SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
26 avril 2025
Diaspora
SOULEYMANE BACHIR DIAGNE, LE PHILOSOPHE QUI A CONQUIS L'AMÉRIQUE
L'université Columbia a organisé un hommage à la hauteur de la carrière du natif de Saint-Louis. Après 15 ans sur ce campus d'élite, ce penseur qui a révolutionné les études françaises en y intégrant une dimension africaine ferme un chapitre de sa vie
(SenePlus) - L'université de Columbia à New York a rendu un hommage exceptionnel au philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne, qui termine sa carrière d'enseignant-chercheur après plus de quinze ans sur ce prestigieux campus américain. Pendant trois jours, ce penseur majeur originaire de Saint-Louis a été célébré lors d'une série de conférences et d'échanges intellectuels qui ont réuni plus de trente intervenants de renom, rapporte RFI.
"Cet hommage est tout naturel pour un grand professeur, un grand intellectuel qui apporte énormément dans plusieurs champs, et on voulait respecter cette tradition pour Souleymane, qui laisse un héritage immense à Columbia", a expliqué Emmanuelle Saada, responsable du département de français de l'université, citée par RFI.
Entouré de sa famille venue en grande partie de Dakar et de nombreux collègues universitaires, le philosophe a participé à des discussions embrassant une vaste gamme de disciplines, de l'histoire à la philosophie, en passant par la sociologie, le français et les religions. Une diversité qui reflète parfaitement l'approche intellectuelle de Diagne.
"C'est quelque chose qui est très marqué dans la culture universitaire américaine et je pense que cela amène de nouvelles dimensions au débat, car on demande, on analyse des sujets sur plusieurs angles, par différents types de personnes qui sont spécialistes dans des domaines différents", s'est réjoui le penseur sénégalais lors de l'événement.
L'impact de Souleymane Bachir Diagne sur ses étudiants est profond et durable. Martina, actuellement doctorante en philosophie à UCLA, témoigne avec émotion : "Je suis tout de suite devenue passionnée par ses cours, par son approche, mais aussi par la manière dont il analyse les phénomènes de société. En moins d'un mois, j'ai compris que je voulais emprunter la voie de la recherche en philosophie".
Son influence s'étend bien au-delà des frontières américaines. Mouhamadou El Hady Ba, responsable du département de philosophie à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar, raconte comment sa rencontre avec Diagne a changé sa trajectoire : "En 1996, j'ai obtenu le concours général de philosophie au Sénégal, alors que je m'apprêtais à faire de l'économie à la suite d'études en sciences. Bachir m'a rencontré et m'a félicité, et m'a conseillé de poursuivre la voie philosophique plutôt que de faire de l'économie. Je ne l'ai jamais regretté !"
Il décrit Diagne comme "un pionnier africain qui impacte à l'international, dont l'influence sans frontières inspire aussi le continent et sa jeunesse par son parcours formidable et ses réflexions toujours si constructives".
À l'aube de ses 70 ans, Souleymane Bachir Diagne ne considère pas cette étape comme une fin mais comme une transition. "Je ferme la boucle du troisième chapitre de mon parcours philosophique, rempli d'émotions, et avec le sentiment du devoir accompli", a-t-il déclaré avec son sourire caractéristique.
Le philosophe garde une affection particulière pour ses années à Columbia : "J'ai passé de superbes années ici, des années heureuses. Des années décisives pour ma carrière, aussi, car les publications et les travaux que j'ai réalisés ici ont eu un impact sans commune mesure avec les précédents travaux que j'avais réalisés".
Loin de prendre sa retraite, Diagne a déjà planifié ses prochaines activités intellectuelles : "Je ne m'arrête pas ! Je ne vais pas avoir de journées vides, c'est certain. Je travaille sur trois ouvrages, et je suis invité à plusieurs séminaires dans les mois à venir, dont un à Cambridge. Je vais aussi pouvoir passer plus de temps à Dakar, ce qui est toujours un plaisir immense".
Selon RFI, cet hommage marque non seulement la fin d'un chapitre pour le philosophe sénégalais, mais souligne également l'importance de sa contribution aux études françaises et à la pensée philosophique contemporaine, enrichies par sa perspective africaine et son approche résolument interdisciplinaire.
LA MORT D'UN SÉNÉGALAIS ENFLAMME LA RUE AU BRÉSIL
Le ministère sénégalais des Affaires étrangères annonce l'ouverture d'une enquête pour faire la lumière sur ce drame qui aurait impliqué une intervention policière violente durant une opération contre des vendeurs ambulants
Le ministère sénégalais de l’Intégration Africaine et des Affaires Étrangères a confirmé la mort d’un citoyen sénégalais à São Paulo. Une enquête a été ouverte pour déterminer les circonstances du drame qui aurait impliqué une intervention policière violente.
La ministre sénégalaise de l’Intégration Africaine et des Affaires Étrangères, Yassine Fall, a publié un message de condoléances suite au décès d’un ressortissant sénégalais au Brésil.
Dans ce communiqué officiel daté du 12 avril 2025, la ministre exprime «avec tristesse et consternation» avoir été informée du «décès tragique» de Ngagne Mbaye, survenu à São Paulo le vendredi 11 avril 2025.
«En cette douloureuse circonstance, je tiens à exprimer, au nom du Gouvernement du Sénégal, mes condoléances émues à la famille du défunt, à la communauté sénégalaise résidant au Brésil, ainsi qu’à l’ensemble de nos compatriotes de la diaspora», déclare la ministre dans son message.
Le communiqué précise également que «les démarches sont entreprises, via notre représentation diplomatique pour faire la lumière sur les circonstances de ce drame», suggérant qu’une enquête est en cours pour déterminer les causes exactes du décès.
Violence policière présumée et manifestations
Les circonstances du décès, non détaillées dans le communiqué officiel sénégalais, seraient liées à une intervention policière selon des informations locales. Ngagne Mbaye aurait été abattu par un policier lors d’une opération de confiscation de marchandises visant des vendeurs ambulants dans le quartier du Brás à São Paulo.
D’après des témoins cités par des médias brésiliens, la victime tentait de défendre une collègue âgée lorsqu’une altercation a éclaté avec les forces de l’ordre. Il aurait été d’abord frappé avec un bâton par un policier avant de répliquer avec une barre de fer, ce qui aurait conduit à l’usage d’une arme à feu par l’agent de police.
Une manifestation organisée le samedi 12 avril pour protester contre cette mort a dégénéré, la police militaire ayant utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants.
Le Centre de droits humains et de citoyenneté des immigrés a dénoncé dans un communiqué ce qu’il considère comme une nouvelle manifestation de violence policière ciblant spécifiquement «un homme noir, migrant et travailleur», et réclame une enquête transparente ainsi que des sanctions.
Les autorités brésiliennes ont annoncé que le policier impliqué a été relevé de ses fonctions et que son arme a été saisie dans le cadre de l’enquête en cours.
SAINT-LOUIS, TERRE DE PATRIMOINES
Son architecture coloniale unique côtoie les richesses naturelles du Djoudj et la tradition culinaire du "Ceebu jën", symbolisant l'alliance parfaite entre patrimoine bâti, environnemental et immatériel que les autorités s'efforcent de préserver
En évoquant Saint-Louis, on pense à ses potentialités touristiques, sa diversité culturelle. Mais aussi son patrimoine historique et ses fantastiques trésors architecturaux qui ont valu à l’île son inscription, en 2000, après le Parc national des oiseaux du Djoudj en 1981, sur la liste emblématique des trésors de l’humanité. En 2021, l’Unesco a encore enrichi la liste de merveilles mondiales dans le nord du pays en y ajoutant le « Ceebu Jën ».
