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2 mai 2025
Diaspora
LES MOTIVATIONS DE L'ITALO-SÉNÉGALAIS PRENEUR D'OTAGES À MILAN
Ousseynou Sy ne regrette rien et referait cent fois son geste si on lui en donnait l'occasion - C'est d'après le Corriere della Sera ce qu'aurait déclaré le chauffeur de bus aux policiers
Toujours beaucoup de questions en Italie deux jours après la prise d'otages d'une cinquantaine d'enfants par leur chauffeur de bus. En particulier sur le degré de préparation et les motivations de cet Italo-Sénégalais de 47 ans, qui a incendié le bus alors que la police venait d'évacuer in extremis ses occupants. La presse italienne a toutefois obtenu des informations de source policière.
Ousseynou Sy ne regrette rien et referait cent fois son geste si on lui en donnait l'occasion. C'est d'après le Corriere della Sera ce qu'aurait déclaré le chauffeur de bus aux policiers. Mais il affirme n'avoir voulu faire de mal à personne, son objectif :« aller sur la piste de l’aéroport avec les enfants que j’aurais utilisés comme un bouclier, et de là partir en avion pour l’Afrique de manière éclatante », confie-t-il aux enquêteurs selon Corriere della Sera.
C'est d'ailleurs pour envoyer un signal aux Africains que ce Sénégalais naturalisé Italien il y a dix-huit ans a séquestré les 51 passagers de son bus. Toujours selon le quotidien, pour Ousseynou Sy, les Africains doivent rester en Afrique. Il aurait également dénoncé la colonisation à l'origine de l'émigration actuelle. Et il explique son passage à l'acte par la saisie mardi par les autorités italiennes du navire Mare Ionio transportant des migrants.
Mais selon le journal Messagero, Ousseynou Sy aurait fait preuve dès lundi d'un comportement suspect, apparaissant nerveux et tentant de modifier le parcours de son bus avant d'être rappelé à l'ordre par un enseignant. Alors acte prémédité ou coup de folie ? L'avocat d'Ousseynou Sy a demandé une expertise psychiatrique de son client.
QUE SACRIFIENT LES TRAVAILLEURS DU SEXE ?
Rahim, jeune gambien se prostitue pour pouvoir gagner sa vie, même s’il n’en est pas fier - Ses clients sont en majorité des Européens en vacances
Ce jeune gambien se prostitue pour pouvoir gagner sa vie, même s’il n’en est pas fier. Ses clients sont en majorité des Européens en vacances. La Gambie est une destination phare du tourisme sexuel en Afrique.
Placé en garde à vue pour avoir incendié un bus transportant des enfants en Italie, Ousseynou risque de porter un sacré coup à la situation des sénégalais vivant en Italie. C’est la conviction de Mame Diarra Fame député de la diaspora. «Ce geste risque de porter un sacré coup à la situation des sénégalais d’ici. Je ne sais pas ses motivations. Seules les personnes à bout de nerfs peuvent se comporter de la sorte. Depuis cet incident, les Sénégalais ont maintenant peur de sortir. Il y a une certaine psychose. On ne sait pas ce qui peut nous arriver », a-t-elle déclaré.
Pire, elle révèle que sa fille qui prenait habituellement le bus, n’a pas eu le courage de le prendre aujourd’hui.
QUE SAIT-ON DU SÉNÉGALAIS QUI A MIS LE FEU À UN BUS EN ITALIE ?
Le nommé Ousseynou S., 47 ans, a obtenu la nationalité italienne en 2004, après avoir épousé une femme italienne - Les premières déclarations des autorités en charge de l’enquête indiquent que l’acte était prémédité
checknews.fr |
Jacques Pezet |
Publication 21/03/2019
Un chauffeur de bus d'origine sénégalaise, ayant obtenu la nationalité italienne en 2004, a pris en otage 51 collégiens près de Milan ce mercredi 20 mars, avant d'incendier son véhicule. Il voulait venger les migrants morts en mer.
Que s’est-il passé ?
Dans un article publié le mercredi 20 mars, la Stampa revient sur le déroulé de cette prise d’otage. À 10 h 20, le bus avec les collégiens et les enseignants à son bord, quitte le gymnase. Le chauffeur est censé les ramener au collège Giovanni Vailati, situé à moins de 3 kilomètres. A moins d’un kilomètre de l’arrivée, le chauffeur dévie de sa route et crie «Personne ne sortira d’ici vivant !» et s’engage sur l’autoroute en direction de Linate, le second aéroport de Milan.
La Stampa indique qu’en route, le chauffeur déclare qu’il compte y faire un massacre pour arrêter les morts en Méditerranée et oblige les enseignants à attacher les enfants et à saisir leurs téléphones portables. Il s’arrête ensuite au niveau de la ville de Paullo pour recouvrir le véhicule d’essence. Alors qu’il continue sa route, un adolescent réussit à se saisir du téléphone portable d’un camarade et appelle la police. Finalement deux patrouilles de carabiniers l’ont intercepté et brisé les vitres arrière du bus pour faire sortir les enfants. Le conducteur a foncé dans un véhicule garé devant lui. Une fois bloqué, le chauffeur est sorti de l’autobus qu’il a incendié à l’aide d’un briquet, rapporte l’agence de presse italienne ANSA dans un article publié le lendemain de l’incident.
