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27 avril 2025
Economie
LE FMI CONFORTE DAKAR
En visite officielle à Dakar, M. Abebe Aemro Selassie, Directeur du Département Afrique du FMI a fait part de la disposition résolue de son institution à accompagner le Sénégal dans la dynamique de redressement engagé après les dysfonctionnements observés
Le Fonds monétaire international (FMI) renouvelle son engagement à soutenir le Sénégal dans la mise en œuvre de ses réformes économiques. En visite officielle à Dakar, M. Abebe Aemro Selassie, Directeur du Département Afrique du FMI a fait part de la disposition résolue de son institution à accompagner le Sénégal dans la dynamique de redressement engagé après les dysfonctionnements observés dans les finances publiques. Le programme en cours entre le Sénégal et le Fmi, d’un montant de 1 180 milliards de francs CFA (1,8 milliard d’euros), est suspendu depuis septembre 2024, suite aux irrégularités relevées par Dakar dans la tenue de ses données publiques.
En visite officielle à Dakar, M. Abebe Aemro Selassie, Directeur du Département Afrique du FMI, a été reçu par le président de la République, M. Bassirou Diomaye Faye. Les deux responsables ont échangé de manière approfondie sur la conjoncture économique nationale et sur les solutions envisagées pour y remédier. À l’issue de cette rencontre, M. Selassie a salué les priorités définies parle nouveau gouvernement, mettant en avant la volonté de restaurer la transparence budgétaire, de renforcer la recevabilité des institutions publiques, et d’inscrire les finances publiques dans une trajectoire durable.
«Le président Faye et moi avons eu des échanges constructifs sur les initiatives entreprises par le gouvernement pour remédier aux dysfonctionnements observés, notamment en matière de transparence des données publiques», lit-t-on dans le communiqué final reçu hier, mardi 08 avril.
Poursuivant son propos, le haut responsable du FMI a précisé : «Nous avons évoqué les mesures prioritaires à mettre en œuvre pour surmonter les défis économiques auxquels le Sénégal est confronté. J’ai souligné que le FMI partage pleinement la vision du président Faye, et demeure résolument engagé à accompagner le pays dans cette dynamique de redressement.»
Il a également réaffirmé la volonté du FMI de consolider un partenariat fondé sur la confiance mutuelle et le dialogue permanent. À court terme, cette collaboration se poursuivra lors des prochaines réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale à Washington D.C., où les autorités sénégalaises seront conviées à poursuivre les échanges surles réformes économiques clés. Enfin, M. Selassie a exprimé sa profonde gratitude au président de la République et à ses collaborateurs pour l’accueil qui lui a été réservé. «Je me réjouis à l’idée de continuer ce dialogue fructueux avec les autorités sénégalaises dans les prochaines semaines à Washington.»
Pour rappel, le programme en cours entre le Sénégal et le Fmi, d’un montant de 1 180 milliards de francs CFA (1,8 milliard d’euros), est suspendu de puis septembre 2024. Les nouvelles autorités, au pouvoir depuis un an, ont révélé des irrégularités dans les données financières de l’ex-président Macky Sall (2012-2024), dont une “dette cachée” estimée à 4 165 milliards de francs CFA (7 milliards de dollars). Un rapport de la Cour des comptes, publié en février 2025, indique que la dette publique atteint 99,67 % du PIB, bien au-dessus des chiffres officiels précédents, avec un déficit budgétaire de 2023 réévalué à 12,3 %, contre 4,9 % annoncé.
IL FAUDRAIT QUE L’ON REPLACE LE PRODUCTEUR ET L’ELEVEUR AU CENTRE DES ACTIVITES AGRICOLES
C’est la conviction du Ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage Dr Mabouba Diagne qui intervenait lors d’un panel organisé en marge du forum de haut niveau sur l’irrigation au Sahel.
Pour rendre le secteur agricole attractif et rentable, le ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage Dr Mabouba Diagne est d’avis qu’il faut replacer le producteur et l’éleveur au centre des activités agricoles. Il s’exprimait lors d’un panel organisé en marge du forum de haut niveau sur l’irrigation au Sahel.
«I l faudrait que l’on replace le producteur et l’éleveur au centre des activités agricoles ». C’est la conviction du Ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage Dr Mabouba Diagne qui intervenait lors d’un panel organisé en marge du forum de haut niveau sur l’irrigation au Sahel.
« Si l’agriculture est bien formalisée, il sera donc très facile de convaincre les financiers. Il faudrait que l’on mette l’accent sur la formation des producteurs, les accompagner à avoir une maitrise parfaite de l’eau, à soigner les sols, à disposer de semences certifiées et à les former aux techniques modernes pour être productifs », a-t-il soutenu.
