SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
25 avril 2025
Culture
L'IMPASSE DES RESTITUTIONS
Six ans après les promesses d'Emmanuel Macron à Ouagadougou, le retour des biens culturels africains pillés pendant la colonisation reste enlisé dans les procédures. La France, à l'origine de cette dynamique, semble désormais à la traîne
(SenePlus) - Six ans après les promesses d'Emmanuel Macron lors de son discours à Ouagadougou, la restitution des biens culturels pillés en Afrique pendant l'époque coloniale reste un processus complexe et lent. Selon un article publié par Le Monde, la loi-cadre facilitant ces restitutions, promise par le président français, n'est plus à l'ordre du jour.
Le cas du "djidji ayôkwé", surnommé le "tambour parleur", illustre cette lenteur. Cet instrument de 430 kilos, confisqué en 1916 par l'armée française à la communauté des Ebriés en Côte d'Ivoire, fait l'objet d'une proposition de loi spécifique qui sera examinée au Sénat le 28 avril avant de passer à l'Assemblée nationale.
Comme le rapporte Le Monde, l'ancienne ministre de la Culture Rima Abdul Malak avait bien rédigé un projet de loi-cadre en 2023, mais celui-ci avait été retoqué par le Conseil d'État pour un vice juridique. L'actuelle ministre, Rachida Dati, "n'en a toutefois pas fait une priorité", selon le quotidien.
Cette situation provoque l'impatience des pays africains, à l'image du Mali qui réclame depuis 2022 la restitution de 81 objets. "Les recherches de provenance ont été faites, les preuves établies, mais on attend", déplore Daouda Keita, directeur du Musée national du Mali, cité par Le Monde.
Face à cette situation, certains pays africains se tournent vers d'autres nations européennes. D'après l'artiste sud-africaine Molemo Moiloa, cofondatrice d'Open Restitution Africa, "aujourd'hui, les pays les plus actifs sur ces sujets sont l'Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique."
La question de la destination finale des objets restitués fait également débat. Comme le souligne l'anthropologue camerounais François Bingono Bingono, "ce ne sont pas seulement des biens culturels qui ont été emportés. Ce sont aussi, souvent, des objets de culte, de liturgie, dont la place se trouve au sein des chefferies traditionnelles."
Dans ce contexte, la collaboration entre institutions africaines et européennes s'avère essentielle, à l'image du programme "Atlas de l'absence", mené conjointement par l'Université technique de Berlin et celle de Dschang au Cameroun.
VIDEO
L'ESSAI QUI DÉBOULONNE LES IDOLES AFRICAINES
Chiffres à l'appui, Joël Té-Léssia Assoko ose l'impensable dans "Enterrer Sankara" en déconstruisant l'héritage du héros burkinabè. Tandis que l'AES et le régime sénégalais revendiquent cet héritage, le journaliste signe un plaidoyer pragmatique
(SenePlus) - Dans un essai aussi incisif qu'érudit, le journaliste économique Joël Té-Léssia Assoko s'attaque à l'héritage de Thomas Sankara et aux penseurs africains contemporains qui perpétuent, selon lui, des mythes économiques préjudiciables au développement du continent. Intitulé « Enterrer Sankara, essai sur les économies africaines », ce premier titre de la collection « Pépites jaunes » des éditions Riveneuve fait déjà polémique, rapporte Jeune Afrique.
« Ceci n'est pas un brûlot », prévient la quatrième de couverture. Pourtant, l'ancien rédacteur en chef adjoint de Jeune Afrique n'hésite pas à remettre en question l'héritage du révolutionnaire burkinabè, figure intouchable pour de nombreux Africains. Chiffres à l'appui, il déconstruit les politiques économiques mises en œuvre et les choix, parfois contradictoires, du capitaine qui n'est resté que quatre ans au pouvoir.
Selon l'auteur, Thomas Sankara représente un mythe « d'hérésies économiques », bien qu'il lui concède des idées novatrices en matière de santé et d'éducation. Ce que regrette particulièrement le journaliste franco-ivoirien, c'est que Sankara ait réussi à installer l'idée que la « révolution » soit la voie à suivre, une perspective qui mènerait à une impasse selon lui.
« Enterrer Sankara, c'est métaphorique », confie l'auteur à Jeune Afrique. « L'objectif, c'est de dépasser cet héritage. On ne peut pas résoudre les problèmes contemporains de l'Afrique avec ce référentiel des années 1980. D'autant qu'à l'époque, déjà, les politiques économiques de Sankara étaient vouées à l'échec ».
Le livre ne s'arrête pas à Sankara. Joël Té-Léssia Assoko élargit sa critique à plusieurs intellectuels africains influents comme Kako Nubukpo, Felwine Sarr, Achille Mbembe ou encore Célestin Monga. Tous sont accusés de perpétuer des idées utopistes et une tendance à « l'apitoiement sur soi ».
