(SenePlus) - Lors du récent congrès du parti Alliance pour la Citoyenneté et le Travail (ACT), Ibrahima Thiam a été élu pour succéder à Abdoul Mbaye à la présidence de cette formation politique.
Dans son discours d'investiture, le nouveau président a exprimé sa "gratitude", son "humilité" et son "sens aigu de la responsabilité" face à cette nouvelle mission. Il a particulièrement salué la démarche d'Abdoul Mbaye, qui reste président d'honneur du parti, pour avoir "préparé, organisé et accompagné sa propre succession dans un esprit de démocratie et de transparence", une pratique qu'il qualifie de "rare" dans le paysage politique sénégalais.
Ibrahima Thiam a également présenté sa vision pour l'avenir de l'ACT, articulée autour de trois défis majeurs : renforcer l'ancrage territorial du parti, construire une "alternative crédible" en vue de "conquérir le pouvoir", et préserver la singularité éthique du mouvement "dans un paysage politique souvent cynique".
Dans un contexte qu'il qualifie de "populisme" au pouvoir, le nouveau président a réaffirmé l'engagement de l'ACT à "remettre la compétence, l'éthique et l'intérêt général au cœur de l'action politique".
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L'ESSAI QUI DÉBOULONNE LES IDOLES AFRICAINES
Chiffres à l'appui, Joël Té-Léssia Assoko ose l'impensable dans "Enterrer Sankara" en déconstruisant l'héritage du héros burkinabè. Tandis que l'AES et le régime sénégalais revendiquent cet héritage, le journaliste signe un plaidoyer pragmatique
(SenePlus) - Dans un essai aussi incisif qu'érudit, le journaliste économique Joël Té-Léssia Assoko s'attaque à l'héritage de Thomas Sankara et aux penseurs africains contemporains qui perpétuent, selon lui, des mythes économiques préjudiciables au développement du continent. Intitulé « Enterrer Sankara, essai sur les économies africaines », ce premier titre de la collection « Pépites jaunes » des éditions Riveneuve fait déjà polémique, rapporte Jeune Afrique.
« Ceci n'est pas un brûlot », prévient la quatrième de couverture. Pourtant, l'ancien rédacteur en chef adjoint de Jeune Afrique n'hésite pas à remettre en question l'héritage du révolutionnaire burkinabè, figure intouchable pour de nombreux Africains. Chiffres à l'appui, il déconstruit les politiques économiques mises en œuvre et les choix, parfois contradictoires, du capitaine qui n'est resté que quatre ans au pouvoir.
Selon l'auteur, Thomas Sankara représente un mythe « d'hérésies économiques », bien qu'il lui concède des idées novatrices en matière de santé et d'éducation. Ce que regrette particulièrement le journaliste franco-ivoirien, c'est que Sankara ait réussi à installer l'idée que la « révolution » soit la voie à suivre, une perspective qui mènerait à une impasse selon lui.
« Enterrer Sankara, c'est métaphorique », confie l'auteur à Jeune Afrique. « L'objectif, c'est de dépasser cet héritage. On ne peut pas résoudre les problèmes contemporains de l'Afrique avec ce référentiel des années 1980. D'autant qu'à l'époque, déjà, les politiques économiques de Sankara étaient vouées à l'échec ».
Le livre ne s'arrête pas à Sankara. Joël Té-Léssia Assoko élargit sa critique à plusieurs intellectuels africains influents comme Kako Nubukpo, Felwine Sarr, Achille Mbembe ou encore Célestin Monga. Tous sont accusés de perpétuer des idées utopistes et une tendance à « l'apitoiement sur soi ».
« Lorsque l'on met en avant de nouvelles façons de penser l'humain, de penser l'économie, c'est mentir à l'Afrique et se mentir à soi-même », écrit-il sans concession, selon Jeune Afrique. L'ouvrage s'inscrit néanmoins dans une réflexion plus large sur les modèles de développement du continent, avec une volonté affichée de pragmatisme.
La publication de cet essai intervient à un moment où la figure de Sankara connaît un regain d'influence. Comme le rappelle Jeune Afrique, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko prônent, à l'instar du capitaine burkinabè, la fin de la dépendance à l'Occident et placent le souverainisme économique au cœur de leur programme. De même, les juntes militaires au pouvoir dans plusieurs pays du Sahel revendiquent l'héritage sankariste.
Face à cette tendance, l'auteur regrette que ces régimes aient « l'émancipation politique comme seul programme » et délaissent les questions « technico-économiques » au profit d'envolées lyriques sur l'asservissement par l'aide au développement, la dette illégitime ou la prédation néocoloniale.
Pour le co-fondateur du think tank L'Afrique des idées, « la première loi de la pauvreté est l'économie ». Sa conclusion est sans appel : l'émergence du continent ne se fera qu'à condition d'une hausse significative et continue de la productivité.
À travers cet ouvrage de 151 pages, Joël Té-Léssia Assoko lance un pavé dans la mare des idées reçues sur le développement économique africain. Reste à voir comment les héritiers intellectuels de Sankara répondront à cette provocation assumée.
UN VOTE DE CONFIANCE POUR L'ÉCONOMIE SÉNÉGALAISE
Le pays vient de réaliser une performance financière exceptionnelle sur le marché sous-régional, mobilisant 405 milliards de FCFA, soit près du triple de l'objectif initial. Une opération clôturée avant même l'échéance prévue
Le Sénégal vient de boucler avec succès une importante opération financière sur le marché sous-régional. En moins d’une semaine, le pays a mobilisé 405 milliards de FCFA à travers un emprunt obligataire par appel public à l’épargne, soit près de trois fois le montant initialement recherché de 150 milliards FCFA. L’opération, portée par Invictus Capital & Finance, a été clôturée de manière anticipée, bien avant l’échéance prévue du 18 mars 2025.
Un succès retentissant pour Invictus Capital & Finance
La société de gestion et d’intermédiation (SGI) Invictus Capital & Finance, cheffe de file et arrangeur principal de l’opération, a joué un rôle central dans cette levée record. Grâce à une stratégie de placement rigoureuse et une coordination efficace, elle a permis une sursouscription massive en un temps record, traduisant la performance de l’équipe et l’attractivité de l’offre proposée.
Une forte adhésion des investisseurs, reflet de la confiance dans l’État
Institutions financières, compagnies d’assurances, banques, mais aussi de nombreux particuliers ont répondu massivement à l’appel du Trésor public. Dans un contexte mondial pourtant tendu — entre inflation persistante, incertitudes géopolitiques et volatilité des marchés — la signature souveraine du Sénégal continue d’inspirer confiance. Cette affluence des souscriptions illustre la solidité perçue de l’économie sénégalaise et la crédibilité des autorités financières.