En 2025, le Sénégal compte huit biens inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. Ce qui lui permet d’occuper une place importante en Afrique. Parmi ces trésors, trois se trouvent dans la région de Saint-Louis dont les potentialités touristiques attirent, chaque année, de nombreux touristes en quête de découvertes et de sensations. Aujourd’hui, vieille de plus de 350 ans, l’ancienne capitale de l’Afrique occidentale française (Aof), qui se trouve entre le présent et le passé, recèle d’un patrimoine architectural riche d’une grande diversité de formes. L’île présente un ensemble urbain, architectural, historique et culturel parmi les plus remarquables de l’Afrique de l’Ouest. Ses valeurs architecturales et son rôle dans la formation des élites politiques en Afrique de l’Ouest ont été mis en avant pour la classer au Patrimoine mondial de l’Humanité en 2000, après un premier classement en 1976 comme secteur sauvegardé par le président Léopold Sédar Senghor.
Aujourd’hui, le visiteur ne peut s’empêcher de suspendre son regard aux balcons en bois ciselé qui se détachent des façades de nombreuses maisons et bâtiments de l’île. Mais, avec les vicissitudes du temps, Saint-Louis subit un dépérissement de son cadre bâti et le vieillissement de son patrimoine est devenu une réalité indéniable. Car, malgré l’adoption du Plan de sauvegarde et de mise en valeur (Psmv) élaboré et approuvé par décret présidentiel n°2008-694, qui avait réussi à le sauver d’une inscription sur la liste du patrimoine en péril, la lutte pour la sauvegarde du patrimoine est loin d’être gagnée. La mise en œuvre du Programme de développement touristique (Pdt) conjuguée aux efforts de la gouvernance concertée pour la gestion du patrimoine pourrait redonner à la ville tricentenaire un nouveau souffle. Parc national des oiseaux du Djoudj et le « Ceebu jën » À Saint-Louis, se trouve également une autre merveille qui promet une expérience unique et inoubliable : le Parc national des oiseaux du Djoudj. Situé à environ 60 kilomètres de Saint-Louis, ce site exceptionnel, avec ses 16.000 hectares de zones humides riches en biodiversité, est l’une des réserves ornithologiques les plus importantes du monde. Reconnu en patrimoine mondial par l’Unesco depuis 1981, ce havre de paix pour les oiseaux migrateurs du Paléarctique, est un sanctuaire vital pour la nidification des pélicans blancs, hérons pourprés et bihoreaux, des grands cormorans, des spatules d’Afrique, des grandes aigrettes, entre autres.
Depuis décembre 2021, le « Ceebu jën » (riz au poisson) est devenu le 8e bien sénégalais classé. En ajoutant cette nouvelle inscription à sa prestigieuse liste, l’Unesco reconnaît la valeur exceptionnelle de ce plat ancestral rebaptisé « Jollof rice » au Ghana et au Nigeria et des savoirs, pratiques et savoir-faire qui l’entourent. Après des années de persévérance, le Sénégal a réussi à inscrire au patrimoine culturel immatériel de l’humanité ce patrimoine culinaire qui s’est ouvert à l’universel. Dans leur ouvrage « Ceebu jën, un patrimoine bien sénégalais » (Harmattan, 74 pages), Fatima Fall Niang et Alpha Amadou Sy, respectivement spécialiste en conservation préventive et philosophe, retracent le long itinéraire de cette spécialité qui ravive à la fois les yeux et l’estomac et devenue, par la force des choses, symbole de multiculturalisme et d’universalisme. Ce livre est une invite à préserver ce patrimoine immatériel bien sénégalais dans ses vertus et ses richesses, pour assurer sa transmission aux générations futures. Avec le label Unesco, symbole de la beauté et de l’importance historique, ces trois merveilles, mieux promues, pourraient permettre d’attirer davantage de touristes à la recherche de nouvelles aventures et de nouvelles sensations.
UN VOTE DE CONFIANCE POUR L'ÉCONOMIE SÉNÉGALAISE
Le pays vient de réaliser une performance financière exceptionnelle sur le marché sous-régional, mobilisant 405 milliards de FCFA, soit près du triple de l'objectif initial. Une opération clôturée avant même l'échéance prévue
Le Sénégal vient de boucler avec succès une importante opération financière sur le marché sous-régional. En moins d’une semaine, le pays a mobilisé 405 milliards de FCFA à travers un emprunt obligataire par appel public à l’épargne, soit près de trois fois le montant initialement recherché de 150 milliards FCFA. L’opération, portée par Invictus Capital & Finance, a été clôturée de manière anticipée, bien avant l’échéance prévue du 18 mars 2025.
Un succès retentissant pour Invictus Capital & Finance
La société de gestion et d’intermédiation (SGI) Invictus Capital & Finance, cheffe de file et arrangeur principal de l’opération, a joué un rôle central dans cette levée record. Grâce à une stratégie de placement rigoureuse et une coordination efficace, elle a permis une sursouscription massive en un temps record, traduisant la performance de l’équipe et l’attractivité de l’offre proposée.
Une forte adhésion des investisseurs, reflet de la confiance dans l’État
Institutions financières, compagnies d’assurances, banques, mais aussi de nombreux particuliers ont répondu massivement à l’appel du Trésor public. Dans un contexte mondial pourtant tendu — entre inflation persistante, incertitudes géopolitiques et volatilité des marchés — la signature souveraine du Sénégal continue d’inspirer confiance. Cette affluence des souscriptions illustre la solidité perçue de l’économie sénégalaise et la crédibilité des autorités financières.
Une opération inscrite dans une stratégie globale
Ce succès marque le début d’un programme de mobilisation de ressources plus vaste. Deux autres émissions obligataires sont attendues au rythme d’une par trimestre, pour un objectif global annuel estimé à 6.000 milliards FCFA. Ces ressources serviront à financer des projets majeurs dans les domaines des infrastructures, de l’énergie, du numérique, de la santé et de l’industrialisation. Ce programme s’inscrit dans la dynamique du nouveau référentiel de politique économique et sociale du Sénégal, fondé sur la transformation structurelle, la résilience et la justice sociale.
Vers une démocratisation de l’investissement et de l’épargne
Au-delà de la performance financière, cette opération témoigne aussi d’un tournant vers une inclusion financière accrue. L’élargissement de la base des souscripteurs, facilité par la digitalisation des processus et une meilleure vulgarisation des produits financiers, traduit l’émergence d’une nouvelle culture économique. Une culture où les citoyens prennent part activement au financement du développement national.
Le Sénégal démontre ainsi qu’il est non seulement capable de mobiliser rapidement des ressources significatives, mais aussi de bâtir une économie plus résiliente, inclusive et tournée vers l’avenir.
