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25 avril 2025
Développement
LE CRÉPUSCULE COMBATIF DU PAPE FRANÇOIS
Le pape François refuse de voir son autorité diminuer avec sa santé. Après avoir "frôlé la mort à deux reprises", le pontife multiplie les apparitions publiques et les décisions importantes, contrant ainsi les rumeurs d'une succession imminente
(SenePlus) - Malgré une santé fragile qui l'a obligé à alléger considérablement sa participation aux célébrations pascales, le pape François, 88 ans, montre sa volonté de rester maître de son pontificat. Comme le rapporte Le Monde dans son édition du 20 avril 2025, le souverain pontife "entend rester souverain en son royaume et seul maître du calendrier".
Dimanche 20 avril, alors que la messe pascale se déroulait sans lui sur le parvis de la basilique Saint-Pierre, le pape recevait le vice-président américain J.D. Vance dans ses appartements. Un choix de timing significatif puisque, selon Le Monde, c'est "durant cette messe, l'un des moments les plus sacrés de l'année pour les chrétiens, que les services du Saint-Siège ont choisi de diffuser un communiqué pour annoncer cette 'rencontre privée de quelques minutes'".
Après la célébration, François est apparu brièvement au balcon de la basilique, visiblement affaibli. "Chers frères et sœurs, joyeuses Pâques", a-t-il simplement pu prononcer "dans un souffle" devant les 35 000 fidèles rassemblés. La traditionnelle bénédiction urbi et orbi a dû être lue par l'archevêque Diego Ravelli.
Moins d'un mois après sa sortie de l'hôpital Gemelli, où il a "frôlé la mort à deux reprises, de l'aveu de son propre médecin", le pape multiplie les apparitions publiques. Dimanche encore, après son bref message, "il s'est offert un bain de foule, parcourant pendant une quinzaine de minutes les allées de la place à bord de sa 'papamobile'".
Pour les observateurs cités par Le Monde, cette omniprésence vise à contrer les spéculations sur sa succession. Dès 2024, François écrivait dans son autobiographie : "Pour revenir à mes hospitalisations, elles m'ont donné beaucoup de matière à réflexion, mais pendant ce temps, certains se sont davantage intéressés à la politique, à mener une campagne électorale, pensant presque à un nouveau conclave."
"S'il veut éviter que la fin de son pontificat soit polluée par ces sujets, il doit occuper le terrain", analyse un observateur du Vatican dans les colonnes du quotidien français.
Le pape François se trouve aujourd'hui face au même dilemme que ses prédécesseurs : "voir son autorité s'effilocher en même temps que sa santé, ou renoncer". La question est d'autant plus délicate que, comme le souligne le quotidien français, "le pape a exercé, durant son pontificat, un pouvoir extrêmement personnel".
Pour l'heure, selon des sources vaticanes, "la curie fonctionne principalement par inertie, dans la continuité des décisions prises ces derniers mois". Mais si le pape souhaite "continuer à s'impliquer dans le détail des dossiers, il va devoir déterminer ses priorités".
L'une d'entre elles semble être le synode sur l'avenir de l'Église, "qui vise à rendre le fonctionnement de l'Église plus inclusif et plus ouvert (aux laïques et aux femmes en premier lieu)" et dont le calendrier, s'étendant jusqu'en 2028, a été détaillé par écrit par le pontife alors même qu'il était encore hospitalisé.
Le pape montre également "une impatience parfois troublante", comme en témoigne la publication le 15 avril d'une réforme de la formation des nonces apostoliques, un sujet qui "devait être tranché dans le cadre du synode". Une précipitation que résume un observateur cité par Le Monde : "Il est pressé".
L'IRRÉSISTIBLE ASCENSION DU CAFÉ TOUBA
Du Gabon à la conquête du monde, le café Touba s'est imposé comme un pilier de l'identité sénégalaise. Rapporté par Cheikh Ahmadou Bamba en 1902, ce breuvage épicé est aujourd'hui consommé par deux Sénégalais sur trois
(SenePlus) - Devenu incontournable dans la vie sociale sénégalaise, le café Touba s'est imposé comme une véritable institution nationale. À la fois symbole culturel, opportunité économique et boisson distinctive, ce breuvage aux épices conquiert les palais bien au-delà des frontières du pays. D'après BBC Afrique, "le café Touba véritable s'est imposé au fil des années comme un élément incontournable de la culture sénégalaise".
Le café Touba tire son nom de la ville sainte fondée par Cheikh Ahmadou Bamba, figure emblématique du mouridisme. Selon BBC Afrique, "la légende raconte que c'est le fondateur du Mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba, connu aussi sous le nom de Serigne Touba, qui a rapporté le breuvage à son retour d'exil du Gabon en 1902". Plus qu'une simple boisson, il est devenu "un symbole de résilience et d'appartenance culturelle, mêlant la dévotion à la prière et la solidarité communautaire".
Ce café occupe une place centrale dans les rituels religieux, particulièrement lors du Grand Magal, pèlerinage annuel où "des millions de personnes sirotent le café qui est distribué gratuitement", souligne le média.
La particularité du café Touba réside dans sa préparation singulière. BBC Afrique précise que "la saveur distinctive du Café Touba provient de grains de café torréfiés et infusés avec du poivre de Guinée ou grains de Selim (un piment d'Afrique de l'Ouest) et des clous de girofle". Le reportage ajoute que "les vrais amateurs de café vous diront que le goût du café Touba est proche du goût d'expresso et celui du poivre de Guinée".
Préparé principalement à partir de café Robusta originaire de Côte d'Ivoire, cette boisson "contient presque deux fois plus de caféine" que l'Arabica et possède "un goût plus corsé et plus amer", indique l'article.
Le café Touba ne se limite pas à sa dimension culturelle ; il représente également une activité économique florissante. Selon les données de l'Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) citées par BBC Afrique, "cette boisson est consommée par deux Sénégalais sur trois, soit plus de 66% de la population".
