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4 mai 2025
Economie
15 NOUVEAUX CAS TESTÉS POSITIFS AU CORONAVIRUS
Dans le communiqué du 15 avril du ministère de la Santé et de l'Action sociale, qui a fait le point sur la situation du jour sur le Covid-19 dans le pays, il est mentionné que sur 227 tests réalisés, 15 sont revenus positifs.
Le Sénégal dépasse la barre des 300 cas infectés au coronavirus ! Dans le communiqué du 15 avril du ministère de la Santé et de l'Action sociale, qui a fait le point sur la situation du jour sur le Covid-19 dans le pays, il est mentionné que sur 227 tests réalisés, 15 sont revenus positifs.
La directrice générale de la Santé publique et présidente du Comité national de gestion des épidémies, Docteur Marie Khémesse Ngom Ndiaye d'indiquer que d'après les résultats des examens virologiques, il s'agit de 14 cas contacts suivis par les services du ministère et d'un (1) cas issu de la transmission communautaire.
Elle a, par ailleurs, annoncé que 7 patients hospitalisés ont été contrôles négatifs. Non sans déclarer que l'état de santé des malades hospitalisés est stable.
La présidente du Comité national de gestion des épidémies a rappelé qu'à ce jour, 314 cas ont été déclarés positifs au Sénégal. Il s'agit 190 guérisons, 2 décès, 1 évacué et encore 121 patients sous traitement dans les hôpitaux.
En outre, le ministère de la Santé et de l'Action sociale a exhorté les populations "au respect scrupuleux des mesures de protection individuelle et collective".
par Rodrigue Fénélon Kenge
À QUI PROFITE LE DÉSENDETTEMENT DE L'AFRIQUE ?
Après chaque période d’annulation de la dette des pays africains, on a l’impression de se retrouver au même point de départ. Les pays qui ont bénéficié du processus de désendettement se retrouvent, quelques années plus tard, surendettés
Après le Pape François durant ses bénédictions pascales, le président français Emmanuel Macron a annoncé dans son discours du 12 avril, envisager avec l’Europe à l’annulation massive de la dette des pays africains.
Le processus de développement économique induit des besoins de financement importants pour la mise en place d’infrastructures et de services publics, dont l’essentiel est couvert par l’endettement, notamment public. L’encours de la dette publique africaine représentait ainsi 1 330 milliards de dollars en 2019 , soit 57 % du PIB continental (équivalent à 60 % du PIB en calculant en moyenne pondérée sur les PIB en parité de pouvoir d’achat) ou encore 1 060 dollars par habitant, et s’inscrit en hausse depuis le début de la décennie 2010. Cette augmentation interroge sur la viabilité de l’endettement des États africains et pose la question du financement de leur processus de développement. En Afrique, cette problématique est d’autant plus importante que des allègements significatifs de dette publique ont été accordés dans les années 2000 et 2010.
Le mythe de Sisyphe
Au demeurant, on a l’impression de se retrouver dans un cycle bi-quinquennal de la question de la dette des pays africains qui déjà, durant les dix dernières années, ont bénéficié de l’initiative PPTE qui a permis un effacement de la dette à travers le mécanisme de réinvestissement des fonds consentis pour le service de remboursement de la dette. Au regard de tout ce qui précède, après chaque période d’annulation ou d’allégement partiel de la dette des pays africains, on a l’impression de se retrouver au même point de départ, dans une sorte de mythe de Sisyphe.
Car les pays qui ont bénéficié du processus de désendettement se retrouvent, quelques années plus tard, surendettés comme c’est le cas du Congo et du Mozambique. Le premier a vu sa dette effacée entre 2009 et 2010 mais se retrouve en 2020 avec une dette de plus de 120% de son PIB. La dette publique de la République du Congo oscille autour de 12,5 milliards de dollars. Cela représente plus d’un tiers supplémentaire par rapport aux estimations publiées par le FMI en juillet 2019 . Le Congo, il sied de le signifier, dans le cadre bilatéral, ne doit pas à la France plus de 11% de sa dette. La part de la dette du Congo qui pose problème est celle vis-à-vis de la Chine , des traders pétroliers, des banques privées et des obligations. Les prévisions budgétaires des charges de trésorerie pour 2020 sont de 1045milliards FCFA dont 601milliards pour cette partie-ci de la dette. Les experts sont formels, le Congo n’a pas les moyens de faire face à de tels engagements.
Tant que la Chine et les traders ne réduiront pas leurs créances, le Congo ne pourra pas à court et moyen terme s’en sortir malgré l’annulation massive annoncée par le chef de l’Etat français en faveur des pays africains. Ainsi, toujours dans le même ordre d’idée, la Côte d’Ivoire qui avait en 2012 atteint le point d’achèvement de l’initiative PPTE se retrouve aujourd’hui avec une dette publique qui avoisine 12 105,3 milliards FCFA à fin juin 2019. Elle réalise ainsi une progression de 4,29% par rapport à son niveau du 31 décembre 2018. L’encours de cette dette est essentiellement constitué de 67% de la dette extérieure et de 33% de la dette intérieure. A la fin de juin 2019, la dette extérieure de la Côte d’Ivoire s’est élevée à 8 063 milliards FCFA contre 7 613,4 milliards FCFA à fin décembre 2018. Les principaux créanciers de la Côte d’Ivoire sont donc les porteurs de titre de créances (51%), les partenaires bilatéraux (17,4%) et multilatéraux (24,6%). La part des autres créanciers ne ressort qu’à 7%. La plus grande part de cette dette est libellée en dollar (44,7%) contre 34,9% en euro. Aussi, 97,4% de la dette extérieure a été contractée à taux fixe contre 2,6% à taux variable.
La problématique de l’annulation de la dette
Annulation massive de la dette. Pourquoi Macron utilise t-il le vocable “massive”? Une annulation n’est elle pas une annulation? S’agit-il d’une réduction massive ou d’une annulation massive? D’entrée de jeu, il sied de souligner que la dette est le moyen classique d'”asservir davantage” les pays endettés, en ajoutant un nœud supplémentaire au nœud existant autour de leur cou. Par ailleurs , lorsqu’on parle d’annulation de la dette, c’est pas toujours limpide. Le togolais Edem Kodjo nous disait que par annulation de la dette il ne s’agit souvent que de l’annulation des intérêts de ladite dette tandis que le “capital” reste entier.