L'AMBITIEUX PLAN POUR RÉVOLUTIONNER L'HABITAT
Plus de la moitié du salaire part dans le loyer : une réalité insoutenable pour les Sénégalais. Moussa Bala Fofana dévoile un plan de 18 000 hectares à travers le pays pour transformer l'accès à la propriété et libérer le pouvoir d'achat des citoyens
(SenePlus) - Un Sénégalais moyen consacre plus de la moitié de ses revenus à se loger. Face à cette situation préoccupante, le gouvernement lance un programme d'envergure visant à construire 500 000 logements sur les dix prochaines années. Analyse d'une initiative qui pourrait transformer le paysage immobilier du pays.
Selon les déclarations du ministre de l'Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l'Aménagement des territoires, Moussa Bala Fofana, la situation actuelle du logement au Sénégal représente un défi majeur pour les ménages. Lors de la présentation du Programme national d'accès au logement et de rénovation urbaine (PNALRU), le ministre a révélé un chiffre alarmant : "Un Sénégalais, peu importe son niveau de revenus, donne minimum 54% de ses revenus pour payer un loyer", a-t-il affirmé.
Cette proportion dépasse largement les standards internationaux recommandés, qui suggèrent qu'un ménage ne devrait pas consacrer plus de 30% de ses revenus au logement. Le ministre a souligné l'importance cruciale de réduire cette charge financière : "Voilà l'importance aujourd'hui de ramener cela dans des proportions acceptables. Et chaque effort que nous ferons dans le domaine du logement permettra à un Sénégalais de mieux vivre."
L'accès à la propriété représenterait une véritable libération financière pour de nombreux Sénégalais. M. Fofana a expliqué : "Parce que si quelqu'un payait 50% de ses revenus dans le loyer et qu'il devient propriétaire, c'est 50% de ses revenus qui vont aller dans sa santé, dans l'éducation des enfants, dans l'épargne, dans la qualité de vie."
Au-delà de l'impact direct sur les ménages, le ministre a également mis en avant les retombées macroéconomiques attendues : "Et c'est aussi autant d'argent qu'on va investir dans notre économie. Parce que le bâtiment, nous ne l'oublions pas, c'est un secteur de l'économie qui a un rôle important à jouer en termes de taux de croissance."
Pour répondre à ces défis, le gouvernement a élaboré un ambitieux programme baptisé "Pénal Rue" (PNALRU). Son objectif principal est clairement défini : "L'objectif clairement fixé ici, c'est donc d'atteindre 500 000 logements à 10 ans", a précisé le ministre.
Le PNALRU s'appuie sur plusieurs données quantitatives impressionnantes :
18 000 hectares identifiés à travers le territoire national
4 000 hectares ciblés à la sortie 5 de l'autoroute Illa-Touba pour une zone industrielle du bâtiment
500 000 logements à construire sur une période de 10 à 15 ans
13 chefs-lieux de région concernés par le projet d'extension, plus Mbour et Touba
Contrairement aux programmes précédents qui ont souvent échoué faute de financement adéquat, le PNALRU propose un modèle économique autonome. Le ministre a expliqué cette nouvelle approche : "Avant, nous demandions à l'État de financer les verdes. Vous imaginez, si nous devons construire, je dirais, 10 000 hectares et on demande à l'État de financer les verdes, c'est quelque chose que l'État ne pourra pas supporter."
Cette réflexion est d'autant plus pertinente dans le contexte économique actuel du Sénégal, caractérisé par "un déficit de plus de 12%, d'un endettement à plus de 100% et d'une tension trésorerie qui ne fait plus débat", selon les propos du ministre.
La solution adoptée repose sur un partenariat avec des promoteurs privés : "Les promoteurs qui vont accepter d'investir dans ce programme auront du foncier, mais 50% du foncier vont être dédiés à leur propre programme, ce qui va leur permettre de pouvoir assurer leur modèle économique et de prendre en charge la viabilisation."
Le ministre a également mentionné la mobilisation de nombreux acteurs pour soutenir ce programme : "Pour la mise à contribution des baillères publiques et des fonds dédiés à l'habitat social, le Pénal Rue a été présenté à la Caisse des dépôts et consignations, CDC, à la Banque de l'Habitat, à l'APIX, au Consortium des industriels du Sénégal, à l'Ordre des architectes, au secteur bancaire et à d'autres établissements financiers du secteur du logement."
AU PROCÈS SARKOZY-LIBYE, BEAUCOUP DE SOUPÇONS, PEU DE PREUVES
Entre carnets compromettants, dîners secrets et exfiltrations rocambolesques, l'accusation a décrit un système sophistiqué qui reste à qualifier juridiquement dans le cadre de l'affaire du financement libyen de la campagne de l'ex-président français
(SenePlus) - Après trois mois d'audiences, le procès des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 s'est terminé mardi 8 avril. Le jugement ne sera rendu que le 25 septembre.
Les douze prévenus, dont l'ancien chef de l'État, font face à des accusations de corruption, trafic d'influence et détournement de fonds publics, pour lesquelles ils risquent jusqu'à dix ans d'emprisonnement. Tous réclament la relaxe, arguant de l'absence de preuves formelles.
"Il n'y a pas que la preuve documentaire", a rappelé la présidente Nathalie Gavarino. "La preuve peut résulter d'un faisceau d'indices, d'un ensemble d'éléments, parmi lesquels des témoignages", précise Le Monde.
Parmi les éléments troublants figure le carnet de Choukri Ghanem, ancien ministre libyen du pétrole retrouvé mort dans le Danube en 2012. Une note datée du 29 avril 2007 y mentionne : "Bechir a parlé, disant avoir envoyé 1,5 million d'euros à Sarkozy quand Saïf donnait 3 millions à Sarkozy."
L'enquête a établi que Claude Guéant, directeur de cabinet de Sarkozy au ministère de l'Intérieur, avait reçu un demi-million d'euros d'origine libyenne pour l'achat d'un appartement parisien, via un montage financier complexe.
Trois épisodes embarrassent particulièrement la défense : le dîner de Guéant avec Abdallah Al-Senoussi, chef des services secrets libyens condamné pour l'attentat d'UTA, en octobre 2005 ; la visite mystérieuse de Brice Hortefeux à ce même Al-Senoussi en décembre 2005 ; et l'exfiltration rocambolesque de Bechir Saleh, argentier du régime Kadhafi, le 3 mai 2012, alors qu'un mandat d'arrêt international venait d'être émis contre lui.
Ziad Takieddine, intermédiaire au cœur de l'affaire, affirme avoir remis personnellement trois valises contenant 5 millions d'euros à Claude Guéant en 2006 et 2007, avant de se rétracter spectaculairement en 2020 - revirement pour lequel Carla Bruni-Sarkozy a été mise en examen en juillet 2024.
"Le tribunal aura fort à faire pour démêler les objections juridiques et les versions des uns et des autres", conclut Le Monde, les magistrats s'attendant à "une volée de bois vert, quel que soit le sens du jugement de ce procès historique".
par Adama Dieng
HOMMAGE À MON AMI BADIO CAMARA
EXCLUSIF SENEPLUS - Son absence laisse un vide que ni le temps, ni les mots ne pourront jamais combler. La mémoire de nos conversations, de nos batailles partagées, et de notre admiration réciproque restera à jamais ancrée en moi
C’est avec une profonde tristesse que je rends hommage à un ami de longue date, un frère d’âme et un pilier du droit sénégalais, qui vient de nous quitter. Sa voix raisonnerait à jamais dans les couloirs de la justice comme un écho de courage et de vérité. Étant jusqu’ici le président du Conseil constitutionnel du Sénégal, son engagement inébranlable pour la justice et l’équité a été une boussole guidant notre nation à travers les mers tumultueuses de l'incertitude et du conflit. Sa capacité à rendre des décisions courageuses a non seulement sauvé le Sénégal durant des moments cruciaux, mais a aussi capté l’admiration au-delà de nos frontières. Ce qu’il a semé dans le domaine de la légalité et de l’intégrité continuera de fleurir dans l'esprit de ceux qui marcheront dans son sillage.