« Lorsque l'on met en avant de nouvelles façons de penser l'humain, de penser l'économie, c'est mentir à l'Afrique et se mentir à soi-même », écrit-il sans concession, selon Jeune Afrique. L'ouvrage s'inscrit néanmoins dans une réflexion plus large sur les modèles de développement du continent, avec une volonté affichée de pragmatisme.
La publication de cet essai intervient à un moment où la figure de Sankara connaît un regain d'influence. Comme le rappelle Jeune Afrique, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko prônent, à l'instar du capitaine burkinabè, la fin de la dépendance à l'Occident et placent le souverainisme économique au cœur de leur programme. De même, les juntes militaires au pouvoir dans plusieurs pays du Sahel revendiquent l'héritage sankariste.
Face à cette tendance, l'auteur regrette que ces régimes aient « l'émancipation politique comme seul programme » et délaissent les questions « technico-économiques » au profit d'envolées lyriques sur l'asservissement par l'aide au développement, la dette illégitime ou la prédation néocoloniale.
Pour le co-fondateur du think tank L'Afrique des idées, « la première loi de la pauvreté est l'économie ». Sa conclusion est sans appel : l'émergence du continent ne se fera qu'à condition d'une hausse significative et continue de la productivité.
À travers cet ouvrage de 151 pages, Joël Té-Léssia Assoko lance un pavé dans la mare des idées reçues sur le développement économique africain. Reste à voir comment les héritiers intellectuels de Sankara répondront à cette provocation assumée.
SOULEYMANE BACHIR DIAGNE, LE PHILOSOPHE QUI A CONQUIS L'AMÉRIQUE
L'université Columbia a organisé un hommage à la hauteur de la carrière du natif de Saint-Louis. Après 15 ans sur ce campus d'élite, ce penseur qui a révolutionné les études françaises en y intégrant une dimension africaine ferme un chapitre de sa vie
(SenePlus) - L'université de Columbia à New York a rendu un hommage exceptionnel au philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne, qui termine sa carrière d'enseignant-chercheur après plus de quinze ans sur ce prestigieux campus américain. Pendant trois jours, ce penseur majeur originaire de Saint-Louis a été célébré lors d'une série de conférences et d'échanges intellectuels qui ont réuni plus de trente intervenants de renom, rapporte RFI.
"Cet hommage est tout naturel pour un grand professeur, un grand intellectuel qui apporte énormément dans plusieurs champs, et on voulait respecter cette tradition pour Souleymane, qui laisse un héritage immense à Columbia", a expliqué Emmanuelle Saada, responsable du département de français de l'université, citée par RFI.
Entouré de sa famille venue en grande partie de Dakar et de nombreux collègues universitaires, le philosophe a participé à des discussions embrassant une vaste gamme de disciplines, de l'histoire à la philosophie, en passant par la sociologie, le français et les religions. Une diversité qui reflète parfaitement l'approche intellectuelle de Diagne.
"C'est quelque chose qui est très marqué dans la culture universitaire américaine et je pense que cela amène de nouvelles dimensions au débat, car on demande, on analyse des sujets sur plusieurs angles, par différents types de personnes qui sont spécialistes dans des domaines différents", s'est réjoui le penseur sénégalais lors de l'événement.
L'impact de Souleymane Bachir Diagne sur ses étudiants est profond et durable. Martina, actuellement doctorante en philosophie à UCLA, témoigne avec émotion : "Je suis tout de suite devenue passionnée par ses cours, par son approche, mais aussi par la manière dont il analyse les phénomènes de société. En moins d'un mois, j'ai compris que je voulais emprunter la voie de la recherche en philosophie".
Son influence s'étend bien au-delà des frontières américaines. Mouhamadou El Hady Ba, responsable du département de philosophie à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar, raconte comment sa rencontre avec Diagne a changé sa trajectoire : "En 1996, j'ai obtenu le concours général de philosophie au Sénégal, alors que je m'apprêtais à faire de l'économie à la suite d'études en sciences. Bachir m'a rencontré et m'a félicité, et m'a conseillé de poursuivre la voie philosophique plutôt que de faire de l'économie. Je ne l'ai jamais regretté !"
Il décrit Diagne comme "un pionnier africain qui impacte à l'international, dont l'influence sans frontières inspire aussi le continent et sa jeunesse par son parcours formidable et ses réflexions toujours si constructives".
À l'aube de ses 70 ans, Souleymane Bachir Diagne ne considère pas cette étape comme une fin mais comme une transition. "Je ferme la boucle du troisième chapitre de mon parcours philosophique, rempli d'émotions, et avec le sentiment du devoir accompli", a-t-il déclaré avec son sourire caractéristique.
Le philosophe garde une affection particulière pour ses années à Columbia : "J'ai passé de superbes années ici, des années heureuses. Des années décisives pour ma carrière, aussi, car les publications et les travaux que j'ai réalisés ici ont eu un impact sans commune mesure avec les précédents travaux que j'avais réalisés".
Loin de prendre sa retraite, Diagne a déjà planifié ses prochaines activités intellectuelles : "Je ne m'arrête pas ! Je ne vais pas avoir de journées vides, c'est certain. Je travaille sur trois ouvrages, et je suis invité à plusieurs séminaires dans les mois à venir, dont un à Cambridge. Je vais aussi pouvoir passer plus de temps à Dakar, ce qui est toujours un plaisir immense".