Que sait-on de l’identité du chauffeur et de ses motivations ?
Mercredi 20 mars, le ministre de l’intérieur italien Matteo Salvini a annoncé sur Twitter qu'«un Sénégalais de nationalité italienne (sic) au volant d’un bus scolaire, avec un casier judiciaire pour conduite sous l’influence de l’alcool et de violences sexuelles, a détourné le véhicule et l’a finalement incendié. C’est arrivé dans la province de Milan. L’homme a été arrêté. En ce moment, la police fouille sa maison. Je veux que ce soit clair : pourquoi une personne ayant un tel passé conduisait-elle un autobus pour transporter des enfants ?»
La presse italienneprécise que le chauffeur de 47 ans nommé Ousseynou S., a obtenu la nationalité italienne en 2004, après avoir épousé une femme italienne. Selon l’ANSA, le ministère de l’intérieur réfléchit à le destituer de sa nationalité. Il est actuellement détenu à la prison de San Vittore.
Au sujet de ses motivations, l’agence de presse italienne indique que le chauffard a déclaré aux enquêteurs que c’est la saisie du navire humanitaire Mare Ionio, le 19 mars, par les autorités italiennes, qui a été l’élément déclencheur, qui l’a poussé à commettre la dangereuse prise d’otages. Les premières déclarations des autorités en charge de l’enquête indiquent que l’acte était prémédité. Le chef de la cellule antiterrorisme de Milan, Alberto Nobili, a ainsi indiqué que l’homme «avait enregistré une vidéo, qu’il avait diffusée auprès de ses amis, jusqu’au Sénégal, où il leur disait "Afrique soulève-toi, ne venez plus en Europe !"» Concernant des liens avec des organisations terroristes, Nobili présente Ousseynou S. comme un «loup solitaire», qui «n’est pas en lien avec Daech ou d’autres mouvements djihadistes» et avertit qu’à ce stade de l’enquête, son acte ne peut pas être mis en lien avec du terrorisme islamiste. La seule revendication évoquée est celle de venger les noyés en Méditerranée.
Les enfants vont bien
Le président de la région Lombardie, Attilio Fontana, a annoncé que les collégiens présents dans le bus allaient bien : «J’ai parlé avec les directeurs généraux de l’hôpital San Raffaele et de la clinique De Marchi, où des enfants et des enseignants impliqués dans l’épisode très grave qui s’est produit ce matin, sur la route provinciale de Paullese, ont été transportés. Ils m’ont assuré que leur état est globalement bon et qu’ils ont surtout besoin de soutien psychologique. C’est la chose la plus importante parce que le risque était énorme.»
PROMOTION DES NOUVELLES ROUTES DE LA SOIE , XI JINPING EN EUROPE
Xi Jinping sera accueilli ce Dimanche à Nice par Emmanuel Macron.
Le président chinois entame ce jeudi une nouvelle tournée en Europe. Six jours de visite officielle en Italie, puis en France notamment Monaco et Nice.
Xi Jinping sera accueilli ce Dimanche à Nice par Emmanuel Macron.
Le président chinois devrait signer avec Rome un projet d’accord sur les « nouvelles routes de la soie » chinoises dans une Europe divisée.
«LA DIASPORA S’EST PRISE EN MAIN EN ENTREPRENANT»
L’ancien boxeur Jean Claude Nkodo Essomba, 54 ans, qui a été champion d’Afrique dans la catégorie des poids très légers, a fait de son expérience dans le sport un véritable atout au service de l’entrepreneuriat
Afrika Stratégies France |
Assanatou Baldé, |
Publication 21/03/2019
L’ancien boxeur Jean Claude Nkodo Essomba, 54 ans, originaire du Cameroun, et qui vit à Chartres (Centre-Val de Loire) à un peu moins de 100 km de Paris, en a fait du chemin. Celui qui a été champion d’Afrique dans la catégorie des poids très légers a fait de son expérience dans le sport un véritable atout au service de l’entrepreneuriat. A la tête de plusieurs entreprises, dont Phoenix promotion, qui accompagne des boxeurs africains tout au long de leur carrière, il est l’une des figures de cette diaspora inspirante et créative. Rencontre avec un entrepreneur au parcours hors norme. Diasportrait consacre une série d’interviews avec ses modèles de la diaspora dont dépend, en partie, le destin des pays d’origine. Entretien !