Parfois, on annule une partie de la dette (capital) sans toucher aux intérêts. Ce qui compte souvent pour le bailleur c’est la publicité autour de la pseudo-annulation de la dette et là, les détails manquent. Les dirigeants africains, pour la plupart d’entre eux, ne partagent pas avec leurs citoyens même par le biais de leurs élus au parlement. L’annulation de la dette de l’Afrique ne bénéficiera jamais qui plus est aux peuples du continent. Tous les experts et observateurs africains les plus avertis le savent, y compris les tenants du système financier des pays occidentaux et asiatiques. Le désendettement servira d’abord à déresponsabiliser certaines élites politiques prébendiéres ayant endetté leur pays à des fins de corruption et d’enrichissement personnel. La question de l’endettement du désendettement cyclique dans la coopération multilatérale s’apparente à un jeu de casino. Au terme de notre analyse, il serait judicieux de faire remarquer que le continent est riche de ses hommes et femmes mais cela n’est encore bien clair dans nos textes et les esprits de plusieurs africains, les dirigeants. Parce qu’on a pas cesser de nous asséner que nous sommes pauvres, sous-développés, qu’on nous aide, on a fini par le croire et on arrête pas de tendre la main. Il faut que cela change .
DETTE AFRICAINE : LA GÉNÉROSITÉ CALCULÉE DE MACRON
«Aujourd’hui, 40 % de la dette africaine, entre 145 et 175 milliards de dollars, est due à la Chine. Dans quelle mesure, Macron peut-il inviter à annuler une dette qu’il ne possède pas ?»
Libération |
Maria Malagardis |
Publication 14/04/2020
Alors que la dette du continent est en grande partie due à la Chine, la demande d’annulation du président français est surtout interprétée par certains comme un effet d’annonce.
Ce fut certainement l’annonce la plus surprenante du discours présidentiel lundi soir : «Nous devons aussi savoir aider nos voisins d’Afrique à lutter contre le virus plus efficacement, les aider aussi sur le plan économique en annulant massivement leur dette», a déclaré Emmanuel Macron, qu’on n’attendait pas forcément sur ce terrain-là. Aussitôt, les réseaux sociaux ont été envahis de commentaires cocardiers s’insurgeant contre une annulation de dettes en faveur de l’Afrique alors qu’une largesse du même genre aurait dû profiter en priorité à nos entreprises nationales.
Autant rassurer tout de suite ces internautes «patriotes» : «Aujourd’hui, 40 % de la dette africaine, entre 145 et 175 milliards de dollars, est due à la Chine. Dans quelle mesure, Macron peut-il inviter à annuler une dette qu’il ne possède pas ?» s’interroge malicieusement Andrea Ngombet, un activiste congolais au sein du collectif Sassoufit qui depuis son exil parisien dénonce la kleptocratie qui règne au Congo-Brazzaville.
Voilà bien longtemps que les entreprises chinoises se sont incrustées dans le paysage économique de son pays natal, «à l’aide de contrats bidons, d’offres d’infrastructures plus ou moins fiables. Et avec des contreparties qui relèvent d’un système quasi féodal, en prenant possession des ressources locales. On retrouve le même système à Djibouti, en Guinée, en république démocratique du Congo ou en Ouganda», accuse-t-il. «Du coup, l’annonce de Macron vise peut-être à faire pression sur la Chine pour la contraindre à entrer réellement au sein du Club de Paris, là où se négocient les dettes africaines et où Pékin n’a jusqu’à présent accepté qu’un poste d’observateur depuis deux ans», suggère l’activiste congolais, qui voit dans cette démarche la possibilité d’impliquer la Chine «à un moment où les entreprises françaises en Afrique souffrent de l’insolvabilité des Etats qui ne règlent plus leurs échéances sous prétexte que la dette les étrangle».
«Mallettes»
Mais il reste plutôt méfiant :«Quand on évoque les dettes africaines, de quoi parle-t-on ? En réalité, il s’agit surtout de malgouvernance. Depuis les années 90, tous les dix ans, on voit naître des initiatives pour annuler les dettes africaines, et on se retrouve à chaque fois dans le même marasme. Car, parmi les pays bénéficiaires, il y a toujours les mêmes régimes qui volent les ressources de leurs pays», déplore-t-il. Et de rappeler que plus de 50 milliards de dollars (environ 45 milliards d’euros) échappent chaque année au fisc sur le continent et se retrouvent sur des comptes dans les paradis fiscaux,«sans compter les innombrables mallettes de cash qui circulent et ne sont pas comptabilisées».
Reste que les initiatives en faveur de l’allégement ou de l’annulation des dettes africaines sont à nouveau dans l’air du temps : le 11 avril, huit personnalités africaines signaient une tribune en faveur d’une suspension immédiate du remboursement de la dette, pour faire face aux conséquences économiques du coronavirus en Afrique. «Et le jour même du discours de Macron, c’est le FMI qui annonçait le versement d’une aide d’urgence à 25 pays, dont 19 africains. Aide qui leur permet de couvrir six mois de remboursement de leurs dettes à l’égard de cette institution», rappelle Kako Nubukpo, économiste et ancien ministre togolais.
«Anticipation»
«En réalité, Macron s’aligne sur cette position du FMI. C’est peut-être une bonne chose à court terme, parce que le continent manque de moyens pour répondre à la pandémie avec un déficit annuel de 66 milliards de dollars dans le seul domaine de la santé. Mais c’est une arme à double tranchant car on perpétue aussi le schéma des trente dernières années qui ne sanctionne pas la malgouvernance. Laquelle a justement conduit à négliger les infrastructures de santé», constate-t-il lui aussi, appelant à rester très vigilant sur les modalités éventuelles de cette annulation et le choix des bénéficiaires.
«En quoi un effacement des dettes peut-il combler à court terme le manque de masques, de respirateurs, voire d’électricité ?» s’interroge de son côté l’analyste politique ivoirien Franck Hermann Ekra. Lui voit dans cette annonce «une anticipation du monde d’après» : «On a le sentiment que Macron tente de reprendre la main en Afrique, tout en rappelant implicitement le destin universaliste de la France. Et dans l’immédiat, derrière le masque de la générosité, c’est aux Français qu’il s’adresse bien plus qu’aux Africains. Comme pour souligner que la France est passée du côté des soignants, avec un président qui, d’un discours à l’autre, a troqué l’uniforme du général de guerre pour la panoplie du médecin en chef. On est aussi dans le registre de l’émotion, celui qui s’impose au discours politique en ces temps de pandémie.»