Selon RFI, cet hommage marque non seulement la fin d'un chapitre pour le philosophe sénégalais, mais souligne également l'importance de sa contribution aux études françaises et à la pensée philosophique contemporaine, enrichies par sa perspective africaine et son approche résolument interdisciplinaire.
DIP DOUNDOU GUISS SACRÉ AU WORLD AI FILM FESTIVAL AVEC UN CLIP SUR LES TIRAILLEURS
L’artiste sénégalais a décroché la 3e place avec “Thiaroye 44 (Jambaar Remix)”, seul projet africain en lice. Un hommage vibrant aux Tirailleurs sénégalais, mêlant musique, narration et intelligence artificielle.
L’artiste sénégalais Dip Doundou Guiss a remporté la 3e place au World AI Film Festival à Nice, en France, avec son clip “Thiaroye 44 (Jambaar Remix)”, seul projet africain en compétition parmi plus de 1 500 candidatures de 80 pays.
Le clip, hommage poignant aux Tirailleurs sénégalais, mêle musique, narration et intelligence artificielle pour raviver un pan douloureux de l’histoire coloniale.
Ce prix consacre non seulement une œuvre artistique innovante, mais aussi l’importance de la mémoire collective portée par la nouvelle génération.
« Pour nos Tirailleurs, pour le Sénégal, pour l’Afrique qui gagne », a réagi Dip sur ses réseaux sociaux, remerciant toute son équipe.
APRES 5 MOIS DE FORMATION «FILM LAB AFRICA» PRESENTE 4 COURTS METRAGES
Repas Parfait, Marco, Niary Tally et Borom Baax sont tous issus de cette résidence créative initiée par le British Council, d’abord au Nigeria en 2023 puis au Sénégal, en collaboration avec Tangerine Production de Chloé Ortolé et Alarba films de Fama Ndia
Ce jeudi, la vingtaine de jeunes formés dans le cadre de la résidence «Film Lab Africa» ont présenté les 4 courts métrages réalisés durant ces 5 mois. En collaboration avec «Alarba Films» et «Tangerine Production», ce programme initié par le British Council pose les bases d’une initiative prometteuse.
De l’audace, de la créativité et des thématiques incisives. Les quatre courts métrages issus de la première session du «Film Lab Africa» sont le reflet d’une jeune génération de cinéastes décomplexés. Repas Parfait, Marco, Niary Tally et Borom Baax sont tous issus de cette résidence créative initiée par le British Council, d’abord au Nigeria en 2023 puis au Sénégal, en collaboration avec Tangerine Production de Chloé Ortolé et Alarba films de Fama Ndiaye. Conçu comme un tremplin vers l’insertion professionnelle, «Film Lab Africa» a accompagné 4 scénaristes, 3 réalisateurs, 3 directeur-rice-s de la photographie, 4 ingénieure-s du son et 2 producteur-rices pendant 5 mois. Selon le British Council Senegal, ces sessions ont permis à ces jeunes de renforcer leurs compétences en scénarisation, réalisation, production, cinématographie et son. ««Film Lab Africa» s’inscrit dans l’engagement du British Council à soutenir les Industries culturelles créatives (Icc) comme vecteurs de croissance inclusive, de création d’emplois, mais aussi expression puissante de récits uniques et divers sur la scène internationale. Dans ce cadre, nous plaçons les talents au cœur de toutes nos initiatives et, ensemble, nous avons conçu ce programme de 6 mois, véritable tremplin professionnel, en apportant une formation et un programme de mentorat complet dans différents domaines : développement artistique, compétences techniques, mise en œuvre pratique, connaissances en entreprenariat et renforcement du réseau professionnel», résume la directrice pays du British Council, Morgane Quemener. Au-delà de la formation, la résidence a eu pour objectif la production de courts métrages. Et les quatre films présentés ce jeudi sont autant d’aventures cinématographiques. Quand Georges Diodji Ndour explore le cinéma d’horreur dans Borom Baax, Ismaël Mahamadou Laouali nous amène dans un road movie intitulé Niary Tali, tandis que Ciré Ndiaye nous entraîne, avec Marco, dans l’univers d’une enfant autiste et Penda Seck nous invite dans les méandres de la folie lors d’un Repas Parfait.
