce mois, j’égorgeais un à deux moutons par jour. Ce qui équivaut à 100 mille francs Cfa de recettes journalières. Mais maintenant, je ne tue qu’un mouton qui pèse 15 à 20 kg pour gagner 50 mille à 60 mille francs Cfa», laisse-t-il entendre.
A quelques mètres de là, se trouve la boucherie de Billou Dieng. Sur la table sont exposés des intestins de mouton bien serrés. La viande est envahie par des mouches. Une balance accrochée au toit, une autre sur la table, un couteau, un coupecoupe et des côtelettes complètent le décor. Sans oublier les peaux de mouton laissées au pied d’un arbre. L’odeur de la viande bien garnie pétille les narines.
«Sept à dix moutons abattus, au lieu de quinze par jour»
Devant la porte de la dibiterie située près de la boucherie, une mini-chaîne distille la chanson de Souleymane Faye dédiée à Fatou Faye. Sur le mur carrelé en jaune et noir sont majestueusement postées les photos de Serigne Touba, fondateur du mouridisme, de son fils et 4ème khalife, Serigne Abdou Khadre Mbacké, et celle de serigne Cheikh Sidy Mokhtar Mbacké, actuel khalife général des mourides.
Billou, de taille un peu élancée, marche à pas de caméléon à cause de son handicap. «Impossible de vous parler de mon chiffre d’affaires, mais je rends grâce quand même au bon Dieu. J’ai constaté une baisse de la clientèle comme tout le monde. C’est pourquoi nous n’abattons que sept à dix moutons, au lieu de quinze par jour» révèle-t-il. Avant d’ajouter : «Le prix n’a pas changé. Le kilogramme de la viande grillée coûte cinq mille et la viande fraîche à trois mille cinq cents francs Cfa.»
Soumbédioune : ambiance un peu morose et clients rares
Après la rupture du jeûne, nous avons arpenté les rues pour voir le taux de fréquentation dans les endroits souvent choisis par une bonne frange de la population pour se restaurer. Direction Soumbédioune. De loin, on sent la brise de mer. Un vent frais balaye l’atmosphère.
De plus en plus qu’on s’approche de la mer, le bruit assourdissant des vagues s’intensifie. Sur place, vendeuses de poissons grillée, mareyeuses et clients se côtoient dans une ambiance un peu morose. Effet Ramadan oblige !
Ndèye Isseu, Aïssa Diallo et les sœurs Bâ, Coumba et Hady, ont un dénominateur commun : toutes les quatre sont des vendeuses de poissons grillés. Le décor est le même à leurs places respectives. Une fumée noire se dégage. A cela s’ajoute une bonne odeur qui force à admirer les cuissons. Le «yaboye» (la sardinelle), la daurade, le «lotte», le «thiof» et des fruits de mer sont au menu du jour. Le piment, le vinaigre, le citron et l’oignon viennent rajouter plus de saveur au plat.
Ces dames entonnent la même chanson : les clients se font rares en cette période du mois béni. Docteur Denis est Bissau-guinéen. Il est l’un des rares clients rencontrés sur place. Habillé en short, associé à un tee-shirt bleu, et un sac au dos, il fréquente les lieux depuis deux ans et trouve les prix abordables.
Avant de livrer les vertus du poisson : «C’est un aliment complet, c’est pourquoi nous conseillons nos patients de le prendre régulièrement. Surtout pour les hypertendus, les diabétiques, les patients atteints de maladies cardio-vasculaires tels que l’obésité, le cholestérol...»
«Le ndogou marche bien ; le problème, c’est les repas»
A quelques mètres de là se situe le quartier Gueule-Tapée. Dans une des rues menant à l’école Paille, une foule croise notre chemin. Des fidèles venant d’effectuer leur «Nafila» (prière surérogatoire). A quelques jets de pierre de là se trouve un autre restaurant dirigé par la dame Siga Faye. Devant ledit établissement, des jeunes chahutent.
D’aucuns sont assis sur un banc, d’autres sur une natte. Au même moment, un film de dessins animés diffusé sur Tv5 défile à l’écran d’un poste téléviseur installé à côté. Taux de fréquentation dans les restaurants en ce mois de Ramadan, le sujet intéresse toutes les personnes présentes ou presque. Chacun voulait parler à la place de la restauratrice, souvent avec un brin d’humour.