L'activité génère des revenus substantiels pour de nombreux jeunes vendeurs. "C'est un business qui marche. Chaque jour, je peux avoir un bénéfice allant de 5 000 francs à 7 000 francs CFA", confie Mame, vendeur de café Touba à Bourguiba, un quartier de Dakar, interrogé par BBC Afrique.
Son accessibilité financière contribue également à sa popularité : "Dans les rues des villes sénégalaises, il n'est pas rare de croiser de jeunes vendeurs ambulants de café Touba, qui, munis d'un fourneau, d'une bouteille isotherme (thermos) et d'une pile de gobelets, proposant au passant le liquide sucré pour la modique somme de 50 francs CFA la tasse".
Concernant les bienfaits attribués au café Touba, la prudence est de mise. BBC Afrique rapporte les propos de l'Association Nutrition Alimentation au Sénégal : "À ce jour, il n'y a pas eu d'études spécifiques permettant d'affirmer qu'il y a un effet positif ou négatif du Café Touba sur l'organisme".
Madame Adama Diouf, Assistante à cette association, précise : "Le fait qu'il existe plusieurs types de café Touba préparé avec différents ingrédients font qu'il peut y avoir un effet sur l'organisme. La seule chose que tous ces cafés Touba partagent, c'est la caféine qu'ils contiennent et qui a des effets positifs comme négatifs en fonction de l'état physiologique ou pathologique de la personne".
Le poivre de selim, appelé "Jar" en wolof, est néanmoins "utilisé pour ses vertus médicinales en particulier contre la grippe, les bronchites et contre la dysenterie", note l'article.
Aujourd'hui, le café Touba transcende les frontières du Sénégal pour s'imposer comme un produit typique "made in Senegal" qui "commence à devenir un véritable produit typique", conclut BBC Afrique.
Par Babacar Faye
LES ARTISTES À L’ASSAUT DES ASSIGNATIONS
En explorant des médiums variés — photographie, vidéo, performance, installations interactives —, une nouvelle vague d’artistes ne se contente pas d’interroger les récits muséaux : elle bouscule les pratiques institutionnelles
Si son héritage colonial est tenace, le musée peut devenir un espace de vie commun et disruptif.
Souvent perçu comme déconnecté des réalités sociales, l’art possède pourtant une portée tangible qui incite à l’action. En réintégrant les femmes noires au sein de paroles plurielles, authentiques et multidimensionnelles, il joue un rôle crucial dans les efforts de décolonisation des narratifs muséaux. Longtemps enfermées dans des représentations stéréotypées, souvent marquées par des regards exotisants ou coloniaux, notamment dans les espaces muséaux occidentaux, les figures féminines noires sont aujourd’hui au cœur d’une redéfinition historique portée par des artistes contemporains. Leurs œuvres interrogent la mémoire, le genre et la résistance, et dépassent les formats d’exposition traditionnels en sollicitant activement la participation du public.
Un lieu dynamique
En explorant des médiums variés — photographie, vidéo, performance, installations interactives —, une nouvelle vague d’artistes ne se contente pas d’interroger les récits muséaux : elle bouscule les pratiques institutionnelles. Kara Walker et Zanele Muholi, par exemple, déconstruisent les stéréotypes issus des imaginaires coloniaux tout en utilisant une grammaire visuelle puissante pour révéler les violences historiques et les stigmates de l’histoire esclavagiste américaine. Muholi, en documentant la vie des femmes noires en Afrique du Sud, leur redonne visibilité et dignité.
Le musée, longtemps figé dans son rôle de conservatoire statique, devient alors un territoire dynamique et évolutif. En intégrant la création contemporaine à leurs expositions, les institutions muséales instaurent un dialogue critique entre passé et présent. L’approche intersectionnelle adoptée par plusieurs artistes complexifie également la lecture des œuvres. En collaborant avec des artistes issus des diasporas africaines et afrodescendantes, les musées peuvent remettre en question les modèles curatoriaux traditionnels, autrefois unilatéraux, au profit de processus co-créatifs. Ce dialogue entre artistes, institutions et publics enrichit leur mission éducative et sociale. Il ouvre aussi des espaces de discussion essentiels sur la justice sociale, les droits humains et la réappropriation du patrimoine culturel.
Revisiter les récits historiques
De nombreux artistes contemporains participent à la redéfinition muséale en réinterprétant l’histoire. Lubaina Himid, par exemple, revisite les récits liés aux diasporas africaines en Europe, redonnant une visibilité aux figures effacées des collections muséales, particulièrement à l’occasion de l’exposition « Thin Black Line(s) » dont elle a été la commissaire au Tate Britain, à Londres en 2011-2012. Ces démarches s’inscrivent dans une dynamique plus large de décolonisation de l’art, où les discours ignorés trouvent enfin leur place au sein d’institutions culturelles. Héritier des luttes anti-racistes des années 1960-1970, le Black Arts Movement explore les thématiques de résistance et de fierté identitaire à travers divers supports : peinture, photographie, performance. Ce courant, qui centre la femme noire comme sujet, en souligne le rôle actif dans les mouvements de transformation sociale.
Inscrit dans la dynamique du féminisme de la quatrième vague, The Intersectional Feminist Art Movement met en lumière la créativité et la richesse des voix féminines racisées, en affirmant leur autonomie et leur force politique. Certaines photographes afro-américaines comme Carrie Mae Weems réinterprètent les corps féminins noirs en les présentant comme des symboles de dignité et d’auto-détermination, en particulier dans sa série d’autoportraits « Four Women », datant de 1988. D’autres encore questionnent les pratiques muséales héritées du colonialisme, comme Faith Ringgold, notamment depuis sa participation à l’exposition collective « The Art of the American Negro » au Harlem Cultural Council en 1966.