Une opération inscrite dans une stratégie globale
Ce succès marque le début d’un programme de mobilisation de ressources plus vaste. Deux autres émissions obligataires sont attendues au rythme d’une par trimestre, pour un objectif global annuel estimé à 6.000 milliards FCFA. Ces ressources serviront à financer des projets majeurs dans les domaines des infrastructures, de l’énergie, du numérique, de la santé et de l’industrialisation. Ce programme s’inscrit dans la dynamique du nouveau référentiel de politique économique et sociale du Sénégal, fondé sur la transformation structurelle, la résilience et la justice sociale.
Vers une démocratisation de l’investissement et de l’épargne
Au-delà de la performance financière, cette opération témoigne aussi d’un tournant vers une inclusion financière accrue. L’élargissement de la base des souscripteurs, facilité par la digitalisation des processus et une meilleure vulgarisation des produits financiers, traduit l’émergence d’une nouvelle culture économique. Une culture où les citoyens prennent part activement au financement du développement national.
Le Sénégal démontre ainsi qu’il est non seulement capable de mobiliser rapidement des ressources significatives, mais aussi de bâtir une économie plus résiliente, inclusive et tournée vers l’avenir.
UN FMI EN PERTE DE SÉRÉNITÉ
La révélation d’une dette non déclarée de plus de 4000 milliards de francs CFA, place l’État sénégalais face à une crise de transparence et de gouvernance, et met aussi en lumière un trouble perceptible au sein du FMI dont la sérénité semble vaciller
La situation des finances publiques sénégalaises sur la période 2019–2024 continue de susciter de vives inquiétudes. La révélation d’une dette non déclarée, estimée à plus de 4000 milliards de francs CFA, place non seulement l’État sénégalais face à une crise de transparence et de gouvernance, mais met également en lumière un trouble perceptible au sein du Fonds monétaire international (FMI), dont la sérénité semble vaciller.
Institution censée incarner la rigueur budgétaire et le respect des principes de bonne gouvernance économique, le FMI se retrouve aujourd’hui dans une posture ambivalente. En dépit des nombreuses missions dépêchées à Dakar, les contours de cette dette dissimulée n’ont toujours pas été clairement définis. Ce flou alimente une impression de flottement dans la communication du Fonds, lequel peine à affirmer avec autorité son rôle d’arbitre et de partenaire vigilant.
L’appel réitéré du FMI à l’endroit du gouvernement sénégalais, l’enjoignant de fournir des « clarifications », reste certes fondé, mais souffre d’un déficit de fermeté. En l’absence d’un discours clair et d’un mécanisme de contrôle plus rigoureux, cette injonction perd de sa portée. Que penser d’une institution qui suspend l’ouverture de discussions à l’élucidation d’une crise dont elle n’ose pas confirmer les faits ? Cette prudence, qui frôle parfois la réserve diplomatique, contribue-t-elle pas à fragiliser l’image du FMI ?
Ce malaise est d’autant plus patent que, dans un premier temps, le FMI avait clairement indiqué attendre les conclusions de la Cour des comptes censées confirmer ou infirmer les constats de l’Inspection générale des finances (IGF) avant toute prise de position. À la suite de ce rapport, une mission a bien été envoyée à Dakar pour en prendre connaissance. Les représentants du Fonds avaient alors déclaré que le document serait examiné en marge des Assemblées de printemps, prévues du 21 au 26 avril, en vue d’un nouveau cadre de collaboration. Pourtant, alors que cet examen n’a pas encore eu lieu, le FMI multiplie les déclarations publiques, comme celle, toute récente, de M. Abebe Aemro Selassie, sans qu’aucun élément décisif ne soit véritablement apporté au débat.
Dès lors, l’on est en droit de s’interroger sur la logique de cette sur-communication, qui finit par créer une cacophonie diplomatique. Tantôt, le FMI dit saluer les efforts de transparence des nouvelles autorités sénégalaises ; tantôt, il semble s’arc-bouter sur une exigence de clarification, sans prise de position claire. Ce double discours alimente la confusion, alors qu’un cap lucide et cohérent serait plus que jamais nécessaire.
En définitive, cette affaire met au jour les failles de la gouvernance financière interne, tout autant qu’elle révèle les limites structurelles de la supervision multilatérale. Si le FMI souhaite restaurer son aura et préserver la confiance de ses partenaires notamment celle des peuples concernés, il devra impérativement adopter une posture plus lisible, plus exigeante et fondée sur des mécanismes de reddition de comptes renouvelés, une transparence renforcée et une réforme sincère de ses outils de suivi. Pour s’en convaincre, des chefs d’Etat intervenus sur la tribune de la 78ème Assemblée générale des Nations-Unies avaient clairement plaidé pour la réforme des institutions internationales aux fins de prendre en charge les aspirations des nations.
LE STADE LÉOPOLD SÉDAR SENGHOR, MÉMOIRE D’UN MONUMENT SPORTIF
Après près de trois ans de travaux de rénovation, le stade s'apprête à rouvrir officiellement ses portes. Cette réhabilitation initiée en prévision des JOJ 2026, redonne vie à l'un des sites sportifs les plus emblématiques du pays
Ce vendredi 11 avril 2025, le stade Léopold Sédar Senghor sera officiellement réceptionné par la ministre de la Jeunesse, des Sports et de la Culture, Khady Diène Gaye. Un événement de taille, puisque la rénovation entamée en août 2022 a mobilisé d’importants moyens et s’est étalée sur près de trois ans.
Dans la perspective des Jeux olympiques de la Jeunesse que le Sénégal doit accueillir en 2026, les autorités avaient décidé de fermer le stade pour rénovation. Ce 11 avril marque donc la fin des travaux et la livraison d’une enceinte modernisée. La capacité du stade passe de 60 000 à 54 000 places. À cette occasion, retour sur l’histoire d’un lieu emblématique du sport sénégalais, toutes disciplines confondues.
Moussa Ndao, à jamais le premier
Le 31 octobre 1985, le stade est inauguré par le président Abdou Diouf lors d’un match mythique entre le Jaraaf et la Jeanne d’Arc de Dakar. C’est Moussa Ndao, ancien international sénégalais, qui inscrit le tout premier but dans cette enceinte flambant neuve.
Outre le football, de nombreuses disciplines y étaient pratiquées : athlétisme, volley-ball, basket-ball, tennis, tennis de table, escrime, gymnastique, lutte sénégalaise, boxe, karaté, judo et taekwondo.
En 1992, le Sénégal accueille pour la première fois la Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Le stade abrite le match d’ouverture ainsi que la finale, le 26 janvier, entre la Côte d’Ivoire et le Ghana (victoire ivoirienne).