La première chose qui étonne lorsqu’on rencontre Jean Claude Nkodo Essomba, c’est l’humilité dont il fait preuve malgré son riche parcours. Il faut dire que le colosse de plus d’un mètre 90 en a encaissé des coups. Mais il a toujours su se relever à chaque fois qu’il était à terre. C’est sans doute cela qui fait sa force. Il est aujourd’hui à la tête de plusieurs sociétés, dont Phoenix promotion, fondée en 2008, à travers laquelle, il organise des galas de boxe et accompagne durant leur carrière des boxeurs professionnels africains en Europe et en Amérique du Nord. Pas étonnant qu’en 2017, il soit élu vice-président de la National Boxing Authoritative (NBA), organisation mondiale de gestion de la boxe professionnelle, dont il est aussi nommé directeur des opérations Afrique pour promouvoir la boxe professionnelle sur le continent. Avant d’acquérir cette expertise qui lui vaut une reconnaissance internationale, le chemin a été long. La vie en effet n’épargne pas celui qui quitte le Cameroun pour la France en 1982, où il poursuit ses études en mécanique, qu’il est contraint d’abandonner au décès de son père. Il n’a alors que 16 ans. Une situation qui pousse le jeune homme qui pratique la boxe depuis ses 12 ans à devenir boxeur professionnel. Il tente alors sa chance aux Etats-Unis, où il réside pendant sept ans à Las Vegas et New York puis intègre les écuries professionnelles Level Two Promotion de Charles Biddle avant de signer avec Boxing One promotion d’Irene Cole. C’est d’ailleurs sous les couleurs de cette écurie qu’il devient champion d’Afrique des poids super-légers, défiant même le champion du monde Ile Qartey. Mais la boxe seule ne suffit plus à Jean Claude qui a toujours eu plusieurs cordes à son arc. Il s’envole pour Londres en 91 où tout en continuant dans la boxe sous les couleurs d’All stars boxing d’Isola Akay, il suit un cursus en sociologie et management du sport à l’université de Canterbury, y décrochant en 1995 un bachelor en management du sport. Passionné d’histoire et de lettres, Jean Claude, qui est aussi essayiste en sociologie du sport, est auteur de l’essai Requiem pour la Boxe, Éditions Melibee-Toulouse (2012). Il a notamment écrit, L’indomptable, roman sur l’immigration, paru en 2014 aux Éditions K d’Oteurs, à Paris, avant de créer sa propre maison d’édition Afropéennes.
D’où vous vient cette passion pour l’entrepreneuriat ?
Je suis un passionné. Je m’implique toujours complètement dans ce que je fais. Bien sûr, ça m’a joué des tours, j’ai été dupé, escroqué. Parfois j’ai tout misé dans certaines affaires et tout perdu mais je me suis toujours relevé pour recommencer et aller de l’avant. Pour entreprendre, il faut de la méthode, de la persévérance, et des compétences. La compétence peut se louer si on ne l’a pas soi-même ! Par exemple en 2006, j’ai créé une entreprise de plomberie à Chartres. Nouveau dans la ville, je m’étais rendu compte qu’elle manquait d’artisans pour refaire certains travaux dans mon appartement. J’ai recruté un plombier diplômé et compétent, créé une entité, mis en place une stratégie marketing. Deux ans plus tard, je faisais 300 000 euros de chiffre d’affaires !
Quels sont concrètement vos objectifs à travers vote entreprise Phoenix promotion qui occupe le plus clair de votre temps ?
Mon but est de répertorier les talents sportifs qui foisonnent en Afrique mais qui malheureusement souffrent du marasme économique qui mine le continent. Du coup, ces talents souffrent d’un manque de visibilité du fait de peu de combats organisés et d’une trop pauvre couverture médiatique. Peu de promoteurs et managers de renom nord-américains et européens sont sensibilisés des talents dont regorge l’Afrique. Par ailleurs, les boxeurs africains souffrent de difficultés d’obtention de visas vers l’Occident. Il arrive donc qu’une organisation soit annulée parce qu’ils n’ont pas obtenu leur visa.
Selon-vous, comment peut-on faire du sport une niche économique qui pourrait contribuer au développement du continent ?
Le sport et spécifiquement la boxe génère des revenus faramineux à ses acteurs tant compétiteurs qu’officiels de l’encadrement. Ce n’est pas anodin le fait que le sportif le mieux payé au monde soit le boxeur américain Floyd Mayweather depuis cinq ans ! La boxe, par les valeurs sociétales qu’elle véhicule, inculque aux pratiquants les valeurs d’amour de l’effort, de respect et d’éthique. En Afrique, elle sera certainement une niche économique indéniable en développant une réelle économie du sport où différents corps de métiers pourraient se développer tels que les avocats pour les contrats, les kinésithérapeutes, les médecins du sport, les entraîneurs, les manageurs, les agents, le journalisme spécifique et spécialisé, sans compter les nutritionnistes, ou encore les équipementiers qui réalisent des chiffres d’affaires à plusieurs chiffres. Hormis les différents aspects professionnels bénéfiques à la jeunesse africaine, ce serait en outre un excellent moyen de juguler l’émigration qui saigne l’Afrique depuis une décennie.
Quel regard portez-vous sur la diaspora qui a décidé d’entreprendre pour contribuer à l’essor de l’Afrique ?