Enfin, l’Afrofuturisme, revisite les récits historiques en imaginant des futurs où les femmes noires occupent une place centrale dans la fabrique des mondes possibles. Cette vision se matérialise dans l’exposition « A Fantastic Journey » de la Kényanne Wangechi Mutu au Brooklyn Museum en 2013, ou encore dans la série « A Haven. A Hell. A Dream Deferred », présentée au New Orleans Museum of Art par la Libério-Britannique Lina Iris Viktor en 2018. En mêlant science-fiction, mythologie africaine et esthétique futuriste, ce mouvement réinscrit la femme noire dans des utopies actives.
Tous ces courants artistiques poursuivent un même objectif : subvertir les structures coloniales et patriarcales encore présentes dans les musées et institutions culturelles, en Occident comme en Afrique, tout en révélant la puissance narrative des subjectivités féminines noires. Par ces réinterprétations, le musée cesse d’être un simple lieu de conservation : il a le potentiel de devenir un espace de transformation.
Les belles feuilles de notre littérature par Amadou Elimane Kane
ISSA SAMB DIT JOE OUAKAM, UNE ICÔNE DU MONDE DES ARTS SÉNÉGALAIS
EXCLUSIF SENEPLUS - Le grand artiste est parvenu à cet ultime paroxysme de la création et son œuvre, comme une pierre sacrée, nourrira plusieurs générations d’êtres de manière éternelle
Notre patrimoine littéraire est un espace dense de créativité et de beauté. La littérature est un art qui trouve sa place dans une époque, un contexte historique, un espace culturel, tout en révélant des vérités cachées de la réalité. La littérature est une alchimie entre esthétique et idées. C’est par la littérature que nous construisons notre récit qui s’inscrit dans la mémoire. Ainsi, la littérature africaine existe par sa singularité, son histoire et sa narration particulière. Les belles feuilles de notre littérature ont pour vocation de nous donner rendez-vous avec les créateurs du verbe et de leurs œuvres qui entrent en fusion avec nos talents et nos intelligences.
Issa Samb est sans conteste un créateur tout à fait unique dans le monde des arts du Sénégal. Eclectique et inclassable, il n’a pas cherché à composer, il a construit une œuvre qu’il a incarnée parce qu’il était à l’écoute de la vie tout simplement. Un artiste pur, authentique au sens humain qui savait dialoguer avec les autres par l’écriture, la peinture, la poésie. C’est cette alchimie qui nous est offerte dans Poto-Poto Blues.[1]
A travers un texte tout à fait étonnant dédié à Paul Lods, personnage singulier, peintre et enseignant, ami de Senghor et amoureux de l’Afrique, Issa Samb nous livre un récit où le « je » est un autre. Il raconte Pierre Lods qu’il connaît bien et s’approprie la beauté de la création artistique de son ami pour écrire un texte absolument poignant. Tout y est juste, émouvant dans la compréhension de la sensibilité de l’autre qui est aussi la sienne. Du coup, le lecteur s’élève à ce niveau de communion. La langue pour décrire les matériaux de la peinture, inspiration humaine de la nature, est splendide et possède une forte incarnation. C’est ainsi que les arts se rejoignent, il y a un réel partage de la beauté voluptueuse du monde. Lumière, couleurs, vapeurs de l’océan, drapé des tissus, ébène, cosmogonie enchanteresse, tout est rassemblé dans l’épaisseur saisissante, fascinante de l’Art Nègre.
« Lorsqu’on est l’autre, on a cet immense avantage de ne pas être trompé par les petites habitudes »[2], voici ce qui résume l’état d’esprit de Issa Samb qui se refusait toute vanité pour exprimer son art et pour vivre. C’est à travers le regard du double qu’il trouve la poétique de l’écrit, l’esthétique de la peinture, mouvement charnel, dense, il bâtit son œuvre dans le dialogue culturel qui réunit les artistes dans un monde parallèle où les frontières, les origines, les différences sont absentes. C’est un univers métaphysique, cérébral et humainement plein. « Nous devons aller ensemble à l’essentiel. A l’amitié. A la solidarité et à la fraternité. »[3]
Quel bel exemple que ce cheminement à poursuivre dans l’espoir que les hommes et le monde se transforment pour parvenir à cette grandeur humaine.
Chez Issa Samb, ce ne sont pas que des mots, il y a une authenticité palpable et déchirante dans cette déclaration à l’autre.
Courtisé par les marchands, les politiciens, Issa Samb s’est battu pour demeurer un homme libre. Selon lui, l’artiste ne doit appartenir à aucun clan, « la liberté est son [seul] parti »[4]. La lucidité qui l’accompagne tout au long de son existence en fait un homme douloureusement inconsolable. Il redoute la perte des valeurs humaines, l’absence de respect pour les morts « [qui] se suivent et ne se ressemblent pas »[5], la disparition des idéologies qui construisent un futur, l’accélération de la misère, de la terreur, de la souffrance. Il dénonce les injustices pour ceux qui mendient pour manger, « pour passer, pour travailler », et le pouvoir des finances imperméable à la douleur « des hommes squelettiques ».
C’est ainsi que l’artiste se réfugie dans la création qui ne saurait être mensongère ou habitée de calcul. Le verbe est magnifique et une esthétique flamboyante embrase les phrases de Issa Samb : « Moi, je crée le vent, le temps, je t’invente une vie avec plusieurs paliers […]. J’y pose des couleurs et attends que le hasard t’invente une réalité ».[6]
C’est cette quête de l’absolu, celle d’une humanité reconquise, qui traverse la vie, l’œuvre de Issa Samb et cela nous transporte dans une bouleversante vérité.
Cette belle justesse se retrouve dans sa poésie qui offre parallèlement une esthétique mystérieuse. La langue est d’une grande beauté naturelle, sans fard, sans maquillage. Le regard du peintre s’aiguise et les couleurs, les matières éclatent pour former une poétique singulière, « l’odeur de la poussière efface la couleur des fleurs ».[7]
Peinture, poésie, essai, théâtre, opéra, tous les arts nourrissent l’œuvre de Issa Samb car ils représentent la vie sous toutes ses formes.