Il a souligné ainsi la nécessité de mettre 95% des investissements dans l’agriculture familiale pour développer une maitrise parfaite de l’eau. « Si le financement du calendrier cultural n’est pas respecté avec des taux de financement qui avoisinent les 12, 13 et 14%, comment l’agriculture seraitelle performante ? Je crois fermement que l’agriculture est rentable et peut créer des centaines de milliers d’emplois dont nous avons besoin, mais nous devons cesser de faire ces petites investissements », a-t-il laissé entendre.
Par ailleurs, le ministre demeure absolument convaincu qu’il faudrait retourner au concept de ferme intégrée agro écologique où il faudra combiner agriculture, élevage, aquaculture et pisciculture avec une maitrise parfaite de l’eau.
Selon lui, l’agriculture familiale a besoin d’être développée, encadrée et financée. « Nous ne devons pas continuer à dépendre à 95% des financements venant de l’extérieur si nous croyons que nourrir nos populations, c’est un devoir. Donc une des leçons que nous devons impérativement apprendre de la non atteinte des objectifs en 2013, c’est de s’assurer que 95% de l’argent que nous dépensons va servir à investir dans les infrastructures notamment les périmètres irriguées et les coopératives agricoles », a-t-il indiqué.
par Mia Amor Mottley
LE CRI D'ALARME DE LA BARBADE
Nous devons renforcer nos liens commerciaux avec l’Afrique, l’Amérique latine et centrale, et renouveler nos partenariats historiques avec l’Europe, le Royaume-Uni et le Canada. Nous ne pouvons plus dépendre d’un ou deux marchés
Dans un discours empreint d'urgence, Mia Amor Mottley, Première ministre de la Barbade et présidente de la CARICOM, alerte les nations caribéennes sur une convergence de crises sans précédent. Changement climatique, inflation galopante, tensions géopolitiques et désormais guerre commerciale : la leader barbadienne dresse un tableau inquiétant des défis imminents qui menacent des économies insulaires historiquement dépendantes des importations et vulnérables aux chocs extérieurs.
"Bonjour à toutes et à tous,
Je m’adresse aujourd’hui à tous nos frères et sœurs caribéens, non pas en tant que Première ministre de la Barbade, mais en tant que présidente de la Communauté caribéenne.
Notre monde est en crise. Je ne vais pas l’édulcorer. Nous vivons l’une des périodes les plus difficiles que notre région ait connues depuis que la majorité de nos membres ont accédé à l’indépendance. En vérité, c’est la période la plus critique que le monde ait traversée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il y a 80 ans.
Notre planète fait face à une catastrophe climatique qui s’aggrave chaque année. Nous subissons une crise du coût de la vie qui nous accable depuis la désorganisation des chaînes d’approvisionnement, déclenchée par la pandémie de Covid-19.
La désinformation, la manipulation et les fausses informations sont omniprésentes. La crise de santé mentale provoque un profond sentiment de désespoir chez beaucoup de nos jeunes. Et malheureusement, la criminalité et la peur augmentent. Des guerres ont lieu en Terre Sainte, en Europe, en Afrique. Les pays se méfient les uns des autres. Les voisins se méfient de leurs voisins. L’ordre international est en grand danger d’effondrement. Et désormais, nous sommes au bord d’une guerre commerciale mondiale.
Nos économies caribéennes dépendent largement des importations. Il suffit d’aller au supermarché, au centre commercial, dans une quincaillerie ou un magasin d’électronique, pour constater que la majorité des produits que nous utilisons ne sont pas fabriqués dans notre région. Beaucoup sont directement importés des États-Unis ou y transitent avant d’arriver chez nous. C’est l’héritage de notre dépendance coloniale.
Avec mes collègues chefs d’État et de gouvernement, nous travaillons à sortir de cette dépendance. Nous avons déjà enregistré certains succès, notamment dans l’agriculture, mais le chemin reste long. Et alors que nous avançons, nous devons comprendre que les annonces récentes, faites ces derniers jours, auront un impact direct sur notre région et nos peuples.
Nous œuvrons, et continuerons d’œuvrer, pour devenir plus autosuffisants. Mais je veux que chaque homme et chaque femme de la Caraïbe m’entende. Cette guerre commerciale, et la possibilité d’une taxe de 1 à 1,5 million de dollars américains sur tous les navires fabriqués en Chine entrant dans les ports américains, entraînera une hausse des prix pour nous tous : au coin de la rue, au supermarché, dans les magasins d’électronique, au restaurant, chez les concessionnaires automobiles, et au-delà.