Programme intensif, «Film Lab Africa» vient confirmer des vocations et éclairer des démarches artistiques déjà perceptibles dans les productions. Autour de ces jeunes, des structures comme Héritage for Africa, l’Association des techniciens du cinéma du Sénégal (Atacs) ou encore des mentors comme la réalisatrice Awa Moctar Guèye, le photographe Djibril Dramé ont participé à faire éclore ces talents. «Cette approche holistique permet aux participant·e·s d’acquérir non seulement des compétences techniques, mais aussi une compréhension globale des industries cinématographiques et télévisuelles», expliquent les organisateurs. Sur 140 candidatures, seuls 16 participants ont été sélectionnés par un jury de professionnels. Et pour beaucoup, cette expérience est une première. C’est le cas de Adji Sène Mbaye, productrice de Borom Baax de Georges Diodji Ndour. «Pour moi, c’est une première expérience de management d’une équipe de professionnels. Et j’ai su transformer les difficultés en opportunités», se réjouit la jeune apprenante. Scénariste de Niari Tali, JeanJacques Pascal Assoumou a fait l’apprentissage du lâcher-prise et de la déresponsabilisation durant cette expérience. Des leçons, des expériences partagées et des sensations artistiques qui vont accompagner ces jeunes tout au long de leur carrière.
SAINT-LOUIS, TERRE DE PATRIMOINES
Son architecture coloniale unique côtoie les richesses naturelles du Djoudj et la tradition culinaire du "Ceebu jën", symbolisant l'alliance parfaite entre patrimoine bâti, environnemental et immatériel que les autorités s'efforcent de préserver
En évoquant Saint-Louis, on pense à ses potentialités touristiques, sa diversité culturelle. Mais aussi son patrimoine historique et ses fantastiques trésors architecturaux qui ont valu à l’île son inscription, en 2000, après le Parc national des oiseaux du Djoudj en 1981, sur la liste emblématique des trésors de l’humanité. En 2021, l’Unesco a encore enrichi la liste de merveilles mondiales dans le nord du pays en y ajoutant le « Ceebu Jën ».
En 2025, le Sénégal compte huit biens inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. Ce qui lui permet d’occuper une place importante en Afrique. Parmi ces trésors, trois se trouvent dans la région de Saint-Louis dont les potentialités touristiques attirent, chaque année, de nombreux touristes en quête de découvertes et de sensations. Aujourd’hui, vieille de plus de 350 ans, l’ancienne capitale de l’Afrique occidentale française (Aof), qui se trouve entre le présent et le passé, recèle d’un patrimoine architectural riche d’une grande diversité de formes. L’île présente un ensemble urbain, architectural, historique et culturel parmi les plus remarquables de l’Afrique de l’Ouest. Ses valeurs architecturales et son rôle dans la formation des élites politiques en Afrique de l’Ouest ont été mis en avant pour la classer au Patrimoine mondial de l’Humanité en 2000, après un premier classement en 1976 comme secteur sauvegardé par le président Léopold Sédar Senghor.
Aujourd’hui, le visiteur ne peut s’empêcher de suspendre son regard aux balcons en bois ciselé qui se détachent des façades de nombreuses maisons et bâtiments de l’île. Mais, avec les vicissitudes du temps, Saint-Louis subit un dépérissement de son cadre bâti et le vieillissement de son patrimoine est devenu une réalité indéniable. Car, malgré l’adoption du Plan de sauvegarde et de mise en valeur (Psmv) élaboré et approuvé par décret présidentiel n°2008-694, qui avait réussi à le sauver d’une inscription sur la liste du patrimoine en péril, la lutte pour la sauvegarde du patrimoine est loin d’être gagnée. La mise en œuvre du Programme de développement touristique (Pdt) conjuguée aux efforts de la gouvernance concertée pour la gestion du patrimoine pourrait redonner à la ville tricentenaire un nouveau souffle. Parc national des oiseaux du Djoudj et le « Ceebu jën » À Saint-Louis, se trouve également une autre merveille qui promet une expérience unique et inoubliable : le Parc national des oiseaux du Djoudj. Situé à environ 60 kilomètres de Saint-Louis, ce site exceptionnel, avec ses 16.000 hectares de zones humides riches en biodiversité, est l’une des réserves ornithologiques les plus importantes du monde. Reconnu en patrimoine mondial par l’Unesco depuis 1981, ce havre de paix pour les oiseaux migrateurs du Paléarctique, est un sanctuaire vital pour la nidification des pélicans blancs, hérons pourprés et bihoreaux, des grands cormorans, des spatules d’Afrique, des grandes aigrettes, entre autres.
Depuis décembre 2021, le « Ceebu jën » (riz au poisson) est devenu le 8e bien sénégalais classé. En ajoutant cette nouvelle inscription à sa prestigieuse liste, l’Unesco reconnaît la valeur exceptionnelle de ce plat ancestral rebaptisé « Jollof rice » au Ghana et au Nigeria et des savoirs, pratiques et savoir-faire qui l’entourent. Après des années de persévérance, le Sénégal a réussi à inscrire au patrimoine culturel immatériel de l’humanité ce patrimoine culinaire qui s’est ouvert à l’universel. Dans leur ouvrage « Ceebu jën, un patrimoine bien sénégalais » (Harmattan, 74 pages), Fatima Fall Niang et Alpha Amadou Sy, respectivement spécialiste en conservation préventive et philosophe, retracent le long itinéraire de cette spécialité qui ravive à la fois les yeux et l’estomac et devenue, par la force des choses, symbole de multiculturalisme et d’universalisme. Ce livre est une invite à préserver ce patrimoine immatériel bien sénégalais dans ses vertus et ses richesses, pour assurer sa transmission aux générations futures. Avec le label Unesco, symbole de la beauté et de l’importance historique, ces trois merveilles, mieux promues, pourraient permettre d’attirer davantage de touristes à la recherche de nouvelles aventures et de nouvelles sensations.