Le grand artiste sénégalais est parvenu à cet ultime paroxysme de la création et son œuvre, comme une pierre sacrée, nourrira plusieurs générations d’êtres de manière éternelle.
Car l’art est indestructible, il n’est pas poussière dans le vent, il est l’expression de la vie, des particules qui peuplent la terre et les airs, de la conscience humaine et de la beauté des cœurs.
« Et le soleil répand ses lumières
Et ce sculpteur trace ses lignes molles sur ce basalte
DANS LES COULISSES DU 'PROJET NATALISTE' D'ELON MUSK
Père d'au moins 14 enfants, le milliardaire américain mènerait une mission secrète pour "ensemencer la terre avec plus d'êtres humains de haute intelligence". Il est convaincu que "la civilisation va s'effondrer" sans un redressement démographique
(SenePlus) - Selon une enquête du Wall Street Journal (WSJ) publiée le 15 avril 2025, Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, aurait eu au moins 14 enfants avec quatre femmes différentes, mais le nombre réel pourrait être bien plus élevé. Le journal américain révèle les coulisses d'une mission personnelle du milliardaire : engendrer de nombreux enfants avec des femmes qu'il estime intelligentes pour contrer ce qu'il considère comme une menace démographique.
D'après le le quotidien américain, Elon Musk est animé par une vision inquiétante : la civilisation serait menacée par le déclin démographique. "Sans bébés, il n'y a pas d'avenir, tous les problèmes deviennent secondaires par rapport au problème de ne pas avoir de personnes sur la planète", aurait expliqué Martin Varsavsky, ami de Musk et fondateur d'une grande chaîne de cliniques de fécondation in vitro aux États-Unis, qui dit avoir discuté avec le milliardaire des risques liés à la baisse des taux de natalité.
Lors d'une conférence d'investissement en Arabie saoudite l'année dernière, Musk aurait exposé l'urgence de la situation : "Je pense que pour la plupart des pays, ils devraient considérer le taux de natalité comme le plus grand problème qu'ils doivent résoudre. Si vous ne faites pas de nouveaux humains, il n'y a pas d'humanité, et toutes les politiques du monde n'ont pas d'importance", rapporte le journal.
Le Wall Street Journal explique que Musk considère ses enfants comme une "légion", en référence aux anciennes unités militaires romaines qui pouvaient compter des milliers de soldats. Selon des sources proches du milliardaire citées par le journal, il "est motivé pour corriger ce moment historique en aidant à ensemencer la terre avec plus d'êtres humains de haute intelligence".
Le média américain révèle également que Musk aurait recruté des mères potentielles sur sa plateforme de médias sociaux X, et aurait même proposé à Ashley St. Clair, une influenceuse de droite avec qui il a eu un enfant, d'avoir recours à des mères porteuses pour avoir plus d'enfants plus rapidement. "Pour atteindre le niveau de légion avant l'apocalypse", aurait-il écrit dans un message texte consulté par le Wall Street Journal, "nous aurons besoin d'utiliser des mères porteuses."
L'article du WSJ détaille également comment Jared Birchall, qui dirige le family office de Musk, gère les accords financiers et de confidentialité avec les femmes qui élèvent les enfants du milliardaire. Ashley St. Clair, 26 ans, se serait vu offrir 15 millions de dollars et 100 000 dollars par mois en échange de son silence concernant leur enfant, prénommé Romulus.
Lors d'une conversation téléphonique de deux heures en décembre, Birchall aurait conseillé à St. Clair de ne pas emprunter la "voie légale" dans ces discussions, car cela "conduit toujours, toujours à un résultat pire pour cette femme que ce qu'il aurait été autrement", selon les propos rapportés par le journal.
Le Wall Street Journal identifie plusieurs femmes qui ont eu des enfants avec Musk, dont la musicienne pop Grimes (Claire Boucher) et Shivon Zilis, une dirigeante de Neuralink, l'entreprise de Musk spécialisée dans les interfaces cerveau-ordinateur.
Selon le journal, Zilis jouirait d'un "statut spécial" auprès de Musk. Diplômée de l'Université Yale, elle "était membre fondatrice de l'équipe d'investissement de Bloomberg Beta et a figuré sur la liste 'Forbes 30 Under 30' du capital-risque en 2015", précise l'article. Elle aurait quatre jeunes enfants avec Musk, qui "passe du temps chez elle à Austin et l'emmène à des événements publics de haut niveau".
Le Wall Street Journal révèle également que Musk aurait approché l'influenceuse en cryptomonnaies Tiffany Fong pour lui demander si elle était intéressée à avoir son enfant, selon des personnes familières avec le sujet. Les deux ne se seraient jamais rencontrés en personne.
D'après le journal, Fong "n'a pas donné suite avec Musk parce qu'elle imaginait avoir des enfants dans une famille nucléaire plus traditionnelle", mais a confié cette approche à quelques amis, dont Ashley St. Clair. Lorsque Musk a appris que Fong avait divulgué sa demande à d'autres personnes, il l'aurait réprimandée pour son manque de discrétion et aurait cessé de la suivre sur X, ce qui aurait entraîné une baisse de son engagement et de ses revenus sur la plateforme.
Cette enquête du Wall Street Journal offre un aperçu rare de la vie personnelle de l'homme d'affaires, actuellement conseiller principal du président Trump et responsable du Département de l'efficacité gouvernementale, où il s'emploie à réduire le personnel et les milliards de dollars du gouvernement fédéral.
COMPRENDRE LE BAPTÊME CHRÉTIEN
Le rite fondamental qui marque l'entrée dans la vie chrétienne, pratiqué par toutes les Églises, a vu sa signification et ses modalités évoluer au fil des siècles
(SenePlus) - À l'occasion du week-end pascal, Le Monde des religions revient sur la signification et l'histoire du baptême, sacrement essentiel du christianisme célébré particulièrement en cette période de l'année.