Rappelons d’abord l’histoire de l’émigration africaine en Europe, concernant la troisième vague d’immigrés, qui représente 10 % des enfants issus des parents de la première émigration et 80% des enfants de la deuxième vague. Malheureusement cette dernière n’a pas eu la chance des premières vagues car tous les postes sont pourvus dans les administrations. Or le monde entre dans une crise économique au début des années 80. Les administrations africaines ne recrutent plus et ces diplômés pour la grande majorité demeurent en Europe. Les crises successives économiques dont fait face l’Europe discriminent douloureusement les jeunes issus de la diaspora. Lassés d’attendre une éventuelle embellie de la situation économique de la France et des pays africains, cette diaspora largement discriminée dans le marché de l’emploi décide de se prendre en main en entreprenant. Très bien formée dans sa majorité, elle fait preuve depuis une dizaine d’années d’une résilience remarquable en créant des start-ups et diverses autres entreprises. Beaucoup de ces jeunes ont aussi décidé de travailler avec les pays d’origine de leurs parents où certaines économies sont en plein essor. Conscients de développer leurs pays d’origine, la diaspora s’est imprégnée des freins des économies africaines et milite désormais pour la fin des lobbies France-Afrique et de ses outils tels que le Franc CFA.
Vous avez aussi créé votre propre maison d’édition, Afropéennes. Pouvez-vous nous dire ce que vous entendez à travers ce concept de plus en plus utilisé dans la langue française ?
Le Français, plus que toutes les langues vivantes, évolue au gré des cultures à travers les peuples qui l’utilisent. Un mot nouveau ou une expression nouvelle se crée chaque jour. L’Afrique est le continent le plus francophone dans le monde. Ceci est dû aux échanges commerciaux et culturels séculaires de ces deux entités continentales. Le résultat est là aujourd’hui. Il s’est créé et développé une culture métisse qui enrichit la langue française un peu plus tous les jours. Partie de la Négritude de Césaire et Senghor, les deux mentors Africain et Antillais, la Négritude a évolué en Afropéenne ! Les générations d’Africains et d’Antillais nés après les décolonisations ont vécu et vivent autrement leurs métissage culturel et l’expriment désormais dans cette littérature métissée que nous promouvons aux Éditions Afropéennes !
UN SÉNÉGALAIS A FAILLI FAIRE UN MASSACRE EN ITALIE
Les carabiniers ont sauvé mercredi in extremis, 51collégiens pris en otage et ligotés dans un bus près de Milan par leur chauffeur, un Italien d'origine sénégalaise qui a invoqué le sort des migrants morts en Méditerranée, avant d'incendier le bus
"C'est un miracle, cela aurait pu être un carnage. Les carabiniers ont été exceptionnels pour bloquer le bus et faire sortir tous les enfants", a déclaré à la presse le procureur de Milan, Francesco Grec, précisant ne pas exclure "l'hypothèse du terrorisme".
Le chauffeur, blessé et transporté dans un hôpital pour des brûlures aux mains, a été interpellé sous les chefs de "prise d'otage, massacre et incendie" avec la circonstance aggravante de "terrorisme". Le chef de la cellule antiterroriste de Milan a elle aussi été chargée de l'enquête.
Les 51 élèves de deuxième année de collège devaient se rendre à une sortie sportive dans un gymnase avec trois accompagnateurs, quand le chauffeur a subitement changé de trajectoire à San Donato Milanese (nord de l'Italie) et commencé une prise d'otage qui durera environ une demi-heure.
"Personne ne sortira d'ici vivant", a-t-il lancé, selon les témoignages de plusieurs enfants.
Armé de deux bidons d'essence et d'un briquet, il a menacé de massacrer les enfants, leur a pris leur téléphone portable et a demandé à leurs accompagnateurs de les ligoter à leurs sièges avec du fil électrique.
"J'ai perdu trois enfants en mer", a afffirmé l'homme, selon le témoignage d'un garçonnet diffusé sur les sites internet des médias italiens.
"Il nous menaçait, disait que si nous bougions il verserait l'essence et allumerait le feu. Il n'arrêtait pas de dire qu'il y avait tant de personnes en Afrique qui continuaient à mourir et que c'était la faute de Di Maio et Salvini" (les deux vice-Premiers ministres italiens et hommes forts du pays), a raconté une fillette.
Elle précise que le chauffeur "se retournait et versait de l'essence par terre" et qu'il a aussi brandi "un pistolet et un couteau". "Puis les carabiniers sont arrivés et nous ont sauvés".
- "Les morts en Méditerranée" -
"Je veux en finir, il faut arrêter les morts en Méditerranée", aurait aussi hurlé l'homme, ont rapporté plusieurs médias.
Selon le procureur Francesco Greco, le chauffeur a gardé sans cesse près de lui deux enfants, en leur montrant le briquet qu'il tenait à la main. Il a en outre percuté une voiture où se trouvait un père de famille et son enfant, qui se sont enfuis avant que leur véhicule ne prenne feu.
Des photos des pompiers après le drame montrent le bus et la voiture entièrement calcinés.
Le héros du jour est aussi un jeune garçon, qui a pu récupérer le téléphone tombé à terre d'un camarade et a donné l'alerte. "Je me suis un peu fait mal aux mains pour le récupérer et j'ai pu prévenir les carabiniers et la police. Nous étions tous effrayés", a-t-il raconté, très calmement, devant une caméra.
Les forces de l'ordre ont finalement pu bloquer le bus et ont fait sortir les enfants en brisant les vitres arrière, peu avant que le chauffeur ne mette le feu.
Une vidéo prise par un automobiliste montre des enfants sortant en courant du bus, hurlant et pleurant.
