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1 mai 2025
Politique
Par Ibrahima BAKHOUM
BABACAR SOUS TERRE, LA PRESSE PERD SON EMBLEME
Maison de la Presse Babacar Touré. Cette fois Mbaye, tu ne pourras ni décliner ni même faire attendre. C’est comme si le président Macky Sall prenait une petite revanche
Maison de la Presse Babacar Touré. Cette fois Mbaye, tu ne pourras ni décliner ni même faire attendre. C’est comme si le président Macky Sall prenait une petite revanche.
En 2012, le Chef de l’Etat avait dû s’y prendre par deux fois avant de te convaincre d’accepter la Présidence du Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel. On est en septembre. Ceux qui suivaient le dossier savent que, même la composition du Collège du CNRA avait pris un temps plus long que d’ordinaire. Tu avais demandé et obtenu que les futurs Conseillers fussent politiquement peu ou pas du tout marqués. Surtout pas du tout partisans. Logique, Macky te laissa le choix de la désignation des membres de ton équipe. Et tu t’abstins de copinage. Certains de tes futurs collaborateurs ne t’avaient jamais rencontré et il y en avait dont tu ne découvris le visage que le jour où, dans une prise de parole publique au King Fahd Palace, le Chef de l’Etat t’a lancé un « oui, Monsieur le Président, j’ai validé votre liste ». Voilà pour la petite histoire. Ceux qui un moment, ruèrent dans les brancards de la dénonciation avaient tout faux, estimant que le Président de la République venait de donner « à un concurrent », des droits de vie et de mort sur les autres éditeurs. On pouvait les comprendre. Le Groupe Sud dont tu étais jusqu’alors le PDG, avait déjà sa radio. Une première comme investissement privé dans la chaine de valeur de la Communication audiovisuelle au Sénégal. Là encore, tu t’illustras en pionnier.
Acteur des médias, tu avais tout ton mandat durant à la tête du CNRA, mis l’accent sur la pédagogie et le contact direct avec les éditeurs, même et surtout ceux qui à travers des programmes, se rendaient coupables de sorties de pistes éthique et déontologique. Pour une stricte observance de la loi, tu n’avais non plus jamais voulu te laisser prendre en défaut. Ton successeur a trouvé la tradition dans la maison ; il est resté dans la continuité. Vous avez en commun d’être des journalistes.
REUSSIR LA TRANSITION
Arrivé au terme de ta mission en 2018, tu t’es abstenu de retourner immédiatement à tes fonctions éditoriales. L’élégance républicaine t’avait éloigné des pages de Sud. Parce que devenu régulateur, tu avais choisi de ne jamais être juge et partie. Même si concernant la publication phare du groupe tu ne t’étais pas laissé aller à l’indifférence, tu avais fait le pari de ne jamais te laisser surprendre à prendre parti pour le quotidien dont tu proposas le titre de l’ancêtre, Sud magazine. C’était un jour de 1985. Le petit cercle de cinq confrères des quatrième, sixième et septième promotions du CESTI réunis chez toi à HAMO 1 avait tellement rêvé de panafricanisme et de libération et/ou liberté pour les peuples du Sud, que ta proposition de nom pour ce que nous allions créer, avait tout de suite obtenu l’adhésion des quatre autres. Une dizaine d’années plus tard, tu parlas de Sud comme d’une « galaxie éclatée », parce que quelques uns de ceux qui avaient été là aux premières heures ou venus plus tard, s’étaient ouvert d’autres pistes entreprenariales, sans jamais rompre avec la famille. Fairplay et grand Seigneur comme on ne peut plus, tu avais accompagné financièrement l’initiative du premier des quatre, parti faire cavalier seul. Pendant ce temps, sous ton influence, ton entregent, ton portefeuille relationnel qui débordait largement les frontières de notre pays, SUD renforçait sa place dans la construction d’une opinion publique de plus en plus regardante sur la gouvernance publique. C’était le projet.
L’emblème aux « 3 lettres d’or » avait réussi une initiative inédite. Tu t’es souvent plu à le dire dans des moments de plaisanterie : ce qui est devenu aujourd’hui le Groupe Multimédia Sud Communication était au départ, un produit-passe temps pour de jeunes journalistes ayant chacun un port d’attache professionnel avec salaire relativement correct. Abdoulaye Ndiaga Sylla, Sidy Gaye et Ibrahima Fall étaient encore au quotidien gouvernemental Le Soleil, où tu fis stage es qualités étudiant au CESTI. La fréquentation Ecole-milieu du travail avait pu vous faire tisser des rapports de confiance mutuelle en la valeur professionnelle de chacun. Plus tard, vous rattrapa le besoin incompressible d’expression plurielle et de libération éditoriale. Il vous fallut pouvoir pratiquer le journalisme tel que vous l’aviez appris, ce que ne pouvaient pas toujours permettre les médias dits d’Etat. Parmi ces derniers l’Agence de Presse Sénégalaise. Là aussi tu as été stagiaire.
ET LE SOLEIL PERDIT DE BRILLANTES PLUMES
Le besoin d’indépendance comme en rêve tout jeune journaliste avait été si souvent manifeste dans les attitudes de tes confrères et futurs co-fondateurs de Sud, que nul ne fut surpris par la démission de Sylla, Fall et Gaye. Le Soleil venait de perdre de bons analystes et versa à l’entreprise de Presse en gestation, de redoutables polémistes. Aussi, beaucoup y compris dans le milieu professionnel, ne donnèrent-ils pas cher d’un compagnonnage durable entre fortes têtes. Tu savais tout cela. Il y avait respect des différences et tu es parvenu, en bon meneur d’hommes, à créer un esprit d’entreprise en capitalisant sur les contradictions, les atouts et le tempérament de chacun.
De ton poste à ENDA, où ton assistante Mame Fatou Fall s’occupait de dactylographier tes premiers textes destinés à ce qui va devenir SUD Magazine, tu coordonnais déjà le contenu du premier numéro de la publication, à l’origine trimestrielle. La Une fut consacrée, en février 1986, à l’éminent Pr Cheikh Anta Diop. Le projet panafricaniste prenait déjà forme. La plateforme démocratique n’a plus jamais quitté l’espace public dont tu devins une figure, des plus illustres, des plus emblématiques.
Un éditorial signé Babacar Touré emballait tout ce que le Sénégal et l’Afrique de l’Ouest d’alors avaient comme intellectuels et personnalités politiques de premier plan. Ainsi Sud Magazine d’abord, Sud Hebdo ensuite, le quotidien et la radio FM successivement, ont réussi à donner un autre nouveau visage à la presse papier et à la radio, dans un pays pas vierge d’initiatives privées, mais pour des expériences qui, dans le secteur, ont fait long feu.
Les titres qui suivirent la naissance de Sud hebdo complétèrent le tableau de la bien nommée « bande des quatre », ou encore les « 4 Mousquetaires ». Walfadjri, le Cafard Libéré et le Témoin arrivaient sur le marché.
En toi Babacar, les hommes et femmes des médias, les universitaires d’ici et d’ailleurs venaient de découvrir un maître, un militant du journalisme. La profession s’en trouvait rapidement rendue plus attractive, et des jeunes sortis d’Ecoles ou se faisant encadrer sur le tas et le tard pour certains, ne rêvaient que de cette profession où la liberté d’expression côtoyait et se renforçait du devoir assumé de responsabilité. Sud passé quotidien en 1993, la radio Sud FM ouverte l’année suivante, en 1994, tu eus l’idée de donner de la chance à ceux dont le concours très sélectif du Cesti pouvait briser le rêve de devenir Journaliste ou Communicant.