En ce week-end de Pâques 2025, l'Église catholique de France prévoit de baptiser 10 300 adultes, un chiffre en hausse de 45% selon Le Monde. Ce rite fondamental qui marque l'entrée dans la vie chrétienne, pratiqué par toutes les Églises, a vu sa signification et ses modalités évoluer au fil des siècles, comme l'explique le journaliste Cyprien Mycinski.
Le baptême est aussi ancien que le christianisme lui-même. D'après le quotidien français, ce rite est mentionné à de nombreuses reprises dans les Actes des Apôtres qui racontent la naissance des premières communautés chrétiennes. Il trouve sa légitimité dans une injonction attribuée à Jésus dans l'Évangile de Matthieu : "Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit" (Mt 28, 19).
Jésus lui-même reçut le baptême des mains de Jean le Baptiste dans le Jourdain, un épisode relaté par les quatre évangélistes, soulignant ainsi son importance pour les premiers croyants. Selon Cyprien Mycinski, des pratiques rituelles de purification par l'eau existaient déjà dans le judaïsme antique, notamment avec le mikvé, un "bain de purification", et certains groupes comme les esséniens pratiquaient également l'immersion dans l'eau.
Le baptême, qui a fait l'objet d'une immense réflexion théologique comme le rappelle Le Monde, marque avant tout l'intégration dans l'Église : c'est par lui qu'un individu devient chrétien. Cette cérémonie signifie également que le baptisé est lavé du péché, une conception qui a longtemps fondé l'idée que ce rite était nécessaire pour être sauvé. Pour les catholiques et les orthodoxes, il constitue le premier des sept sacrements, ces rites par lesquels Dieu agit en vue du salut.
Le terme "baptême" vient du grec "baptizein" qui signifie "immerger", rappelant le geste de Jean le Baptiste plongeant Jésus dans le Jourdain, explique l'article. L'eau est donc l'élément central de ce rite. Selon Chez les catholiques et dans les Églises luthériennes et réformées, le baptême se pratique généralement par effusion, c'est-à-dire qu'un filet d'eau est versé sur la tête du baptisé par un ministre du culte. Les orthodoxes et les évangéliques préfèrent quant à eux le baptême par immersion, où le baptisé est entièrement plongé dans l'eau.
La désignation d'un parrain et d'une marraine fait également partie de la tradition dans la plupart des confessions chrétiennes, bien que cette pratique soit plus rare chez les évangéliques, précise Cyprien Mycinski. Ces personnes incarnent la parenté spirituelle du baptisé et s'engagent à le soutenir dans sa vie chrétienne.
À en croire Le Monde des religions, lors d'un baptême, il est courant que les parrain et marraine offrent à leur filleul une médaille religieuse ou une croix, souvent bénie pendant la cérémonie. Une tradition occidentale veut aussi que les invités reçoivent des dragées, ces amandes enrobées de sucre dont l'origine symbolique reste mystérieuse mais qui évoquerait la germination et donc la vie nouvelle dans laquelle entre le baptisé.
Si le baptême peut être reçu à tout âge, la majorité des chrétiens dans le monde sont baptisés durant la petite enfance. Cependant, comme l'explique l'historien Vincent Gourdon, cité par Le Monde et auteur d'une "Histoire du baptême" (Passés composés, 2024), "l'âge du baptême a beaucoup varié au fil du temps". Dans l'Antiquité, selon cet historien, il était fréquent de recevoir volontairement le baptême à la fin de sa vie afin que celui-ci "lave" tous les péchés commis.
C'est au cours du Moyen Âge que s'est imposé le baptême des jeunes enfants, célébré de plus en plus tôt. D'après l'article, dans la France catholique du XVIIIe siècle, il était obligatoire de baptiser un nourrisson dans les vingt-quatre heures suivant sa naissance, par crainte qu'un enfant mort sans baptême ne rejoigne les limbes, un lieu intermédiaire de l'au-delà, sans souffrance mais sans salut.
L'Église catholique a progressivement abandonné cette conception au cours du XXe siècle, jusqu'à faire disparaître la thèse des limbes de son Catéchisme en 1992, comme le souligne Cyprien Mycinski.
Le catéchuménat désigne la formation suivie par les adultes souhaitant recevoir le baptême. Cette pratique était très importante dans les premiers siècles du christianisme mais tomba en désuétude à mesure que le baptême des jeunes enfants se généralisait, sans jamais disparaître complètement.
Aujourd'hui, dans des pays comme la France, l'Église catholique a relancé le catéchuménat dans tous ses diocèses pour accompagner ceux qui découvrent tardivement la foi chrétienne. Cette initiation s'étale généralement sur deux années et s'achève par la réception des trois sacrements d'initiation : le baptême, l'eucharistie et la confirmation. La célébration des baptêmes d'adultes à Pâques n'est pas anodine, précise l'auteur : à l'image de la résurrection du Christ, le baptême symbolise le début d'une vie nouvelle.
Les baptêmes catholiques sont en nette baisse dans de nombreux pays occidentaux depuis les années 1960. En France, selon les chiffres le journal, alors que plus de 90% des enfants nés après la Seconde Guerre mondiale recevaient le baptême catholique, ce pourcentage est passé à 75% en 1975, 50% en 2000, pour s'établir aujourd'hui à moins de 30%. D'après les Annuaires statistiques de l'Église catholique mentionnés dans l'article, le nombre de baptêmes célébrés en France est passé de 400 327 en 2000 à 198 091 en 2022.
Cependant, si les baptêmes d'enfants diminuent, ceux d'adultes et d'adolescents augmentent, rapporte Cyprien Mycinski. De 2 958 adultes baptisés en 2012, leur nombre est passé à 7 135 en 2024, dont les trois quarts avaient moins de 40 ans. Une évolution similaire s'observe chez les adolescents, avec 5 025 baptêmes célébrés en 2024 contre 1 899 en 2018.