AU-DELÀ DE LA QUESTION DE LA DETTE
Des intellectuels africains réclament davantage qu'une annulation de la dette publique : ils veulent repenser l'Afrique
Les implications de la pandémie de Covid-19 ne se limitent pas au plan sanitaire. Les Etats d’Afrique subsaharienne se préparent à entrer en récession économique cette année, la Banque mondiale prévoit en effet une croissance négative entre -2,1% et -5,1% pour la première fois depuis 25 ans dans cette zone.
Pour accompagner les plans de soutien économiques et sociaux décidés au niveau national dans la plupart des pays, l’Union africaine vient de nommer une équipe d’experts chargés de coordonner l’aide internationale. Et la discussion sur l’annulation de la dette extérieure publique est relancée.
Les grands créanciers occidentaux se sont mis d’accord sur un moratoire de la dette extérieure africaine.
Les détails de l’accord seront dévoilés sous peu, le FMI, la Banque mondiale vont bientôt tenir leurs réunions de printemps, le G20 doit se réunir pour en discuter. Mais le ministre français des Finances assure déjà que de nombreux Etats africains seront éligibles au dispositif.
Cette mesure s’ajoute au plan d’aide d’urgence présenté par le FMI pour soutenir l’agriculture, l’industrie et la consommation en milieu rural.
La Chine, premier bailleur du continent, semble elle aussi sur la voie d’un rééchelonnement de la dette. Pékin pourrait geler les remboursements pour laisser respirer les économies africaines, mais pas les annuler totalement.
Une demande venue des Etats africains
Afin d’endiguer du ralentissement économique lié au Covid-19, le président nigérien, Mouhamadou Issoufou, avait appelé de ses vœux un "plan Marshall pour l’Afrique".
Son homologue sénégalais Macky Sall réclamait la semaine dernière une annulation ou de la dette publique contractée à l’étranger.
Fin mars, les ministres africains des Finances avaient relancé la discussion.
Leur appel avait été appuyé par la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (Cnuced) qui conseille une aide de 2500 milliards de dollars, dont la remise de 250 milliards de dette, pour amortir la crise du Covid-19 en Afrique.
L’idée a également été soutenue par les institutions de Bretton Woods fin mars et reprise par Emmanuel Macron dans son discours de lundi soir (13.04.20). Le président français y a évoqué la nécessité d’une "annulation massive" de la dette africaine par l’Europe.
Le Covid-19 de plein fouet
Les économies des principaux partenaires commerciaux de l’Afrique (la Chine, l’Union européenne, les Etats-Unis notamment) sont déjà affectées par la crise du coronavirus.
Ceci entraîne une baisse de la demande en matières premières en provenance d’Afrique subsaharienne. Les cours du pétrole, du coton et de certains métaux ont déjà commencé à chuter.
Les mesures de confinement et les interdictions de voyager touchent également le secteur du tourisme. Et avec lui toute la chaîne de métiers qui y contribuent, jusqu’aux secteurs de la pêche, de la restauration, des transports ou du divertissement, par exemple.
Même si les prévisions de la Banque africaine de développement sont moins alarmistes et ne tablent « que » sur une récession de -0,7 à -2,8% pour les économies africaines, alors que
la croissance en 2019 avoisinait les 3%.
Les exportations vont baisser – tout comme les revenus de nombreux foyers – et le chômage risque d’augmenter fortement.
Des dizaines de millions d'emplois menacés
L’Union africaine chiffre à "près de 20 millions" le nombre d'emplois "menacés de destruction", à la fois dans les secteurs formel et informel. L’ONU craint même que ce nombre atteigne jusqu’à 50 millions.
Les personnes travaillant dans le secteur informel représentent jusqu’à 80% des travailleurs du continent, qui ne bénéficient d’aucun filet de sécurité en terme de protection sociale ou d’assurance chômage.
Enfin, la diaspora établie hors du continent sera elle aussi contrainte de revoir à la baisse ses transferts d’argent aux proches restés au pays.
Il rappelle toutefois que la dette extérieure des Etats ne représente qu’une partie de la dette totale. Il regrette ainsi que les Etats ne s’occupent pas davantage de rembourser leur dette intérieure "pourtant vitale pour les populations et les entrepreneurs" locaux.
Yves Ekoué Amaizo souligne par ailleurs qu’un rééchelonnement signifie simplement qu’on repousse les échéances de remboursement et ne constitue donc pas de soulagement sur le long terme puisque la dette persiste.
Par ailleurs, l’économiste réclame davantage de transparence : il note que ce qui est présenté comme un "cadeau" généreux de la part des pays riches ou des institutions financières internationales pour soutenir des pays en crise est presque toujours assorti de conditions qui sont tues au grand public. Parmi ses craintes : l’"annulation de la dette en échange des tests grandeur nature pour trouver des vaccins contre le Covid-19."
"Faire du pain ici pour le vendre au Brésil"
Selon lui, pour réduire durablement la dépendance des Etats africains à l’étranger, tout en protégeant l’environnement, la crise du Covid-19 doit être l’occasion notamment de valoriser l’économie de proximité et l’économie circulaire. Pour "réorganiser la production de richesses en Afrique" et illustre sa pensée avec un exemple concret :
"Il n’y a pas de sens à faire du pain pour aller le vendre au Brésil ou au Japon. Il doit en être de même pour la plupart des aliments et des biens dont nous avons besoin.Il s’agit donc de redonner la priorité pour produire, échanger, consommer et innover – si possible avec des incitations fiscales – dans un rayon de moins de 1000 km autour de soi."
Yves Ekoué Amaizo préconise aussi de penser l’économie comme devant servir non plus les Etats ou les dirigeants, mais bien, d’abord, les intérêts des populations.
La task force de l’UA axée sur l’argent
Alors Yves Ekoué Amaizo ne croit pas tellement à la "Covid-task force", ce groupe d’experts mis en place par l’Union africaine pour collecter des fonds afin de lutter contre le coronavirus.
"Les personnalités : Tidjane Thiam, ex-patron d’un ebanque suisse, Ngozi Okonjo-Iweala, ex-ministre des Finances du Nigeria et ancienne DG de la Banque mondiale, Trevor Manuel, ex-grand ministre qui a beaucoup lutté contre la corruption en Afrique du Sud, et qui a aujourd’hui sa propre société financière, et Donald Kaberuka, ancien président de la Banque africaine de développement.