Beaucoup de Caribéens pensent que ces problèmes sont lointains. On entend souvent : « Je suis juste un agriculteur », « Je suis juste un enseignant », ou « Je suis juste un mécanicien ». On se dit : « J’habite à Saint Lucy à la Barbade », ou « à Portmore en Jamaïque », « à Kingstown à Saint-Vincent », « à Arima à Trinité », « à Basseterre à Saint-Kitts-et-Nevis », ou encore « à San Ignacio au Belize ».
Et pourtant, la réalité, mes amis, c’est que si vous achetez de la nourriture, des appareils électroniques, ou des vêtements, cela vous concerne. Cela nous concerne tous.
Nos économies ne sont pas très grandes. Elles sont donc — et ont toujours été — à la merci des prix mondiaux. Si l’Europe, la Chine, les États-Unis, le Canada et le Mexique imposent des droits de douane les uns aux autres, cela perturbera les chaînes d’approvisionnement et augmentera les coûts de production de tout ce que nous consommons : la nourriture, les vêtements, le téléphone dans votre poche, la voiture que vous conduisez, les pièces pour nos infrastructures essentielles. Cela signifie des prix plus élevés pour nous tous, peu importe les efforts de nos gouvernements.
Même si nous supprimions tous les droits de douane à l’intérieur de la CARICOM, cela ne changerait rien. Parce que nos économies sont petites et vulnérables. Cette crise ne se limitera pas aux biens. Elle pourrait aussi avoir des conséquences importantes sur le tourisme. Nous devons donc prendre des mesures pour préserver ce secteur, car la détérioration des conditions économiques dans les pays émetteurs risque de freiner les voyages. Nous appelons le secteur privé régional et les acteurs du tourisme à collaborer avec les gouvernements pour élaborer une stratégie immédiate et coordonnée visant à maintenir notre part de marché touristique.
Je prie pour avoir tort. Je prie pour que la sagesse l’emporte dans le monde, que les dirigeants se rassemblent avec un nouvel esprit de coopération, pour protéger les pauvres et les plus vulnérables, et permettre à la classe moyenne de tracer son chemin de vie, pour que les entreprises puissent fonctionner et commercer.
Mais franchement, je n’ai pas confiance que cela se produise.
Alors, que devons-nous faire ?
Nous devons renouer d’urgence, directement et au plus haut niveau, avec nos amis des États-Unis. Il existe une vérité évidente que les deux parties doivent affronter : les micro-États des Caraïbes n’ont en aucun cas un avantage commercial sur les États-Unis, dans aucun secteur. Historiquement, c’est précisément notre petite taille et notre vulnérabilité qui ont motivé les États-Unis, y compris sous Ronald Reagan, à soutenir notre développement via l’Initiative des Caraïbes (CBI – Caribbean Basin Initiative). Nous verrons comment les nouvelles taxes affecteront cette initiative.
Nous ne devons pas nous diviser pour des raisons politiques. Comme le dit l’adage : Unis, nous résistons. Divisés, nous tombons.
Nous devons redoubler d’efforts pour investir dans l’agriculture et la production locale. L’objectif du projet « 25 by 2025 » mené par le président Ali semble désormais insuffisant face à la gravité de la situation. Nous devons cultiver et produire autant que possible. Chacun de nous peut faire le choix d’acheter des produits sains, locaux, au marché plutôt que des produits transformés au supermarché.
Nous devons renforcer nos liens commerciaux avec l’Afrique, l’Amérique latine et centrale, et renouveler nos partenariats historiques avec l’Europe, le Royaume-Uni et le Canada. Nous ne pouvons plus dépendre d’un ou deux marchés. Nous devons vendre nos produits à un monde plus diversifié et plus stable.
Mes frères et sœurs, chaque crise mondiale est aussi une opportunité. Si nous mettons nos divisions de côté, si nous soutenons nos petites entreprises et nos producteurs, nous sortirons plus forts de cette épreuve.
À nos hôteliers, à nos commerçants, à notre population : le message est le même. Achetez local. Achetez régional. Les produits sont souvent meilleurs, plus frais, plus compétitifs. Si nous travaillons ensemble, si nous valorisons nos ressources locales, nous pourrons surmonter cette crise. Il y aura des défis logistiques, mais nous y parviendrons.
Que Dieu bénisse notre civilisation caribéenne.
Merci."
LE SÉNÉGAL FACE AU VERROUILLAGE DES MARCHÉS
La guerre commerciale déclenchée par Donald Trump menace d'exclure le pays et d'autres nations africaines des marchés obligataires mondiaux, alors même que ces économies traversent une période critique
(SenePlus) - Les turbulences tarifaires provoquées par l'administration Trump menacent d'exclure plusieurs pays africains, dont le Sénégal, des marchés obligataires mondiaux, selon Bloomberg. Cette situation pousse les investisseurs à délaisser les actifs jugés risqués, au moment même où ces économies font face à de sérieux défis financiers.