«Le ndogou marche bien. Le problème, c’est les repas. Les clients se font rares», confie Babacar Thiam, cogérant. Qui tente encore de donner une explication. «Le temps qui sépare la rupture et l’heure du repas est trop court», justifie-t-il.
Propos corroborés par la restauratrice Siga Faye : «Avant le Ramadan, je cuisinais sept à huit kilogrammes de riz par jour. Faute de clients, je ne mets que quatre kilogrammes dans la marmite. Malgré cela, il reste parfois des plats.»
Jusqu’à 21 heures et demie, pas l’ombre d’un client au restaurant. Avant notre départ, seul un homme, bol à la main, a effectué une commande avant de vider les lieux. De la rue 5X6 de la Médina à la GueuleTapée en passant par Soumbédioune, le constat est le même : beaucoup de clients ont abandonné restaurant, dibiterie, gargote, fast-food et autres.
Adama Diop, gérante d’un fast-food à la rue 19 X 6, n’a pas échappé à la règle. Assise devant son comptoir, grosses boucles d’oreilles portées, foulard bien ajusté, calculatrice et téléphone portable sur la table, elle jette un regard sur son poste téléviseur, écran plat, accroché au mur.
De l’autre côté, du fataya, du chawarma, des sandwichs et des bouteilles de boisson sont bien rangés derrière une vitre. Elle reconnaît que leur chiffre d’affaires connaît une baisse à chaque mois de Ramadan. Selon toujours elle, les rares personnes qui fréquentent son lieu de travail sont des femmes, pour la plupart, et des étrangers.
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L'AUTRE SCANDALE FONCIER
Attribution de parcelles autour du périmètre de l'aéroport Léopold Senghor - Des ministres et des hauts fonctionnaires parmi les bénéficiaires présumés
Les titres fonciers 350 GRD et 4407/DG risquent de provoquer des remous autour du périmètre aéroportuaire. Désaffectés par un décret, ils devaient servir de lotissement administratif partiel, en vue du recasement des parcelles impactées par les servitudes aéronautiques dans les zones industrielles et commerciales de l'aéroport Lss. A l'arrivée, ce sont de hauts fonctionnaires et des ministres qui se sont partagé les parcelles.
Ils ont partagé une partie du foncier de l'aéroport de Dakar. Le TF350/GRD tiré du TF 4407/DG, est une affaire qui met en cause plusieurs hauts fonctionnaires, des ministres et des privés. Les veinards se retrouvent avec des parcelles de 200, 300, 400 et plus de 5 000 m2 autour du périmètre de l'aéroport. Et l'affaire Tobago devient presque banale face à ce scandale foncier.
Aujourd'hui, les interrogations s'élèvent au-dessus de Lss. Cette fois-ci, les autorités sont au courant de cette nouvelle affaire. Les différents attributaires de ces parcelles sont mis en gras dans une lettre adressée au Premier ministre et datée du 10 avril 2013. Intitulée Situation lotissements à Ouakam-Aéroport, elle détaille les noms de tous les bénéficiaires de ces nouvelles parcelles.
Pourtant, le 1er mars 2013, le Premier ministre Abdoul Mbaye avait demandé à Pathé Seck, ministre de l'Intérieur de l'époque, de mettre en place un Groupe opérationnel mixte de surveillance des alentours de l'Aéroport international Léopold Sédar Senghor. Il l'alertait par rapport à la "prolifération de nouvelles constructions irrégulières dans l'emprise des 350 m, bordant la piste de l'aéroport".
Il faut savoir que le TF4407/DG a été désaffecté, en partie, par le décret N°2014-802 du 25 juin 2014. Il fait l'objet d'un arrêté portant autorisation de Lotissement administratif partiel, en vue du recasement des parcelles impactées par les servitudes aéronautiques dans les zones industrielles et commerciales de l'aéroport Lss sur la piste 03/21. Et il appartiendrait aux héritiers de la famille feu Dame Mbengue. Mais, à l'arrivée, des fonctionnaires et des responsables de l'Etat se partagent cet espace.
Controverse autour d'un décret
Evidemment, les constructions n'ont pas encore commencé dans cette zone située à l'extrême ouest de l'aéroport contigu aux Almadies. Mais, les travaux de remblayage ont débuté. Sur cette vaste terre, les camions ont déversé des tonnes de gravats pour faciliter l'érection d'éventuels bâtiments. Sans tarder, les autorités aéroportuaires ont entamé l'érection d'un nouveau mur de clôture pour sécuriser la zone. Un ouvrier : "On a commencé les travaux avant le Ramadan. Je suis juste un ouvrier qui a été envoyé ici par ma société. Allez demander aux autorités de l'aéroport."