Le problème est qu’au lieu de chercher des solutions pour l’éradication du Covid.19, l’Union africaine semble se concentrer sur la recherche d’argent, la réduction des dettes. On dirait bien que cette institution, l’UA, a un problème de crédibilité car elle est financée à plus de 83% par des fonds non-africains. Et cela pose un problème. On aurait aimé avoir parmi ces personnalités quand même des médecins africains de renom – et il y en a. »
Lettre ouverte de 90 intellectuels
Faire un bilan de la gestion des fonds publics en Afrique et plus globalement du système économique, c’est ce que réclament aussi 90 intellectuels signataires d’une lettre ouverte aux chefs d’Etat africains.
Parmi ceux qui ont récolté ces signatures se trouve l’économiste sénégalais Ndongo Samba Sylla, révolté par les inégalités mises en lumière par la crise actuelle.
"Pour prendre un exemple : une étude faite en 2017 au Sénégal montrait que 52% des ménages ruraux n’avaient accès ni au savon ni à l’eau potable. Ça montre que les gestes barrières (anti-coronavirus) sont impraticables pour beaucoup de nos populations."
Changer d'orientation
D’après Ndongo Samba Sylla, la crise liée au coronavirus montre qu’"il faut changer d’orientation de développement" de la façon suivante :
"Il faut aller davantage vers la souveraineté alimentaire et la souveraineté économique et monétaire. Cela requiert beaucoup plus de concertation entre pays africains, pour aller vers une dynamique d’intégration qui ne repose pas intégralement sur les marchés mais sur l’union politique, sur l’intégration politique africaine, comme l’avaient pensée nos pères fondateurs, des gens comme Kwame Nkrumah, Cheikh Anta Diop etc. C’est-à-dire aller vers l’unité africaine, dans l’autosuffisance, et exiger un nouvel ordre mondial où les peuples ont plus de marge de manœuvre et où les moyens de développement reposent sur une croissance partagée et équitable pour tous."
par Felwine Sarr
TEMPS ÉTRANGES
Ce virus révèle les failles et fragilités de la société-monde, son caractère profondément inégalitaire, ses défauts de solidarité - Depuis que le mantra de jouir sans entraves est le mieux partagé au monde, que faire ?
Temps étranges où la vie est réduite à ses fonctions essentielles ; biologiques, végétatives. En ces temps de pandémie, elle se résume à se maintenir en bonne santé. Et pour cela, éviter l’autre qui est un potentiel porteur de cette maladie, infectieuse, sournoise et invisible.
Etrange temps où l’on se rend aussi comte que vivre est au-delà de se maintenir en vie, c’est aussi vivre avec, c’est être relié aux autres.
Dakar est une ville où la proxémie est forte. C’est une notion qui varie selon les cultures. Certaines se touchent, se tâtent, s’embrassent, s’agglomèrent, s’agglutinent. D’autres mettent une plus grande distance entre les corps, se saluent de la tête, les deux moins jointes, les corps inclinés. Ici, pour se saluer on se touche. On se serre la main. Des fois on la pose sur le front et le cœur de l’autre. Vivre, c’est être ensemble. On se regroupe à plusieurs dans des pièces exiguës, sur des bancs publics, à l’entrée des maisons autour du thé, dans des gargotes, dans les transports en commun. Dans les baptêmes, les mariages, on fait grappe. La société fait littéralement corps.
La ville est fantomatique. La peur a gagné les esprits. D’abord ceux des citadins, bien informés, connectés 24h sur 24h sur des tubes cathodiques qui diffusent ad nauseam les mêmes informations. Le nombre de cas qui augmente. La mort qui rode et fauche. Les difficultés des systèmes de santé. La peur. Toujours la peur.
Couvre-feu. Interdiction de sortie entre 20h et 6h du matin. Le premier soir la police a bastonné les retardataires. Des jeunes qui ont trainé, des taximen, des pères de familles sur le pas de leur porte. Des aides-soignants rentrant chez eux mais n’ayant pas trouvé de transport en commun. Cette culture de la violence étatique sous nos cieux, qui remonte à l’époque coloniale, que nos états postcoloniaux ont repris à leur compte. Le peuple, un bétail que l’on mate, à défaut de l’éduquer. Le président de ce pays a remis aux affaires un commissaire tristement célèbre qui s’était illustré par sa brutalité lors des contestations de 2012, contre les velléités de troisième mandat d’Abdoulaye Wade, qui ont fait une dizaine de morts. La crise est une aubaine pour les pouvoirs qui en profitent pour serrer la vis, amenuiser les libertés publiques et justifier le tournant autoritaire dont ils rêvent tous. En France, ils en profitent pour chasser les immigrés clandestins et les rapatrier, gagner du terrain dans les banlieues dites difficiles, y casser du marginal, du pauvre, du noir et de l’arabe. Au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Burkina, soumettre le peuple à la trique et à la chicotte. Transformer un problème de santé publique en une problématique de maintien de l’ordre. S’attaquer aux plus vulnérables, au lieu de leur apporter soin et assistance.
L’Afrique, le continent le moins touché, parce que le moins connecté à la mobilité mondiale. Pour une fois, l’épidémie ne vient pas d’ici. Il n’empêche que l’OMS demande au continent de se réveiller et de se préparer au pire et Antonio Gutteres le Secrétaire Général de l’ONU déclare qu’il y aura des dizaines de millions de morts sur le Continent. Toujours la même antienne de mépris, de condescendance et de racisme, qui ne prend plus la peine d’observer la réalité. L’Afrique, c’est une réalité imaginaire dont la force des représentations qui lui sont accolées congédie sa réalité. Même si la plupart des pays Africains ont très tôt pris des mesures, dont certaines sont drastiques, contrairement à certains pays européens qui eux ont dormi. On nous anticipe le pire. C’est l’Afrique. Ce serait contre la logique des choses que nous nous en sortions pas trop mal. On oublie que le continent a malgré ses difficultés, une longue expérience de gestion des maladies infectieuses. Et certainement une plus grande résilience à tous types de chocs. Sa longue histoire est là pour en témoigner. Rendez-vous est pris au lendemain de la crise.
Ce virus nous oblige à faire monde, même négativement dans un premier temps. Il a transcendé les frontières géographiques, physiques, économiques, idéologiques, de classe. Il est le résultat de l’anthropocène, d’une dévastation de la biodiversité par un mode de production capitaliste écervelé et l’hubris du mode de vie d’un quart de la planète, les euraméricains auxquels s’ajoutent désormais les chinois. Tout le monde paye le prix de leur inconscience et de leur égoïsme. Ce virus révèle les failles et fragilités de la société-monde, son caractère profondément inégalitaire, ses défauts de solidarité. Il nous rappelle également notre communauté de destin. Nul n’échappera aux effets d’une crise écologique qui est déjà en cours.