"Si les bouleversements causés par la guerre commerciale du président américain Donald Trump persistent, entraînant des écarts de rendement continuellement plus élevés, il sera difficile pour les nations d'Afrique subsaharienne d'émettre de nouvelles euro-obligations", a déclaré lundi Aurelie Martin, économiste et analyste d'investissement chez Ninety One à Londres.
"Les turbulences pourraient inciter les gouvernements aux finances tendues à négocier de nouveaux programmes de financement avec le Fonds monétaire international, notamment le Kenya, le Sénégal et l'Angola", rapporte Bloomberg.
Cette situation survient alors que le pays, comme d'autres de la région, avait commencé à retrouver un accès aux marchés après le gel de 2022, lorsque la hausse rapide des taux d'intérêt avait fermé l'accès aux financements internationaux.
La situation est particulièrement inquiétante pour les économies dépendantes des matières premières. "Si la chute des prix du pétrole et d'autres matières premières affectait simultanément leurs recettes fiscales", les conséquences seraient graves, souligne Martin.
Pour le Sénégal, qui développe actuellement ses ressources pétrolières et gazières, cette pression arrive à un moment critique de son développement économique.
Si le Kenya et la Côte d'Ivoire ont déjà émis de nouvelles obligations cette année pour refinancer des dettes existantes, la situation pourrait inciter le Sénégal et d'autres nations à envisager "une nouvelle vague de demandes de programmes du FMI", selon Martin.
Kevin Daly, gestionnaire de portefeuille chez Abrdn Investments Ltd., observe que "la dernière fois que nous avons vu des mouvements de cette ampleur, c'était pendant la pandémie", mais aujourd'hui, "nous ne savons tout simplement pas dans quelle mesure ou d'où viendra la stabilité."
Les obligations du Kenya et de la Zambie ont déjà "chuté à des niveaux historiquement bas", selon Bloomberg, illustrant les risques auxquels le Sénégal pourrait également faire face dans ce contexte de turbulences internationales.
Les discussions entre les pays africains touchés et les institutions financières internationales se poursuivront lors des réunions de printemps organisées par le FMI et la Banque mondiale plus tard ce mois-ci, où le Sénégal pourrait chercher à sécuriser de nouvelles sources de financement.
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LA LEÇON DE DIPLOMATIE DE WADE À SONKO
"Quand on a le destin d'un pays pauvre entre ses mains, on ne doit pas dire que son pays est pauvre." Cette confiance de l'ancien président interroge la stratégie du gouvernement actuel qui a choisi de dévoiler l'état préoccupant des finances nationales
Dans son nouveau livre "Wade, mille et une vies", Madiambal Diagne révèle une position surprenante d'Abdoulaye Wade sur la communication gouvernementale concernant l'état économique du pays.
S'adressant à Mamadou Massali, jeune militant du PDS, Wade aurait déclaré : « Quand on est à la tête d'un pays, on doit se montrer conciliant, surtout si c'est un pays pauvre. Si je disais la situation véritable dans laquelle j'ai trouvé le pays, personne ne financerait le Sénégal. Abdou Diouf et les socialistes, en 40 ans, n'avaient rien foutu et avaient fait n'importe quoi, mais je ne peux pas le dire. Je présente les choses de la manière la plus belle."
L'ancien président justifiait cette approche par une logique pragmatique : "Si je me mettais à dire que la situation est mauvaise, peu reluisante, qui mettrait son argent dans ce pays ? Or, j'ai besoin d'argent pour lancer mes projets. Quand on a le destin d'un pays pauvre entre ses mains, on ne doit pas dire que son pays est pauvre, sans ressources, etc."
Cette position tranche radicalement avec celle adoptée par l'actuel Premier ministre Ousmane Sonko, qui a fait de la dénonciation de l'état des finances publiques héritées du régime de Macky Sall un élément central de sa communication. Madiambal Diagne indique avoir souri en entendant les déclarations de Sonko, allant jusqu'à appeler Massali pour lui dire que "notre livre aurait dû sortir avant ses propos".
Dans l'ouvrage, l'auteur souligne qu'Abdoulaye Wade "a su avoir de l'élévation, de la hauteur pour pouvoir mettre en avant les intérêts du Sénégal plutôt que de régler des personnels", ce qui lui aurait permis "d'impulser des politiques soutenues par la communauté internationale".
À l'inverse, Diagne estime que la réaction actuelle de la communauté internationale face aux révélations du gouvernement Sonko-Diomaye est "sans équivoque", suggérant que cette stratégie de communication serait préjudiciable aux intérêts du Sénégal.