ASSURER LA FORMATION POUR PRESERVER LA RELEVE
L’explosion médiatique que tu voyais venir appelait davantage de personnels bien préparés aux fonctions sociales d’information par voie de Presse. Et naquit en 1996, l’Institut Supérieur des Sciences de l’Information et de la Communication (ISSIC), dont la seule évocation renvoyait à Abdou Latif Coulibaly devenu plus tard, figure emblématique du journalisme d’investigation. « L’Ecole de Latif » s’était fait un nom, une enseigne dans l’Enseignement Supérieur. Une décennie venait alors de s’écouler depuis le matin où, fouettés par le vent frisquet des mois de décembre, nous faisions le pied de gru devant le hangar, à cette heure encore fermé, de l’ADP. Je cherchai les mots pour te distraire autrement, vu ton humeur du moment. Tu venais de te demander pourquoi il y avait si peu d’engagés (nous n’étions que deux en vérité), pour assurer la manutention de la publication, au Km 2,5 Boulevard du Centenaire. Sud Magazine avait ses locaux à la rue de Bayeux en centre-ville. Une petite pièce au fond d’une cour, après que nous avions un temps durant, quasi squaté le salon de Mme Touré, chez toi en proche banlieue de Dakar. Tu avais aussi relevé à cet instant, que nous avions été les principaux rédacteurs des articles de l’édition dont nous étions invités à aller enlever le tirage. La Messagerie qui distribuait tout ce qui était publications de qualité au Sénégal, faisait l’essentiel de son chiffre d’affaires avec les journaux français et la presse africaine de Paris. Le Titre Sud faisait encore ses petits pas dans le monde des médias qui comptent. Pour te calmer ce matin donc, je t’ai sorti quelques mots dont je n’avais moi-même, pas mesuré la portée prémonitoire.
LE SUCCES AU-DELA DES ESPERANCES
« Arrivera un jour, te dis-je, où dans ce pays, personne ne pourra parler de Journalisme sans y associer ton nom ». On était en 1986. Et depuis, je ne sais combien de fois je t’ai rappelé cette prédiction, question de te dire que j’avais vu juste. Ce qui est arrivé est très largement au-delà de ce que je croyais voir venir. La réponse que tu me servis sur le moment est encore fraiche dans ma mémoire. « Tu penses que je travaille pour la gloriole » ?, me lanças-tu, histoire de me signifier que ton rêve n’était pas de célébrité ni de vedettariat. Tu n’avais pas vu venir, car te voilà largement auréolé de gloire. La preuve irréfutable en est administrée par le torrent d’éloges qui coulent dans tous les médias du pays et hors du Sénégal, depuis l’annonce de ton retrait définitif de la scène, dimanche 25 juillet 2020.
Après le professionnel, nous nous économisons relativement à ce qui fait que j’ai souvent parlé de toi comme d’une sécurité sociale ambulante. Ta main n’a jamais quitté ta poche. Des milliers de familles dans ce pays et ailleurs peuvent en témoigner. Il y a quelque trois semaines encore, je te le répétait après un appel de ton collaborateur et homme de confiance Ousmane NDIAYE, qui ne se signalait jamais sans la bonne nouvelle : « le grand m’a demandé de t’envoyer … » Le lendemain du dernier message de ce même Ousmane, tu m’annonçais être sur le chemin de chez ton médecin. Optimiste comme j’eus souvent raison de l’être, j’attendais le jour que j’espérais évident et proche, où tu me dirais comme de précédentes fois, « Ok B... tout va bien je suis à Ngaparou ». Je te voyais te sortir de la maladie. Erreur ; on t’a sorti de chez le toubib. L’imposant gabarit avait refroidi. Adieu Mbaye. Mes condoléances à ta famille, à Ndèye Fatou ta fille qui dut si souvent, les samedis après 13 h, sommeiller seule à la devanture de son Ecole maternelle. Là, attendait la gamine, que vienne la chercher le papa occupé à cogiter sur le menu d’une revue à la prochaine parution improbable, parce qu’il fallait aux fondateurs se cotiser pour aller à l’imprimerie. Ces condoléances vont à tous les tiens, aux frères et sœurs, à la maman de Ndèye Fatou qui eut un moment à imaginer un « club des épouses dont les maris rentrent tard ». C’était au début de Sud quotidien avec des bouclages tirant en longueur, tous les soirs. Illustration d’un paradoxe car certains jours, il s’y passait une ambiance exactement comme on ne pouvait imaginer se comporter, ces « mécontents » et/ou « rebelles », présumés hostiles à l’ordre établi. Se représentait-on ces journalistes comme une faune d’individus incapables de plaisanteries, de moments d’évasion joyeuse même sur le lieu de travail ?
UN TON PAS AU GOÛT DES AMIS
Vu de l’extérieur et victime d’un imaginaire qui accompagna ses fondateurs mais surtout alimenté par le physique de celui qui passait devant, Sud était une affaire de gens austères, voire prétentieux… opposés au Pouvoir. Le président Abdou Diouf et son Premier ministre Habib Thiam étaient pourtant tous deux du cercle de ceux dont on pouvait dire que Babacar avait l’écoute. De ces deux plus hautes personnalités de la République, on peut imaginer que tu connaissais l’office, la table le jardin et peut-être un bout d’arrière-cour. Ce qui n’avait aucune incidence sur la politique éditoriale de Sud. Tu avais tenu à garder tes amis à distance pendant que les journalistes s’occupaient à « informer juste et vrai ». La maison n’était pas à un paradoxe près. Au lendemain de ton départ pour le voyage sans retour, Mamadou Amat parlait encore de ton sens de l’humour. Lui Yamatélé imbattable sur ce registre, sait de quoi il parle.
Outre vos relations personnelles, il anima pour Sud hebdo, une célèbre chronique au titre de critique télé. Un redoutable observateur qui troublait le sommeil des agents d’antenne et présentateurs du JT de l’alors unique chaine au Sénégal. Cela lui valut ce pseudonyme de Yamatélé, que lui attribuèrent les cibles de ces mises au point. C’était en référence au petit bonhomme du dessin animé qui portait toujours son poste partout, sur l’épaule. Tu n’eus pas tort de lui ouvrir les pages de la publication, creuset de diversités d’opinions et de talents, le tout au service d’un journalisme loin des règlements de compte personnels et de la propagande ; que celle-ci soit assumée ou déguisée. Amat qui était à l’APS savait qu’il arrivait à la rédaction de s’animer d’anecdotes et de blagues entre reporters qui se vouaient un égal et mutuel respect. Et chacun parmi les déjà anciens de la Rédaction qui se rajeunissait, avait une étiquette. Celle-ci renvoyait à son style ou à des expressions qui se retrouvaient souvent dans ses textes.
Sidy Gaye le chroniqueur économique était sur des « Boulevards », quand Ibrahima Fall, « petit chef » chroniqueur politique et militant de gauche, décortiquait ses « Vulgates » devant un Abdoulaye Ndiaga Sylla incarnant la sagesse et la combativité syndicale. Il avait été secrétaire général du Synpics, et à ce titre négociateur à tes côtés, de la Convention Collective de 1991.
Loin du syndicat et exclusivement pour Sud, et plus d’une fois, il t’est arrivé d’être mis en minorité dans une mesure à prendre. Pour ne pas lâcher prise, tu faisais remettre la discussion à plus tard, le temps d’aligner Sylla, sur ton point de vue.
A la reprise, on disait rarement non à Ndiaga. Et tu gagnais. Je t’ai souvent rappelé ces épisodes du parcours de Sud. Dans la bonne humeur. Certains autres jours, tout prenait des allures de grand place joyeuse, A tel point qu’on pouvait craindre pour l’heure du bouclage. Mais les femmes et hommes préposés au traitement des menus avaient la main. Une fois les informations recoupées, vérifiées et consolidées, sortir du texte entrait dans l’ordinaire d’un journal normal. C’était aussi Sud.