Deux options, un repli, le retour et le renforcement des idéologies ethno-nationaliste ; ou la solidarité, une conscience écologique plus aiguë, une refondation de notre civilisation. Depuis l’arrêt imposé de la surproduction industrielle, les rivières et fleuves respirent mieux, les poissons reviennent, les grandes mégalopoles sont moins polluées, on respire mieux à Beijing. J’ai rarement respiré un air si pur sur la corniche de Dakar.
Mais il semblerait que l’art que nous pratiquons le mieux soit Lars oblivionis, l’art de l’oubli. Il est à craindre qu’une fois la crise passée, heureux de retrouver nos habitudes, notre vie sociale, après un temps de sidération que nous oublions le signal envoyé par le covid 19 et le sens de cette crise. Où faut-il chercher notre aveuglement au désastre ? Comment se fait-il qu’aucune alarme ne soit assez puissante pour nous empêcher d’aller gaiement vers le mur.
Le cerveau est depuis le pré-cambrien programmé pour assurer sa survie ; manger, se reproduire, stocker de l’information, accéder à un statut social, découvrir de nouveaux territoires. Au cœur du cerveau, le striatum assure cette tache en déchargeant de la dopamine pour récompenser et motiver les comportements qui assurent la survie. C’est ce que le neuroscientiste Sébastien Bohler appelle le bug du cerveau. Ce dernier est conçu pour toujours désirer consommer toujours plus. Ce principe qui a assuré notre survie jusqu’ici est celui qui aujourd’hui le menace. La surconsommation et la surexploitation de nos écosystèmes menace notre survie en temps qu’espèce.
Comment alors s’autolimiter lorsque la structure interne du cerveau et son fonctionnement conduisent à l’hubris. Les religions et les grands corsets communautaires ont tenté de modérer cette tendance, avec un succès limité. Mais depuis que le mantra de jouir sans entraves est le mieux partagé au monde, que faire ?
Renoncer au rêve sur-consumériste. Pour ceux du nord industrialisé entreprendre un travail de de-sintoxication consumériste. Pour ceux des sud, qui déjà vivent une austérité imposée, renoncer à l’imaginaire de la modernité industrielle occidentale et à ce modèle civilisationnel. En inventer un autre. Cette crise est opportunité pour cela.
Wole Soyinka, Makhily Gassama, C. Hamidou Kane et des dizaines d'autres intellectuels africains, exhortent leurs dirigeants à profiter de la crise du covid-19 pour penser le développement endogène, rompre avec la sous-traitance de leur souveraineté
Près de 90 intellectuels du continent et de la diaspora parmi lesquels Wole Soyinka, Makhily Gassama, Cheikh Hamidou Kane, Iva Cabral,
Odile Tobner, Olivette Otele, Boubacar Boris Diop adressent la lettre ci-dessous aux dirigeants africains, afin de les exhorter à saisir l'occasion de la crise du coronavirus pour opérer dès maintenant des ruptures dans la gouvernance.
Les risques qui planent sur le continent africain, relatifs à la propagation du COVID-19, nous interpellent individuellement et collectivement. L’heure est grave. Elle ne consiste pas à juguler une énième crise humanitaire « africaine » mais à contenir les effets d’un virus qui vient bousculer l’ordre du monde et interroger les fondements de notre vivre ensemble.
La pandémie du coronavirus met à nu ce que les classes moyennes et aisées vivant dans les grandes mégalopoles du continent ont feint de ne pas voir. Depuis près de dix ans, en effet, certains médias, intellectuels, hommes politiques et institutions financières internationales s’accrochent à l’image d’une Afrique en mouvement, d’une Afrique nouvelle frontière de l’expansion capitaliste. Une Afrique sur la voie de l’émergence économique ; une Afrique dont les taux de croissance positifs feraient pâlir d’envie plus d’un pays du Nord. Une telle représentation que l’on finissait par croire réelle à force d’en rêver se déchire désormais devant une crise multiforme qui n’a pas encore livré tous ses secrets. Dans le même temps, l’ordre global multilatéral que l’on se figurait encadré par un minimum de traités se délite sous nos yeux, faisant place à une lutte géopolitique féroce. Ce nouveau contexte de guerre d’influence économiquedu tous contre tous laisse dans l’ombre les pays du Sud, en leur rappelant s’il le fallait le rôle qui leur échoit : celui de spectateurs dociles d’un ordre du monde qui se construit par-devers eux.
La pandémie du COVID-19 pourrait saper les bases des États et des administrations africaines dont les défaillances profondes ont trop longtemps été ignorées par la majorité des dirigeants du continent et leur entourage. Il est impossible de les évoquer toutes, tant elles sont nombreuses : sous-investissement dans les secteurs de la santé publique et de la recherche fondamentale, insécurité alimentaire, gaspillage des finances publiques, priorisation d’infrastructures routières, énergétiques et aéroportuaires aux dépens du bien-être humain, etc. Autant de sujets qui font pourtant l’objet d’une littérature spécialisée, désormais abondante, mais qui semblent avoir peu pénétré les cercles du pouvoir des différents États du continent. La preuve la plus évidente de ce fossé est fournie par la gestion actuelle de la crise.
De la nécessité de gouverner avec compassion
Reprenant sans souci contextuel le modèle de « containment » et des régimes d’exception adoptésdes pays du Nord, nombreux sont les dirigeants africains imposant un confinement brutal à leurs populations souvent ponctué, lorsqu’il est n’est pas respecté, de violences policières. Si de telles mesures satisfont les classes aisées, à l’abri de la promiscuité et ayant la possibilité de travailler à domicile, elles demeurent punitives pour ceux qui, pour utiliser une formulation répandue à Kinshasa, doivent recourir à « l’article 15 », c’est-à-dire à la débrouille et aux activités dites informelles.
Soyons clairs. Il n’est nullement question d’opposer sécurité économique et sécurité sanitaire mais plutôt d’insister sur la nécessité pour les gouvernements africains de prendre en compte les conditions de précarité chronique vécue par la majorité de leurs populations. Cela, d’autant plus que le continent africain a une longueur d’avance sur le Nord en matière de gestion de crises sanitaires de grande ampleur, au regard du nombre de pandémies qui l’ont frappé ces dernières années.