Aujourd'hui, on comprend la pertinence et la portée de la lettre du directeur des Aéroports du Sénégal (Ads). Selon Pape Maël Diop, le courrier du 14 avril 2015 est une confirmation des termes de la lettre du 12 janvier que le directeur général de l'Agence nationale de l'aviation civile et de la météorologie avait déjà adressée au chef du Bureau des Domaines de NgorAlmadies et Grand-Dakar. Il confirmait que les constructions sur terrain TF4407/DG, qui se trouve dans une zone frappée par les servitudes aéroportuaires de la piste 03/21, ne doivent pas dépasser une hauteur de 7 m.
Interpellé hier, le patron des Ads, qui a réagi à travers son service de communication, se réfugie derrière le décret 2014/802 qui réglemente la zone. "Le TF 4407 n'est pas frappé de mesure d'interdiction comme le montre le décret sur le lotissement qui organise le périmètre de l'aéroport en plusieurs secteurs", annoncent les Ads. Quid du nouveau mur en construction à quelques mètres des pistes ? "C'est la nouvelle délimitation pour protéger l'aéroport."
A. KANE ACCUSE LE MAIRE DE GRAND-DAKAR DE PEDOPHILE ET CHANTAGE SEXUEL ET ATTERRIT AU TRIBUNAL
Militant du Parti socialiste (Ps), Amadou Kane est dans de beaux draps. il a accusé le maire de la commune de Grand Dakar de pédophile et de chantage sexuel. il soutient que Jean- Baptiste Diouf entretient des relations intimes avec la deuxième adjointe au maire et le régisseur. interpellé, il comparaît aujourd’hui devant le juge des flagrants délits.
Qui disait que la politique est le lieu des coups bas ? À coup sûr, des pratiques peu orthodoxes sont en train de pourrir le milieu. On se souvient de l’affaire Diombass Diaw qui avait dégoûté les citoyens. Et comme si cela ne suffisait pas, cette fois c’est au niveau du Parti socialiste (Ps) que cela s’est produit. En effet, Amadou Kane qui se réclame militant du Parti socialiste (Ps) s’est permis de jeter l’opprobre sur Jean Baptiste Diouf. Il a envoyé au maire de la commune de Grand Dakar plusieurs messages l’accusant de pédophile, d’obsédé sexuel et de maître chanteur.
Selon Amadou Kane, l’édile de Grand Dakar entretient des rapports intimes avec la deuxième adjointe, Aïssatou Fall, mais également avec le régisseur Ndiaté Dieng. Suite à la plainte du maire de Grand Dakar ainsi que des dames, Kane a été cueilli. Le procès-verbal établi par un huissier retrace les messages envoyés par Amadou Kane au maire, mais également à d’autres collègues qui travaillent à la mairie. Dans l’un des messages, il est écrit «méfiez vous de Jean Baptiste Diouf, c’est un pédophile qui fait du chantage aux jeunes filles pour entretenir des relations sexuelles avec elles dans son bureau» ; dans un autre «Jean Baptiste est un maitre chanteur qui utilise son bureau comme hôtel pour tromper les jeunes filles il les licencie s’il n’abuse pas d’elles».
À Un certain J M N, il écrit ceci «ton grand frère (en référence au maire) est un obsédé tantôt il est dans le lit de Aïssatou tantôt dans celui de ndiatté…» Un autre message est adressé au maire de Grand Dakar, dans lequel il est mentionné «vous êtes un sale menteur qui ne fait que b…les jeunes filles je vous détruirai».
Interpellé, Amadou Kane reconnaît entièrement les faits. Il n’a voulu retirer un iota de ce qu’il a écrit. Selon certaines informations, Babacar Mbaye en veut au maire parce qu’il conteste sa légitimité. Il dit à qui veut l’entendre que Jean Baptiste Diouf ne devrait pas être maire de la commune de Grand Dakar. Des querelles internes, en somme. Amadou Kane sera jugé, aujourd’hui, par le juge du Tribunal des flagrants délits. Il est poursuivi pour diffamation, injures publiques, menaces commis sur un fonctionnaire public investi d’un mandat public par distribution d’écrits.