En 2001, le stade est officiellement rebaptisé « Stade Léopold Sédar Senghor » en hommage au premier président de la République du Sénégal.
Des affiches mythiques en lutte
Le stade Léopold Sédar Senghor n’a pas seulement vibré au rythme du football ou de l’athlétisme. Il a également accueilli des combats de lutte mémorables qui ont enflammé les amateurs du genre. Parmi les affiches marquantes : Tyson / Yékini, Bombardier / Tyson, Gris Bordeaux / Baboye, Sa Thiès / Boy Niang 2, Lac 2 / Modou Lô.
14 octobre 2012, le chaos
Si le stade a connu des moments de gloire, une soirée sombre restera gravée dans les mémoires : celle du 14 octobre 2012. Lors du match retour du troisième tour préliminaire des qualifications à la CAN 2013, la Côte d’Ivoire élimine le Sénégal. Après le deuxième but ivoirien, les supporters sénégalais se révoltent : jets de projectiles, incendies dans les tribunes… L’arbitre interrompt la rencontre à la 76e minute.
La Confédération africaine de football (CAF) sanctionne lourdement : suspension du stade pour un an et amende de 100 000 dollars, ramenée à 50 000 sous condition qu’aucun incident similaire ne survienne dans les deux années suivantes. Le Sénégal est alors contraint de disputer ses matchs « à domicile » à l’extérieur.
Une alternative au stade Abdoulaye Wade ?
Désormais de nouveau opérationnel, le stade Léopold Sédar Senghor rouvre ses portes. Désormais, seule la pelouse recevra des rencontres de football et de rugby.
Ce retour pourrait offrir une alternative sérieuse au stade Abdoulaye Wade de Diamniadio, souvent critiqué par les supporters pour son accessibilité difficile. S’y rendre relève, selon eux, du parcours du combattant, ce qui explique en partie l’ambiance souvent morose des matchs à domicile.
Plus accessible, le stade Léopold Sédar Senghor pourrait donc accueillir certains matchs des Lions, qui pourraient alterner entre les deux enceintes.
L'AMBITIEUX PLAN POUR RÉVOLUTIONNER L'HABITAT
Plus de la moitié du salaire part dans le loyer : une réalité insoutenable pour les Sénégalais. Moussa Bala Fofana dévoile un plan de 18 000 hectares à travers le pays pour transformer l'accès à la propriété et libérer le pouvoir d'achat des citoyens
(SenePlus) - Un Sénégalais moyen consacre plus de la moitié de ses revenus à se loger. Face à cette situation préoccupante, le gouvernement lance un programme d'envergure visant à construire 500 000 logements sur les dix prochaines années. Analyse d'une initiative qui pourrait transformer le paysage immobilier du pays.
Selon les déclarations du ministre de l'Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l'Aménagement des territoires, Moussa Bala Fofana, la situation actuelle du logement au Sénégal représente un défi majeur pour les ménages. Lors de la présentation du Programme national d'accès au logement et de rénovation urbaine (PNALRU), le ministre a révélé un chiffre alarmant : "Un Sénégalais, peu importe son niveau de revenus, donne minimum 54% de ses revenus pour payer un loyer", a-t-il affirmé.
Cette proportion dépasse largement les standards internationaux recommandés, qui suggèrent qu'un ménage ne devrait pas consacrer plus de 30% de ses revenus au logement. Le ministre a souligné l'importance cruciale de réduire cette charge financière : "Voilà l'importance aujourd'hui de ramener cela dans des proportions acceptables. Et chaque effort que nous ferons dans le domaine du logement permettra à un Sénégalais de mieux vivre."
L'accès à la propriété représenterait une véritable libération financière pour de nombreux Sénégalais. M. Fofana a expliqué : "Parce que si quelqu'un payait 50% de ses revenus dans le loyer et qu'il devient propriétaire, c'est 50% de ses revenus qui vont aller dans sa santé, dans l'éducation des enfants, dans l'épargne, dans la qualité de vie."
Au-delà de l'impact direct sur les ménages, le ministre a également mis en avant les retombées macroéconomiques attendues : "Et c'est aussi autant d'argent qu'on va investir dans notre économie. Parce que le bâtiment, nous ne l'oublions pas, c'est un secteur de l'économie qui a un rôle important à jouer en termes de taux de croissance."
Pour répondre à ces défis, le gouvernement a élaboré un ambitieux programme baptisé "Pénal Rue" (PNALRU). Son objectif principal est clairement défini : "L'objectif clairement fixé ici, c'est donc d'atteindre 500 000 logements à 10 ans", a précisé le ministre.
Le PNALRU s'appuie sur plusieurs données quantitatives impressionnantes :
18 000 hectares identifiés à travers le territoire national
4 000 hectares ciblés à la sortie 5 de l'autoroute Illa-Touba pour une zone industrielle du bâtiment
500 000 logements à construire sur une période de 10 à 15 ans
13 chefs-lieux de région concernés par le projet d'extension, plus Mbour et Touba
Contrairement aux programmes précédents qui ont souvent échoué faute de financement adéquat, le PNALRU propose un modèle économique autonome. Le ministre a expliqué cette nouvelle approche : "Avant, nous demandions à l'État de financer les verdes. Vous imaginez, si nous devons construire, je dirais, 10 000 hectares et on demande à l'État de financer les verdes, c'est quelque chose que l'État ne pourra pas supporter."
Cette réflexion est d'autant plus pertinente dans le contexte économique actuel du Sénégal, caractérisé par "un déficit de plus de 12%, d'un endettement à plus de 100% et d'une tension trésorerie qui ne fait plus débat", selon les propos du ministre.
La solution adoptée repose sur un partenariat avec des promoteurs privés : "Les promoteurs qui vont accepter d'investir dans ce programme auront du foncier, mais 50% du foncier vont être dédiés à leur propre programme, ce qui va leur permettre de pouvoir assurer leur modèle économique et de prendre en charge la viabilisation."
Le ministre a également mentionné la mobilisation de nombreux acteurs pour soutenir ce programme : "Pour la mise à contribution des baillères publiques et des fonds dédiés à l'habitat social, le Pénal Rue a été présenté à la Caisse des dépôts et consignations, CDC, à la Banque de l'Habitat, à l'APIX, au Consortium des industriels du Sénégal, à l'Ordre des architectes, au secteur bancaire et à d'autres établissements financiers du secteur du logement."
par Djibril Ndiogou Mbaye
L’AUDIT DE LA COUR DES COMPTES NE DEVAIT-IL PAS RESTER CONFIDENTIEL ?