La nature ayant horreur du vide, plusieurs initiatives fragiles provenant de la « société civile » se mettent progressivement en place. En aucun cas pourtant, le dynamisme d’individus ou d’acteurs privés ne peut pallier la désorganisation et l’impréparation chronique que seuls les États seraient en mesure d’endiguer à travers le continent.
Plutôt que de subir et tendre la main à nouveau en attendant meilleure fortune, il serait d’ores et déjà souhaitable de repenser notre vivre ensemble en partant de nos contextes spécifiques et des ressources diverses que nous avons.
Notre conviction est que l’urgence ne peut, et ne doit pas, constituer un mode de gouvernance. Il s’agit de saisir ce moment de crise majeure comme une opportunité afin de revoir les politiques publiques, de faire en sorte notamment qu’elles œuvrent en faveur des populations africaines et selon les priorités africaines. Bref, il s’agit de mettre en avant la valeur de chaque être humain, quel qu’il soit et quelles que soient ses appartenances, au-delà des logiques de profit, de domination et de monopolisation du pouvoir.
Au-delà de l’urgence
Les dirigeants africains doivent, et peuvent, proposer à leurs peuples une nouvelle idée politique d’Afrique.C’est une question de survie et non d’arguties intellectuelles comme on a trop souvent tendance à le croire. De profondes réflexions sont nécessaires sur la gestion et le fonctionnement des administrations nationales, de la fonction de l’État et de la place des normes juridiques dans la distribution et l’équilibre des pouvoirs à l’aune de systèmes de pensées adaptés aux réalités du continent. En effet, la seconde étape de nos indépendances politiques ne se réalisera que sur les terrains de l’inventivité politique et sociale, de la prise en charge par nous-mêmes de notre destinée commune. Des initiatives en ce sens existent déjà. Elles mériteraient simplement d’être écoutées, discutées et encouragées.
Le panafricanisme aussi a besoin d’un nouveau souffle. Il doit retrouver son inspiration originelle après des décennies d’errements. Si les progrès en matière d’intégration du continent ont été faibles jusque-là, la raison est que celle-ci n’a été conçue que sur la base de la seule doxadu libéralisme économique. Or, la pandémie du coronavirus montre tristement l’insuffisance de la réponse collective du continent autant sur le volet sanitaire qu’ailleurs. Plus que jamais, nous sommes placés devant la nécessité d’une gestion concertée et intégrée de domaines relatifs à la santé publique, à la recherche fondamentale dans toutes les disciplines scientifiques et aux politiques sociales. Dans cette perspective, il est important de repenser la santé comme un bien public essentiel, de revaloriser le statut du personnel de la santé, de relever les plateaux techniques des hôpitaux à un niveau qui permet à tous, y compris les gouvernants eux-mêmes, de se faire soigner en Afrique.
Cette lettre est un morceau de rappel, de rappel de l’évidence : le continent africain doit reprendre son destin en main. Or c’est dans les moments difficiles que des orientations nouvelles doivent être décidées et que des solutions pérennes doivent être mises en place.
Cette lettre est destinée aux dirigeants africains de tous bords, aux peuples africains et à ceux qui essaient de penser le continent. Nous les invitons à saisir l’opportunité de cette crise pour mutualiser leurs efforts afin de repenser l’idée d’un État au service du bien-être des peuples, de rompre avec le modèle de développement basé sur le cercle vicieux de l’endettement extérieur, de sortir de la vision orthodoxe de la croissance pour la croissance, et du profit pour le profit.
Il s’agit pour l’Afrique de retrouver la liberté intellectuelle et la capacité de créersans lesquelles aucune souveraineté n’est envisageable. De rompre avec la sous-traitance de nos prérogatives souveraines, de renouer avec les configurations locales, de sortir de l’imitation stérile, d’adapter la science, la technique et les programmes de recherche à nos contextes historiques et sociaux, de penser nos institutions en fonction de nos communes singularités et de ce que nous avons, de penser la gouvernance inclusive, le développement endogène, de créer de la valeur en Afrique afin de diminuer notre dépendance systémique. Surtout, il est primordial de ne pas oublier que le continent dispose de suffisamment de ressources matérielles et humaines pour bâtir une prospérité partagée sur des bases égalitaires et respectueuses de la dignité de chacun. L’absence de volonté politique et les agissements de l’extérieur ne peuvent plus constituer des excuses pour nos turpitudes. Nous n’avons pas le choix : nous devons changer de cap. Il est plus que temps !
Maria das Neves Baptista de Sousa (Université Lusíada de São Tomé e Príncipe)
Lazare Ki-Zerbo (Philosophe)
Lina Benabdallah (Wake Forest University)
Iolanda Evora (Université de Lisbonne)
Kokou Edem Christian Agbobli (Université du Québec à Montréal)
Opeyemi Rabiat Akande (Harvard University)
Lourenço do Rosário (Université Polytechnique du Mozambique)
Issa Ndiaye (Université de Bamako)
Yolande Bouka (Queen’s University)
Adama Samaké (Université Félix Houphouët Boigny)
Bruno Sena Martins (Université de Coimbra)
Charles Ukeje (University of Ile Ife)
Isaie Dougnon (Fordham University)
Cláudio Alves Furtado (Université fédérale de Bahia, Université du Cap-Vert)
Ebrima Ceesay (University of Birmingham)
Rita Chaves (Université de São Paolo)
Benaouda Lebdai (Université du Mans)
Guillaume Johnson (CNRS, Paris-Dauphine)
Ayano Mekonnen (University of Missouri)
Thierno Diop (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Mbemba Jabbi (University of Texas)
Abdoulaye Kane (University of Florida)
Muhammadu M.O. Kah (American University of Nigeria & University of the Gambia)
Alpha Amadou Barry Bano (Université de Sonfonia)
Sean Jacobs (The New School of International Affairs)
Yacouba Banhoro (Université Ouaga 1 Joseph Ki-Zerbo)
Dialo Diop (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Rahmane Idrissa (African Studies Center, Leiden)
José Luís Cabaco (Universidade Técnica de Moçambique)
Mouhamadou Ngouda Mboup (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Hassan Remanoun (Université d’Oran)
Oumar Ba (Morehouse College)
Salif Diop (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Narciso Matos (Université Polytechnique du Mozambique)
Mame Thierno Cissé (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Demba Moussa Dembélé (ARCADE, Sénégal)
Many Camara (Université d’Angers)
Ibrahima Wane (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Thomas Tieku (King's University College, Western University)
Jibrin Ibrahim (Center for Democracy and Development)
El Hadji Samba Ndiaye (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Benabbou Senouci (Université d’Oran)
José Luís Cabaço (Université technique du Mozambique)
Firoze Manji (Daraja Press)
Mansour Kedidir (CRASC, Oran)
Abdoul Aziz Diouf (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Mohamed Nachi (Université de Liège)
Alain Kaly (Universidade Federal Rural do Rio de Janeiro)
Last Dumi Moyo (American University of Nigeria)
Hafsi Bedhioufi (Université de la Manouba)
Abdoulaye Niang (Université Gaston Berger de Saint-Louis)
Lionel Zevounou (Université Paris Nanterre)
Amy Niang (University of the Witwatersrand)
Ndongo Samba Sylla (Économiste, Sénégal)
SOUPÇONS DE MICMAC
La distribution des vivres aux ménages impactés par le covid-19 va faire grand bruit les jours à venir. Au-delà de la polémique sur les appels d’offres, le coût du transport, il y a la distribution des denrées sur le terrain qui pose problème.