Nous avons partagé plus qu’une simple amitié au fil des décennies — c’était un demi-siècle de complicité, de rêves communs, et de rires. Son absence laisse un vide que ni le temps, ni les mots ne pourront jamais combler. La mémoire de nos conversations, de nos batailles partagées, et de notre admiration réciproque restera à jamais ancrée en moi. Il a maintenant rejoint notre cher Cherif Soumaré dans l'au-delà. Cherif, qui était lui aussi un juge exemplaire, saura l’accueillir avec la chaleur et la bienveillance qui les caractérisaient tous deux. Unis à nouveau, ils continueront à éclairer nos chemins avec leur sagesse et leur esprit indomptable.
C’est aussi avec une émotion poignante que je me remémore notre dernière rencontre à sa résidence, en compagnie de son épouse Madjiguene Lydia. Alors qu’ils séjournaient à Paris, j’avais eu l’occasion d’apprécier des moments pleins de chaleur et de complicité. Madjiguene ne ménageait aucun effort pour l’assister dans son combat contre la maladie. À mon retour à Dakar, nous nous sommes retrouvés, et j’attendais avec impatience notre prochaine rencontre à mon retour de New York pour continuer à célébrer la fête de l’Eid. Mon fils Sidy Junior le taquinait affectueusement en lui proposant, dès qu’il serait un peu plus requinqué de faire le footing ensemble. Le Tout Puissant en a décidé autrement.
Badio, un fervent musulman, avait aussi pour habitude de participer chaque jeudi à la lecture du Coran à la mosquée Omarienne. Sa foi était le socle de son existence, et sa générosité exceptionnelle était connue de tous. Il soutenait, dans la plus grande discrétion, les personnes démunies et vulnérables, offrant un rayon d’espoir et d’humanité à ceux qui en avaient le plus besoin. L’Imam Seydou Tall peut en témoigner.
À ses épouses Maimouna et Madjiguene, à leurs enfants, à la famille judiciaire et au peuple sénégalais, j’adresse mes plus sincères condoléances. Que la force et la paix soient avec vous en ces temps de deuil. Que nous n'oublions jamais l’impact inestimable que Badio a eu non seulement sur notre vie, mais sur la société tout entière. Sa mémoire continuera de vivre à travers les actes d'amour et de justice qu’il a semés.
Adieu, mon ami, mon frère. Ta flamme continue de briller dans nos cœurs, et ton héritage de droiture et de justice demeure un phare pour les générations futures. Ta vie a été un exemplaire modèle de service et d'humanité que nous continuerons à honorer chaque jour.
Repose en paix, sachant que tu es et seras toujours aimé et respecté. Que les Jardins du Paradis soient ta demeure éternelle. Amine Yaa Raabi !
par Djibril Ndiogou Mbaye
L’AUDIT DE LA COUR DES COMPTES NE DEVAIT-IL PAS RESTER CONFIDENTIEL ?
Ni le principe de transparence, ni la loi organique qui le surclasse, édictant et encadrant les rapports de la cour des comptes ne sont au dessus de l’intérêt supérieur de la nation
La politique ? c’est tout un art ! Mais c’est un art vil. Et si c’est un art vil, c’est parce qu’elle use de subterfuges, manœuvres et comme au poker, abuse du bluff comme technique pour dissimuler sa stratégie dans un écosystème où chaque erreur de communication se paie cash et peu anéantir un projet ou reporter un important programme, si ce n’est interrompre une carrière politique.
Publier un rapport qui plonge un pays pauvre comme le Sénégal, en quête perpétuelle de financements, dans un désarroi financier sans précédent, en le discréditant auprès des bailleurs de fonds, du FMI et des investisseurs, en entraînant la dégringolade de toutes ses notes souveraines, est-il la panacée ?
Les principaux défenseurs de cette publication, comme le président de la cour des comptes Mamadou Faye, mettent en avant un exercice de transparence inédit en Afrique. Transparence oui, mais à quel prix ?
La politique moderne, c’est l’honnêteté
L’honnêteté de l’État à l’égard du peuple commence par la transparence dans les actes de gouvernance. Les informations recueillies et conservées par le gouvernement sont un bien national. Elles sont la propriété du peuple.
Ainsi, la transparence est une exigence démocratique, Indissociable d’une bonne gouvernance moderne et inclusive. Elle responsabilise les citoyens, qui de leurs impôts et contributions diverses financent les projets de développement Économique et social. D’ailleurs, la trajectoire fiscale du nouveau gouvernement valide parfaitement l’intention d’associer le citoyen-contribuable aux financements des projets de développement à l’heure où l’emprunt coûte cher et devient rare et difficilement accessible aux États les moins bien notés et de surcroît en développement.
Le lancement récent d’un emprunt obligataire par appel public à l’épargne s’inscrit dans cette veine. Comme s’inscrit dans la même veine le très accrocheur slogan « Jub, Jubeûl, Jubànti » aux intentions heureuses et vertueuses. Mais au-delà du charme envoûtant de l’allitération en « J », il ne faudrait pas se laisser bercer par la musicalité des mots, ni se laisser compter fleurette par cet art vil qu’est la politique, si prompte à reprendre ses droits et très souvent encline à une transparence sélective.
En effet, la transparence ne vaut que lorsqu’elle garantit l’existence des autres composantes de la démocratie et de la bonne gouvernance.
Il convient donc de confier cet outil précieux mais sensible et facile à instrumentaliser, à des autorités capables d’assurer et d’assumer l’équilibre nécessaire entre la transparence et ce qui doit rester confidentiel ou secret.
En effet, l’argument de la transparence est une modalité du jeu politique. Ceux qui ont les prérogatives de la transparence ont également légitimement et souvent légalement, la faculté de la censurer. Ne nous y méprenons pas.
La transparence est un enjeu et une arme politique, forgée par et pour les élites politiques. Il s’agit d’un enjeu interne au champ politique, porté par des professionnels de la politique, à la fois juges et parties . Une des dimensions de leur savoir-faire politique consiste à savoir se jouer du principe.
Dans l’univers si sensible de la macroéconomie, toute vérité est-elle bonne à dire ?
On peut légitimement douter et intellectuellement débattre de la pertinence et de l’opportunité de publier une information qui remet en cause, ralentit ou hypothèque la matérialisation de programmes urgents de développement économique et d’assistance sociale et sanitaire des populations les plus vulnérables. Ce qui, en d’autres termes, constitue un risque économique majeur pour la nation.
Et tout cela, alors qu’on vient d’arriver à la tête d’un pays pauvre, de surcroît mal gouverné depuis toujours, ultra endetté et alors qu’on vient de lancer le plan « Sénégal 2050 : agenda national de transformation », qui a pour objectif d’atteindre un taux de croissance de + de 6 %, et qui a besoin de financements très conséquents, que l’autofinancement, à lui seul, ne saurait assurer.