L'Église catholique voit dans cette tendance le signe d'une soif de spiritualité chez les jeunes générations. Toutefois, selon l'historien Vincent Gourdon cité par Le Monde, cette augmentation des baptêmes tardifs, loin de compenser la baisse des baptêmes d'enfants, s'explique surtout par le fait que "le stock de non-baptisés a considérablement augmenté au cours des dernières décennies" en France.
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L'INFLATION DÉFIE LE NGALAX PASCAL
Malgré des hausses de prix atteignant 50% sur certains ingrédients essentiels, les familles s'organisent et s'adaptent, bien décidées à ne pas laisser les contraintes économiques compromettre ce pilier du vivre-ensemble islamo-chrétien
À la veille du Vendredi saint, les familles sénégalaises ont préparé activement à célébrer Pâques avec le traditionnel ngalax, véritable symbole du vivre-ensemble entre communautés musulmanes et chrétiennes.
Le ngalax, préparation sucrée composée de pâte d'arachide, de pain de singe (bouye) et de tchakri (céréales), est devenu au fil du temps bien plus qu'un simple dessert. C'est le symbole du partage interreligieux qui caractérise le Sénégal. "On a grandi comme ça. Si c'est le ngalax, on bascule sur le ngalax, si c'est la Korité, c'est la Korité", témoigne un membre d'une famille mixte.
Malgré l'augmentation significative des coûts des ingrédients à l'approche des fêtes, la tradition perdure. Le sac de pain de singe (50 kg) est passé de 15 000 à 17 500 francs CFA, tandis que la pâte d'arachide (20 kg) a augmenté de 20 000 à 30 000 francs CFA. "Il faut avoir un grand cœur pour gérer vraiment", confie une préparatrice qui admet avoir pensé que "cette année ça n'allait pas marcher".
La confection du ngalax est devenue un rituel familial où musulmans et chrétiens se retrouvent. "Nous venons la veille chahuter, déconner et tout préparer en famille", explique l'un des participants. Ces veillées qui durent souvent jusqu'au petit matin sont des moments privilégiés d'échange et de convivialité.
Si traditionnellement chaque famille apportait son propre récipient, la pratique a évolué. Aujourd'hui, les hôtes investissent dans des pots en plastique jetables, représentant une dépense supplémentaire pouvant atteindre 100 000 francs CFA. "Moi, le plaisir c'est de le partager quand chacun vient chercher son petit 'gamel'", témoigne une cuisinière.
Malgré les difficultés économiques et l'évolution des pratiques, le ngalax reste un élément incontournable des célébrations pascales au Sénégal. "C'est une bonne tradition de partager. Chaque année on fait le ngalax impérativement", affirme un habitant. Cette préparation continue d'incarner les valeurs de partage et de cohésion sociale qui font la spécificité du modèle islamo-chrétien sénégalais.
À l'heure où les défis économiques pèsent sur les ménages, le ngalax demeure un rappel puissant de l'importance du vivre-ensemble et de la préservation des traditions qui unissent plutôt que de diviser.
par Salla Gueye
LA MORALE CONFINÉE
Ce qui s’éclaire dans cette affaire de fonds Covid dépasse la simple mécanique d’un détournement de fonds publics. C’est une trahison. Pendant que l’on creusait les tombes pour nos dépouilles, certains creusaient leurs comptes bancaires
Ils sont 27. Arrêtés en moins de 48 heures par la Division des investigations criminelles. 258 millions de FCfa déjà recouvrés. Une goutte dans l’océan des milliards engloutis, si l’on se fie au rapport de la Cour des comptes. À mesure que les révélations tombent, une nausée monte.
Car ce qui s’éclaire dans cette affaire dépasse de loin la simple mécanique d’un détournement de fonds publics. C’est une trahison. Une profanation de la douleur d’un peuple. Le fonds Force-Covid-19, lancé en mars 2020, devait être notre rempart collectif face à l’effondrement. Financé par l’État, par des partenaires internationaux, mais aussi – et surtout – par la foi des Sénégalais en leurs institutions, il incarnait une promesse : celle que la République tiendrait bon dans la tempête. Celle que personne ne serait abandonné. Qu’il y aurait des masques, des lits, de l’oxygène, des secours. Que le pays serait protégé. Mais pendant que l’on creusait les tombes pour nos dépouilles, certains creusaient leurs comptes bancaires.
Pendant que des médecins s’effondraient de fatigue et que des familles regardaient mourir les leurs à distance, eux facturaient en trop, détournaient en douce et justifiaient en moins. Qui sont-ils ? Des fonctionnaires. Des figures de l’administration. Parfois des artistes, des communicateurs, des influenceurs. Tous ceux qui, au lieu de prêter main-forte à la nation, ont choisi de tendre la main… pour se servir. L’audit de la Cour des comptes fut accablant. L’enquête du parquet l’est tout autant. Ce qui s’est joué ici, ce n’est pas une simple fraude. C’est une rupture de contrat moral entre l’État et ses citoyens. Un acte de forfaiture en pleine tragédie. Car ces milliards détournés ne sont pas qu’un chiffre. Ce sont des soins qui n’ont pas été donnés, des vies qui n’ont peut-être pas été sauvées, des espoirs enterrés avec les corps. C’est en quelque sorte la morale qui semblait être enfermée pendant que les abus circulaient librement.
Aujourd’hui, il ne s’agit pas de crier à la vindicte. La justice suit son cours. Mais ce cours-là doit être sans complaisance. Il ne peut y avoir de « chèque de sortie » là où il y a eu vol du bien commun. Il ne peut y avoir d’arrangements discrets là où il y a eu mise en péril d’une nation. Ceux qui ont confondu crise sanitaire et opportunité financière devront rendre des comptes. En droit. Mais aussi en mémoire. Car si l’argent se restitue, la confiance, elle, ne se récupère pas facilement. Cette affaire, qui remue l’opinion publique, doit devenir un précédent. Pas seulement pour sanctionner, mais pour transformer. Le Sénégal ne peut plus tolérer que l’argent public soit un butin à se partager selon les urgences du moment où les amitiés de circonstance. La transparence ne peut plus être un slogan : elle doit être une règle.