Une douzaine d'enfants et deux des adultes ont été conduits à l'hôpital après avoir été légèrement intoxiqués par la fumée.
L'auteur des faits est un homme de 47 ans, Italien depuis 2004, d'origine sénégalaise, chauffeur scolaire sans histoire depuis 2002 selon son employeur. Divorcé de son épouse italienne, il a deux enfants adolescents.
Le ministère de l'Intérieur a évoqué dans un communiqué des antécédents de conduite en état d'ivresse et d'agression sexuelle sur mineur.
"Le ministère est à l'oeuvre pour vérifier la possibilité de retirer la citoyenneté italienne au Sénégalais", ont ajouté des sources ministérielles, en brandissant le décret-loi du ministre de l'Intérieur Matteo Salvini sur la sécurité et l'immigration adopté à l'automne.
"LE FRANÇAIS N'A D'AVENIR EN AFRIQUE QUE S'IL RECONNAÎT LES LANGUES LOCALES"
Le philosophe Souleymane Bachir Diagne prévient que l'évolution de la francophonie ne dépends pas du facteur démographique, mais reposera sur le plurilinguisme et la bonne santé de l'éducation en Afrique
Jeune Afrique |
Fatoumata Diallo |
Publication 20/03/2019
S’approprier la langue française et l’inscrire pleinement dans le pluralisme linguistique. Et en particulier dans le contexte de l’Afrique francophone. C’est le credo de Souleymane Bachir Diagne pour en finir avec une vision archaïque d’une francophonie crispée, campée sur « une défense du français contre l’hégémonie de l’anglais ». Pour le philosophe sénégalais, professeur de français à l’université de Columbia (New York), c’est la langue française qui doit s’adapter à la société africaine, et non l’inverse.
En clair, les Africains francophones peuvent, et doivent, modifier la langue, l’adapter à leurs langues nationales, leurs pratiques, leurs vécus. Et, surtout, ne pas attendre pour ce faire d’obtenir l’aval de l’Académie française.
L’Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone (ODSEF) prévoit que, d’ici à 2050, 70% des francophones seront des Africains. Un chiffre largement mis en avant ce 20 mars, Journée internationale de la francophonie. Mais Souleymane Bachir Diagne balaie cet argument démographique. Pour lui, la pérennité du français en Afrique n’est possible que si les locuteurs participent à l’évolution de la langue.
Vous défendez la nécessité de la reconnaissance des langues locales et nationales dans l’espace francophone africain. Comment concevez-vous la cohabitation entre le français et celles-ci ?
Souleymane Bachir Diagne : Pendant de nombreuses années, la francophonie a été perçue comme une défense frileuse de la langue française contre l’hégémonie de l’anglais. Aujourd’hui, le maître mot pour la définir est le pluralisme linguistique. Ce pluralisme se caractérise par la reconnaissance de l’existence de plusieurs langues dans l’espace francophone. Ces langues locales méritent d’être considérées et renforcées.
Le français, l’anglais et le portugais sont des langues d’Afrique, à côté des langues africaines. Ainsi, la cohabitation des langues est naturelle en Afrique. Sur le continent, il est rare de trouver un africain qui ne parle pas plusieurs langues. Donc, le français n’a d’avenir en Afrique francophone que si il reconnaît les langues locales, et fonctionne avec elles.
Que pensez-vous du mode d’apprentissage du français en Afrique, au regard de celui des langues locales ?
L’école doit être un espace plurilingue qui doit faire l’objet d’une vraie politique linguistique. Il faut renforcer le français, car sa maîtrise a faibli dans les écoles africaines.
Dans le même temps, il est crucial d’introduire les langues africaines dans l’enseignement. Celles-ci doivent devenir des langues de savoirs et de créations dans lesquelles les écrivains écrivent. Je plaide que l’on puisse écrire la philosophie et d’autres disciplines en langues africaines. Boubacar Boris Diop – auteur de l’ouvrage Les tambours de la mémoire – en est l’exemple. La francophonie aura de l’avenir si, et seulement si, l’école et la société sont des espaces plurilingues.
Êtes-vous favorable à une transgression de la langue française académique ?
Oui, car le français est une langue vivante. Elle est par nature appelée à subir des transformations et des formes d’hybridations. Par exemple, en Côte d’ivoire, s’est développé « un français ivoirien » qui a sa saveur et son sel. Beaucoup d’artistes et écrivains ivoiriens jouent de ces transformations pour s’exprimer.
Néanmoins, cela va au-delà d’introduire de simple mots dans la langue française. Au Sénégal, pour nommer une station à essence, on disait « essencerie ». Ce mot n’existant pas dans la langue française, Léopold Sédar Senghor l’a fait adopter par l’Académie française quand il y siégeait !
En somme, le pluralisme à l’intérieur de la langue française est une richesse de la francophonie : la manière de parler le français au Québec et en Belgique est différente de celle qui est pratiquée dans l’Hexagone. Et cela permet d’enrichir la langue.
Quel est le rôle des écrivains dans l’évolution de la langue française ?
La littérature dite francophone a imposé sa qualité dans le spectre littéraire français mais, aussi, un certain style. Les Africains ont inventé dans la littérature francophone leur propre manière de jouer avec la langue, en s’installant entre deux langues. À travers leurs écrits, ils parlent leurs langues maternelles à l’intérieur du français.