ILS ETAIENT LA AUSSI
Babacar, je sais qu’il y a de ces personnes qui nous quittés et dont tu ne supporterais que leur nom et apport ne soient pas rappelés quand on parle des débuts de Sud. Comme des humains, nous avions déjà en projet de revisiter tout cela au 35 ème anniversaire, en 2021. Parmi eux, Mansour Niang Niamagne qui conçut et accompagna la charte graphique du magazine depuis Hamo1. Paul Nejem de l’imprimerie Saint Paul que tu te plaisais à appeler Petit Paul. Il avait été un complice des premières heures. Et Sud Magazine pouvait espérer paraître, même si l’enveloppe commençait à révéler une solvabilité peu évidente de celui qui signait les bons de commande, toi Babacar, en l’occurrence. Mais Paul et toi saviez manoeuver dans une mutuelle confiance. Il t’a devancé auprès du Créateur SWT depuis des années. Paix à son âme, lui qui dès le début, crut en des jeunes certes volontaires et engagés mais si peu prêts financièrement. Tu étais crédible, cela suffisait au fournisseur. Tu ne t’en étais pas arrêté à trouver les moyens de faire imprimer Sud Magazine. Tu eus l’idée de faire sponsoriser le projet jeune, par l’ancien Président du Sénégal. Léopold Sédar Senghor n’était plus aux affaires mais tu obtins un rendez-vous aux Dents de la Mer, sa résidence privée. Il te proposa de lui présenter un projet de Lettre qu’il signa après t’avoir assuré que Sud Magazine était agréable à lire. « Le ton est bon », voilà ses mots. ?
Babacar Touré, la Presse sénégalaise et celle ouest africaine francophone notamment, te doivent d’avoir connu un essor qui n’est, depuis lors, plus jamais remis en question. Partout naissent des Titres privés avec plus ou moins de chance de longévité. La démocratie s’en est trouvée à l’ordre du jour dans tous les pays de la sous région, même si les multiples soubresauts peuvent laisser une impression d’impréparation, telle que voulue et cultivée par des Pouvoirs politiques multi décennaux. Ce qu’il serait extrêmement dangereux de défendre, c’est l’idée que rien ne peut se faire contre les projets dictatoriaux. La Presse pourra assumer et poursuivre ses fonctions de vigie de la démocratie, si chacun de tes héritiers professionnels s’emploie à préserver et vivifier le legs.
ILS ONT SAUVE LA DEMOCRATIE
Tu as déjà reçu en son temps, des confidences sur comment la presse privée, Sud notamment, avait gêné et fait renoncer à un projet de liquidation de l’opposition sénégalaise. On sortait d’élections troubles en 1988. Et dans les cercles huppés de l’establishment on n’en revenait pas. La question était pour les décideurs, de savoir d’où sortaient donc ces journalistes inconnus aux tableaux des fils de, neveux de, frère de... C’est vrai qu’un coup d’œil sur les pièces d’état civil pouvait intriguer un peu plus. Entre 145 à 150 km voire davantage au sud ou à l’ouest de la capitale comme lieu de naissance, pour des perturbateurs de l’ordre établi par la puissance étatique, cela s’expliquait difficilement. Tout politiquement engagé que tu fusses, on ne pouvait te classer au niveau social de cet autre révolutionnaire, fils de Dakar né à Niamey et tué à la prison de Gorée en 1973. Comme Oumar Blondin Diop, tu fis tes humanités à l’école de la gauche radicale. Ce que tu en as gardé a fait de toi l’homme d’une immense générosité dont le talent professionnel et le combat démocratique sont salués partout. Politiquement cultivé, journalistiquement aguerri, l’histoire bientôt tri décennal de Sud a révélé en toi un grand homme intègre, digne et bon. Ton nom se prononce encore avoir bonheur et fierté dans les couloirs du CNRA dont tu as proposé au chef de l’Etat de nommer à la présidence, un autre Babacar, alors que tu terminais ton mandat. Et conseiller de l’ombre tu le restas pour aider à aplanir les rapports entre le Régulateur de l’Audiovisuel et des éditeurs qui s’essayaient à la sortie de route.
PRENDS TA MAISON ET REPOSE EN PAIX
On n’aura jamais tout dit te concernant, post mortem. Et comme tu sus allier vision, professionnalisme, rigueur et sociabilité, nous allons faire comme tu aimais recommander. Faire ou dire chaque chose en son temps, mais le faire ou le dire quand on aura fini de s’assurer que nul ne s’engagera sur une piste aventureuse du fait des seuls écrits d’un journaliste. A chaque étape son sujet. De quelques étapes de la marche des Sud-produits et de ta gouvernance de la Régulation de l’Audiovisuel, nous parlerons une prochaine fois avec le soutien d’autres acteurs au sein du Groupe et de l’institution. Repose en Paix Mbaye. Mais ton nom figurera sur tous les communiqués, cartons d’invitation ou supports publicitaires portant sur toutes activités et manifestions à tenir dans ou pas loin du majestueux immeuble qui trône sur la rue 5 angle Corniche, à Dakar. Une consécration décidée par le président Macky Sall et mérité incontestablement par l’incontournable Babacar Touré, lorsqu’il s’agit d’honorer la presse. Nous savons ce que nous avons perdu. L’ancien enseignant au Cesti, formateur de la plupart d’entre notre génération, ancien fonctionnaire de l’Unesco à Paris et Dakar a eu le mot juste.
Diomansi Bombote assimile ta disparition à une « amputation ». Elle est incurable parce que le membre séparé du corps n’est jamais remplaçable à l’identique de l’originel. Tu me confiais, pas plus tard que l’année dernière, que tu étais « un être des eaux ». Te voici désormais majestueusement face à la mer, avec vue imprenable sur l’Océan Atlantique. Cette fois, Mbaye je te le redis, impossible d’opposer au Conseil des ministres ta célèbre adresse à Diouf. A Macky et pour cette distinction, tu ne pourras pas dire « Non Monsieur le Président ! ».
par Makhtar Diouf
AVEC BABACAR (MBAYE) TOURÉ
EXCLUSIF SENEPLUS - Lors de notre dernière rencontre, il me propose devant sa fille, de coécrire avec moi un livre. Je lui donne mon accord et lui demande, comme l’idée vient de lui, de choisir le thème. Un projet qui ne verra pas le jour
Lorsque j’apprends la nouvelle ce lundi à 6h 30 sur sa radio Sud Fm, ma première pensée va vers sa fille étudiante en compagnie de qui il est venu me rendre visite à la maison, il y a quelques mois. Comme il le faisait chaque année. C’est la dernière fois qu’on s’est vu, mais nous sommes restés en correspondance.
Ma première rencontre rapprochée avec lui a lieu au milieu des années 1980 dans un avion qui nous amène à Cotonou pour une conférence. C’est en plein vol qu’il vient vers moi pour se présenter et me dire qu’il a été mon étudiant au département de Sciences économiques de l’Ucad et qu’il est maintenant dans le journalisme. Il est en compagnie de mon ami Mbaye Sidy Mbaye.
Lorsqu’il lance le journal Sud-Hebdo dans cette masure qui leur sert de local au centre - ville à la rue Raffenel (actuelle rue Joseph Gomis), avec son escouade de talentueux et téméraires jeunes intellectuels-journalistes comme Abdoulaye Ndiaga Sylla, Alain Agboton, Ibrahima Fall, Vieux Savané, Abdou Latif Coulibaly, Sidy Gaye … je fais partie des premiers à les accompagner, à les encourager. Je les ai suivis dans leur audacieuse aventure jusqu’à la création de la radio Sud-Fm et du quotidien Sud où j’envoie pour publication tous mes articles d’intervention sur l’actualité.
Depuis lors, une solide amitié entre nous. Il me rend visite au moins une fois chaque année. Lorsque je lui dis que je ne sors pas beaucoup, il me rétorque que lui non plus ne sort pas beaucoup, ayant jeté ses bases à Ngaparou, et d’ajouter : « Sortir d’ailleurs pour aller où ? ».
Il m’appelait toujours ‘’Grand’’ au téléphone, et ‘’Grand frère’’ au courrier. Dans le dernier email que je lui envoie le 21 mai 2020, je le taquine en ces termes : ‘’Babacar le confiné’’. Il me fait cette réponse : Salam, grand frère. Le covid m’a empêché d’effectuer mon Ziar du Ramadan. Il veut me dire qu’il respecte la recommandation ‘’Restez chez vous’’ pour éviter la diffusion du virus.
C’est lors de notre dernière rencontre qu’il me propose devant sa fille, de coécrire avec moi un livre. Je lui donne mon accord et lui demande, comme l’idée vient de lui, de choisir le thème. Un projet qui ne verra pas le jour.