Ni le principe de transparence, ni la loi organique qui le surclasse, édictant et encadrant les rapports de la cour des comptes ne sont au dessus de l’intérêt supérieur de la nation
La politique ? c’est tout un art ! Mais c’est un art vil. Et si c’est un art vil, c’est parce qu’elle use de subterfuges, manœuvres et comme au poker, abuse du bluff comme technique pour dissimuler sa stratégie dans un écosystème où chaque erreur de communication se paie cash et peu anéantir un projet ou reporter un important programme, si ce n’est interrompre une carrière politique.
Publier un rapport qui plonge un pays pauvre comme le Sénégal, en quête perpétuelle de financements, dans un désarroi financier sans précédent, en le discréditant auprès des bailleurs de fonds, du FMI et des investisseurs, en entraînant la dégringolade de toutes ses notes souveraines, est-il la panacée ?
Les principaux défenseurs de cette publication, comme le président de la cour des comptes Mamadou Faye, mettent en avant un exercice de transparence inédit en Afrique. Transparence oui, mais à quel prix ?
La politique moderne, c’est l’honnêteté
L’honnêteté de l’État à l’égard du peuple commence par la transparence dans les actes de gouvernance. Les informations recueillies et conservées par le gouvernement sont un bien national. Elles sont la propriété du peuple.
Ainsi, la transparence est une exigence démocratique, Indissociable d’une bonne gouvernance moderne et inclusive. Elle responsabilise les citoyens, qui de leurs impôts et contributions diverses financent les projets de développement Économique et social. D’ailleurs, la trajectoire fiscale du nouveau gouvernement valide parfaitement l’intention d’associer le citoyen-contribuable aux financements des projets de développement à l’heure où l’emprunt coûte cher et devient rare et difficilement accessible aux États les moins bien notés et de surcroît en développement.
Le lancement récent d’un emprunt obligataire par appel public à l’épargne s’inscrit dans cette veine. Comme s’inscrit dans la même veine le très accrocheur slogan « Jub, Jubeûl, Jubànti » aux intentions heureuses et vertueuses. Mais au-delà du charme envoûtant de l’allitération en « J », il ne faudrait pas se laisser bercer par la musicalité des mots, ni se laisser compter fleurette par cet art vil qu’est la politique, si prompte à reprendre ses droits et très souvent encline à une transparence sélective.
En effet, la transparence ne vaut que lorsqu’elle garantit l’existence des autres composantes de la démocratie et de la bonne gouvernance.
Il convient donc de confier cet outil précieux mais sensible et facile à instrumentaliser, à des autorités capables d’assurer et d’assumer l’équilibre nécessaire entre la transparence et ce qui doit rester confidentiel ou secret.
En effet, l’argument de la transparence est une modalité du jeu politique. Ceux qui ont les prérogatives de la transparence ont également légitimement et souvent légalement, la faculté de la censurer. Ne nous y méprenons pas.
La transparence est un enjeu et une arme politique, forgée par et pour les élites politiques. Il s’agit d’un enjeu interne au champ politique, porté par des professionnels de la politique, à la fois juges et parties . Une des dimensions de leur savoir-faire politique consiste à savoir se jouer du principe.
Dans l’univers si sensible de la macroéconomie, toute vérité est-elle bonne à dire ?
On peut légitimement douter et intellectuellement débattre de la pertinence et de l’opportunité de publier une information qui remet en cause, ralentit ou hypothèque la matérialisation de programmes urgents de développement économique et d’assistance sociale et sanitaire des populations les plus vulnérables. Ce qui, en d’autres termes, constitue un risque économique majeur pour la nation.
Et tout cela, alors qu’on vient d’arriver à la tête d’un pays pauvre, de surcroît mal gouverné depuis toujours, ultra endetté et alors qu’on vient de lancer le plan « Sénégal 2050 : agenda national de transformation », qui a pour objectif d’atteindre un taux de croissance de + de 6 %, et qui a besoin de financements très conséquents, que l’autofinancement, à lui seul, ne saurait assurer.
Considérant ses effets graves pour la nation, pourquoi n’a-t-il pas été frappé du sceau de la confidentialité, par la cour des comptes elle-même ? « … est strictement confidentiel et ne saurait être communiqué à des destinataires autres que ceux choisis par la Cour des Comptes » ?
Qu’est-ce qui interdisait au gouvernement de le classer confidentiel, lorsqu’il a reçu communication du pré-rapport, en considérant les graves conséquences que sa publication allait engendrer ?
Le gouvernement et la cour des comptes avaient-ils pris la mesures de l’impact considérable que la publication de ce document allait avoir ?
La cour des compte doit comprendre qu’elle pose, à la publication de chacun de ses rapports, un acte éminemment politique.
Quelle est alors l’autorité la plus irresponsable (au sens péjoratif du mot) en décidant ou en n’empêchant pas sa publication ?
Ni le principe de transparence, ni la loi organique qui le surclasse, édictant et encadrant les rapports de la cour des comptes ne sont au dessus de l’intérêt supérieur de la nation.
Dans ce monde globalisé, ou un seul mot placé dans une phrase apparemment anodine, d’une haute personnalité politique, peut faire chuter la bourse de New York, le Nasdaq ou Shanghai.
Un homme politique ayant sous sa responsabilité la gestion d’une population pauvre, doit remuer sa langue mille fois avant de parler. La vie et l’avenir de millions de personnes sont pendus à ses mots et à ses actes.
Le rapport n’apprend rien aux Sénégalais qui ont décidé, en connaissance ou en soupçon des abus, mauvaise gestion et incompétence, de la part de l’ancien régime, de les bouter dehors. Les Sénégalais ne connaissent pas seulement la vérité, ils la vivent depuis 2012 et même bien avant.
C’est un peuple déçu, meurtri et à genoux, fort de ses espoirs, sa maturité politique et de son incroyable résilience, qui a porté sur ses frêles épaules la lutte qui a mené à l’avènement de l’ère Pastef. Le nouveau gouvernement ayant hérité des actifs, ne doit-Il pas assumer le passif et assurer la continuité de l’État ?
Cette publication de l’audit dit de la cour des comptes a été inconsciemment et sûrement involontairement faite au mépris des conséquences qui pouvaient en découler. Car dès la publication, l’agence Moody's a immédiatement abaissé la note du pays à B3, avec une perspective négative, suivie par Standard & Poor's qui l'a faite passer de B+ à B, avec une perspective négative également.
Le FMI a, quant à lui gelé, dès les premières alertes en octobre 2024, le programme d’aide de 1,8 milliard de dollars, négocié avec les anciennes autorités sénégalaises.Interrogé par Reuters, Edward Gemayel, chef de mission du FMI pour le Sénégal, est on ne peut plus clair : « Nous ne pouvons pas discuter d’un nouveau programme avant d’avoir réglé la question des fausses déclarations. »
Si c’était à refaire, le gouvernement n’aurait certainement pas lavé et étendu ce linge sale sur cette place internationale, sur laquelle donne les fenêtres de toutes les institutions financières et autres agences de notation, qui règnent implacablement sur le financement des États. Sinon, quelle serait la pertinence d’un tel acte digne d’un grand-maître de l’autoflagellation ?