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''LE LEADERSHIP NE SE DONNE PAS''
HADJA MAIMOUNA MAIDANDA, LA WINNIE MANDELA DU NIGER
MIGUEL GODONOU DE SENEPLUS |
Publication 10/07/2015
Le leadership des femmes sort de plus en plus de l’ombre. A côté de celles qui assurent de hautes fonctions, étatiques, administratives, etc. d’autres femmes plus ou moins discrètes, mènent leur combat au service de leurs sœurs, de la communauté à la base. C’est le cas de la Nigérienne Hadja Maimouna Maidanda. En un an, elle a créé 173 associations dans sa région. Un exemple de leader féminin qui a fait ses armes dans le monde communautaire au Niger.
Maimouna est une femme engagée pour l’amélioration des conditions des femmes nigériennes. Le facteur déclencheur de sa vie de militante fut l’arrestation de son mari pendant le régime d’exception de 1985 au Niger. «Ce régime qui a voulu me détruire m’a donné un passeport pour la vie. Il a fait de moi une femme leader», se souvient-elle, tout en faisant montre d’une certaine fierté d’avoir pu passer cette épisode de sa vie.
L’histoire de l’arrestation de son mari par le régime d’alors rappelle dans une certaine mesure, l’histoire de Nelson et de Winnie Mandela en Afrique du sud sous le régime de l’Apartheid. C’est d’ailleurs à juste titre que Maimouna Maidanda a été surnommée Winnie Mandela du Niger par les dignitaires du régime qui ont arrêté son mari.
Enseignante de formation, la ‘’Winnie Mandela du Niger’’ a mené une vie associative riche meublée par les activités de ses ONG (Association des éducatrices pour le développement, Association féminine pour la promotion et l’Education de la femme) dont les buts sont : l’alphabétisation de la femme et la promotion de la scolarisation de la fille. Ce qui lui a permis d’agir efficacement pour l’autonomisation financière des femmes de la région de Dosso au Niger.
Casser la glace
Avec la nomination de son mari dans la chefferie en 2000, Mme Hadja Maimouna est devenue Djermakoye. Très tôt, elle s’est confrontée à une réalité complexe. Hostile à son militantisme féminin, la chefferie traditionnelle, a essayé de freiner son élan, rendant difficile son accès aux femmes. Mais déterminée et tempérament de gagneur aidant, Mme Djermakoye n’a pas abandonné le combat. «C’était dure et terrible mais je ne me suis pas laisser faire, j’ai dû casser la glace». Désignée comme une femme révolutionnaire, elle a montré ses mérites par la mise sur pied de 173 groupements féminins au bout d’un an de travail. Ce qui a contribué à l’amélioration des conditions de vie socio-économiques des femmes rurales.
Manager hors-pair, elle a conduit plusieurs projets d’organisations non-gouvernementales visant l’affirmation du leadership féminin dans le milieu rural par l’autonomisation financière des femmes. Les succès engrangés par ces initiatives font montre du leadership incontestable de Djermakoye.
«Pleurer la nuit et sourire le jour»
Un leader ne doit pas montrer un signe de faiblesse. C’est pourquoi Le leitmotiv de cette mère de famille est de foncer quels que soient des obstacles ô combien présents. «Quand vous êtes leaders, les gens vous combattront, mais il ne faut pas flancher» a insisté Djermakoye en présence de ses sœurs. Pour elle, le leader ne doit pas «montrer ses larmes». Elle peut «pleurer la nuit» et «sourire le jour».
Avec détermination, la femme doit être une jusqu’au-boutiste pour afficher son leadership. La raison est toute simple : « le leadership s’arrache. Il ne se donne part ». Une leçon de Djermakoye qui sans coloration politique est doigtée comme une référence pour les aspirantes au leadership.
Septuagénaire, Djermakoye reste encore forte pour continuer le combat de la valorisation du leadership de la femme et de la fille au Niger et partout ailleurs. Récipiendaire de nombreuses distinctions et décorations, elle est nominée dans le Livre des 100 femmes du Niger 2012 par le Fonds des Nations-Unies pour la Population (FNUAP) pour être marraine de cinquante filles dont la scolarisation et le suivi reposent sur ses épaules. Ainsi elle aborde le passage à témoin vers une nouvelle génération de leader faite d’une multitude de Winnie Mandela.