Je n’ai pas pu aller à la levée de corps, ayant reçu la visite de cet indésirable que certains appellent ‘’migraine’’. Je suis resté à la maison avec un exemplaire du Coran pour lui faire tout ce que recommande l’Islam à l’intention des chers disparus. Je me joins naturellement à tous les hommages mérités et sincères qui lui ont été rendus.
Au décès de sa compatriote, la grande romancière George Sand en 1876, Victor Hugo a ses mots : Je pleure une morte. Je salue une immortelle. Nombreux sont ceux qui, sans l’exprimer, ont murmuré des propos semblables dans leurs cœurs à l’endroit de Babacar Mbaye Touré. Mais lui qui n’avait rien d’un rabat-joie, plutôt farceur, avec son goût pour la plaisanterie, il aurait sûrement souhaité que personne ne soit triste à l’occasion de son rappel à Dieu.
Dans mon ordinateur figurent deux adresses email qui ne seront plus mis à contribution, mais qui ne seront pas effacés : babacarsud@yahoo.fr et mbayeture@gmail.com.
LES NOMINATIONS AU CONSEIL DES MINISTRES DU 29 JUILLET
SenePlus publie ci-dessous, les nominations prononcées en Conseil des ministres du 29 juillet 2020.
"Au titre des mesures individuelles, le Président de la République a pris les décisions suivantes :
Monsieur Lamine DIOM, Inspecteur général d’Etat de classe exceptionnelle, matricule de solde n° 514357/C, est nommé, Vérificateur général du Sénégal ;
Monsieur Sacoura GUEYE, inspecteur de l’Enseignement élémentaire, matricule de solde n° 621654/Z, est nommé, Directeur de l’Institut national d’Education et de Formation des jeunes aveugles (INEFJA) au ministère de l’Education nationale."
L'ÉTAT VA ÉVALUER L'IMPACT DE LA COVID-19 EN MILIEU DU TRAVAIL
Il est demandé au ministre du travail de finaliser, avant le 15 août 2020, avec les partenaires sociaux et le Haut Conseil du Dialogue social, un rapport à cet effet - COMMUNIQUÉ DU CONSEIL DES MINISTRES
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué du Conseil des ministres du 29 juillet 2020.
"Le Président de la République, Son Excellence Monsieur Macky SALL, a présidé le Conseil des ministres, le mercredi 29 juillet 2020, à 10 heures, au Palais de la République.
Le Chef de l’Etat, à l’entame de sa communication, a adressé, au nom de la Nation, ses condoléances les plus attristées à la famille du Défunt et à toute la Presse sénégalaise, africaine et internationale, suite au Rappel à Dieu de Monsieur Babacar TOURE, Président Fondateur du Groupe Sud Communication, ancien Président du Comité national de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) et ancien Président du Conseil national de Transition de l’Analogique au Numérique (CONTAN). Il a, ensuite, informé le Conseil de sa décision de baptiser la Maison de la Presse au nom de Babacar Touré, pour offrir en exemple, le professionnel hors pair qu’il était, aux générations futures.
Le Président de la République, abordant la célébration de la tabaski (l’AID EL KEBIR), ce vendredi 31 juillet 2020, a saisi l’occasion pour adresser ses chaleureuses félicitations et présenter ses meilleurs vœux à la Oumah Islamique. Il exhorte, dans cet esprit, nos compatriotes à redoubler de vigilance et d’engagement communautaire pour consolider la résilience de notre système de santé face à la pandémie de la COVID-19.
Le Chef de l’Etat, sur l’impératif d’intensifier la mise en œuvre de la stratégie « Sénégal Numérique 2025 », a rappelé au Gouvernement, l’urgence de bâtir un Sénégal Emergent à travers l’accélération de l’aménagement numérique du territoire national afin de favoriser l’accès universel, à moindre coût, aux services numériques de qualité.
Il a, à cet égard, demandé à l’Autorité de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP) de veiller davantage à la qualité du service délivré par les opérateurs aux usagers, ainsi qu’à la soutenabilité des tarifs appliqués aux consommateurs.
Le Président de la République a, par ailleurs, demandé à la Ministre de l’Economie numérique, de faire prendre toutes les dispositions pour la mise en œuvre optimale des composantes du Programme Spécial « SMART SENEGAL ».
Il a, dans cet élan, rappelé l’impératif de mettre à disposition les moyens nécessaires au développement de l’Université Virtuelle du Sénégal (UVS).
Le Chef de l’Etat a également souligné l’impératif d’achever le basculement intégral de la Télévision Numérique Terrestre (TNT) de l’analogique au numérique. Il a particulièrement demandé au Ministre de l’Intérieur, en rapport avec le Ministre de la Communication, de soumettre, en urgence, à sa validation, la liste des 300 villages éligibles à la 2ème phase du projet sino - sénégalais d’accès à la Télévision Satellite.
Le Président de la République a, sur ce chapitre, demandé aux membres du Gouvernement d’intensifier, avec le concours de l’ADIE, la transformation digitale des administrations afin d’asseoir un service public accessible, innovant et performant.
Il a, enfin, demandé, au Ministre d’Etat, Secrétaire général de la Présidence de la République et au Ministre de l’Economie numérique, d’intensifier l’exécution des projets relatifs à la Cybersécurité.
Le Chef de l’Etat, évoquant la célébration de la Journée nationale de l’Arbre et l’intensification des campagnes nationales de reboisement, a informé le Conseil qu’il présidera, le dimanche 09 août 2020 à Diamniadio, la cérémonie marquant la célébration de la 37ème édition, dont l’arbre parrain est le Baobab.
Il a, en outre, demandé au Ministre de l’Environnement et du Développement Durable et aux autres ministres impliqués, de soutenir le déploiement intensif des activités de l’Agence sénégalaise de Reforestation et de la Grande Muraille Verte qui doit finaliser le recrutement et l’entrée en service progressif, à terme, des 10.000 jeunes volontaires.
Le Président de la République a, enfin, informé le Conseil de sa décision de créer un Grand Prix du Président de la République pour le Reboisement et la Protection de l’Environnement.
Le Chef de l’Etat, au sujet du climat social, de la gestion et du suivi des affaires intérieures, a rappelé l’importance qu’il accorde à l’instauration au niveau des entreprises, d’un climat favorable à l’investissement et à la consolidation de l’emploi.
Il a, à ce titre, réitéré ses directives relatives au respect scrupuleux des droits des travailleurs en cette période de gestion de la pandémie de la COVID-19. Il a, à cet effet, demandé au Ministre du travail de finaliser, avant le 15 août 2020, avec les partenaires sociaux et le Haut Conseil du Dialogue social, l’évaluation de l’impact de la pandémie de la COVID-19 en milieu du Travail.
Le Président de la République, revenant sur l’application de la règlementation sur la circulation des gros porteurs, a requis auprès du Ministre des Transports terrestres, du Ministre de l’Intérieur et du Ministre des Forces Armées, le renforcement systématique des contrôles techniques de la circulation des camions et autres gros porteurs, en particulier, dans les centres urbains et périurbains.
Le Chef de l’Etat, au titre de la coopération et des partenariats, a demandé aux ministres en charge du Commerce et du Tourisme, de veiller à la bonne préparation de la participation du Sénégal à l’Exposition internationale de la Province chinoise de Hainan, prévue du 19 au 22 novembre 2020.
Le Président de la République a clos sa communication sur son agenda diplomatique, en informant le Conseil avoir pris part, le 23 juillet, en compagnie des Chefs d’Etat de Côte d’Ivoire, du Ghana, du Nigéria et du Niger, à la Mission d’information, d’écoute et d’échanges de la CEDEAO sur le Mali et au Sommet extraordinaire de ladite Organisation tenu, en visioconférence, le lundi 27 juillet 2020.
Au titre des Communications :
Le Ministre d’Etat, Secrétaire général de la Présidence de la République a fait une communication sur la mise en œuvre des projets phares prévus dans le cadre des initiatives présidentielles (PSE jeunesse 2035 et PSE numérique inclusive).