DAKAR ENTRE MODERNITÉ ET CHAOS
La presqu'île dakaroise, devenue mégapole par l'histoire coloniale, voit ses artères s'obstruer davantage chaque jour. Malgré les tentatives de trois présidents successifs, la capitale reste prisonnière de sa géographie et d'une planification défaillante
(SenePlus) - Étouffée dans son étroit losange atlantique, Dakar concentre le quart des Sénégalais sur 0,28% du territoire national. Entre modernisation et chaos persistant, la capitale cherche désespérément son second souffle.
Selon une analyse de Mehdi Ba pour Jeune Afrique, Dakar incarne le paradoxe d'une métropole africaine en mutation : "Les transports sont à l'agglomération ce que les artères sont au cœur et au corps humain: des connexions vitales qui permettent de maintenir en vie le reste du pays."
Cette métaphore organique illustre l'importance cruciale d'un système circulatoire efficace dans une région hypertrophiée qui abrite "près du quart des quelque 18 millions de Sénégalais" sur une superficie représentant à peine "0,28% du territoire". Résultat: une densité de population atteignant "7.277 habitants au km²", bien supérieure à celle de l'Île-de-France (1.025 hab/km²).
Plusieurs tentatives de décentralisation ont échoué. Jeune Afrique rappelle qu'"Abdoulaye Wade avait un temps prétendu faire de Lompoul la nouvelle capitale administrative du pays, et de Thiès, sa 'capitale industrielle'". Dans la même logique, "Macky Sall entendait hisser la ville nouvelle de Diamniadio au rang d'annexe de cette capitale asphyxiée par la conjonction de l'exode rural et d'un taux de natalité galopant."
Mais ces ambitions se sont heurtées à la réalité: "Dakar a tenu bon."
Si "la modernité, en particulier en matière de transports urbains, y a supplanté peu à peu l'héritage désuet d'une Afrique de carte postale", les contrastes demeurent saisissants. D'un côté, "depuis 2016, une autoroute spacieuse (mais à péage) permet de rallier l'Aéroport international Blaise-Diagne", de l'autre, on y croise toujours "les fantômes du Sénégal des profondeurs: camions préhistoriques ou taxis 7 places antédiluviens [...] sans oublier les minibus surchargés, qui penchent dangereusement d'un côté et sont autant de bombes routières à retardement..."
Même la régulation du trafic illustre ce dualisme : dans cette "capitale sénégalaise où les feux tricolores font office de vestiges ornementaux", "des policiers restent chargés de cette tâche, à l'ancienne, sifflet à la bouche."
Deux innovations majeures tentent d'apporter "un nouveau souffle à des transports urbains qui n'ont jamais été en mesure de suivre la cadence de l'explosion démographique". D'abord, la ligne de Bus Rapid Transit (BRT), "en service depuis mai 2024" entre "Guédiawaye, ville-champignon de la banlieue, et Petersen, dans le centre-ville historique".
Ensuite, le Train express régional (TER), qualifié de "frère de lait du BRT", qui constitue "une avancée notable vers un réseau de transports urbains digne du pays". Encore limité à Diamniadio, son extension vers l'aéroport est "annoncée pour le second semestre de 2025".
Malgré ces progrès, JA souligne que le TER, "aussi rutilant soit-il, peine à masquer l'absence d'un réseau ferroviaire digne de ce nom". Face à ce constat, le président Bassirou Diomaye Faye a "demandé à son Premier ministre, Ousmane Sonko, de 'présider un comité stratégique du ferroviaire'" en juillet 2024.
Un mois plus tard, "les ministres sénégalais et marocain concernés signaient deux conventions censées sceller leur 'volonté commune de renforcer les liens de coopération bilatérale' en la matière".
La conclusion de Mehdi Ba résume parfaitement l'enjeu générationnel de ce défi : "Si Abdoulaye Wade a lancé la construction de l'AIBD, que Macky Sall a inauguré après lui tout en donnant naissance au TER et au BRT, faut-il espérer que, sous le règne de Bassirou Diomaye Faye, le Sénégal accouchera d'un TGV?"
FCFA, LE COUP FINAL ?
Diomaye a réaffirmé sa volonté d'émancipation monétaire, tandis que Tidiane Thiam, favori à la présidentielle ivoirienne, défend une "zone crédible, autonome et bien gérée". Un mouvement qui s'accélère avec le retrait déjà acté de l'AES de ce système
Le président de la République Bassirou Diomaye Faye, lors de son face-à-face avec la presse, a réaffirmé la volonté de son gouvernement d'avoir une souveraineté monétaire. La même velléité est notée en Côte d'Ivoire où l'un des favoris pour la prochaine présidentielle, le candidat du PDCI Tidiane Thiam, souhaite lui-aussi, lorsqu'il sera élu, prendre ses distances avec cette monnaie. Des annonces qui viennent se greffer sur la volonté des trois pays de l'AES de sortir de cette «colonisation».