Du mésusage de la transparence en realpolitik
Aucun État moderne et démocratique ne l'applique systématiquement. Car malgré son caractère fondamental, elle ne surclasse pas l’intérêt supérieur de la nation. C’est de la responsabilité des plus hautes autorités de l’Etat de passer chaque situation au filtre de l’intérêt national. Éviter l’application systématique des concepts importés, avant leur « tropicalisation », à des contextes qui ne sont pas à l’origine de leur élaboration. Dans la réalité, la transparence est juste une notion alors que « l’intérêt national » est une réalité, comme le sont la faim et la pauvreté.
Ce concept « occidental », importé comme « la démocratie » et parfaitement assimilé par nos élites intellectuelles et politiques est évidemment nécessaire dans les pays démocratiques du tiers monde, mais son usage doit toujours tenir compte de la conjoncture politico-économique.
Les USA, avec leur grande et ancienne tradition démocratique, ont une expérience issue d’un riche vécu et de débats philosophiques et doctrinaux interessants. Dans ce pays, la transparence a souvent été « snobée » au profit du « secret » ou de la « confidentialité », pour des soucis d’intérêt national. Le cas échéant, c’est cette justification qui immunise et exonère d’accusations de trahison ou d’entorse à la démocratie. Car c’est une décision émanent d’autorités élues qui portent la confiance du peuple, pour les représenter et veiller à leurs intérêts supérieurs.
Sciences politiques sans conscience économique peut entraîner la ruine de l’État
Cette publication d’une information mettant en péril l’intérêt national montre l’un des talons d’Achille de cette nouvelle administration qui est en train de réussir le fou et excitant pari de la transition générationnelle.
En effet, elle puise certains de ses cadres dans le vivier si fécond de la jeune élite sénégalaise, diplômée, dynamique et « patriote » au deux sens du mot, qui pêche justement par son manque d’expériences et de recul. Autrement dit , elle a les défauts de ses qualités.
Le haro des institutions financières et agences de notation sur le Sénégal à la publication de l’audit de la dette publique, est une première leçon faite au gouvernement Pastef sur l’importance d’une vision sur la nécessité d’une anticipation par « l’étude d’impact » qui doit précéder toute prise de décision.
La transparence en tant que concept indispensable à la bonne gouvernance semble être passée du fameux « projet » à une application rigoureuse et stricto-sensu, sans passer par le tamis de l’expérience et d’une vision moins philosophique et moins « PowerPoint » de cet outil précieux mais à double tranchant, dont le mauvais usage peut entraîner des conséquences peu enviables.
L’équilibre secret-transparence doit être de mise
Mais attention aux extrêmes. Attention à l’abus de secrets qui déséquilibre les rapports gouvernants et gouvernés. « En opérant des choix sur ce qu’il faut divulguer et sur la manière dont il faut le faire, les procédures de transparence sont porteuses d’un message, d’un sens déterminé par une série de choix humains. La transparence entendue en ce sens est éminemment politique, et peut être instrumentalisée ». Quel est l’intérêt de « donner la bâton pour se faire battre » en mettant les bailleurs et autres institutions internationales dans le secret d’une éventuelle mal gouvernance du régime sortant, susceptible de mettre le pays dans une crise sans précédent et en un moment charnière ? Sinon pour les mettre en état d’alerte ?
Autant de questions qui interpellent sur la vraie raison de la publication d’un tel document qu’aucun Etat aguerri ou averti et responsable n’aurait publié. Tout au plus, c’est un bon document de travail interne qui peut renseigner les gouvernants sur l’état réel des finances publique et lui permettre de réajuster sa politique et ses prévisions.
Ce document devait-il pas rester confidentiel, du moins le temps que les autorités reprennent le contrôle de la situation, trouvent les financements des politiques économiques, avant d’être « déclassifié » plus tard ?
La gouvernance, c’est la prévision. Oú est la pertinence d’un « hara-kiri » économique que ne subiront que les couches défavorisées du pays ?
Tous les États, même les plus grandes démocraties, pratiquent le « secret » ou la « confidence ou le mensonge statistique » pour « charmer » les agences de notation et les bailleurs et investisseurs mais par souci de protéger l’intérêt national.
Cette pratique de la comptabilité publique est bien présente en comptabilité privée, dans la gestion de toute les grandes ou plus petites entreprises également. Quel bon dirigeant ne s’enferme, au moins une fois l’an, avec son comptable ou son conseiller juridique pour bien « ficeler » son bilan comptable, minorer son imposition ?
Mêmes les bailleurs et les autres institutions internationales ficellent leur gestion sur le plan juridique et comptable. Ils ne sont pas des références en matière de justice et d’équité. Ils ne parient que rarement sur l’humain.
L’éthique comme argument n’est pas non plus pertinente, surtout en ce moment ou les puissances, censées être les « gendarmes du monde » s’adonnent à des exactions ahurissantes d’injustices, allant de la colonisation d’États souverains à des attaques en règles contre le droit et les institutions judiciaires internationales. Mais aussi et surtout des agressions violentes et inexplicables contre les économies de pays tiers et souvent partenaires. Les saillies économiques du président Trump, par l'augmentation unilatérale des droits de douanes nous montre que les États ne s’encombrent plus de vertus quand il sagit d’intérêts.
Aussi, la notion de « politique vertueuse », tente-t-elle l’improbable alliage schizophrénique de deux réalités que tout sépare. La morale « sociale » n’est pas la morale politique. La défense des intérêts nationaux semblent donc primer sur toutes les vertus et la morale.
Au-delà de la confirmation de l’existence d’une justice impuissante contre les riches et puissants États, ces actes entérinent la mort de l’éthique politique et l’avènement d’une morale politique permissive, trés proche de la délinquance d’état.
L’urgence, dans la gestion d’un État pauvre et pressé n’est pas dans les tripatouillages et les bidouillages en tous genres, qu’il faut différencier de la reddition des comptes qui est une exigence d’ordre constitutionnel mais qu’il faut manier avec une dextérité politique .
Aujourd’hui, le remède semble pire que le mal ! M. Gemayel du FMI s’est déplacé jusqu’à Dakar pour sermonner le pays et dire qu’il ne débloquera pas le programme commencé en 2023 et qui devait se poursuivre jusqu’en 2026. Cette position du FMI a été réitérée par le responsable pour l’Afrique, M. Sélassié, venu à son tour au chevet de l’économie sénégalaise mais sans apporter une solution. Au contraire, il confirme la suspension de tous les programmes du FMI en faveur du Sénégal, en attendant la communication par le gouvernement d’un plan d’apurement de la situation et un plan de sortie de crise.