Le Ministre des Finances et du Budget a fait une communication sur la situation du FORCES COVID-19, l’exécution de la LFR 2020 et la présence du Sénégal sur le marché financier.
Le Ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur a fait le point sur l’assistance apportée à nos compatriotes de la Diaspora et sur la situation internationale.
Le Ministre en charge de la Solidarité nationale a fait le point sur l’aide alimentaire d’urgence.
Le Ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération a fait une communication sur le projet de Programme de Relance de l’Economie nationale.
Le Ministre de la Santé et de l’Action sociale a fait le point sur la situation de la pandémie, du paludisme et sur le nouveau laboratoire national de détection de Thiès.
Le Ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural a fait une communication sur la situation de la pluviométrie, la mise en place des intrants agricoles et l’exportation de fruits et légumes.
Le Ministre en charge du Travail a fait une communication portant sur l’enquête effectuée sur l’impact de la pandémie dans le milieu du travail.
Le Ministre en charge du Suivi du Plan Sénégal Emergent a fait le point sur l’état d’exécution des projets phares du PSE.
Au titre des textes législatifs et réglementaires, le Conseil a examiné et adopté :
le décret portant dénomination de la maison de la Presse.
Au titre des mesures individuelles, le Président de la République a pris les décisions suivantes :
Monsieur Lamine DIOM, Inspecteur général d’Etat de classe exceptionnelle, matricule de solde n° 514357/C, est nommé, Vérificateur général du Sénégal ;
Monsieur Sacoura GUEYE, inspecteur de l’Enseignement élémentaire, matricule de solde n° 621654/Z, est nommé, Directeur de l’Institut national d’Education et de Formation des jeunes aveugles (INEFJA) au ministère de l’Education nationale."
par Mamadou Amat
MON HOMMAGE À KADER ET À BABACAR
EXCLUSIF SENEPLUS - Grands professionnels aimés et respectés, reposez en paix. Vous pouvez, car je peux vous certifier que pour vous au moins, les hommages qui vous ont été rendus sont vraiment sincères. Ce n’est pas forcément le cas pour tout le monde...
Voilà que Babacar Touré tire sa révérence alors que je n’ai même pas fini de pleurer mon aîné et ami Kader Diop, ce très grand agencier comme moi [attention, le « comme moi » ici s’applique juste à « agencier » et pas forcément au reste], qui vient de partir sur la pointe des pieds rejoindre sa douce et inséparable moitié. Les témoignages ont été nombreux et unanimes sur les qualités tant humaines, morales que professionnelles de cet ancien ténor de Radio-Sénégal de la grande époque ainsi que de la respectable Agence France presse (AFP), dont il a dirigé le bureau dakarois de nombreuses années avant de prendre sa retraite. Une retraite très active puisqu’il l’a mise à profit pour donner des cours de journalisme dans certains instituts de la place. Mais surtout une retraite d’où la tiré Alpha Abdallah Sall [autre illustre disparu], alors à la tête du syndicat dont il cherchait à compléter la superstructure par la mise en place d’un Conseil pour le respect de l’éthique et de la déontologie dans les médias (Cred), qui a aujourd’hui muté [tel un virus] en l’actuel Cored. Avec Kader, qui en était le président, et Mbaye Sidy Mbaye, le porte-parole, j’étais un des membres sur qui ces deux esclavagistes comptaient le plus souvent pour la rédaction des communiqués que la structure publiait périodiquement. Restant effacé aux yeux de l’extérieur, mais très efficace pour nous de l’intérieur, Kader, fidèle à son tempérament de bosseur de l’ombre, donnait la fausse impression d’avoir abdiqué au profit du porte-parole qui, par ses nombreuses sorties dans les médias, ne faisait qu’accomplir, et bien assurer et assumer, sa fonction de porte-voix, de vitrine. Deux très grands professionnels qui, pour avoir bossé ensemble à Radio-Sénégal, s’entendaient comme larrons en foire. Je vois d’ici Mbaye Sidy me menacer du doigt pour l’avoir traité de larron. LOL, ou plutôt MDR pour ceux dont l’anglais est bancal. Avec « Grand Kédeur », comme je l’appelais avec un accent anglais pas du tout bancal, l’on comprend aisément l’expression « forcer le respect ». Qui que vous soyez, quels que soient vos rang et fonctions, Kader ne se gênait jamais de vous livrer le fond de sa pensée, même s’il savait que vous ne seriez pas content. La franchise et la vérité, voilà les deux éléments de son credo. Mais bon, tout ce qui devait être su de Kader a été dit et écrit, de fort belle manière, par ceux et celles qui lui ont rendu, avant moi, ces hommages bien mérités auxquels il a eu droit dans les médias. Et dans les cœurs.
A présent, passons à Babacar Touré, dont je fus l’un des compagnons de route au tout début de la belle et extraordinaire aventure du groupe Sud. Je me souviens de ce soir de l’an de grâce 1985 où, en compagnie d’Abdoulaye Ndiaga Sylla, il est passé à la maison pour s’accorder avec moi sur le rôle qui devait être le mien dans l’animation de Sud-Magazine, le mensuel des débuts qui allait donner naissance à tout ce qui est là aujourd’hui. Travaillant déjà à temps plein pour l’APS comme chef du service des reportages, j’optai pour les pages détente, jouant les verbicrucistes par la création de grilles de mon cru et imaginant des jeux de culture générale en questions/réponses… Mais j’ai fait la connaissance de B.T. bien plus tôt que ça. Et, histoire de rigoler un peu, je l'appelais « mon apprenti ». En effet, c'est moi qui fus le premier à encadrer l’étudiant de première année du Cesti lors du stage qu'il vint effectuer, durant les vacances 1978, au bureau régional de l'APS à Thiès. Absolument ! Bien qu'il fût mon aînée de quelques années, Babacar est entré au Cesti au moment où j'en sortais. Frais émoulu de l'école des Canadiens et des Français, j'assurais l'intérim du chef du bureau de Thiès avec, derrière la tête, l'idée de contribuer à valoriser l'information régionale, alors parent pauvre de l'actualité nationale. Admis en stage d’été à l'agence nationale, Babacar demanda à effectuer celui-ci à mes côtés, qui plus est dans la ville de notre enfance... Ce furent des moments mémorables pour lui comme pour moi. Et nous nous plaisions, par la suite, à ressasser les très bons moments passés ensemble, mais surtout les nombreux reportages que nous réalisâmes alors sur la pêche à Kayar, Potou, Fass-Boye ou le tourisme sur la petite Côte, notamment au Club Aldiana et à Saly Portudal, encore en grande partie en chantier et dans une zone en plein boom touristique.