Le vent de l'Afrique en matière monétaire rame actuellement à contre-courant du FCFA. Et c'est le moins qu'on puisse dire. En effet, si par le passé, cette question semblait être un vœu pieux des dirigeants de cette zone, force est dire qu'avec la nouvelle génération de décideurs, la souveraineté monétaire est au cœur des préoccupations, des revendications pressantes et des objectifs, à commencer par le Sénégal. Les nouveaux tenants du pouvoir qui ont battu leur réputation sur la nécessité d'aller vers une indépendance totale à l'égard de la France. Et pour ce faire, Ousmane Sonko et le Pastef n'avaient pas lésiné sur les moyens quand ils étaient dans l'opposition pour montrer toute leur volonté de se séparer de tout ce qui reste de la Françafrique comme les bases militaires et le FCFA. Muet sur cette dernière question depuis son accession à la magistrature suprême, le Président Bassirou Diomaye a affirmé vendredi dernier, face à la presse, que son gouvernement «reste toujours sur cette même trajectoire». «On ne renonce jamais dans la quête de la souveraineté intégrale d'avoir notre propre monnaie» a soutenu le chef de l’Etat avant d'ajouter : «On a trois leviers pour financer notre économie, ce sont la fiscalité, l'endettement et la monnaie. Mais un pays qui n'a pas une souveraineté monétaire ne peut rien décider. Durant le covid, si des pays comme les États unis ont pu battre monnaie pour donner du souffle à leur économie et soulager leurs populations, c'est grâce à leur souveraineté monétaire. «Nous, on ne pouvait pas parce que qu'on a pas notre propre monnaie».
Ainsi pour le président Diomaye Faye, l'objectif premier est de travailler à avoir cette souveraineté dans le cadre communautaire avec l'UEMOA ou la CEDEAO. «Mais si on constate des lenteurs à long terme, on devra avoir notre propre monnaie», fait-il savoir sans langue de bois. Même son de cloche concernant les trois pays de l’AES. Pour rappel, le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont signé en septembre 2023 la Charte créant l’Alliance des États du Sahel (AES). Ces trois pays ont annoncé leur retrait de la CEDEAO. Ils annoncent aussi avoir entamé une réflexion sur la sortie de la Zone franc et la création d’une monnaie commune. Pour recouvrer, disent-ils, leur souveraineté totale et cesser d’être la «vache à lait» de la France. La messe est dite. La Côte d'Ivoire qui est aussi un pays très important économiquement dans la zone risque de s'aligner sur ces pays dans les semaines et mois à venir.
Tidiane Thiam, candidat du PDCI en Côte d'Ivoire : « Ma vision serait d'avoir une zone crédible, autonome et bien gérée »
En effet, un des favoris de la prochaine présidentielle, le candidat du PDCI Tidiane Thiam, est pour une monnaie souveraine. « Je pense que la monnaie est un attribut essentiel de la souveraineté. Je pense qu'une nation qui n'a de contrôle de sa monnaie n'est pas vraiment souveraine», constate l'héritier d'Houphouët Boigny lors d'une récente interview sur France 24 non sans signaler toutefois que le fait d'avoir une zone monétaire a de gros avantages. Et il faut, d'après lui, arriver à gérer une monnaie. «Avec tout ce que cela comporte, notamment le taux de change et la parité externe», précise-t-il avant de déclarer : «Ma vision serait d'avoir une zone crédible, autonome et bien gérée». Vestige colonial, le FCFA reste la monnaie de 15 pays d’Afrique, avec un soutien de la France. Mais près de 80 ans après sa création, sa remise en cause est aujourd'hui une tendance lourde dans les pays de l'Afrique de l'ouest.
par Félix Nzale
MALAISE AU SOMMET DE L’ÉTAT
Entre un président poussant à faire pression sur la justice, un Premier ministre revendiquant le contrôle du Garde des sceaux, et un ministre affirmant son indépendance, le nouveau régime expose ses contradictions sur la séparation des pouvoirs
Il est malheureux que les confrères qui avaient en face d’eux le président de la République (dans le cadre de son «Face à la presse») n’aient pas émis la moindre objection lorsque Diomaye Faye a déclaré qu’il appartient aux Sénégalais de mettre la pression sur la Justice afin de contraindre cette dernière à faire son travail. Parce que, a ajouté le chef de l’Etat, «on ne peut pas identifier des tiers épinglés par les différents corps de contrôle et que la Justice se mette à traîner les pieds».