On l’appellera comme on veut : « couper la branche sur laquelle on est assis », « se tirer une balle dans les pieds », « se faire hara-Kiri», mais le Sénégal discrédité, est obligé de suspendre ou reporter certains de ses programmes et des projets de développement très urgents pour les populations, en attendant de négocier, manœuvrer, convaincre, pour essayer de débloquer ou trouver des financements.
Bien sûr, si des infractions sont constatées, il faudrait poursuivre.
Tous responsables de l’impasse ?
La cour des compte avertit : « Les faits relatés dans le présent rapport, présumés constitutifs de fautes de gestion, de gestions de fait ou d’infractions à caractère pénal feront l’objet, le cas échéant, de déférés, de référés ou de déclarations provisoires de gestion de fait ». Elle a confirmé avoir transmis des dossier au procureur général. Mais force est de reconnaître, malgré l’apparence de manœuvres « dolosives » dans le comportement présumé de l’ancienne administration, qu’il sera incommode de sanctionner sévèrement des comportements délictueux. D’ailleurs, M. Gemael refuse de parler de « détournements » : «…25 % du PIB. C'est à peu près 6,7 milliards de dollars. Je ne dirai pas détournés. C'est un endettement qui n'a pas été dévoilé. Et donc, le stock de la dette a été sous-estimé d’à peu près ce montant de 7 milliards de dollars ».
Mais il est parfaitement concevable que le fait d’avoir « caché » une dette assez conséquente, qui à conduit à cette situation désastreuse qui cause un réel préjudice au pays et à ses intérêts économiques soit constitutif d’une infraction pénale.
Et en poussant les investigations, l’ensemble de ces manœuvres pourraient être imputé au président sortant, en tant que gardien des finances publiques. Est-ce la solution de l’énigme ?
Mais ceux qui ont rendu public cette information et on incidemment et par ce fait déclenché les nombreuses et graves réactions en chaîne pour l’économie nationale, n’ont-ils pas leur part de responsabilité ?
En attendant que le gouvernement propose au FMI un programme crédible de régularisation de la situation, les citoyens moyens, nos braves « goorgoorlus », auscultent l’horizon économique avec beaucoup de questions et d’incertitudes. Certains rentreront le soir, avec au fond du sac à courses, juste le rapport de la cour des comptes.
Pendant ce temps, l’État s’arrache les cheveux, à la recherche de la formule magique qui l’extirpera de l’ornière. C’est à se demander si le jeu en valait vraiment la chandelle.
texte collectif
MACKY SALL, FOSSOYEUR DE LA DÉMOCRATIE SÉNÉGALAISE ET CAUTION MORALE DE LA FONDATION MO IBRAHIM ?
Il s’agit d’interroger la cohérence éthique et la crédibilité de la Fondation Mo Ibrahim. Peut-elle encore se revendiquer comme un baromètre impartial de la gouvernance africaine en promouvant des figures qui incarnent l’exact opposé de ses valeurs ?
Il arrive que l’histoire trébuche. Mais quand elle s’effondre volontairement dans l’amnésie, alors l’indignation devient un devoir. En intégrant Macky Sall à son conseil d’administration, la Fondation Mo Ibrahim tourne le dos à ses principes fondateurs et accorde un blanc-seing à l’un des dirigeants les plus critiqués de l’histoire politique sénégalaise pour sa dérive autoritaire, son mépris des institutions et sa politique économique fondée sur l’endettement débridé et la falsification comptable.
Pourtant, la fondation s’était donnée pour mission, depuis sa création, de « promouvoir une gouvernance exemplaire et un leadership responsable » sur le continent africain. À travers l’indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique (IIAG), elle évalue précisément la qualité des institutions, la démocratie, l’État de droit et les droits de la personne. Or, si l’on appliquait strictement ces critères à Macky Sall, son profil relèverait davantage du contre-exemple que du modèle. Faut-il rappeler que la Fondation elle-même a, dans ses rapports, exprimé ses préoccupations quant au recul démocratique et aux restrictions des libertés dans plusieurs pays, dont le Sénégal sous Macky Sall ?
Un passif démocratique accablant
L’héritage de Macky Sall n’est pas celui d’un bâtisseur, mais d’un fossoyeur obstiné de la démocratie sénégalaise. Sous sa présidence, l’État de droit a été méthodiquement vidé de sa substance : instrumentalisation de la justice à des fins politiques, musellement de la presse, emprisonnements massifs d’opposants politiques, coupures arbitraires d’Internet, dissolution de partis et de mouvements citoyens, manipulation des calendriers électoraux, tentatives de coup d’État institutionnel — la liste est longue, consternante, documentée.
Mais plus encore, son règne fut lourdement taché de sang. Entre 2021 et 2024, des dizaines de manifestants pacifiques ont été tués par les forces de sécurité. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : des étudiants, de jeunes militants, de simples passants ont péri dans les rues de Dakar, de Ziguinchor, de Bignona ou de Saint-Louis, pour avoir exercé un droit fondamental et constitutionnel : celui de résister. Ces morts ne sont pas de simples bavures. Ils sont les témoins silencieux d’un régime qui, au nom de l’ordre, a préféré gouverner par la terreur.
Le rapport Afrobarometer de 2023 confirme cette réalité : plus de la moitié des Sénégalais (53 %) considéraient que leur pays n’était plus une démocratie effective. Ce chiffre témoigne d’un effondrement de la confiance populaire dans les institutions, corollaire direct de la « méthode Macky Sall » faite de duplicité, de concentration autoritaire du pouvoir, et d’un usage cynique de la « raison d’État » pour justifier l’injustifiable.
La tentative avortée de troisième mandat n’était pas une erreur de jugement, mais l’aboutissement d’un projet mûri de longue date, soutenu par une caste de politiciens et de consultants internationaux rémunérés pour interpréter la Constitution. L’épisode du décret du 3 février 2024, par lequel il a suspendu le processus électoral à la veille de la campagne présidentielle, a été unanimement condamné comme un coup d’État institutionnel, y compris par le Conseil constitutionnel sénégalais.
Un gestionnaire sans scrupule et sans transparence
L’autre pan du « legs » de Macky Sall, que la Fondation Mo Ibrahim semble avoir passé sous silence, est le désastre économique et financier qu’il a légué au peuple sénégalais. Comme l’ont révélé les rapports de la Cour des comptes, il a systématiquement sous-estimé la dette publique, dissimulé les déficits budgétaires, contracté des emprunts hors budget et détourné l’éthique de la gouvernance publique.