La distribution des vivres aux ménages impactés par le covid-19 va faire grand bruit les jours à venir. Au-delà de la polémique sur les appels d’offres, le coût du transport, il y a la distribution des denrées sur le terrain qui pose problème.
A priori, le gouvernement veut s’appuyer sur le Registre national unique (Rnu), un document issu de larges concertations sous la direction de l’Agence nationale des statistiques (Ansd). Sauf que ce fameux Rnu comporte plusieurs incongruités qui jurent d’avec la transparence qui doit être le viatique de cette opération. Sinon comment comprendre, dans certaines localités, que le nombre de ménages dit vulnérables soit supérieur au nombre d’inscrits sur le Registre national unique ?
A la lecture du document qui circule sur le net, on est frappé par cet impair qui ajoute une couche sombre au parfum de micmac qui se répand dans l’atmosphère autour de la distribution des vivres. La lueur d’espoir née du choix de l’armée s’est vite estompée, laissant place à un vent de suspicion, légitime du reste.
A l’intérieur du pays, au Fouta, dans le Sénégal oriental, dans le Fouladou, on a parfois frôlé des affrontements. A Missirah, département de Tamba, les chefs de village ont reçu une lettre du maire les appelant à sélectionner des familles devant bénéficier de cette aide. Les deux villages les plus peuplés (Tessan et Bidiancoto) ont été sommés de sélectionner respectivement 30 et 20 familles sur des centaines de ménages vulnérables.
Pour les autres villages et hameaux moins peuplés, c’est 8 ou 10 ménages qui doivent être sélectionnés. Conséquence : devant l’impossible compromis, certains ont rejeté les vivres. Ailleurs, à Niaoulin Tanou par exemple, la réunion pour le choix de 8 bénéficiaires a failli virer aux affrontements. Dire que la situation est électrique relève d’un euphémisme. Bref, c’est à se demander quel est le rôle de l’Armée dans cette opération ? Qui plus est, pourquoi demander aux chefs de village de choisir des ménages vulnérables si tant est que le Rnu identifie déjà les ayants droit.
L’absence de transparence sur les opérations risque d’annihiler l’ingénieuse idée d’appuyer les impactés du covid-19 et pire, de déboucher, à l’image du Kenya, sur des affrontements. N’est-ce pas René de Chateaubriand qui disait : ventre affamé n’a point d’oreille mais un sacré nez.
Amadou BA
LE FMI ZAPPE LE SENEGAL
Le conseil d’administration du FMI a décidé hier, d’approuver un allégement de la dette immédiat pour 25 pays dont 19 en Afrique.
Le conseil d’administration du FMI a décidé hier, d’approuver un allégement de la dette immédiat pour 25 pays dont 19 en Afrique. Ce, quelques minutes seulement après la sortie radio-télévisée d’Emmanuel Macron demandant l’annulation de la dette africaine.
Paradoxalement, le Sénégal dont le Chef de l’Etat a été à l’initiative d’un tel appel, dans une déclaration dite désormais de Dakar, ne figure pas sur la liste. Les pays qui bénéficieront d’un allégement du service de leur dette sont plutôt les suivants : Afghanistan, Bénin, Burkina Faso, Comores, Gambie, Guinée, Guinée Bissau, Haïti, Îles Solomon, Libéria, Madagascar, Malawi, Mali, Mozambique, Népal, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Rwanda, Sao Tomé-et-Principe, Sierra Leone, Tadjikistan, Tchad, Togo et Yémen.
Dans un communiqué qui est parvenu à la Rédaction de Sud Quotidien, la Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), déclaré : «notre conseil d’administration a approuvé un allégement immédiat du service de la dette pour 25 pays membres du FMI au titre du fonds fiduciaire réaménagé d’assistance et de riposte aux catastrophes (fonds fiduciaire ARC), dans le cadre des mesures que le FMI prend pour aider ses pays membres à faire face aux conséquences de la pandémie de COVID-19».
Kristalina Georgieva d’ajouter : «Nos pays membres les plus pauvres et les plus vulnérables recevront ainsi des dons qui couvriront leurs obligations envers le FMI pour une phase initiale de six mois, ce qui leur permettra de consacrer une plus grande partie de leurs faibles ressources financières aux soins médicaux et autres efforts de secours d’urgence vitale».
«Le fonds fiduciaire ARC peut actuellement fournir un allégement du service de la dette sous forme de dons à hauteur d’environ 500 millions de dollars, y compris les 185 millions de dollars promis récemment par le Royaume-Uni et les 100 millions de dollars fournis par le Japon comme ressources immédiatement disponibles.
D’autres pays, parmi lesquels la Chine et les Pays-Bas, s’apprêtent également à apporter des contributions importantes», précise l’édit. «J’engage d’autres donateurs à nous aider à reconstituer les ressources du fonds fiduciaire et à renforcer davantage notre capacité à offrir à nos pays membres les plus pauvres un allégement supplémentaire du service de la dette pendant pas moins de deux ans», a conclu Kristalina Georgieva.