L’écrivain Ahmadou Kourouma – auteur du Soleil des indépendances– est sans doute le meilleur exemple. Il a réussi dans ses écrits à faire sentir la présence de la langue Malinké – langue Mandingue – dans le français. Le style de Soni Labou Tansi œuvre aussi dans ce sens. Il y a une sorte de jubilation avec la langue française, qui est permise par le fait que les francophones se situent le plus souvent entre deux langues.
Un étude de l’ODSEF estime qu’à l’horizon 2050, plus de 70% des francophones seront des Africains. L’Afrique comptera alors plus de 90% des francophones de 15-29 ans. Quel regard portez-vous sur ces chiffres ?
Au-delà des chiffres, il est important de se focaliser sur deux conditions. Dans un premier temps, l’enracinement de la langue française sur le continent tient à la qualité de l’enseignement. La santé du français en Afrique francophone dépendra fortement de la santé de l’école.
Puis, il est essentiel que le français reste une langue de la science et de la recherche. Il y a un énorme potentiel sur le continent mais à conditions que ces deux aspects soient remplis. Il faut que l’OIF en prenne conscience et veuille un espace qui compte dans le monde de demain sur le plan de l’éducation et de la recherche.
Le cadre domestique est-il le premier espace de transmission de la langue française ?
Le premier principe est qu’il faut que le français soit présent ailleurs qu’à l’école. Si son usage s’arrête à l’enceinte de l’école, la francophonie en souffrira. Au Sénégal, dans une pratique éducative, on peut parler à l’enfant en français, car on sait que la société parle le Wolof. Il finira donc par le parler.
Par ailleurs, il est vrai qu’il faut s’adapter à la situation concrète de la société : si le français est plus répandu dans l’espace public, dans le cadre domestique il faut favoriser les langues locales et vice-versa.
Le français demeure-t-il la langue « de l’élite » en Afrique, selon vous ?
Malheureusement, cela est encore vrai . L’usage du français hors des élites tient à la démocratisation de l’éducation et de la culture en générale. Il faut que le français fasse partie de la culture populaire. Par ailleurs, cet effort de démocratisation doit venir de tous. En tant que philosophe, j’ai ma responsabilité d’écrire en Wolof pour que cette langue soit présente dans la philosophie contemporaine.
Enfin, l’État et les institutions ont la responsabilité de mettre en place des politiques qui favorisent le pluralisme linguistique au sein de la francophonie. De la même manière, l’OIF a un rôle à jouer pour rendre le français attractif et populaire.
LA CHRONIQUE HEBDO D'ELGAS
QUINTETTE, CINQ NUANCES DE TALENTS
EXCLUSIF SENEPLUS - Entre tous les motifs de fiertés nationales, les sénégalais peuvent se réjouir de voir une scène musicale dont les cinq ambassadeurs majeurs portent chacun ou presque, un talent singulier - INVENTAIRE DES IDOLES
Les sénégalais sont bien chanceux. Entre tous les motifs de fiertés nationales – et ils sont nombreux - ils peuvent se réjouir de voir une scène musicale dont les cinq ambassadeurs majeurs (le choix est subjectif), portent chacun ou presque, un talent singulier. Talent sinon égal, à tout le moins, d’un grand souffle, portant des nuances différentes comme le symbole du vœu d’harmonie culturelle intérieure du pays. Leur longévité du reste, au-delà des fortunes inégales, pose Youssou Ndour, Baaba Maal, Omar Pène, Ismaël Lo, Thione Seck, en quintette miraculeux. Une telle cohabitation, dans une même classe d’âge, sans que les registres ne se confondent, n’était pas gagnée. S’il demeure, admise ou tue, une forme de compétition, voire de rivalité réelle, il est à penser que cette communauté d’artistes tient cette paix des géants du fait qu’ils ont chacun enrichi un genre, qu’ils se sont peu aliénés les uns les autres. Ils ont épanoui un registre propre, créé un horizon, un style et par conséquent, segmentent l’audience au gré des humeurs et des envies. Ces 5 mâles, dos argentés de la jungle musicale, qui ont tous pris leur envol à la fin des années 70, avec leurs groupes, leurs lieutenants, sont les commandants et les héros d’une armée sans guerre, parce que les armes étaient si plurielles, si inoffensives, que seul un orchestre pouvait en naître, comme une symphonie providentielle…
Selon que l’on danse dans les vieux et éculés Furël[i] des années 90, les boîtes de nuits, les cérémonies multiples ; que l’on écoute sa musique dans l’intimité de sa chambre, dans les endroits feutrés, que l’on soit d’une humeur mélancolique ou qu’on ait le diable au corps, que l’on ait des envies de Fouta ou de Walo, de respiration continentale et de désirs d’Orient, que l’on veuille le mbalax des origines ou celui influencé par l’époque moderne ; que l’on veuille entendre le cris des sans-grades, où les grands élans élégiaques ou griotiques, le quintette est là, comme la parfaite réponse d’un d’âge d’or que l’on a le privilège de vivre, et qui, rêvons, pourrait être éternel.