Dans un contexte de croissance inégalitaire, où plus de 37 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, le faste des grands projets d’infrastructure a masqué une absence criante d’inclusivité et de durabilité. La jeunesse sénégalaise, abandonnée à un secteur informel précaire, a payé le prix fort de cette politique d’endettement au service d’intérêts privés et de clientélismes.
Le discours que Macky Sall tient désormais depuis son exil doré au Maroc, en se posant en « homme de paix », contraste violemment avec la réalité de son pouvoir. La paix dont il se réclame est celle des cimetières de la démocratie. On ne reconstruit pas une légitimité internationale sur les ruines d’un pays que l’on a contribué à diviser et affaiblir.
La Fondation Mo Ibrahim, une caution morale en question
L’enjeu ici dépasse le cas Macky Sall. Il s’agit d’interroger la cohérence éthique et la crédibilité de la Fondation Mo Ibrahim elle-même. Peut-elle encore se revendiquer comme un baromètre impartial de la gouvernance africaine en promouvant des figures qui incarnent l’exact opposé de ses valeurs ?
Certes, l’institution n’est pas exempte du droit à l’erreur. Mais une telle nomination ne peut être interprétée que comme une capitulation morale ou, pire, comme une instrumentalisation politique de son prestige au service de la respectabilité des anciens autocrates.
Dans un continent où la confiance entre les peuples et les élites est souvent rompue, où les nouvelles générations réclament des leaderships transparents, démocratiques et responsables, ce type de décision affaiblit le combat commun pour la souveraineté populaire, la justice et la redevabilité.
Accepter Macky Sall dans le cercle restreint des « sages » de la gouvernance africaine, c’est officialiser le double discours : le langage fleuri de la démocratie dans les rapports internationaux, et les pratiques autoritaires sur le terrain. C’est banaliser la violence institutionnelle, les détournements de procédure, la répression des libertés, au nom d’une prétendue stabilité.
La Fondation Mo Ibrahim, si elle veut rester fidèle à sa mission, doit reconsidérer cette nomination, ou à tout le moins, expliciter les critères éthiques sur lesquels elle fonde une telle décision. L’Afrique mérite mieux que la reconversion dorée de ses anciens autocrates. Elle mérite des leaders de rupture, pas des fossoyeurs recyclés.
Signataires :
Félix Atchadé, médecin, Paris
Seynabou Sougoufara, Biologiste, University of Warwick, Manchester
Youssou Mbargane Guissé, chercheur à la retraite, IFAN, UCAD
Mouhamed Abdallah Ly, Directeur de recherches assimilé, IFAN, UCAD
Abdourahmane Seck, Maître de conférences titulaire, UGB
Mamadou Diallo, Doctorant, Columbia University
Oumar Dia, Maître de conférences titulaire, FLSH, UCAD
Abdou Aziz Diouf, Professeur titulaire, FSJP, UCAD
Ibrahima Xalil Niang, Maître de conférences assimilé, FLSH, UCAD
Alioune Thiongane, FMPO, UCAD
Salif Baldé, Maître de conférences titulaire, ESEA, UCAD
Jean Domingo, Enseignant-vacataire à la FST, UCAD
Marie Olivia Guèye, Informaticienne, Ngaparou
Amadou Fall, Professeur assimilé à la retraite, FASTEF-UCAD
Diéry Ngom, Maître de conférences titulaire, UADB
El Hadji Malick Sy Camara, Maître de conférences assimilé, FLSH-UCAD
Ansoumana Diémé, Elève-Professeur, ENSETP, UCAD
Pierre Sané, Ancien secrétaire général d’Amnesty international
Yaya Diallo, responsable pédagogique, CUK-UASZ
Tidiane Sow, Coach en communication politique, Dakar
François Joseph Cabral, Professeur titulaire, FASEG, UCAD
Cheikh Thiam, Professeur titulaire, Amherst college
Benjamin Diouf, Professeur assimilé, FLSH, UCAD
El Hadji Farba Diop, Chef du service de l’éducation, Musée des Civilisations noires (MCN)
Raoul Manga, fonctionnaire, Ontario, Canada
Par Ibou FALL
ADJI RABY SARR, SUISSE ET PAS FINIE
Entre De Gaulle qui dégage, Macky Sall qui s'incruste chez Mo Ibrahim, et Ndèye Khady Ndiaye qui s'autoproclame "patronne du pays", l'affaire Sweet Beauté continue de nous offrir un spectacle plus rocambolesque qu'une série Netflix
L’affaire Sweet Beauté, par laquelle tout nous tombe sur la tête depuis quatre interminables années, ne fait pas que des malheureux : entre-temps, le contumax voit sa condamnation annulée, sort de prison - où il glande pour des accusations bien plus graves que la corruption de la jeunesse - et se retrouve Premier ministre. D’ailleurs, le président de la République en personne, Bassirou Diomaye Faye, face aux journalistes, l’évoque en passant, affirmant que tout le monde sait que cette affaire est un complot.
Personne n’osera lui demander de précisions : vous savez bien, l’article quatre-vingts…
Ben, c’est pile-poil le moment où, dans la presse, tombe l’annonce : l’héroïne de l’affaire Sweet Beauté, Adji Raby Sarr, que la voiture de Madiambal Diagne conduit à l’aéroport pour quitter le pays à destination de la Suisse, bannie du peuple de Pastef dont la malédiction lui prédit la pire des fins, vient d’en être une honorable citoyenne.
Voilà donc, en résumé, une dame qui, dorénavant, en bonne Helvète qui apprend les leçons de la vie, n’aura plus besoin de visa pour bien des destinations agréables… Elle risque de skier dans les Alpes, de préférence à Gstaad en hiver, engoncée dans du vison. Elle a toutes les chances d’y croiser, comme le dirait Félix Houphouët-Boigny, des gens assez sérieux pour confier leur argent aux banques suisses. L’été, elle pourra se laisser glisser sur le lac Léman avec juste un bikini pour seul habit sans que l’inénarrable Mame Matar Guèye n’en fasse une affaire nationale.
Rien que le bonheur de ça… Y’a des malédictions qu’on appelle de tous ses vœux !
Avec ses formes voluptueuses, que le fromage et le chocolat suisse ne manqueront pas de rembourrer, qui ont mis en émoi son pays natal, ça promet des émotions fortes pour l’économie mondiale si elle s’invite d’autorité au Sommet de Davos, à une réunion de la Fifa en direction de la Coupe du monde, ou du Cio qui prépare les Jeux Olympiques…
Assez divagué, revenons à nos moutons ?