Une exigence. Une nouvelle culture. Pendant la pandémie, environ 2.000 Sénégalais sont morts. Derrière chaque chiffre, un nom. Une mère. Un frère. Un enfant. Une promesse brisée. C’est pour eux que la vérité doit éclater. C’est pour eux que la justice doit être implacable. C’est pratiquement connu de tous : malheureusement, dans nos sociétés modernes, le devoir moral est devenu une monnaie de propagande, vidé de sa substance et recyclé à l’infini pour servir des intérêts qui n’ont plus rien d’éthique. Ce qui hier relevait de la conscience, aujourd’hui relève de la communication. Le devoir moral n’est plus vécu, il est affiché.
On ne l’incarne plus, on le vend. Ce pillage du devoir moral consiste à utiliser les symboles de la vertu pour masquer l’absence de véritable engagement. À transformer la responsabilité en posture. À parler de solidarité sans jamais en payer le prix. Il ne s’agit plus de faire le bien, mais de paraître bon. Ce que nous attendons aujourd’hui, ce n’est pas un simple procès. C’est une réponse morale. Une réponse politique. Une réponse citoyenne. Pour que plus jamais, dans les heures les plus sombres de notre histoire, les mains tendues vers l’État ne se referment sur du vide.
PAR Mamadou Ndione
LES CONFRÉRIES, PILIERS MÉCONNUS DU FINANCEMENT SOLIDAIRE
À travers des mécanismes de financement communautaire, un accompagnement spirituel continu et une médiation efficace des conflits, ces institutions traditionnelles façonnent un entrepreneuriat unique
Au Sénégal, la religion occupe une place centrale dans la vie socio-culturelle et les acteurs religieux un rôle de plus en plus visible dans le développement économique local. En particulier, leur implication dans les activités entrepreneuriales constitue un levier important pour de nombreux Sénégalais, notamment ceux issus de milieu modeste ou exclus des circuits classiques de financement.
Les confréries religieuses telles que les Tidjanes et les Mourides, les dahiras (groupe religieux ou association spirituelle à caractère musulman) et les leaders spirituels ne se contentent plus d’un rôle moral ou spirituel. Ils interviennent activement dans le soutien matériel, organisationnel et psychologique des initiatives économiques. Ils n’ont plus de fait ce statut d’observateurs passifs. Cet apport se manifeste sous différentes formes : financements communautaires, accompagnement spirituel et médiation en cas de conflit.
En tant que chercheur, j'ai étudié les dynamiques entrepreneuriales au Sénégal, notamment l'impact des acteurs culturels et religieux dans le secteur informel, ainsi que sur les mécanismes de gouvernance au sein des PME sénégalaises. J'explique ici comment les confréries islamiques sont devenues des piliers de l'économie du pays.
Le financement communautaire et solidaire
Dans un contexte où l’accès aux financements bancaires reste limité pour la majorité des entrepreneurs sénégalais, les communautés religieuses offrent des alternatives inclusives et accessibles. Les mécanismes de financement communautaire reposent principalement sur des cotisations volontaires, des dons, et parfois des prêts sans intérêt, dans le respect des principes de solidarité et de justice sociale prônés par les enseignements religieux, notamment l’islam.
Ces formes de financement sont le plus souvent organisées au sein des dahiras, des cercles religieux informels où les membres cotisent régulièrement. Les fonds collectés servent à soutenir les projets économiques des membres, en particulier les jeunes qui n'ont pas toujours les garanties exigées par les banques classiques. Il ne s'agit pas uniquement d'argent prêté, mais aussi d’un engagement collectif dans lequel la réussite de l’un est vue comme bénéfique pour tous.
En plus des cotisations, les dons de la diaspora jouent un rôle considérable. De nombreux Sénégalais établis à l’étranger envoient régulièrement de l’argent à leurs dahiras pour financer des projets communautaires ou individuels. Certains guides religieux, très influents, mobilisent également leurs fidèles autour de levées de fonds ponctuelles, souvent lors d’événements religieux.
Enfin, dans certains cas, les prêts sans intérêt sont proposés, notamment pour respecter le principe islamique de non-usure (riba). Ces prêts, souvent symboliques au départ, permettent de démarrer une activité génératrice de revenus. La confiance, la transparence et l’honnêteté sont essentielles, car le remboursement repose avant tout sur l’honneur, la dignité et la responsabilité morale de l’entrepreneur envers sa communauté.
Au Sénégal, les mécanismes de financement communautaire organisés par les dahiras échappent en grande partie à la régulation formelle de l’État. Celui-ci adopte à leur égard une attitude de non-intervention directe dans la mesure où ces pratiques sont perçues comme relevant de la solidarité communautaire. A notre connaissance, il n’existe à ce jour aucune taxation spécifique sur ces opérations, et elles échappent pour l’essentiel aux circuits fiscaux officiels.
Cette tolérance de fait s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, les dahiras jouent un rôle social important. Ensuite, le poids religieux et politique des confréries au Sénégal rend toute tentative de régulation particulièrement sensible. Une intervention directe de l’État pourrait être perçue comme une atteinte aux grandes confréries religieuses, dont l’influence sur la société sénégalaise est considérable.
Enfin, les capacités limitées de contrôle fiscal dans l’économie informelle rendent difficile une surveillance systématique de ces circuits de financement.
Accompagnement spirituel et psychologique
Au-delà du soutien financier, les acteurs religieux offrent un accompagnement spirituel et psychologique essentiel à la résilience des entrepreneurs face aux nombreuses incertitudes économiques. L'entrepreneuriat au Sénégal est un parcours semé d'obstacles : accès limité aux ressources, concurrence étrangère quasi permanente, instabilité des marchés, et parfois échec pur et simple. Dans ce contexte, la dimension spirituelle devient un soutien moral déterminant.