Sous des dehors apparemment farouches, Babacar dissimulait un énorme sens de l'humour, ce qui faisait de nos rencontres à tous les deux ou de nos entretiens téléphoniques des moments d'inextinguibles fous rires et de grand bonheur. Avec son sens de la répartie et son esprit d’à-propos, Babacar n’était jamais pris au dépourvu. Au lancement de Sud-Hebdo, qui paraissait alors deux fois par mois avant de devenir vraiment hebdomadaire, c’est lui qui me suggéra l’idée d’animer une rubrique sur la télévision, un défi pas très évident au départ, mais que je me fis fort de relever en livrant une lecture très personnelle de la façon dont certaines émissions de la télé nationale étaient conduites. Quatre années durant, entre 1987 et 1991, Yamatélé [le sobriquet qui me désignait du fait que je gobais quasiment tout ce qui passait sur la lucarne imagique] publiait chaque jeudi une chronique très suivie par le public et par les agents de l’ORTS. A ce propos, Babacar m’a un jour servi une réponse qui nous a encore fait rire à gorge déployée tous les deux, il y a quelque temps, quand je lui ai rappelé le sondage qu’il avait commandé et qui faisait de la chronique de Yamatélé et des éditos de Babacar Touré les deux lectures préférées du public. Du tac au tac, il me fit la réponse suivante : « Toi tu écris chaque semaine et moi, seulement quand l’actualité le commande. Tu me fais de la concurrence déloyale ! »
Tenez, voici une anecdote où s’illustrent en même temps Kader et Babacar. Le premier nommé venait de se voir attribuer le Prix Pierre Mille du meilleur reportage, décerné par le Syndicat de la presse française d'Outre-mer et destiné à récompenser un journaliste de la presse écrite ou audiovisuelle francophone. Très fier de Kader et inspiré par cette récompense, je décidai de créer le Prix Yamatélé Pile pour distinguer le premier présentateur du journal télévisé de l’ORTS qui réussirait à tenir pile-poil dans le créneau 20h30-21h00. Quand Ibrahima Souleymane Ndiaye réussit la prouesse, Babacar Touré s’amusa beaucoup de mon idée et ordonna au comptable de me remettre la somme nécessaire à l’achat et à la gravure d’un trophée en forme de coupe du monde ! Comme je n’avais pas trop froid aux yeux à l’époque, je suis allé personnellement à la rédaction du journal télévisé remettre le trophée à Ibrahima S. Ndiaye, ce dans une atmosphère sympathique, bon enfant et hilarante. A noter, pour finir, que je ne me souviens pas avoir une seule fois entendu Babacar Touré m’appeler autrement que par le sobriquet « Amo », déclinant ainsi la première des trois premières personnes du verbe aimer conjugué en latin : Amo, Amas, Amat…
Kader Diop et Babacar Touré, grands professionnels aimés et respectés, reposez en paix. Vous pouvez, car je peux vous certifier que pour vous au moins, les hommages qui vous ont été rendus sont vraiment sincères. Ce qui n’est pas forcément le cas pour tout le monde...
par Ababacar Lo
CONTRIBUTION À L'AMÉLIORATION DE LA DÉCENTRALISATION
EXCLUSIF SENEPLUS - Des acquis non négligeables sont notés grâce à l’acte 3 qui n’est pas un aboutissement, mais il fait partie du chemin à parcourir pour une meilleure appropriation des politiques de développement par les populations locales
La loi sur la décentralisation constitue une étape très importante dans l’opérationnalisation du développement à la base des territoires. Des acquis non négligeables sont notés grâce à l’acte 3 de la décentralisation qui n’est pas un aboutissement, mais il fait partie du chemin à parcourir pour une meilleure appropriation des politiques de développement par les populations locales.
Cependant, pour une réussite de la décentralisation, il faut l’évaluer et l’améliorer. A ce propos, il y a deux points sur lesquels je veux insister en guise de contribution.
Premièrement, il faut absolument réfléchir sur les frontières entre les collectivités territoriales.
En effet, dans certaines parties du pays, la communalisation universelle a permis à plusieurs localités de devenir des communes avec toutes les implications en termes de gestion du foncier. Brusquement, des compétitions naissent entre des communes pour le contrôle des espaces qui se trouvent entre deux ou plusieurs localités et qui présentent des intérêts économiques, écologiques et culturels notables.
Dès lors, il est urgent de délimiter rapidement les frontières des collectivités territoriales (communes, départements) avec l’agence qui s’occupe de l’aménagement du territoire.
Deuxièmement, il y a l’implication des collectivités territoriales dans le développement économique local en devenant de véritables acteurs et partenaires de l’investissement économique. Dans chaque commune ou, à défaut, dans chaque département, il faut une agence de développement pour accompagner les activités socioéconomiques locales. L’ARD est à un niveau éloigné, et souvent il est difficile, à son niveau, de maîtriser tout le potentiel et les opportunités des départements. Une gestion de proximité est à favoriser.
Les entreprises qui s’installent dans les collectivités territoriales doit obligatoirement contribuer au développement local, en consacrant une partie de leurs bénéfices aux budgets d’investissement des territoires dans lesquels elles sont implantées.
Il faut penser à une sorte d’actionnariat des collectivités territoriales, avec le foncier comme contribution. Il ne faut pas se contenter de la responsabilité sociétale des entreprises ou des patentes ou taxes payées à la collectivité, mais imposer un pourcentage sur les bénéfices de toute entreprise à verser au territoire local hôte. Ainsi, les populations se sentent mieux impliquées et les dégradations et pollutions des entreprises sont en partie compensées. Par exemple, un taux de 10% des bénéfices n’est pas excessif eu égard aux perturbations susmentionnées engendrées par les activités des entreprises. La plus grande partie de cet argent, reversé à la collectivité, est investie dans les secteurs social, culturel, sportif et le cadre de vie.
Pour éviter des rivalités et des problèmes entre des collectivités territoriales, il serait peut être intéressant de penser au partage des retombées économiques entre elles lorsqu’une entreprise est implantée au niveau de leurs limites territoriales.
Par ailleurs, dans le cas où une entreprise est aussi installée dans une commune et n’est pas distante de 1 kilomètre d’une autre, cette dernière doit bénéficier, à un degré moindre, des retombées financières. Par exemple, les fumées et les odeurs provenant des industries sont ressenties loin de l’entreprise.
Enfin, une part de la contribution des entreprises locales doit être reversée au conseil départemental qui la redistribue aux autres collectivités du département. La région d’accueil doit aussi être prise en compte dans la répartition des contributions des entreprises qui s’implantent dans la zone.
Les avantages sont innombrables, et nous pouvons citer, entre autres, l’appropriation et la protection par la population locale de tous les investissements dans la localité, un développement endogène des territoires plus cohérent, une décentralisation plus poussée.
L’Etat, en diminuant légèrement le pourcentage, va continuer à percevoir des impôts auprès des entreprises.
Par Yoro DIA
MALI, A QUI PROFITE LA CRISE ?
Alors que le Mali n’a jamais été aussi proche de la disparition ou de la partition, la classe politique se divise à Bamako et fait de la politique politicienne comme si de rien n’était, en avançant masquée derrière l’imam Dicko
«Le temps ne chôme pas», nous enseigne la grand évêque africain Saint Augustin de la ville d’Annaba. La crise actuelle au Mali ne profite qu’aux jihadistes dont le temps est l’allié le plus précieux. Les jihadistes et autres séparatistes jouent le temps en attendant que la France se retire, soit après un méga-attentat qui va choquer l’opinion publique et entraîner le retrait français, comme celui des Américains à Mogadiscio.
Les jihadistes jouent le temps en attendant une alternance (respiration naturelle d’une démocratie) en France et un changement de politique. Il n’est pas évident que l’armée française serait encore au Mali si Marine Le Pen avait été élue. Les jihadistes et autres séparatistes jouent le temps en attendant une lassitude de l’Onu et de la communauté internationale sur le dossier du Mali ou qu’une autre crise plus importante le relègue au second plan. La seule urgence pour les Maliens est de comprendre cela et de se lancer dans une course contre la montre pour rebâtir une armée pendant qu’il en est encore temps, c’est-à-dire en profitant du parapluie français et international. C’est tout le contraire qu’on voit. Quand Rome était la proie des flammes, Néron déclamait des vers.
Alors que le Mali n’a jamais été aussi proche de la disparition ou de la partition, la classe politique se divise à Bamako et fait de la politique politicienne comme si de rien n’était, en avançant masquée derrière l’imam Dicko. Depuis leurs grottes dans l’Adrar des Ifoghas ou leurs planques dans le désert, les jihadistes doivent bien rire sous cape et remercier le ciel d’avoir des adversaires aussi inconscients, car en plus du temps, les divisions et les clivages politiciens sont l’autre chance des jihadistes. Leur silence stratégique en est la meilleure preuve car, comme dit Napoléon, «n’interrompez jamais un ennemi en train de faire une erreur».
Les jihadistes sont silencieux, n’entreprennent aucune action pour ne pas «interrompre l’ennemi en train de faire l’erreur». Une attaque jihadiste pourrait interrompre l’erreur de la guerre politicienne et montrer aux Maliens que l’urgence est ailleurs, non pas dans la querelle de strapontins gouvernementaux. L’urgence est une union sacrée pour bâtir une armée digne de ce nom, capable de réaffirmer l’autorité de l’Etat sur les territoires perdus. Face à cette urgence nationale, IBK est une variable. La seule constante doit être la prise de conscience des Maliens que leur pays est au bord de la partition comme l’ont été le Soudan, l’Ethiopie ; par contre le Sénégal et le Nigeria ont évité la partition grâce à leur armée. L’histoire est remplie de pays qui ont disparu ou des pays charcutés pour en créer d’autres. Si le général Atatürk n’avait pas été un génie militaire, il existerait un Kurdistan.