LE FMI APPROUVE 442 MILLIONS DE DOLLARS D'AIDE AU SÉNÉGAL
L'aide du Fonds vient de deux facilités qui permettent à un pays d'accéder rapidement à de l'agent en cas d'urgence
Le conseil d'administration du Fonds monétaire international a approuvé une aide de 442 millions de dollars pour le Sénégal, afin de dégager de l'argent pour que le pays puisse faire face à l'épidémie de Covid-19. L'aide du Fonds vient de deux facilités qui permettent à un pays d'accéder rapidement à de l'agent en cas d'urgence.Le Sénégal va toucher 294,7 millions de dollars au titre de l'instrument de financement rapide et un décaissement au titre de la facilité de crédit rapide équivalant 147,4 millions de dollars "pour aider le Sénégal à répondre aux besoins urgents de financement de la balance des paiements qui résultent de la pandémie de COVID-19", souligne un communiqué du Fonds.
L'épidémie frappe durement l'économie sénégalaise (tourisme, transport, construction et commerce de détail) et qui plus est la crise qui frappe l'Europe a aussi réduit le montant de l'argent transféré par les expatriés.
"Les autorités ont agi rapidement pour atténuer l'impact de la pandémie en augmentant les dépenses de santé et en offrant une aide ciblée aux ménages vulnérables et aux entreprises, avec notamment une aide alimentaire, la suspension des paiements des factures de services publics pour les populations les plus pauvres et des allégements fiscaux ciblés", se félicite le FMI. L'aide apportée par le Fonds "contribuera à préserver l'espace budgétaire et à catalyser une aide supplémentaire de la communauté internationale, de préférence sous forme de dons", souligne encore l'institution.
LES FINANCES DU FOOTBALL AFRICAIN FRAGILISÉES
Pour le moment, ce sont surtout les joueurs qui apparaissent en difficulté, mais le report éventuel du CHAN pourrait créer des tensions
L'arrêt des compétitions en raison du coronavirus n'est pas sans impact sur les finances du football africain, avec toutefois des répercussions variables selon les acteurs et les régions. Enquête.
L’arrêt des compétitions lié au coronavirus a également des conséquences sur le plan financier. Si pour l’instant, la CAF n’a pas de souci à se faire, des tensions pourraient apparaître dans les prochaines semaines. La situation des différents acteurs en témoigne. Actuellement confiné à Yaoundé où il est venu régler les détails techniques de diffusion du CHAN, le Directeur Général de l’UAR (Union africaine de radiodiffusion), Grégoire Ndjaka confie à Football365 Afrique que les chaînes TV ont déjà payé le CHAN : « quand nous avons vendu la CAN, nous avons vendu le CHAN au même moment. Ceux qui ont acheté la CAN ont automatiquement acheté le CHAN. C’est pour cela que je ne comprends pas souvent certaines réactions qui nous disent que c’est cher, mais c’était quand même douze compétitions qui étaient vendues au même moment. Donc, le CHAN est vendu. »
Selon un consultant en marketing spécialisé sur l’Afrique que nous avons joint, les droits TV et commerciaux ne connaissent pas de retard. Pour les compétitions de club, les droits sont versés en deux fois : la moitié après la phase de poules et le solde à la fin de la compétition. Quant aux rencontres éliminatoires de la CAN, elles sont payées en fin de compétition. Autrement dit, en l’état, seul le versement prévu en juin pourrait connaître du retard. Une situation qui confortent les déclarations, sur RFI, de Abdelmounaïm Bah sur la bonne santé de la CAF, dont il est le secrétaire général par intérim.
Clubs : l’Afrique subsaharienne en difficulté
Pour les clubs, la situation est forcément différente selon que l’on soit au nord ou au sud du Sahara. À l’arrêt depuis le mois de mars, les clubs marocains devraient pouvoir passer cette période si la crise ne dure pas plus de trois mois. « Qui dit plus de match dit plus de recettes de billetterie, plus de recette de sponsoring et de droits TV. C’est difficile pour tout le monde, mais les clubs marocains ont de la trésorerie. Ils vont tenir trois mois sans souci », assure une source proche du dossier. Plus au sud, le déficit structurel des clubs peut être plus problématique.
Pour Amadou Bangoura, Directeur Général du Horoya AC, unique équipe subsaharienne encore qualifiée en compétitions africaines (avec des clubs marocains et égyptiens), cette crise est « peut-être la goutte d’eau dans un vase déjà plein. Malgré notre qualification en demi-finale de la Coupe africaine, aucune entreprise guinéenne n’est devenue partenaire du club. Dans n’importe quel autre pays, nos résultats auraient été transformés en succès marketing. C’est une aberration surtout que dans le même temps, nous ne recevons aucune aide de l’État, ni de notre ministère de tutelle. » Le club historique guinéen peut continuer à faire face à ses charges, notamment salariales en raison de l’engagement de leur propriétaire, qui met son « patrimoine personnel au service du club. » Le dirigeant conclut en espérant que « le contexte ne s’éternise pas, avec une éventuelle incidence sur ses autres affaires. Tout est lié. »
Joueurs : le lourd prix de l’inactivité
Derniers acteurs impactés, les joueurs. Présent dans le groupe sélectionné pour le CHAN, Etta Bawak est actuellement retourné dans sa famille à Douala avec un programme de maintien en forme à respecter. Le joueur de Cotonsport de Garoua ne cache pas la difficulté actuelle : « c’est difficile. Tout est arrêté. Et comme vous savez, c’est en jouant qu’on a les avantages. Donc on prie le bon Dieu pour que le championnat puisse reprendre. » La situation des joueurs préoccupe également Hégaud Ouattara. « Je pense que dans les prochaines semaines, de nombreux clubs peuvent avoir des problèmes pour les paiements des joueurs, estime le conseiller en communication d’Ahmad. Déjà qu’en temps normal, les salaires représentent des difficultés en Afrique, si l’argent est rare, vous pourrez comprendre l’inquiétude et le besoin de trouver rapidement des portes de sortie. »
En conclusion, l’Afrique n’est pas encore en crise, comme l’Europe. Une très longue trêve pourrait toutefois entraîner des difficultés pour le football continental. Pour le moment, ce sont surtout les joueurs qui apparaissent en difficulté, mais le report éventuel du CHAN pourrait créer des tensions. La négociation des droits TV de la CAN 2021 pourrait présenter quelques, surtout si la compétition dédiée aux joueurs locaux n’est pas livrée à ce moment. Grégoire Ndjaka préfère rester positif : « nous sommes des hommes et nous devons nous adapter à toutes les situations que nous offre la vie et je crois que la CAF est aussi dans ces dispositions. »