MULTIPLE PHOTOS
UNE EXPOSITION DEVOILE L’HISTOIRE MECONNUE DE LA PRESQU’ILE DE DAKAR
– ”Taarixu Ndakaaru biir géedj – l’histoire immergée de la presqu’île de Dakar”, l’exposition qui sera ouverte au public, vendredi, fait découvrir à travers des images et des récits les nombreuses découvertes archéologiques sous-marines
– ”Taarixu Ndakaaru biir géedj – l’histoire immergée de la presqu’île de Dakar”, l’exposition qui sera ouverte au public, vendredi, fait découvrir à travers des images et des récits les nombreuses découvertes archéologiques sous-marines qui ont contribué à retracer une partie de l’histoire et la culture de la presqu’île du Cap-Vert.
Initiée par la Direction du Patrimoine culturel du Sénégal (DPC), cette exposition s’inscrit dans le cadre de la restitution du projet Margullar-II, qui avait, entre autres objectifs, la formation en archéologie sousmarine et la valorisation du patrimoine culturel subaquatique par le biais du tourisme de, a indiqué jeudi à l’APS son commissaire, Moussa Wélé.
Le projet ambitionne de relier patrimoine et tourisme en réalisant un travail d’archéologie sous-marine de préservation et de conservation du patrimoine marin, pour sa valorisation et son utilisation ultérieure, dans le but d’améliorer l’attractivité et la promotion du tourisme de plongée dans les régions et pays participants.
Ce riche patrimoine englouti et peu connu jusqu’ici permet aussi de revenir sur l’histoire du port de Dakar, devenu ‘’station-service atlantique‘’ depuis la deuxième moitié du XIXe siècle. Le rôle de Dakar dans le seconde guerre mondiale est racontée à travers l’épave du Tacoma, un cargo danois construit en 1926 et qui a été accidentellement incendié par un obus de la marine britannique le 24 septembre 1940 lors de l’opération ”Menace” du général de Gaulle et ses alliés.
Six marins danois périrent lors de cet incident et le cargo qui était à quai au port de Dakar au moment des faits fut finalement remorqué hors de l’enceinte du port pour le laisser dériver dans la rade de Dakar avant de couler non loin de l’Île de Gorée.
L’emplacement actuel de l’épave gisant sur un fond entre 13 et 15 mètres, est matérialisé par une bouée de balisage rouge qui oblige la chaloupe à faire un détour sur sa trajectoire de la liaison Dakar-GoréeDakar.
LES VESTIGES IMMERGÉ DE LA JETÉE DAKAR GORÉE
Un autre des récits revient sur l’histoire de la jetée Dakar- Gorée (Pont bu bees). L’exposition explique que le port de Dakar, qui était un élément isolé sur la côte, est relié à l`intérieur avec l’achèvement du tronçon ferré Dakar-Saint Louis en juillet 1885. Ainsi, pour se plier aux exigences des navires toujours plus grands et plus pressés, les autorités arrêtèrent en mai 1899 un projet de grand port de Dakar.
La capacité d’accueil limitée amena le gouvernement général à proposer au département, dès 1917, un projet de travaux d’aménagement du port de commerce à l’intérieur des jetées et des extensions éventuelles au nord de la « Grande jetée » Dakar-Gorée, communément appelée aujourd`hui la digue Dakar-Gorée ou ‘’Pont bu bees’’ par la population locale. La construction de cette jetée Dakar-Gorée a commencé en 1938, mais le projet d’extension sera abandonné après la construction d’un tronçon de 600m à partir de Dakar.
La Seconde Guerre mondiale est la principale cause de son abandon, selon Moussa Wélé, puisque, dit-il, elle a entraîné la diminution du personnel qualifié, le manque de moyens financiers et de matériaux, en particulier le ciment.
Selon la croyance populaire, cet abandon serait dû au non-respect des forces surnaturelles de la communauté léboue, en particulier le génie protecteur de l’île de Gorée, Mame Coumba Castel, qui aurait opposé son refus à l’érection de cette jetée qui devait relier Dakar à l’île de Gorée.
Aujourd’hui, les recherches archéologiques sous-marines ont permis de disposer d’informations essentielles quant à la compréhension de la technologie utilisée à l’époque pour l’érection de cette jetée. Le visiteur ne manquera pas également de découvrir à travers l’exposition les origines de l’installation de la communauté léboue et patrimoine culturel intimement lié à ce patrimoine sous-marin.