Nuancier
Baaba Maal
Ange gardien du temple pulaar, il évoque l’histoire dans ses chansons. Que l’on soit familier du pulaar ou non, il remue une fibre profonde, presque mystérieuse. L’écho est comme un picotement. Un appel à l’abandon total dans les bras du chant et de la déclamation. Il presse au recueillement et à une forme de gratitude. Pas surprenant alors qu’il accompagne tant de bandes originales cinématographiques, de Sembène à Marvel, tant le cri, filtré par un propos que l’on devine enraciné, est une perpétuelle ode, intérieure et extérieure, sans hostilité, sans fermeture. On devine, rien qu’aux accents et à l’intonation, la célébration des parents, l’amour à la mère, une mystique de l’unité et de la communion qui peut parfois enrober un message politique. C’est la libération d’un talent oral, traversant les âges, qui agrège et sublime toute la tradition du chant solennel ; qu’il accompagne la lutte, les moments fédérateurs des communautés, des étapes symboliques d’une vie… ! Ce chant porte la respiration et le souffle poétique qui emprunte presque au registre religieux. Il épouse la gravité des grands orgues comme celle du Coran, dont il est comme une légère variation. Il se récite, s’écoute, voix consacrée du récit national par les innombrables confluents dont le Fouta s’est fait le cœur. Réduire cependant l’idole nationale à ce statut de gardien du trésor des bergeries, c’est oublier que ce talent s’est enrichi des apports d’un groupe, d’une idée, d’instruments, de périples dans le monde et d’un zeste de baraka. Dans le paysage musical sénégalais, Baaba MAAL a cette voix rare et bénie du prophète qui réussit à l’être triplement, pour les siens du premier cercle, pour le pays et pour le monde. C’est une glorieuse trinité qui récolte la semence fertile, issue de l’authentique don, et la constante ouverture à l’enrichissement moderne. On n’a pas besoin de se diluer pour séduire, pas plus de demeurer inaltéré pour conquérir….
Ismaël Lo
Les amateurs du cinéma de Sembène se rappellent sans doute son jeu d’acteur dans le Camp de Thiaroye. Ils pourraient même percevoir les signes d’un engagement d’artiste qui parsèmera toute une carrière. D’Ismaël Lo, ce qui frappe sans doute c’est la voix, comme rassurante, comme enveloppée d’un voile de douceur. C’est une voix qui ne crie pas mais expulse des notes si pénétrantes qu’on en reste transporté comme dans des paysages virginaux. Si ce timbre a fait voyager une voix jusqu’à en faire une identité de l’unité, c’est qu’il garde une forme de candeur, de nonchalance, qui font sa marque de fabrique. Comme pour Baaba Maal, à l’intérieur des sondages nationaux, il y a de fortes chances, en dehors des mélomanes, qu’il ne soit pas cité comme ténor du quintette, mais à l’international, sur la scène panafricaine et mondiale, ce style, cette bonhommie, cette disponibilité du camarade de tous, ont bâti une vraie envergure. La philarmonie de Paris l’a récemment invité dans un ballet saisissant où les reprises ont magnifié cette part d’universel tapi en chaque être et que la musique sait réveiller. Des chansons pour l’Afrique jusqu’aux grandes leçons de la vie, en passant par cette école de l’humilité presque déconcertante, Ismaël Lo incarne un rôle atypique dans le film du quintette : celui d’un troubadour, d’un saltimbanque à l’ancienne, d’un ménestrel, d’un conteur, qui arpente la vie avec ses notes, assez ancré pour ne pas sombrer mais tout aussi léger pour pouvoir voler, de notes en notes, de continent en continent, la tête pleine de rêves fédérateurs.
Youssou Ndour
Le gosse de la Médina a traversé bien des déserts avant de s’abreuver dans son oasis, à laquelle il convie tout un pays. Le Mbalax avec lui commence par être une affaire de rudiments, avant de devenir la grande cérémonie. Ça commence presque allégoriquement avec Dem dem pour finir en Birima. De la débrouille comme marque de fabrique des origines, au grand prince en son royaume pour finalité. Et entre les deux, du labeur. La voix de Youssou Ndour couvre tous les registres, elle sait se déchirer, être suave, s’attiédir et respirer. C’est le long souffle que le texte varié rend si accessible mais aussi si puissant. Sans même le postuler comme vertu, Youssou Ndour garde cet art de la louange. Sa chanson, les accents chaleureux et lyriques, dans un mélange déroutant, comme la quintessence d’un mbalax où les instruments traditionnels et modernes, se côtoient comme dans une parenté divine. Youssou est comme la tête de pont de la locomotive, la gloire officielle, le soleil tranchant, l’ambassadeur idéal. Si ce costume finit par écorner le talent originel, en le noyant dans le satisfecit général, il reste quand même l’habit princier que l’on doit à cet enfant qui ajoute à la palette du quintette des éléments d’ensemble, comme un consensus, que la diversité de son groupe, ont contribué à forger. Le wolof est devenu la langue nationale, comme Youssou Ndour est le porte-drapeau de cette scène musicale. Peu importe intrinsèquement qu’il soit le meilleur ou non, il est légitime. Il est le fils de sa mère, le fils prodige du pays. Passons la politique, restons dans son domaine de prédilection et l’œuvre est là, belle et généreuse, chaude et humide, comme humectée et légèrement cendrée par ce flambeau national qu’on lui donne de bon cœur. Le mbalax du rythme fusionne avec celui du texte. Et à partir du foyer de naissance, s’impulse la dynamique de conquête.