L’existence ou non de l’Azawad ne dépend pas du droit international ou de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation (Soudan du Sud, Erythrée…), mais dépend en grande partie de la capacité des Maliens à rebâtir une armée et de la motiver par l’exemple. Que IBK parte avant la fin de son mandat ou à la fin, l’urgence est dans l’armée. Le Mali a besoin d’un Lincoln, c’est-à-dire un chef de guerre, mais aussi un chef d’Etat, pour réconcilier le pays divisé. Face à l’urgence, les djihadistes jouent le temps et IBK la montre.
Par Ass Malick NDOYE
LES TRAGIQUES COMPAGNONS DE MACKY SALL
Aujourd’hui nous sommes à la fois dessillés et ulcérés par le comportement public, innommable, de ces troubles personnages qui revendiquent leur amitié et leur compagnonnage avec le président
«Rien n'est si dangereux qu'un ignorant ami; Mieux vaudrait un sage ennemi.» Jean De La Fontaine
Oh peuple du Sénégal ! Vous ne pouvez plus fermer les yeux sur la moralité et la dignité des amis et compagnons de tout prétendant à la magistrature suprême. Désormais, tous les candidats à la fonction présidentielle, devront passer par un filtre de moralité intraitable, y compris leurs futurs compagnons, dans l’exercice du pouvoir. Quelle que soit l’urgence ! Quel que soit le désir irrésistible au changement ! Au risque évidemment d’une désillusion brutale. Aujourd’hui nous sommes à la fois dessillés et ulcérés par le comportement public, innommable, de ces troubles personnages qui revendiquent leur amitié et leur compagnonnage avec Macky Sall, arpentent les plus hauts cercles du pouvoir et semblent ne pas s’en apercevoir. Tant il est vrai que l’inconduite scandaleuse, les propos immondes de ce ramassis de cloportes, est une sanglante injure à la dignité et à l’intelligence du peuple sénégalais. Voilà ces genres de comportements répugnants qui ne feront qu’accentuer le désarrimage, le désamour, le désintérêt des sénégalais, vis-à-vis de la politique.
A ce niveau la bêtise donne une idée de l’infini ! Nous, peuple du Sénégal, qu’a-t-on fait pour mériter le spectacle de ces faquins et gougnafiers, qui viennent nous débagouler, dans toutes sortes d’enregistrements, des déballages, insanités et vulgarités d’une puanteur insoutenable ? Sinon élire un président de la république qui avait, assurément, le meilleur profile parmi tous les candidats en 2012. Décidément la moralité est partie sans laisser d’adresse ! Les sombres individus de cette raclure déconcertante que nous nous garderons bien de citer ici nommément, sont devenus, hélas, à la faveur de l’alternance et de leur amitié avec le président, qui ministre, qui parlementaire, qui directeur de société nationale ou même griot attitré du président de la République. Les compétences importent peu. Il suffit d’avoir eu la chance de connaitre personnellement le président ou la première dame avant l’alternance.As’y méprendre, quelques fois, ces zélotes ressemblent à l’âme damnée du président. Ils n’ont peur de rien ! Pas même du ridicule !
La wadophobie, le repoussoir Abdoulaye Wade aidant, l’obnubilation de défaire le régime dangereux du vieil autocrate, nous ont conduit aveuglément au pis-aller Macky Sall en 2012, sans être vraiment regardant quant à la moralité de ses compagnons. Aujourd’hui nos œillères enlevées, notre sérénité retrouvée, les mots d’aucune langue humaine ne peuvent exprimer notre révulsion horrifiée. Le président doit être dans un profond embarras. Mais, grand Dieu, qu’a-t-il-fait pour nous épargner ce cabotinage vaudevillesque de ses piètres et pitoyables amis ? Ne pas sanctionner sévèrement de tels comportements, est une permissivité qui ouvre la porte à toutes les fenêtres. D’ailleurs des têtes ont été décapitées, avec perte et fracas, pour moins que ça ! Nous en sommes témoins. Quel paradoxe !
En revanche Il faut éviter une bouc-émissairisation grossière et hâtive, sans souci d’objectivité. Le délateur ostensible, les corbeaux masqués qui ont révélé ces insanités formulées en privée, sont aussi pendables que l’auteur de ces grossièretés. Nous sommes sans doute épiés par des esprits tordus qui ne manqueront de faire des commentaires malveillants du genre : dans la querelle de clocher qui opposait un sulfureux troubadour Tutsi proche du prince, à un remuant et dangereux agitateur politique Hutu qui n’est pas, lui, dans les petits papiers du prince, le président Tutsi, a tranché en faveur du troubadour Tutsi. Parfum de partialité ! Alors équité et retenue dans les décisions à prendre ! Tous ceux qui ont déjà ouvert le robinet de boue, provocateurs et ceux qui ont succombé à la provocation, sont tous coupables. Ils nous ont fait un très grand tort en tant que militant de l’organisation politique. Et un autre tort, encore plus grave, en tant que citoyen soucieux de l’assainissement de la pratique politique dans ce pays.
En 2012, Les radars des observateurs politiques n’ont pas vu l’avion furtif Macky Sall s’approcher de la station présidentielle. Mais aussi le peuple souverain qui a validé l’alternative Macky Sall, dans l’ivresse de son aversion instinctive au repoussoir Abdoulaye Wade, n’a pas été assez regardant et scrupuleux quant à la moralité des compagnons du futur chef de l’état. Alors mea culpa pour tout le monde ! Si le peuple viscéralement attaché à la moralité publique avait vu les vulgaires cloportes camouflés dans la soute à bagages de l’avion furtif Macky Sall, jamais il n’aurait autorisé l’atterrissage de cet aéronef à la station présidentielle du Sénégal.
Ass Malick NDOYE
Responsable APR, Fass Gueule Tapée Colobane
«DES REWMISTES MANŒUVRENT POUR DES RETROUVAILLES IDY-MACKY»
Le débat autour de la mise en place d’un gouvernement d’union nationale circule dans les chaumières. Le directeur de l’école du parti Rewmi Yancouba Seydi, le confirme à mis mot.
Le débat autour de la mise en place d’un gouvernement d’union nationale circule dans les chaumières. Le directeur de l’école du parti Rewmi Yancouba Seydi, le confirme à mis mot. Toutefois, il indique que Idrissa Seck n’a pas besoin d’entrer dans un gouvernement d’union nationale formé par le Président Macky Sall. Invité de l’émission «Rfm Matin», il accuse certains de ses camarades de parti de manœuvrer pour ce rapprochement entre les deux hommes.
Le silence du président du parti Rewmi détonne et intrigue bon nombre de Sénégalais. Certains observateurs de la scène politique l’interprètent même comme le résultat de probables discussions souterraines qu’il aurait avec le Président Macky Sall qui souhaite l’enrôler dans un gouvernement d‘union nationale. Mais pour le directeur du parti de Rewmi, une telle éventualité n’est qu’une vue d’esprit. «Les valeurs qu’Idrissa Seck incarne ne riment même pas avec ce que les gens disent de lui.
Le parti Rewmi n’a pas besoin de faire partie d’un gouvernement d’union nationale», soutient avec fermeté le professeur d’anglais au Cesti. A l’en croire, Idrissa Seck ne fera pas partie des membres de l’éventuel gouvernement d’union nationale que le Président Macky Sall serait en train de peaufiner.
En bon défenseur du leader de Rewmi, Yankhoba Seydi dépeint Idrissa Seck comme un homme incarnant de valeurs suprêmes. « Nous sommes un parti politique et nous comptons participer aux prochaines élections », déclare-til à qui veut l’entendre. Toutefois, il révèle que des responsables de Rewmi manœuvrent pour le rapprochement entre Macky Sall et Idrissa Seck. Mais pour lui, cela n’aboutira pas. «Le Président Idrissa Seck n’a parlé avec personne et ne compte aller nulle part», clame Yankhoba Seydi sur Rfm Matin.