Moussa Wélé est revenu sur l’importance du les liens entre la communauté léboue et les épaves retrouvées au fond de la mer. ‘’Avant même l’installation du port, les lébous avait signé des pactes et traités avec l’autorité coloniale’’, a-t-il révélé Selon lui, l’autorité coloniale accusait les communautés de pêcheurs de receleurs qui attaquaient des navires en difficulté en mer pour récupérer leur marchandises, car ils excellaient dans la navigation maritime et dans le milieu marin. ‘’Mais pour certains dignitaires lébous, ce sont les colons qui faisaient appel à eux pour les secourir lorsqu’ils avaient des problèmes en mer. En retour, les colons les remercier avec des marchandises”, explique Wélé.
LES CANONS SUBMERGES AU LARGES DU CAP MANUEL
Plusieurs autres récits garnissent l’espace, notamment celui qui concerne les quatre canons submergés découverts au Cap Manuel à 5 mètres de profondeur. Ces canons qui faisaient partie du dispositif de protection de Dakar, datent, selon le commissaire de l’exposition, du XIXe siècle.
En termes de découverte archéologique sous-marine, Moussa Wélé évoque l’importance du site de la pointe des Almadies avec un riche patrimoine archéologique sous-marin. Réputée dangereuse pour la navigation maritime à cause de la faible profondeur de ses fonds rocheux. Plusieurs cas de naufrages ont été enregistrés au XVIIIe siècle dans ce secteur, rapporte-t-il.
C’est le cas du naufrage du navire Montana, échoué sur les récifs des Almadies, en 1964, et qui avait une cargaison de bois. ‘’C’était du bois qui provenait des forêts africaines et qui était destiné à être exporté en Europe’’, a-t-il expliqué, ajoutant que cette cargaison de bois est devenue aujourd’hui un lot de vestiges archéologiques ”importants” pour comprendre le phénomène de la déforestation des forêts africaines.
Grâce au projet Margullar, un circuit touristique sous-marin autour de Dakar va favoriser en outre la sensibilisation de la préservation du patrimoine subaquatique. ‘’Il était important pour nous d’apporter notre contribution à l’histoire du Sénégal et au développement d’une société consciente de son riche patrimoine culturel immergé’’, a soutenu Moussa Wélé, par ailleurs archéologue sous-marin.
Il a en outre rappelé que le projet l’exposition « Taarixu Ndakaaru Biir Géedj » est le fruit du projet Margullar obtenu par l’ancien Directeur du Patrimoine culturel du Sénégal, Abdoul Aziz Guissé, décédé en 2022 et ”sans qui le Sénégal n’aurait jamais adhéré”. Ce projet a été mis en œuvre grâce au programme Interreg-MAC de l’Union Européenne et a permis de renforcer les capacités des six professionnels au Sénégal. Le commissaire a signalé que ce projet a permis au pays de former la première génération de jeunes professionnels en archéologie sous-marine et en gestion du patrimoine culturel subaquatique, tout en facilitant l’inventaire pilote des premiers sites historiques et culturels immergés le long des côtes sénégalaises y compris l’épave du bateau Le Joola au large de la Gambie.
La journée du vernissage de cette exposition va coïncider avec l’inauguration par le ministre en charge de la Culture, Khady Diène Gaye, d’un centre de ressources de la DPC.
Selon le directeur du Patrimoine culturel, Oumar Badiane, ce centre, grâce au traitement de tout le fond documentaire existant, permettra aux chercheurs d’avoir une base de données restituées dans le domaine du patrimoine (anthropologique, archéologique, monuments historiques).
UN RETOUR PLEIN D’AMBITIONS
Après plusieurs années d’absence, le Festival international du film de Dakar (Fifdak) revient sur le devant de la scène avec pour ambition de devenir un événement cinématographique majeur en Afrique et à l’échelle mondiale.
Après plusieurs années d’absence, le Festival international du film de Dakar (Fifdak) revient sur le devant de la scène avec pour ambition de devenir un événement cinématographique majeur en Afrique et à l’échelle mondiale. Prévu du 14 au 19 avril 2026, le Fifdak entend ainsi dynamiser l’industrie cinématographique locale, attirer des investisseurs et faire de Dakar la capitale du cinéma international.
Dakar sera sous les projecteurs du 14 au 19 avril 2026. Le Festival international du film de Dakar (Fifdak) revient après quelques années de pause, avec l’ambition de se positionner comme un événement cinématographique incontournable, à la hauteur des grands festivals mondiaux. Fondé en 2008 par Oumar Ndiaye, réalisateur et producteur, le Fifdak a été un espace de rencontres et d’échanges pour les professionnels du septième art. Et aujourd’hui, sous l’impulsion de l’Association de producteurs de cinéma et de l’audiovisuel (Apca/Africa Cinéma) et de 7Arcs Films, il se donne pour mission de dynamiser le secteur cinématographique local, d’attirer des investisseurs et de faire de Dakar la capitale du cinéma international. «Le cinéma est un langage universel, un moyen d’expression qui transcende les frontières, les cultures et les identités. Le Fifdak s’inscrit dans cette vision d’un cinéma global, riche de sa diversité, mais unifié par la passion de raconter des histoires qui nous relient tous. C’est dans cet esprit que le Festival international du film de Dakar revient, plus ambitieux que jamais, pour offrir une scène ouverte à tous les cinémas du monde», affirme Oumar Ndiaye, directeur du festival, dans un communiqué. Une vision qui guide cette relance ambitieuse, portée par un budget prévisionnel de 575 millions de francs Cfa.