Considérant ses effets graves pour la nation, pourquoi n’a-t-il pas été frappé du sceau de la confidentialité, par la cour des comptes elle-même ? « … est strictement confidentiel et ne saurait être communiqué à des destinataires autres que ceux choisis par la Cour des Comptes » ?
Qu’est-ce qui interdisait au gouvernement de le classer confidentiel, lorsqu’il a reçu communication du pré-rapport, en considérant les graves conséquences que sa publication allait engendrer ?
Le gouvernement et la cour des comptes avaient-ils pris la mesures de l’impact considérable que la publication de ce document allait avoir ?
La cour des compte doit comprendre qu’elle pose, à la publication de chacun de ses rapports, un acte éminemment politique.
Quelle est alors l’autorité la plus irresponsable (au sens péjoratif du mot) en décidant ou en n’empêchant pas sa publication ?
Ni le principe de transparence, ni la loi organique qui le surclasse, édictant et encadrant les rapports de la cour des comptes ne sont au dessus de l’intérêt supérieur de la nation.
Dans ce monde globalisé, ou un seul mot placé dans une phrase apparemment anodine, d’une haute personnalité politique, peut faire chuter la bourse de New York, le Nasdaq ou Shanghai.
Un homme politique ayant sous sa responsabilité la gestion d’une population pauvre, doit remuer sa langue mille fois avant de parler. La vie et l’avenir de millions de personnes sont pendus à ses mots et à ses actes.
Le rapport n’apprend rien aux Sénégalais qui ont décidé, en connaissance ou en soupçon des abus, mauvaise gestion et incompétence, de la part de l’ancien régime, de les bouter dehors. Les Sénégalais ne connaissent pas seulement la vérité, ils la vivent depuis 2012 et même bien avant.
C’est un peuple déçu, meurtri et à genoux, fort de ses espoirs, sa maturité politique et de son incroyable résilience, qui a porté sur ses frêles épaules la lutte qui a mené à l’avènement de l’ère Pastef. Le nouveau gouvernement ayant hérité des actifs, ne doit-Il pas assumer le passif et assurer la continuité de l’État ?
Cette publication de l’audit dit de la cour des comptes a été inconsciemment et sûrement involontairement faite au mépris des conséquences qui pouvaient en découler. Car dès la publication, l’agence Moody's a immédiatement abaissé la note du pays à B3, avec une perspective négative, suivie par Standard & Poor's qui l'a faite passer de B+ à B, avec une perspective négative également.
Le FMI a, quant à lui gelé, dès les premières alertes en octobre 2024, le programme d’aide de 1,8 milliard de dollars, négocié avec les anciennes autorités sénégalaises.Interrogé par Reuters, Edward Gemayel, chef de mission du FMI pour le Sénégal, est on ne peut plus clair : « Nous ne pouvons pas discuter d’un nouveau programme avant d’avoir réglé la question des fausses déclarations. »
Si c’était à refaire, le gouvernement n’aurait certainement pas lavé et étendu ce linge sale sur cette place internationale, sur laquelle donne les fenêtres de toutes les institutions financières et autres agences de notation, qui règnent implacablement sur le financement des États. Sinon, quelle serait la pertinence d’un tel acte digne d’un grand-maître de l’autoflagellation ?
Du mésusage de la transparence en realpolitik
Aucun État moderne et démocratique ne l'applique systématiquement. Car malgré son caractère fondamental, elle ne surclasse pas l’intérêt supérieur de la nation. C’est de la responsabilité des plus hautes autorités de l’Etat de passer chaque situation au filtre de l’intérêt national. Éviter l’application systématique des concepts importés, avant leur « tropicalisation », à des contextes qui ne sont pas à l’origine de leur élaboration. Dans la réalité, la transparence est juste une notion alors que « l’intérêt national » est une réalité, comme le sont la faim et la pauvreté.
Ce concept « occidental », importé comme « la démocratie » et parfaitement assimilé par nos élites intellectuelles et politiques est évidemment nécessaire dans les pays démocratiques du tiers monde, mais son usage doit toujours tenir compte de la conjoncture politico-économique.
Les USA, avec leur grande et ancienne tradition démocratique, ont une expérience issue d’un riche vécu et de débats philosophiques et doctrinaux interessants. Dans ce pays, la transparence a souvent été « snobée » au profit du « secret » ou de la « confidentialité », pour des soucis d’intérêt national. Le cas échéant, c’est cette justification qui immunise et exonère d’accusations de trahison ou d’entorse à la démocratie. Car c’est une décision émanent d’autorités élues qui portent la confiance du peuple, pour les représenter et veiller à leurs intérêts supérieurs.
Sciences politiques sans conscience économique peut entraîner la ruine de l’État
Cette publication d’une information mettant en péril l’intérêt national montre l’un des talons d’Achille de cette nouvelle administration qui est en train de réussir le fou et excitant pari de la transition générationnelle.
En effet, elle puise certains de ses cadres dans le vivier si fécond de la jeune élite sénégalaise, diplômée, dynamique et « patriote » au deux sens du mot, qui pêche justement par son manque d’expériences et de recul. Autrement dit , elle a les défauts de ses qualités.
Le haro des institutions financières et agences de notation sur le Sénégal à la publication de l’audit de la dette publique, est une première leçon faite au gouvernement Pastef sur l’importance d’une vision sur la nécessité d’une anticipation par « l’étude d’impact » qui doit précéder toute prise de décision.
La transparence en tant que concept indispensable à la bonne gouvernance semble être passée du fameux « projet » à une application rigoureuse et stricto-sensu, sans passer par le tamis de l’expérience et d’une vision moins philosophique et moins « PowerPoint » de cet outil précieux mais à double tranchant, dont le mauvais usage peut entraîner des conséquences peu enviables.
L’équilibre secret-transparence doit être de mise
Mais attention aux extrêmes. Attention à l’abus de secrets qui déséquilibre les rapports gouvernants et gouvernés. « En opérant des choix sur ce qu’il faut divulguer et sur la manière dont il faut le faire, les procédures de transparence sont porteuses d’un message, d’un sens déterminé par une série de choix humains. La transparence entendue en ce sens est éminemment politique, et peut être instrumentalisée ». Quel est l’intérêt de « donner la bâton pour se faire battre » en mettant les bailleurs et autres institutions internationales dans le secret d’une éventuelle mal gouvernance du régime sortant, susceptible de mettre le pays dans une crise sans précédent et en un moment charnière ? Sinon pour les mettre en état d’alerte ?
Autant de questions qui interpellent sur la vraie raison de la publication d’un tel document qu’aucun Etat aguerri ou averti et responsable n’aurait publié. Tout au plus, c’est un bon document de travail interne qui peut renseigner les gouvernants sur l’état réel des finances publique et lui permettre de réajuster sa politique et ses prévisions.
Ce document devait-il pas rester confidentiel, du moins le temps que les autorités reprennent le contrôle de la situation, trouvent les financements des politiques économiques, avant d’être « déclassifié » plus tard ?
La gouvernance, c’est la prévision. Oú est la pertinence d’un « hara-kiri » économique que ne subiront que les couches défavorisées du pays ?
Tous les États, même les plus grandes démocraties, pratiquent le « secret » ou la « confidence ou le mensonge statistique » pour « charmer » les agences de notation et les bailleurs et investisseurs mais par souci de protéger l’intérêt national.