Avant Diomaye, son Premier ministre, Ousmane Sonko, lors de la campagne électorale pour les Législatives, avait clairement fait savoir que le ministre de la Justice n’était ni un homme libre ni un homme indépendant. Que lui, Premier ministre, avait le pouvoir d’ordonner au Garde des sceaux de poursuivre telle ou telle personne, et que ce dernier était tenu de s’exécuter. «Le ministre de la Justice n’est pas une autorité judiciaire, c’est une autorité politique», avait-il justifié. Ce à quoi le ministre de la Justice, Ousmane Diagne, avait rétorqué plus tard disant que personne ne pouvait mettre la pression sur sa personne, «surtout dans un sens déterminé», et qu’il ne fallait pas non plus compter sur lui pour mettre la pression sur les magistrats du Siège.
Au président Diomaye : comment mettre la pression sur la Justice ? En assiégeant le bâtiment qui abrite le ministère ? En organisant des marches de protestation ? En kidnappant des magistrats ? En brûlant leurs maisons ? En déversant sur eux et sur leurs familles des insanités sur les réseaux sociaux ? Bref, l’on ne demande qu’à savoir comment nous y prendre.
En attendant, nous estimons que ces propos sont d’une gravité extrême, a fortiori lorsqu’ils sortent de la bouche du chef de l’Etat en personne. Le problème est simple : vous n’êtes pas d’accord avec la posture de votre ministre ? Dégommez-le et placez une marionnette à la place, au lieu d’un appel à l’émeute ou au soulèvement ! Au Premier ministre Ousmane Sonko : combien de Sénégalais ont perdu la vie du fait, aussi, d’une Justice dont il disait qu’elle était instrumentalisée ? Aujourd’hui, Premier ministre, M. Sonko nous rappelle qu’il a les pleins pouvoirs et qu’il pouvait manipuler la Justice à sa guise. Lui est fondé à le faire, mais ses devanciers, non. En tenant ces propos, Sonko avoue qu’il ne fallait pas compter sur ce régime pour opérer la rupture pour laquelle des centaines de Sénégalais ont sacrifié leur vie. En fait, le moins que l’on puisse dire est que la communication de nos dirigeants actuels est d’un catastrophisme inquiétant.
Au ministre de la Justice, Ousmane Diagne : pour votre honneur et pour votre dignité, rendez le tablier !
Par Mohamed GUEYE
LA PROIE POUR L’OMBRE
Le 4 avril, Diomaye n’était pas là pour faire acte de contrition devant son maigre bilan après un an. Il est assez extraordinaire de voir un dirigeant passer plus d’une année à se vanter de l’état de déliquescence du pays dont il a tant voulu la gestion
Le 4 avril dernier, le président Bassirou Diomaye Faye n’était pas devant la presse pour faire acte de contrition devant le maigre bilan de son parcours d’une année ; loin de là. Au lieu de se désoler des emplois détruits quasiment dès son arrivée au pouvoir, conséquence de la politique menée par son gouvernement, de tenter de rassurer face à la quasifaillite du pays, il a quasiment cherché à enfoncer le clou, en déclarant aux journalistes, en wolof : «Vous avez voté pour le changement, et il là devant vous, et il sera encore plus amer.» Sans aucune donnée, il a voulu justifier les licenciements massifs opérés dans certains services, comme étant le fruit de recensements, qui auraient révélé de nombreux emplois fictifs, souvent faits à quelques jours du changement de régime.
Les entreprises qui ferment suite à des décisions controversées d’arrêt des chantiers ? C’est pour lui, la fin d’une gestion clientéliste de la part de dirigeants qui comptaient sur leur proximité avec les autorités de l’Apr déchues. Le même reproche a été adressé, à quelques nuances près, aux patrons des médias privés qui, par la voix de la journaliste Maïmouna Ndour Faye, ont fini par transmettre au chef de l’Etat leurs complaintes sur la condamnation à mort en sursis de leur secteur. Bassirou Diomaye, comme à son habitude, estime que les ennuis de la presse viennent de ce que les dirigeants d’entreprise, qu’il accuse de détournement de deniers publics, se sont longtemps arrangés avec les anciens dirigeants, qui leur accordaient des faveurs indues, notamment en remises d’impôts, qui ont atteint des «milliards de francs», selon ses dires. Les conventions signées par ces organes de presse avec certains services de l’Etat, n’étaient à ses yeux, pas justifiées, donc, faciles à annuler malgré les conséquences, aux yeux de l’inspecteur des Impôts de formation.