Joint au téléphone par L’As pour commenter cette sortie du responsable de l’Ecole de Rewmi qui pourrait susciter moult interrogations dans le landerneau politique nationale, le porte-parole de l’Apr ne semble pas emballer. «Cela ne nous concerne pas. A l’Apr, on respecte les frontières des différentes organisations. Nous ne sous immisçons pas dans leurs affaires internes », a martelé Seydou Guèye. Toujours est- il qu’une rumeur de remaniement du gouvernement embaume l’espace politique où les acteurs semblent tétanisés par l’habileté du chef de l’Etat qui n’a plus de répondants dans l’espace publique que le Pastef de Ousmane Sonko et les activistes.
LES REPERCUSSIONS AU SENEGAL D’UN SUCCÈS DU POUVOIR SPIRITUEL VIS-A-VIS DU POUVOIR POLITIQUE
Selon Moussa Diaw, enseignant, chef de la section politique de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, l’exemple du célèbre prêcheur malien et figure de proue de la contestation du M5, Imam Dicko peut bien inspirer nos leaders politiques religieux
Au Mali, le président IBK est contesté pour sa gestion de la situation sécuritaire jugée calamiteuse par ses détracteurs. Toutefois, en ligne de mire de cette coalition hétéroclite, le M5 auquel est confronté Ibrahima Boubacar Keita, un imam à la place d’un opposant au régime. Pourtant, Mahmoud Dicko est l’un des artisans de la victoire de l’actuel Président Malien en 2013. Au Sénégal voisin où l’Islam joue un rôle de premier plan dans la résolution de conflits politiques et sociaux, l’influence de Dicko pourrait à bien des égards changer les rapports entre le spirituel et le temporel et instaurer un nouveau paradigme. Une assertion très plausible selon Moussa Diaw. A en croire l’enseignant, chef de la section politique de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, l’exemple du célèbre prêcheur malien et figure de proue de la contestation du M5, Imam Dicko peut bien inspirer les leaders politiques religieux sénégalais.
Il va sans dire que la configuration islamique du Sénégal et du Mali ne sont pas les mêmes. En proie à des assauts répétés des djihadistes dans le Nord du pays depuis 2012, le gouvernement malien est confronté, depuis le grand rassemblement organisé le 5 juin dans la capitale Bamako par une coalition hétéroclite dirigée par le célèbre prédicateur Imam Mahmoud Dicko, à une nouvelle problématique qui risque de faire basculer le pays dans une impasse politique. Car le M5 est catégorique.
D’ailleurs, la coalition contestataire est toujours déterminée à utiliser la voix de la rue pour faire abdiquer IBK. En outre, à la suite du sommet tenu lundi par visioconférence sur la situation du Mali après l’échec de la médiation des Chefs d’Etats dont Macky Sall, la CEDEAO a demandé la démission immédiate de 31 députés y compris le président du Parlement.
Toutefois, il est à constater que celui qui a tenu tête au pouvoir malien n’est même pas un opposant au régime encore moins un politique. Mais un imam, un religieux. Mais qu’en est-il de son influence sur l’espace politique sénégalais et de la sous-région ? Toutefois, il est à rappeler que les relations entre les politiques et les religieux ont connu quelques soubresauts. A ce titre, il faut noter la farouche opposition des guides religieux à la pénétration occidentale.
En outre, l’exemple le plus patent de ces relations conflictuelles entre le spirituel et le temporel est l’incarcération du leader politico-religieux Ahmed Tidiane Sy Al Maktoum, par ailleurs fondateur du Parti de la Solidarité Sénégalaise avec d’autres personnalités en 1959, par le régime de Senghor après qu’ils ont contesté les résultats issus des élections.
Toutefois, il faut rappeler que les hommes religieux sont aussi distingués par leurs capacités à être des régulateurs sociaux. Les guides spirituels interviennent souvent dans la sphère politique pour réconcilier des hommes politiques qui se sont brouillés.
Des fois, ils sont appelés à la rescousse par l’administration centrale afin de jouer les médiations entre l’Etat et les populations. A ce titre, il faut noter la sortie fracassante du Khalife général des Tidianes sur la gestion de la crise de Covid-19.Il avait demandé, en présence du président de la République, au pouvoir public de tenir un langage de vérité envers les populations en disant toute la vérité sur la maladie. Tout ceci montre que les hommes religieux, bien que restés dans la tradition c’est-à-dire concentrés sur leurs missions divines, n’hésitent pas à s’immiscer dans le champ politique pour diverses raisons.
Mais avec le succès ou le triomphe de l’Imam Dicko qui s’est présenté comme une alternative crédible face aux difficultés du peuple malien, va-t-on assister au Sénégal à un changement de rapports entre le pouvoir politique et celui spirituel ? D’ailleurs, il est même assez fréquent dans des débats que des personnalités politico-religieuses, notamment celles proches des familles religieuses, présentent les leaders religieux comme des détenteurs de salut face aux difficultés du peuple.
MOUSSA DIAW : «MAHMOUD DICKO PEUT CONSTITUER UNE REFERENCE POUR LES LEADERS POLITICO-RELIGIEUX»
La figure de proue de la Coalition M5, Imam Mahmoud Dicko peut bien inspirer les leaders religieux sénégalais. C’est du moins l’analyse de l’Enseignant-chercheur à l’UGB. « L’imam Dicko peut constituer une référence pour les leaders politiques religieux. Parce qu’au Sénégal, il y a certains parmi ces leaders qui jouent sur deux tableaux à savoir celui de la politique et du religieux. Il peut même inspirer certains dans leurs discours » a commenté l’analyste politique pour « L’AS ».
D’autant que ces leaders, poursuit-il, sont en mal de construire un discours car au Sénégal, il y a des confréries. Mieux, à l’en croire, même si le religieux se considère toujours à part, quand on observe bien la laïcité au Sénégal, on se rend compte que c’est une laïcité exceptionnelle tout à fait différente de ce qui se passe en France. Ce qui fait que, dit-il, au Sénégal, la collaboration étroite entre le politique et le religieux est bien visible.
En témoigne, martèle l’Enseignant-Chercheur, la position des religieux dans les crises sociales. « L’exemple de Mahmoud Dicko peut être une référence pour les leaders religieux politiques dans leurs stratégies de mobilisation pour la conquête de l’espace politique, puisqu’il y en a parmi eux qui ont des partis politiques », argumente Moussa Diaw. Mais le problème, dit-il, c’est qu’au Sénégal, nous avons un Islam confrérique. Donc, agrémente-t-il, pour conquérir toutes ces confréries, il faudrait tenir un discours rassembleur. Ce qui, note-t-il, n’est pas évident. « Car il faudrait un discours qui va transformer les différences confrériques pour pouvoir associer les populations par rapport à une préoccupation. Ce qu’Imam Dicko est arrivé à faire, les leaders politiques religieux sénégalais peuvent aussi le réussir. Il ne suffit, pour eux, que de tenir un discours rassembleur par rapport aux difficultés auxquelles les politiques peinent à trouver des solutions comme la pauvreté, la corruption et autres sujets », note-t-il.
D’ailleurs, ajoute-t-il, c’est là où le discours pourrait percer et cristalliser toutes les tensions et les mécontentements pour pouvoir fédérer afin de jouer un rôle important de mobilisation autour de ces facteurs.
Toutefois, précise-t-il, il faut replacer la situation au Mali dans son contexte. Le Mali, dit-il, comme le Sénégal, est un pays laïc. Mais comme ici au Sénégal, la séparation du pouvoir spirituel et temporel n’est que théorique. Mieux, il faut aussi rappeler la situation difficile qu’est en train de traverser le Mali avec des assauts répétés de djihadistes », commente-t-il.
Ainsi, selon Moussa Diaw, c’est ce vide politique dû à la défaite de l’Etat malien face à la crise sécuritaire qui a propulsé le discours de l’Imam Mahmoud Dick