Cette pratique de la comptabilité publique est bien présente en comptabilité privée, dans la gestion de toute les grandes ou plus petites entreprises également. Quel bon dirigeant ne s’enferme, au moins une fois l’an, avec son comptable ou son conseiller juridique pour bien « ficeler » son bilan comptable, minorer son imposition ?
Mêmes les bailleurs et les autres institutions internationales ficellent leur gestion sur le plan juridique et comptable. Ils ne sont pas des références en matière de justice et d’équité. Ils ne parient que rarement sur l’humain.
L’éthique comme argument n’est pas non plus pertinente, surtout en ce moment ou les puissances, censées être les « gendarmes du monde » s’adonnent à des exactions ahurissantes d’injustices, allant de la colonisation d’États souverains à des attaques en règles contre le droit et les institutions judiciaires internationales. Mais aussi et surtout des agressions violentes et inexplicables contre les économies de pays tiers et souvent partenaires. Les saillies économiques du président Trump, par l'augmentation unilatérale des droits de douanes nous montre que les États ne s’encombrent plus de vertus quand il sagit d’intérêts.
Aussi, la notion de « politique vertueuse », tente-t-elle l’improbable alliage schizophrénique de deux réalités que tout sépare. La morale « sociale » n’est pas la morale politique. La défense des intérêts nationaux semblent donc primer sur toutes les vertus et la morale.
Au-delà de la confirmation de l’existence d’une justice impuissante contre les riches et puissants États, ces actes entérinent la mort de l’éthique politique et l’avènement d’une morale politique permissive, trés proche de la délinquance d’état.
L’urgence, dans la gestion d’un État pauvre et pressé n’est pas dans les tripatouillages et les bidouillages en tous genres, qu’il faut différencier de la reddition des comptes qui est une exigence d’ordre constitutionnel mais qu’il faut manier avec une dextérité politique .
Aujourd’hui, le remède semble pire que le mal ! M. Gemayel du FMI s’est déplacé jusqu’à Dakar pour sermonner le pays et dire qu’il ne débloquera pas le programme commencé en 2023 et qui devait se poursuivre jusqu’en 2026. Cette position du FMI a été réitérée par le responsable pour l’Afrique, M. Sélassié, venu à son tour au chevet de l’économie sénégalaise mais sans apporter une solution. Au contraire, il confirme la suspension de tous les programmes du FMI en faveur du Sénégal, en attendant la communication par le gouvernement d’un plan d’apurement de la situation et un plan de sortie de crise.
On l’appellera comme on veut : « couper la branche sur laquelle on est assis », « se tirer une balle dans les pieds », « se faire hara-Kiri», mais le Sénégal discrédité, est obligé de suspendre ou reporter certains de ses programmes et des projets de développement très urgents pour les populations, en attendant de négocier, manœuvrer, convaincre, pour essayer de débloquer ou trouver des financements.
Bien sûr, si des infractions sont constatées, il faudrait poursuivre.
Tous responsables de l’impasse ?
La cour des compte avertit : « Les faits relatés dans le présent rapport, présumés constitutifs de fautes de gestion, de gestions de fait ou d’infractions à caractère pénal feront l’objet, le cas échéant, de déférés, de référés ou de déclarations provisoires de gestion de fait ». Elle a confirmé avoir transmis des dossier au procureur général. Mais force est de reconnaître, malgré l’apparence de manœuvres « dolosives » dans le comportement présumé de l’ancienne administration, qu’il sera incommode de sanctionner sévèrement des comportements délictueux. D’ailleurs, M. Gemael refuse de parler de « détournements » : «…25 % du PIB. C'est à peu près 6,7 milliards de dollars. Je ne dirai pas détournés. C'est un endettement qui n'a pas été dévoilé. Et donc, le stock de la dette a été sous-estimé d’à peu près ce montant de 7 milliards de dollars ».
Mais il est parfaitement concevable que le fait d’avoir « caché » une dette assez conséquente, qui à conduit à cette situation désastreuse qui cause un réel préjudice au pays et à ses intérêts économiques soit constitutif d’une infraction pénale.
Et en poussant les investigations, l’ensemble de ces manœuvres pourraient être imputé au président sortant, en tant que gardien des finances publiques. Est-ce la solution de l’énigme ?
Mais ceux qui ont rendu public cette information et on incidemment et par ce fait déclenché les nombreuses et graves réactions en chaîne pour l’économie nationale, n’ont-ils pas leur part de responsabilité ?
En attendant que le gouvernement propose au FMI un programme crédible de régularisation de la situation, les citoyens moyens, nos braves « goorgoorlus », auscultent l’horizon économique avec beaucoup de questions et d’incertitudes. Certains rentreront le soir, avec au fond du sac à courses, juste le rapport de la cour des comptes.
Pendant ce temps, l’État s’arrache les cheveux, à la recherche de la formule magique qui l’extirpera de l’ornière. C’est à se demander si le jeu en valait vraiment la chandelle.
texte collectif
MACKY SALL, FOSSOYEUR DE LA DÉMOCRATIE SÉNÉGALAISE ET CAUTION MORALE DE LA FONDATION MO IBRAHIM ?
Il s’agit d’interroger la cohérence éthique et la crédibilité de la Fondation Mo Ibrahim. Peut-elle encore se revendiquer comme un baromètre impartial de la gouvernance africaine en promouvant des figures qui incarnent l’exact opposé de ses valeurs ?
Il arrive que l’histoire trébuche. Mais quand elle s’effondre volontairement dans l’amnésie, alors l’indignation devient un devoir. En intégrant Macky Sall à son conseil d’administration, la Fondation Mo Ibrahim tourne le dos à ses principes fondateurs et accorde un blanc-seing à l’un des dirigeants les plus critiqués de l’histoire politique sénégalaise pour sa dérive autoritaire, son mépris des institutions et sa politique économique fondée sur l’endettement débridé et la falsification comptable.
Pourtant, la fondation s’était donnée pour mission, depuis sa création, de « promouvoir une gouvernance exemplaire et un leadership responsable » sur le continent africain. À travers l’indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique (IIAG), elle évalue précisément la qualité des institutions, la démocratie, l’État de droit et les droits de la personne. Or, si l’on appliquait strictement ces critères à Macky Sall, son profil relèverait davantage du contre-exemple que du modèle. Faut-il rappeler que la Fondation elle-même a, dans ses rapports, exprimé ses préoccupations quant au recul démocratique et aux restrictions des libertés dans plusieurs pays, dont le Sénégal sous Macky Sall ?
Un passif démocratique accablant
L’héritage de Macky Sall n’est pas celui d’un bâtisseur, mais d’un fossoyeur obstiné de la démocratie sénégalaise. Sous sa présidence, l’État de droit a été méthodiquement vidé de sa substance : instrumentalisation de la justice à des fins politiques, musellement de la presse, emprisonnements massifs d’opposants politiques, coupures arbitraires d’Internet, dissolution de partis et de mouvements citoyens, manipulation des calendriers électoraux, tentatives de coup d’État institutionnel — la liste est longue, consternante, documentée.