A travers cette nouvelle édition, le Fifdak se positionne comme une plateforme essentielle pour le cinéma sénégalais et africain. Il vise à favoriser une meilleure visibilité pour l’Afrique, en rapprochant les créateurs et les investisseurs du monde entier, mais aussi en renforçant l’image de Dakar en tant que capitale cinématographique mondiale. «Avec cette relance, nous souhaitons faire de Dakar un point de convergence pour les cinéastes, producteurs, distributeurs et acteurs de l’industrie cinématographique, un espace où les idées et les talents s’entrelacent dans une dynamique créative. Nous n’avons pas l’ambition de nous inscrire dans une niche particulière, mais de devenir un festival international incontournable, un rendezvous prestigieux où les films du monde entier peuvent se rencontrer et dialoguer», souligne Oumar Ndiaye, précisant que le festival aspire à célébrer le cinéma sous toutes ses formes et origines, qu’il vienne d’Afrique, d’Asie, d’Europe ou des Amériques. En tout cas, avec cette nouvelle dynamique, le Fifdak entend jouer un rôle-clé dans le rayonnement culturel de Dakar.
L’événement ne se limite pas à la simple projection de films, il ambitionne également d’être un véritable marché du film, avec des masterclass, des rencontres professionnelles et des compétitions de haut niveau. «Le Fifdak est bien plus qu’un festival de cinéma : c’est une plateforme de rencontres professionnelles, d’échanges et de collaboration entre les acteurs de l’industrie», explique son directeur. L’objectif pour lui, est de créer un écosystème où les cinéastes, qu’ils soient confirmés ou émergents, trouvent une visibilité et un soutien à la hauteur de leur talent. «Nous ambitionnons de réaffirmer Dakar comme une capitale mondiale du cinéma, un lieu où les films, quelle que soit leur origine, sont appréciés, valorisés et célébrés pour leur capacité à toucher l’âme humaine, à provoquer la réflexion et à susciter l’émotion», assure-t-il, promettant que l’édition 2026 du Fifdak sera un lieu de discussions intellectuelles, un espace pour les rencontres entre cinéastes, producteurs, critiques et journalistes. «Nous invitons tous les cinéastes, artistes et passionnés de cinéma à se joindre à nous pour célébrer le cinéma dans toute sa diversité, pour discuter, découvrir et créer ensemble. Le Fifdak est le symbole de notre engagement à faire du cinéma une passion collective, un lieu où la culture mondiale se rencontre, s’inspire et se réinvente sans frontières», conclut Oumar Ndiaye.
par Seydou Ka
SOULEYMANE BACHIR DIAGNE, UN SAGE HUMANISTE
Son grand mérite, c’est d’avoir « réconcilié » l’Islam avec la philosophie, d’avoir montré que foi et raison ne s’opposent pas, d’avoir rendu la philosophie accueillante pour la démarche spirituelle
L’Université Columbia de New York a célébré le Pr Souleymane Bachir Diagne lors d’une conférence internationale en son honneur, du 3 au 5 avril 2025. Cet événement, faisant suite à l’hommage que lui avait rendu l’Université Cheikh Anta Diop en décembre 2017, marque le couronnement d’une carrière universitaire exceptionnelle.
Après près d’un demi-siècle consacré à l’enseignement, le philosophe sénégalais prend donc sa retraite de l’université. Mais cela ne veut pas dire qu’il arrêtera toute production intellectuelle. « Ce qui va changer, me confiait-il lors de notre dernier entretien en octobre 2024 à Dakar, c’est que je n’aurai plus un emploi du temps et des enseignements réguliers à donner et des copies à corriger, (mais) je vais continuer à être présent dans ces lieux qui ont été des lieux de ma production intellectuelle et je passerai plus de temps à Dakar ».
En effet, durant sa longue carrière universitaire, le Pr Diagne a été un pont entre ces trois continents (l’Afrique, l’Europe et l’Amérique), mais aussi entre les religions et les cultures. Son œuvre est une réflexion à la croisée des disciplines et des mondes, incarnant une forme de pensée transculturelle qui traverserait les continents comme les époques en ne cessant de les mettre en dialogue. Ce n’est sans doute pas un hasard si le concept de traduction est au cœur de son impressionnante œuvre. Il a largement contribué à réhabiliter la contribution de l’Afrique et du monde musulman dans l’histoire de la philosophie. Contre ceux qui en Occident ont voulu effectuer un « nettoyage ethnique » de l’histoire de la philosophie pour éliminer l’apport des musulmans dans la « translatio stodiorum » – la transmission de la philosophie grecque à l’époque moderne – pour en faire une histoire « proprement européenne », Diagne rétablit la vérité, en montrant que loin d’être linéaire (d’Athènes, à Paris et Berlin), cette histoire fait des détours à Bagdad et Cordoue.