Thione Seck
Comme s’il manquait des tonalités orientales au quintette, Thione Seck et sa voix éraillée, ses saccades, nous propose une incursion en Arabie. Tous les chanteurs, les artistes, de manière générale, rêvent d’avoir une patte, une empreinte, à nulle autre pareille. Peu importe finalement ce que la postérité accorde, ils s’accrocheront à ce brin d’unicité qui les rendra toujours à part. Thione Seck est de ceux-là. Sa chanson réveille chez les danseurs des mouvements amples et cérémonieux. Des mouvements latéraux et lents, pleins de grâce. A côté des paroles philosophes aux métaphores multiples, c’est aussi un chant louangeur des vertus sociales que porte l’ethnie wolof. On y sent, pour une fois, comme une velléité de paix dans la caste. A ce grand ensemble très original, qui fait d’ailleurs que les amateurs de Thione Seck se trouvent hauts dans la hiérarchie des mélomanes, s’ajoute des influences orientales qui accentuent cet effet de père-la-morale enjoliveur et bonimenteur, tares bien excusables, tant elles participent de son éclat sur scène et en dehors. Il agrège comme Youssou Ndour des éléments du rudiment, mais on sent - et ça pimente son œuvre - comme un goût de la revanche, une volonté de réécrire la destinée qui a plafonné sa gloire. Il gagne cependant au change car si on regarde son œuvre, c’est une des plus complètes, avec un répertoire si riche, qu’il est comme une forme de train élégant, comme un Orient Express de la musique nationale. Dans le quintette, il incarne le soldat boudeur et bougon, mais infiniment talentueux, qui, sûr de son talent, en développe un mélange d’arrogance et de narcissisme qui épuise la populace mais fait rêver les connaisseurs. Thione est le secret gardé, trop précieux pour être partagé, mais trop lourd pour être embrassé à pleine bouche. C’est une douce tragédie.
Omar Pène
Je m’étais promis de ne plus jamais écrire sur Omar Pène. Tous les mots de mon admiration sans bornes flotteraient, bien ridicules, dans la dette de bonheur que j’ai à son endroit. J’écrirai un jour sur Omar Pène, longuement, très longuement, comme un hommage, une gratitude. Mais pour l’heure, pour compléter ce nuancier, ce passage en partie issu de mes archives.
Omar Pène est le seul du quintette qui nous fait perdre la raison, la tenue, la notabilité. Il est le fédérateur des passions incontrôlées. Il est le déclencheur de ce que Senghor appelait les sombres extases. Dans toutes les classes d’âges, toutes les professions, tous les genres, l’écouter c’est être profondément touché, dans ses entrailles. Toute sa carrière aura été un perpétuel effort. Jamais dans la naphtaline de l’argent, il a dû façonner une camaraderie avec ses compagnons, cimentée par leurs talents communs ; produire du génie avec des moyens rustiques, réinventer sa voix et son style, promener son inspiration dans le fait social, devenir la voix des soldats, des chômeurs, des étudiants, de l’oisif jeune dakarois dont il berce l’existence en en expurgeant les charges douloureuses. Le tout en étant un bonhomme simple, accessible, commun, que la modestie financière, assortie à une extrême humanité, a éloigné des artifices de la starification.
Je le vois encore, au milieu de sa carrière, la figure encore émaciée par l’effort et l’incertitude du destin, offrir un concert à la Pyramide culturelle sénégalaise, je ne sais plus quand. Salle rustre. Ambiance presque familiale. Grand moment de joie. Dans la banalité d’une soirée sénégalaise, il mêlait son art au bonheur quotidien et ordinaire du public. Il y avait un naturel époustouflant dans cette scénographie. Lui et sa voix ronde, aux pointes aigües sublimes ; lui et sa douleur de chanter, à la façon de Joe Cooker ou encore Janis Joplin ; lui et son authenticité qui évoque Ali Farka Touré ; lui et son sens du rythme qui se fondent mielleusement dans les amplitudes du mbalax ; lui et ses penchants d’ivresse ; lui et sa musique qui berce l’âme, chahute la mélancolie, ravive la transe ; lui enfin, accompagné de ses amis, qui montre l’aventure d’un ensemble, d’un groupe presque banalement surnommé le Super Diamono. Lui et sa musique à l’insouciance et à la tristesse tsiganes. Lui identité d’une musique de copains, comme seuls quelques spectacles urbains gratuits savent en offrir. Cette musique d’un envoûtement irréel, irrationnel mais tout à fait évident. Omar Pène est bien l’ange ou le maudit, je ne sais plus, mais à coup sûr, celui qui crée la dépendance, celui sous l’emprise duquel on vit en échangeant son âme pour la promesse certaine d’une expérience rare de la vie.
Et nous sommes des privilégiés de vivre cette époque. Longue vie au quintette.