Mais plus encore, son règne fut lourdement taché de sang. Entre 2021 et 2024, des dizaines de manifestants pacifiques ont été tués par les forces de sécurité. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : des étudiants, de jeunes militants, de simples passants ont péri dans les rues de Dakar, de Ziguinchor, de Bignona ou de Saint-Louis, pour avoir exercé un droit fondamental et constitutionnel : celui de résister. Ces morts ne sont pas de simples bavures. Ils sont les témoins silencieux d’un régime qui, au nom de l’ordre, a préféré gouverner par la terreur.
Le rapport Afrobarometer de 2023 confirme cette réalité : plus de la moitié des Sénégalais (53 %) considéraient que leur pays n’était plus une démocratie effective. Ce chiffre témoigne d’un effondrement de la confiance populaire dans les institutions, corollaire direct de la « méthode Macky Sall » faite de duplicité, de concentration autoritaire du pouvoir, et d’un usage cynique de la « raison d’État » pour justifier l’injustifiable.
La tentative avortée de troisième mandat n’était pas une erreur de jugement, mais l’aboutissement d’un projet mûri de longue date, soutenu par une caste de politiciens et de consultants internationaux rémunérés pour interpréter la Constitution. L’épisode du décret du 3 février 2024, par lequel il a suspendu le processus électoral à la veille de la campagne présidentielle, a été unanimement condamné comme un coup d’État institutionnel, y compris par le Conseil constitutionnel sénégalais.
Un gestionnaire sans scrupule et sans transparence
L’autre pan du « legs » de Macky Sall, que la Fondation Mo Ibrahim semble avoir passé sous silence, est le désastre économique et financier qu’il a légué au peuple sénégalais. Comme l’ont révélé les rapports de la Cour des comptes, il a systématiquement sous-estimé la dette publique, dissimulé les déficits budgétaires, contracté des emprunts hors budget et détourné l’éthique de la gouvernance publique.
Dans un contexte de croissance inégalitaire, où plus de 37 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, le faste des grands projets d’infrastructure a masqué une absence criante d’inclusivité et de durabilité. La jeunesse sénégalaise, abandonnée à un secteur informel précaire, a payé le prix fort de cette politique d’endettement au service d’intérêts privés et de clientélismes.
Le discours que Macky Sall tient désormais depuis son exil doré au Maroc, en se posant en « homme de paix », contraste violemment avec la réalité de son pouvoir. La paix dont il se réclame est celle des cimetières de la démocratie. On ne reconstruit pas une légitimité internationale sur les ruines d’un pays que l’on a contribué à diviser et affaiblir.
La Fondation Mo Ibrahim, une caution morale en question
L’enjeu ici dépasse le cas Macky Sall. Il s’agit d’interroger la cohérence éthique et la crédibilité de la Fondation Mo Ibrahim elle-même. Peut-elle encore se revendiquer comme un baromètre impartial de la gouvernance africaine en promouvant des figures qui incarnent l’exact opposé de ses valeurs ?
Certes, l’institution n’est pas exempte du droit à l’erreur. Mais une telle nomination ne peut être interprétée que comme une capitulation morale ou, pire, comme une instrumentalisation politique de son prestige au service de la respectabilité des anciens autocrates.
Dans un continent où la confiance entre les peuples et les élites est souvent rompue, où les nouvelles générations réclament des leaderships transparents, démocratiques et responsables, ce type de décision affaiblit le combat commun pour la souveraineté populaire, la justice et la redevabilité.
Accepter Macky Sall dans le cercle restreint des « sages » de la gouvernance africaine, c’est officialiser le double discours : le langage fleuri de la démocratie dans les rapports internationaux, et les pratiques autoritaires sur le terrain. C’est banaliser la violence institutionnelle, les détournements de procédure, la répression des libertés, au nom d’une prétendue stabilité.
La Fondation Mo Ibrahim, si elle veut rester fidèle à sa mission, doit reconsidérer cette nomination, ou à tout le moins, expliciter les critères éthiques sur lesquels elle fonde une telle décision. L’Afrique mérite mieux que la reconversion dorée de ses anciens autocrates. Elle mérite des leaders de rupture, pas des fossoyeurs recyclés.
Signataires :
Félix Atchadé, médecin, Paris
Seynabou Sougoufara, Biologiste, University of Warwick, Manchester
Youssou Mbargane Guissé, chercheur à la retraite, IFAN, UCAD
Mouhamed Abdallah Ly, Directeur de recherches assimilé, IFAN, UCAD
Abdourahmane Seck, Maître de conférences titulaire, UGB
Mamadou Diallo, Doctorant, Columbia University
Oumar Dia, Maître de conférences titulaire, FLSH, UCAD
Abdou Aziz Diouf, Professeur titulaire, FSJP, UCAD
Ibrahima Xalil Niang, Maître de conférences assimilé, FLSH, UCAD
Alioune Thiongane, FMPO, UCAD
Salif Baldé, Maître de conférences titulaire, ESEA, UCAD
Jean Domingo, Enseignant-vacataire à la FST, UCAD
Marie Olivia Guèye, Informaticienne, Ngaparou
Amadou Fall, Professeur assimilé à la retraite, FASTEF-UCAD
Diéry Ngom, Maître de conférences titulaire, UADB
El Hadji Malick Sy Camara, Maître de conférences assimilé, FLSH-UCAD
Ansoumana Diémé, Elève-Professeur, ENSETP, UCAD
Pierre Sané, Ancien secrétaire général d’Amnesty international
Yaya Diallo, responsable pédagogique, CUK-UASZ
Tidiane Sow, Coach en communication politique, Dakar
François Joseph Cabral, Professeur titulaire, FASEG, UCAD
Cheikh Thiam, Professeur titulaire, Amherst college
Benjamin Diouf, Professeur assimilé, FLSH, UCAD
El Hadji Farba Diop, Chef du service de l’éducation, Musée des Civilisations noires (MCN)
Raoul Manga, fonctionnaire, Ontario, Canada
LA RÉBELLION DES PLUMES
Alors que les figures traditionnelles peinent à exister, Madiambal Diagne, Yoro Dia et Hamidou Anne ont investi l'espace critique avec une efficacité remarquable, à coups d'articles cinglants, d'interventions télévisées et de publications virales
Dans un paysage politique en recomposition, alors que l’opposition classique peine à incarner une alternative crédible, trois figures médiatiques – Madiambal Diagne, Yoro Dia et Hamidou Anne – prennent le relais du combat politique… sans en avoir les attributs officiels. À coups de tribunes mordantes, de posts incendiaires et de chroniques virales, ces ‘’plumes d’opposition’’ captent l’attention, structurent le débat et éclipsent parfois les ténors supposés de la résistance.
Ils ne sont ni députés ni chefs de parti, encore moins membres d’une quelconque coalition d’opposition officielle. Et pourtant, Madiambal Diagne, Yoro Dia et Hamidou Anne occupent aujourd’hui le devant de la scène critique contre le pouvoir. Trois profils différents, trois styles distincts, mais une cible commune : le régime de Diomaye Faye et Ousmane Sonko. Dans un contexte où l’opposition institutionnelle peine à s’imposer, ce trio s’impose comme une task force médiatique, qui mène la charge à coups de chroniques, de tribunes, de lives et d’interventions tonitruantes.