Il est assez extraordinaire de voir un dirigeant au pouvoir passer plus d’une année à se vanter de l’état de déliquescence du pays dont il a tant voulu la gestion. Un observateur des politiques publiques africaines notait dernièrement que, même dans des pays dont la situation économique est à la limite catastrophique, les dirigeants n’ont jamais passé le temps à se plaindre des turpitudes de leurs prédécesseurs, et cherchaient au contraire, à transmettre un message positif de redressement à plus ou moins brève échéance. Des exemples ne manquent pas, dans notre plus proche voisinage, comme aussi bien dans des pays africains bien éprouvés.
De leur côté, Diomaye et ses amis ont préféré s’atteler à la destruction du tissu économique existant, comme s’ils pensaient remplacer le Peuple sénégalais par un nouveau prototype tiré des bureaux du cabinet de Victor Ndiaye. Le président sait pourtant que l’on ne peut développer un peuple et sa jeunesse en bridant l’initiative privée. Madiambal Diagne vient de commettre un nouvel ouvrage sur le parcours politique de Abdoulaye Wade. La cérémonie de dédicace a été une belle occasion pour des proches et anciens collaborateurs du patriarche de se retrouver et de se rappeler ses œuvres. Beaucoup de Sénégalais pourront se remémorer de ce que le «Gorgui» se vantait d’avoir créé des milliardaires dans ce pays. Est-ce à dire, comme le penseraient sans doute nos dirigeants fiscalistes, que le «Vieux» puisait dans la caisse pour servir une coterie ? Que Nenni ! Wade se contentait juste de créer l’environnement propice à des entrepreneurs de mettre leurs billes là où elles pouvaient leur rapporter gros. Et si ces entrepreneurs se trouvaient être de ses proches, cela ne voulait pas nécessairement dire que ceux qui ne l’étaient pas n’avaient pas des chances de trouver leur place au soleil. Gageons que bien de ceux qui sont stigmatisés actuellement, ont été dans les mêmes conditions auprès de Macky Sall. Et l’on peut aisément parier que dans quelques mois, on parlera de «riches du Projet», qui auront pu se faire leur beurre autour de la table des projets générés par la «Vision 2050». Contrairement à ce que pourraient penser des esprits naïfs, on n’a pas encore pu trouver le moyen de passer des marchés publics à milliards que des miettes tombent de la table pour se glisser dans des poches particulièrement bien positionnées. Ceci n’est pas une justification ni un encouragement à la corruption, c’est juste un constat. D’ailleurs, que l’on ne s’y trompe pas, c’est dans les pays les plus riches que le phénomène est le plus développé. Tout ce qu’il faudrait alors souhaiter, c’est que ces futurs «entrepreneurs du Projet» fassent mieux ruisseler les excès de leur richesse jusqu’au bas de l’échelle.
Et puisqu’au Sénégal, quand l’Agriculture va, tout va, Mabouba Diagne et son collègue Cheikh Tidiane Dièye auront bientôt enfin, l’occasion de présenter aux Sénégalais la mesure de leurs capacités de bien gérer une campagne agricole bien productive, et dont les paysans profiteront plus que les spéculateurs. Pour que les Sénégalais ne regrettent plus trop longtemps d’avoir lâché la proie Macky pour l’ombre Sonko moy Diomaye.
par Thierno Alassane Sall
LA GRANDE SUBSTITUTION POLITIQUE
Licencier des Sénégalais par la main droite, en recruter d’autres par la main gauche, avec comme critère discriminant l’appartenance politique. Et si le Projet n'était rien d'autre que de se partager le Sénégal conçu comme un butin de guerre ?
J'ai reçu ce jour le Rassemblement des Travailleurs Sénégalais (RTS) licenciés par les nouvelles autorités (CDC, DDD, FONGIP, PAD).
Plusieurs centaines de personnes concernées et un objectif commun à toutes ces sociétés : faire de la place aux militants du Parti qui a conquis le Sénégal. Licencier des Sénégalais par la main droite, en recruter d’autres par la main gauche, avec comme critère discriminant l’appartenance politique. Pire détournement - ou plutôt instrumentalisation - de la demande sociale d’une rationalisation. Et si le Projet n'était rien d'autre que de se partager le Sénégal conçu comme un butin de guerre ?
Les concernés déplorent, faits et preuves à l'appui, une brutalité sauvage dans la sélection des personnes à licencier, la violence dans l'annonce des décisions, la gestion inique de tous le processus : violations caractérisées de leurs droits avec un ultimatum (accepter le licenciement aux conditions fixées sans négociations ni préavis par l'entreprise ou le licenciement immédiat sans droits ni compensation financière d'aucune sorte).
Dans les deux cas, la misère retardée de quelques maigres mois ou la misère immédiate. À la clé, des enfants renvoyés de l'école, des mois de loyer impayés, les affres des jours sans pain. Ils disent : "ils nous parlent de Jub, jubal, jubbanti, nous on est victimes du Dëŋ, dëŋal,dëŋŋalaat."