Au moment où les accusations de falsifications de chiffres de la comptabilité publique - à propos desquelles le Fmi exige des éclaircissements circonstanciés - s’accompagnent des déclarations guerrières sur les exactions dont est victime le peuple du Pastef entre 2021 et 2024, Macky Sall force la porte du Conseil d’administration de la Fondation Mo Ibrahim ; celle-là même qui distribue les bons points sur le continent en matière de respect de droits de l’Homme, de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.
C’est fait exprès ?
Etonnez-vous, par la suite, que l’image du Sénégal, selon Mo Ibrahim et les sommités mondiales de la bienséance, fasse un plongeon supplémentaire dans les abysses des pays les moins fréquentables. Après les agences de notation qui influencent les bailleurs de fonds, voilà que l’on risque de voir des gloses salées à l’international sur le respect des droits de l’Homme, la bonne gouvernance de ces bons messieurs du tandem «Diomaye môy Sonko»…
Quand le président Bassirou Diomaye Faye, devant un parterre de journalistes, évoque les mystérieuses actions souterraines de son prédécesseur, il sait sans doute de quoi il parle… Y’avait pas moyen de lui tirer les vers du nez sans risquer de tomber sous le coup du tristement célèbre article quatre-vingts ?
Soit dit en passant, le président de la République se sédentarise subitement depuis quelque temps : ça fait une paye que l’on ne nous annonce plus un de ses périples autour de la planète. Rien de grave, au moins ?
Il n’y a pas que les mauvaises nouvelles dans la vie : la France dégage, le Général de Gaulle aussi, pour céder un boulevard au président Mamadou Dia, le premier chef de gouvernement du Sénégal. On appelle ça, à l’époque, un président du Conseil de gouvernement. Rien à voir avec un Premier ministre : Mamadou Dia comme Léopold Sédar Senghor, en 1960, au sortir de la crise qui explose la Confédération du Mali, sont élus par les députés.
Question impie : il n’y a pas moyen d’honorer Mamadou Dia sans dégager De Gaulle ?
Si ce n’était que ça… Ça apprend également dans la presse à quat’ sous que le célébrissime salon Sweet Beauté renaît de ses décombres. Le p’tit local à la devanture couleur de menstrues, niché à Sacré-Cœur, qui dispense jusqu’en 2021 de fracassantes thérapies contre les maux de dos insupportables, rouvre ses portes dans un quartier tout ce qu’il y a de chic. Curieusement, Ndèye Khady Ndiaye, son entreprenante proprio, n’en est pas heureuse malgré tout : il y a de cela quelques semaines, elle se trouve même une tribune pour évoquer la suite de son procès en appel qui semble s’égarer dans le dédale des affaires judiciaires délicatement refermées sans verdict définitif. Elle se fâche aussi de n’avoir pas la reconnaissance de la République, alors qu’elle juge son rôle déterminant dans l’avènement du régime Pastef : les tridents de la présidence et de la Primature n’ont pas eu un soupir de reconnaissance à son endroit, s’énerve-t-elle dans une vidéo… Toutes ces années, pourtant, Madame tient tête au régime de Macky Sall malgré ses pistolets, ses renseignements généraux, ses juges ; elle se vante même d’être capable, quand elle a besoin d’argent frais sans trace ni témoin, d’avoir au téléphone «le président»…
Allez savoir lequel.
Sa sortie pourtant détonante ne suffit pas à son bonheur : la créature divine d’exception remet ça au micro d’un influenceur qui s’indigne en même temps qu’elle de l’article publié par de vulgaires journalistes jaloux de sa réussite. Il y a surtout l’illustration par «l’ancienne photo» qui l’énerve alors qu’elle a actuellement un totem quatre fois plus grand aux Almadies… Ndèye Khady Ndiaye doit avoir des problèmes de difficulté avec le français : «pourquoi ils ne montrent pas l’ancienne nouvelle photo ?», s’agace-t-elle. Avec Sweet Beauté version 2025, prévient celle qui s’autoproclame la patronne du pays, on va voir ce qu’est «un vrai salon de beauté».
J’en ai la cinquième lombaire qui tremble.
LES SURFACES EMBLAVEES PASSENT DE 400 A 1100 Ha POUR LE MAÏS ET DE 1600 A 3000 Ha POUR LE RIZ
La Société nationale d'Aménagement et d'Exploitation des Terres du Delta de Fleuve Sénégal et des Vallées du Fleuve Sénégal et de la Falémé (SAED) a augmenté ses exploitations agricoles à Matam.
La Société nationale d'Aménagement et d'Exploitation des Terres du Delta de Fleuve Sénégal et des Vallées du Fleuve Sénégal et de la Falémé (SAED) a augmenté ses exploitations agricoles à Matam. Ainsi, les surfaces emblavées par la SAED dans la région Nord passent de 400 à 1100 hectares pour le maïs et de 1600 à 3000 hectares pour le riz.
Le Directeur général de la Société nationale d'Aménagement et d'Exploitation des Terres du Delta de Fleuve Sénégal et des Vallées du Fleuve Sénégal et de la Falémé (SAED), en tournée dans la délégation de Matam, a tiré un bilan positif de l’accroissement des exploitations agricoles dans les casiers d’Orkadiéré, Ounaré, Matam et Kobilo. En compagnie des autorités administratives, Alassane Ba a magnifié, devant les producteurs, des grandes avancées des exploitations notées pour la contre-saison froide de maïs, avec 1 100 hectares cultivés, contre 400 l’année dernière. De même, pour la contresaison chaude de riz, les superficies sont passées de 1 600 à presque 3 000 hectares.
Jugeant, à cet égard, que «les superficies emblavées pour les cultures de riz et de maïs sont plus importantes que les précédentes, en raison du soutien (en semences, engrais et d’autres intrants agricoles), fourni par l’État aux producteurs victimes des inondations causées par le débordement du fleuve Sénégal en 2024»
Au niveau des casiers agricoles où le bon comportement des cultures présage des bons rendements à venir, les producteurs croisent les doigts et prient que les fruits tiennent la promesse des fleurs.
De Orkadiéré à Kobilo et Matam, les présidents des casiers, qui ont salué les efforts consentis par l’Etat, ont saisi l’occasion pour formuler des doléances. Parmi lesquelles, la remise à niveau des réseaux d’irrigation et de drainage des parcelles, des digues de protection et des ouvrages de génie civil ainsi que des équipements de pompage… Ce en plus de l’atténuation du coût des factures élevées d’électricité.
.Après avoir réitéré l’engagement de la SAED aux côtés des producteurs de la zone pour l’atteinte de la souveraineté alimentaire, le Directeur général de la SAED, a fait part de la volonté de la Société nationale d’Aménagement et d’Exploitation des Terres du Delta du Fleuve Sénégal et des Vallées du Fleuve Sénégal et de la Falémé «d’installer des panneaux solaires dans les champs, dans le but de réduire le coût de l’électricité de près de 40%».