Madiambal Diagne, le sniper médiatique
Le doyen du groupe, Madiambal Diagne, est loin d’être un nouveau venu sur le champ de bataille politique. Fondateur du groupe Avenir Communication, éditeur du quotidien ‘’Le Quotidien’’, il revendique une proximité assumée avec l’ancien président Macky Sall. En 2012 déjà, il avait clairement déclaré à ses journalistes qu’il soutenait Macky contre Abdoulaye Wade. Ce parti-pris revendiqué lui a valu la défiance d’une partie du public, mais aussi un accès privilégié aux coulisses du pouvoir.
Depuis l’ascension de Sonko, Madiambal Diagne est devenu l’un de ses adversaires les plus virulents. Ses chroniques dominicales, "Les lundis de Madiambal", sont devenues un terrain de combat. Il y décortique, attaque, accuse. De l’affaire du général Kandé à la supposée découverte d’un compte de 1 000 milliards, en passant par l’abrogation de la loi d’amnistie, il ne laisse aucun répit au régime. L’homme n’a pas seulement choisi la plume : candidat aux dernières législatives sur la liste Jammi ak Njariñ d’Amadou Ba, il a montré qu’il était prêt à conjuguer engagement éditorial et action politique directe.
Son activisme lui vaut aussi des démêlés judiciaires. Les avocats de Sonko ont porté plainte contre lui, ce qui a conduit à son audition par la Sûreté urbaine en décembre 2024. Loin de se rétracter, Madiambal en a fait une tribune supplémentaire pour dénoncer ce qu’il qualifie de "dérives autoritaires". Sa posture divise, mais elle lui confère un rôle central dans la contre-narration du pouvoir actuel.
Yoro Dia, de la neutralité à l’offensive
Yoro Dia, journaliste de formation et politologue reconnu, a longtemps cultivé une image d’analyste mesuré, adepte de la neutralité axiologique. Mais cette image s’est progressivement estompée. Ministre et porte-parole de la présidence de la République dans les dernières années de Macky Sall, il a changé de ton. Fini l’observateur prudent, place au polémiste déterminé.
Depuis la chute du régime qu’il servait, Yoro Dia est devenu l’un des critiques les plus acerbes du gouvernement de Diomaye et Sonko. Il n’a pas hésité à comparer leur projet politique au nazisme, affirmant sur RFM en juillet 2024 : "Je compare toujours le projet Pastef au projet nazi : populisme, coup d’État raté, prison, élection, pouvoir..." Des propos choquants, qui ont suscité une levée de boucliers, mais qui traduisent la volonté de frapper fort.
Sur les grands dossiers économiques, il multiplie les prises de position, comme lorsqu’il a accusé le Premier ministre de "sabotage économique" en confiant le Port autonome de Dakar à Waly Diouf Bodian, présenté comme un nervi. Sur les relations internationales, il met en garde contre une dérive "autoritaire" et appelle à "préserver l’écosystème démocratique du Sénégal".
Pour ce politologue et essayiste, le pays n’a pas de problème d’institutions, mais de vision économique et de gouvernance.
Il conserve une distance critique même vis-à-vis de certains excès du régime précédent, mais sa ligne est claire : défendre le legs de Macky Sall, dénoncer le populisme souverainiste de l’AES et contester la légitimité politique de Sonko.
Hamidou Anne, la nouvelle voix de l’opposition intellectuelle
Hamidou Anne, dernier membre du trio, est sans doute le plus jeune, mais non le moins incisif. Essayiste, ancien chroniqueur, ex-conseiller de Macky Sall, il assume d’avoir adhéré à l’APR après la perte du pouvoir. "Je ne suis pas venu en politique pour des portefeuilles ou pour une richesse matérielle", dit-il. Il se positionne comme un intellectuel engagé, s’exprimant surtout via ses publications sur Facebook et ses lives réguliers.
Il a ouvert récemment un cabinet de stratégie et de marketing politique, aux côtés de Racine Assane Demba, un autre communicant proche de Macky Sall. Son crédo : disséquer les failles du régime, alerter l’opinion, défendre ses pairs. Il s’illustre par une prise de position constante sur des sujets complexes, comme la dette publique et les relations avec le FMI, dénonçant par exemple une "dette cachée" et relayant les critiques adressées par le FMI aux nouvelles autorités.
Perçu comme arrogant par les militants de Pastef, il avait même jeté le discrédit sur les journalistes qui avaient osé mettre en garde le président contre un troisième mandat. Il est passé du langage diplomatique à la confrontation directe.
Comme ses deux compères, il multiplie les attaques contre le gouvernement. Il parle de "régime d’intérim", accuse Sonko d’être un "activiste déguisé en Premier ministre" et affirme que la posture des dirigeants actuels "ne rassure pas au niveau international". Sa verve est cinglante, ses posts très partagés et son ton volontiers provocateur : "Ce vacarme menaçant sans action concrète, au début risible, est devenu gênant", écrit-il à propos de la gouvernance actuelle.
Trois voix, un même écho : l’opposition extra-parlementaire
Le trio ne laisse personne indifférent. Pour certains, ils sont les derniers remparts d’une opposition qui se cherche, capables de poser les bonnes questions et de contrer l’hégémonie de Pastef. Pour d’autres, ils incarnent le retour déguisé d’un ancien régime défait, usant de leurs réseaux médiatiques pour défendre des intérêts personnels ou claniques.
Leur activisme, aussi bruyant soit-il, révèle une réalité : l’opposition parlementaire et politique formelle peine à se faire entendre. Face à un pouvoir centralisé et offensif, et à une majorité encore en construction, c’est dans les médias, les tribunes et les réseaux sociaux que se joue une partie du débat public. Madiambal, Yoro et Hamidou ont investi cet espace avec une efficacité qui force le constat : le contre-pouvoir est aussi une affaire de récit, de stratégie et d’omniprésence.
Le plus frappant est que ce trio médiatique semble aujourd’hui éclipser des figures politiques qui auraient logiquement dû incarner la première ligne de l’opposition. Amadou Ba, ancien Premier ministre et candidat malheureux à la présidentielle avec un score honorable, peine à faire entendre sa voix depuis sa défaite. Aucune structure visible, aucune ligne claire, aucun discours fort. Barthélemy Dias, autrefois très présent dans les médias, est en perte de vitesse depuis sa destitution à la mairie de Dakar en décembre 2024. Ses relations peu cordiales avec Khalifa Sall, son mentor d’hier, semblent encore brouiller son image.
Aujourd’hui, ce sont parfois des chroniqueurs de télés, de sites web ou des "liveurs" sur TikTok et Facebook qui captent davantage l’attention et la confiance d’une partie du public que ces opposants classiques. Le champ politique est devenu un champ médiatique, où la visibilité vaut plus que les mandats. Madiambal, Yoro et Hamidou l’ont compris avant les autres.
Ils agacent, provoquent, polarisent. Mais leur influence est réelle. Madiambal, Yoro et Hamidou sont devenus les têtes d’affiche d’une opposition qui ne dit pas son nom, mais qui impose sa voix.
Reste à savoir si cette opposition de plume, de post et de micro peut, un jour, se transformer en alternative politique crédible.
Leur défi ? Ne pas sombrer dans l’excès, éviter le discrédit, et surtout convaincre qu’ils portent une alternative crédible, au-delà de la seule nostalgie du passé. Car face à une jeunesse mobilisée, à une opinion publique en mutation et à un pouvoir qui s’impose avec autorité, critiquer ne suffit plus. Il faut proposer.