Ainsi, son grand mérite, c’est d’avoir « réconcilié » l’Islam avec la philosophie, d’avoir montré que foi et raison ne s’opposent pas, d’avoir rendu la philosophie accueillante pour la démarche spirituelle. En démontrant que le pluralisme est « le meilleur signe du rôle de la raison dans la religion », il a su surmonter le piège d’une raison exclusiviste et hégémonique. Comme on l’a vu dans l’histoire de l’Islam lorsque le calife abbasside Al-Ma’mun avait voulu imposer le mutazilisme à l’ensemble de la communauté. Ce qui, historiquement, a entraîné une méfiance profonde vis-à-vis du rationalisme (la philosophie) dans le monde musulman. Diagne cultive le juste milieu qui consiste à reconnaître le rôle primordial joué par la raison dans la religion islamique, et en même temps éviter le littéralisme qui nous entraîne dans l’anthropomorphisme.
Dans son ouvrage intitulé « L’islam rationnel de Souleymane Bachir Diagne » (Riveneuve, 2023, 220 pages), le philosophe guinéen Alioune Bah a montré comment le philosophe sénégalais a contribué à la « reconstruction de la pensée religieuse de l’Islam ». D’ailleurs, Diagne aime répéter que « l’Islam est une religion de la raison ». Dans un contexte de montée en puissance de l’islamophobie, de nombreux intellectuels musulmans vivant en Occident fuient le débat, un évitement qui ne fait qu’alimenter le soupçon et les invectives contre les musulmans. Lui, n’a jamais esquivé la question.
Il n’a pas peur de confronter ses idées avec d’autres intellectuels ouvertement islamophobes (Jean-Loup Amselle, Rémi Brague) pour déconstruire l’islamophobie, y compris sous sa forme dite « savante ». Mais plus que son érudition et la finesse de sa pensée, c’est l’humanisme de Souleymane Bachir Diagne qui m’a particulièrement impressionné depuis dix-sept ans que je le fréquente. Son amie Barbara Cassin a raison de le qualifier de sage. Dans un monde marqué par le retour de la haine, la brutalité et le repli identitaire, nous avons plus que jamais besoin des lumières de ce savant véritablement humaniste.
ROMPRE AVEC L’OMERTA DU ROLE MECONNU DES FEMMES AFRICAINES DANS LA LUTTE POUR L’INDEPENDANCE
L e Musée des Civilisations Noires a accueilli une projection du documentaire Les Femmes de l'Indépendance, réalisé par Diabou Bessane.
L e Musée des Civilisations Noires a accueilli une projection du documentaire Les Femmes de l'Indépendance, réalisé par Diabou Bessane. Cet événement, qui s'inscrit dans la programmation "2025, Année des Femmes Noires", a été l'occasion de mettre en lumière le rôle souvent méconnu des femmes africaines dans les luttes pour l'indépendance et leur absence criante dans les récits historiques officiels. La projection a été suivie d'un débat.
Le film de Diabou Bessane, réalisé il y a plus de dix ans, revient sur les contributions des femmes sénégalaises et africaines dans les mouvements d'indépendance. À travers des témoignages poignants et des archives rares, le film expose comment ces femmes ont milité, résisté et construit, pourtant sans reconnaissance dans les livres d'histoire. "Ce silence n'est pas une omission, c'est une violence", a déclaré Bessane lors des échanges. Elle a souligné l'importance de transmettre cette mémoire aux générations futures pour une histoire plus inclusive et juste.
DES ÉCHANGES INTERACTIFS
La séance de questions-réponses a révélé un public touché par le film et préoccupé par les enjeux de mémoire et de représentation des femmes. Plusieurs intervenants ont exprimé leur frustration face à l'absence chronique des femmes dans les récits historiques et les politiques publiques. Une participante a notamment déploré le manque de visibilité des femmes lors des célébrations officielles, comme le 65ème anniversaire de l'indépendance du Sénégal, où seulement deux femmes étaient mises en avant. Diabou Bessane a partagé les défis liés à la diffusion du film, notamment les difficultés à intégrer son contenu dans les programmes scolaires. Malgré des efforts pour le présenter dans des lycées et universités, elle a regretté le manque de soutien institutionnel. "Nous faisons ce travail à petite échelle, mais il mériterait d'être amplifié", a-t-elle expliqué, tout en annonçant travailler sur une nouvelle version du film, cette fois à l'échelle africaine.
La réalisatrice a salué l'initiative du Musée des Civilisations Noires et appelé à une mobilisation collective pour soutenir les projets mettant en avant les femmes. "Le combat pour la mémoire est politique", a-t-elle rappelé, insistant sur la nécessité de donner aux femmes les moyens de raconter leur propre histoire.
La projection s'est achevée sur une note d'optimisme. Le public a félicité Diabou Bessane pour son travail pionnier, tout en soulignant l'urgence de multiplier les initiatives similaires. Comme l'a résumé une spectatrice : "Ce film est un appel à l'action. Il est temps que les femmes ne soient plus des ombres dans notre histoire, mais des actrices visibles et célébrées."