Les guides religieux et responsables communautaires jouent alors un rôle de mentorat spirituel. Ils enseignent des valeurs de patience, de persévérance, d’humilité, de résilience face à l’épreuve, tout en rappelant que la réussite comme l’échec font partie du destin divin. Cette lecture religieuse permet de relativiser les difficultés et de maintenir une motivation intacte, même en cas de revers.
Par ailleurs, les entrepreneurs issus des confréries sont souvent accompagnés dès leur jeune âge à travers des rituels d’apprentissage religieux (apprentissage du Coran, formation à la morale islamique). Ces parcours renforcent non seulement leur endurance psychologique, mais aussi leur discipline personnelle, leur sens de responsabilité et leur capacité à gérer les pressions extérieures. En cas d’échec, le soutien de la communauté évite l’isolement social souvent néfaste, ressenti dans les parcours entrepreneuriaux plus individualisés.
Enfin, des rencontres collectives sont régulièrement organisées au sein des dahiras pour échanger, prier ensemble, et partager les expériences, y compris les difficultés entrepreneuriales. Ces espaces de parole renforcent la solidarité entre les membres et permettent de rebondir plus facilement après un échec.
Médiation et gestion des conflits économiques
Dans les PME sénégalaises, notamment celles issues des dynamiques communautaires, les conflits économiques sont fréquents. Il peut s’agir de mésententes entre associés, de litiges liés aux remboursements de dettes, ou encore de conflits de gestion. Dans ces situations, les acteurs religieux interviennent souvent comme médiateurs ou arbitres.
Grâce à leur légitimité morale et spirituelle, les chefs religieux ou les figures respectées de la communauté peuvent intervenir rapidement pour rétablir la paix sociale, éviter les procédures judiciaires coûteuses, et proposer des solutions négociées. Leur autorité n’est pas coercitive, mais repose sur la confiance et le respect des normes sociales et religieuses. Leur intervention est généralement acceptée de bonne foi par les parties concernées.
Ces mécanismes de médiation sont d’autant plus efficaces qu’ils s’inscrivent dans un cadre de gouvernance transversale, mêlant règles formelles et informelles, comme cela a été mis en évidence dans une étude sur la gouvernance des PME au Sénégal. Ils permettent une cohabitation harmonieuse entre échanges économiques et valeurs communautaires.
De plus, cette médiation n’est pas seulement curative ; elle peut aussi être préventive. Dans de nombreuses confréries, avant même le démarrage d’un projet, des discussions collectives ont lieu pour cadrer les responsabilités, définir les objectifs, et prévenir les risques de malentendus. En cas de désaccord, un responsable est désigné pour écouter, trancher et proposer des solutions pacifiques.
L’apport des acteurs religieux à la dynamique entrepreneuriale au Sénégal ne se limite pas à un rôle spirituel passif. Au contraire, ils se positionnent comme de véritables acteurs économiques, garants de la cohésion sociale, facilitateurs de financement, soutiens psychologiques, et médiateurs de proximité.
Il n’existe pas de base de données nationale recensant précisément le nombre de bénéficiaires de ces financements religieux. Les pratiques sont informelles, décentralisées, communautaires, donc peu documentées par les structures étatiques ou bancaires.
Dans un pays où les institutions formelles sont encore perçues comme éloignées ou inaccessibles par une large partie de la population, leur rôle constitue un complément essentiel aux dispositifs publics et aux mécanismes classiques de l’économie de marché. À travers leurs actions, c’est une forme de gouvernance alternative qui s’installe, plus souple, plus proche des réalités locales, et souvent plus efficace pour soutenir les entrepreneurs dans leur parcours.
L’aide fournie par les cercles religieux, notamment les dahiras, peut à la fois représenter une alternative à l’émigration économique pour certains, tout en servant de levier financier pour des projets migratoires bien structurés pour d'autres.
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LES CINQ OBSTACLES À LA MISE EN ACCUSATION DE MACKY SALL
L'initiative de Guy Marius Sagna serait-elle mort-née ? C'est ce que suggère le journaliste et expert judiciaire Daouda Mine, qui pointe du doigt plusieurs entorses au règlement intérieur de l'Assemblée nationale et à la Constitution
Le journaliste et chroniqueur judiciaire Daouda Mine a relevé plusieurs irrégularités dans la proposition de mise en accusation de l'ancien président Macky Sall, initiée par le député Guy Marius Sagna. Lors de son intervention dans l'émission "Ultimatum" de Seneweb, l'expert a décortiqué les failles juridiques et procédurales qui pourraient compromettre cette démarche.
Selon Mine, le règlement intérieur de l'Assemblée nationale constitue le premier obstacle majeur. "L'article 91 stipule clairement que les résolutions sont présentées uniquement par l'une des commissions, et non par un député à titre individuel", explique-t-il. Cette disposition rendrait donc la proposition de Guy Marius Sagna irrecevable en l'état.
Le spécialiste des questions judiciaires a également souligné l'exigence d'une majorité qualifiée pour ce type de procédure. "Pour mettre en accusation un président de la République, il faut l'approbation des trois cinquièmes des députés composant l'assemblée, soit 99 députés sur les 165, et non une simple majorité comme certains le pensent", précise-t-il.
La qualification juridique des faits pose également problème. "Le concept de trahison invoqué n'est pas clairement défini dans la législation sénégalaise. Depuis l'indépendance, aucun président n'a été jugé pour trahison au Sénégal", observe Mine, qui s'interroge sur la capacité des magistrats à qualifier ces faits en l'absence de jurisprudence nationale.
Par ailleurs, le chroniqueur note l'absence de fondements probatoires solides : "Aucun rapport officiel, comme celui de l'Inspection Générale d'État, ne cite explicitement le président dans les accusations portées."
Enfin, Daouda Mine met en lumière une confusion institutionnelle dans la démarche : "Il existe un flou sur la répartition des rôles entre l'Assemblée nationale, qui propose la mise en accusation, et la commission d'instruction de la Haute Cour de Justice, qui est chargée d'instruire le dossier."