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2 mai 2025
International
EMMANUEL MACRON ANNONCE LA FIN DE BARKHANE
Le président français veut une "profonde transformation" de la présence de l'armée française dans le Sahel. Des bases seront fermées au profit de forces spéciales internationales pour lutter contre le terrorisme
DW Afrique |
Sandrine Blanchard, Avec agences |
Publication 10/06/2021
"La France n’est en Afrique qu’à la demande des Africains, à la demande d’Etats souverains", a tenu à rappeler Emmanuel Macron.
Le président français a tenu ce soir une conférence de presse dans laquelle il a précisé les orientations de son pays en matière de politique internationale.
Les opérations militaires extérieures de la France dans le Sahel, "engageant plus de 5000 hommes" ne sont plus adaptées, selon lui, à la situation actuelle.
Internationalisation de la lutte anti-terroriste
La France va donc procéder à une "profonde transformation" de sa présence dans la région.
Emmanuel Macron confirme ainsi la fin annoncée de l'opération Barkhane au Sahel qui pourrait être remplacée par une opération militaire internationale comme le groupement de forces spéciales européennes Takouba. Celle-ci continuerait de venir en appui des armées des pays sahéliens :
"Nous amorcerons une transformation profonde de notre présence militaire au Sahel dont la modalité et le calendrier seront précisés dans les semaines à venir et je le ferai d'ici à la fin du mois de juin, mais je vais initier ce travail dès les jours prochains.
Cette transformation se traduira par un changement de modèle, il impliquera le passage à un nouveau cadre c'est-à-dire la fin de l'opération Barkhane en tant qu'opération extérieure pour permettre une opération d'appui, de soutien et de coopération aux armées des pays de la région qui le souhaitent et de la mise en œuvre d'une opération militaire et d'une alliance internationale associant les États de la région et tous nos partenaires strictement concentrés sur la lutte contre le terrorisme", a déclaré le président français.
Coopération avec le G5 Sahel, la Minusma, la Cédéao
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a esquissé les vues de l’Elysée, cet après-midi, à Abidjan, lors de l’inauguration de la nouvelle Académie internationale de lutte contre le terrorisme : "Evidemment, la France n'a pas vocation à rester éternellement au Sahel, par sa force (…)
Nous ne renoncerons pas au combat contre le terrorisme, mais il est vraisemblable qu'il faille adapter le dispositif Barkhane, mais le combat contre le terrorisme se poursuit en partenariat avec le G5 Sahel, avec la Minusma et aussi avec les pays de la Cédéao."
La "mauvaise jurisprudence" du Mali
Lors de sa conférence de presse, Emmanuel Macron a déploré que la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest ait "reconnu" le colonel Assimi Goïta comme président de la transition au Mali.
Il a qualifié cette décision d'"erreur", alors que la Cédéao avait refusé de le reconnaître six mois plus tôt, en raison du "précédent que cela crée chez beaucoup de voisins", ajoutant "c'est leur décision, je la respecte."
Parmi les engagements que la France réclame aux autorités de la transition malienne, Le président francais précise : "Nous demandons aux nouvelles autorités maliennes qu’elles respectent les échéances et qu’elles tiennent leurs engagements. La place de tous les mouvements politiques, respect des populations civiles, mise en œuvre des accords d’Alger, pas de dialogue et de compromission avec les groupes terroristes, le respect des règles fixées par la médiation de la Cédéao."
Autres annonces concernant l'Afrique
Par ailleurs Emmanuel Macron s'est prêt à vendre des réserves d’or pour aider à financer l’aide à l’Afrique. La France appelle les laboratoires pharmaceutiques à donner 10% de leurs doses de vaccins anti-Covid-19 aux pays les plus pauvres. Elle va collaborer avec l’Afrique du Sud pour la production de vaccins anti-Covi-19. L’agenda d'application de ces annonces devra être préciser avec les partenaires de la France. Des précisions devraient être données d'ici la fin du mois de juin.
Par Yoro DIA
MALI, EN ATTENDANT LES RUSSES
Le Mali, qui a déjà commis une erreur en sous-traitant durablement sa sécurité, est en train d’en commettre une autre de plus en attendant les Russes. L’urgence pour le pays, ce ne sont pas les combines politico-militaires et les révolutions de palais
«Comme chef d’Etat, deux choses lui avaient manqué : qu’il fût chef et qu’il y eût un Etat.» Ainsi parlait de Gaulle de Albert Brun, président de la République française de 1932 à 1940. On est tenté de dire la même chose du colonel Assimi Goïta, le nouveau président de la transition au Mali. Peut-être qu’il sera chef ? Nous le saurons bientôt, mais est-ce qu’il aura un Etat ? La réponse est «Non».
Le «coup d’Etat dans le coup d’Etat» parachève le long processus de l’effondrement de l’Etat au Mali. En s’enfermant dans une «transitologie» permanente, le Mali ne fait que décaler l’essentiel : reconstruire un Etat, reconstruire une Armée pour défendre son territoire. Le parapluie dont le pays bénéficie depuis presque dix ans aurait dû servir à mobiliser la Nation autour de cet objectif, dont dépend la survie du pays, mais malheureusement l’Armée malienne semble être au même niveau qu’en 2012, quand la France arrêtait les hordes jihadistes dans leur descente vers Bamako.
Le président Ibrahim Boubacar Keïta, par inconscience politique et historique, a fait perdre au Mali les 7 années les plus importantes de son histoire. Et comme je le dis souvent ici : le temps est le meilleur allié des jihadistes. Le Mali va très mal parce qu’il est autant évident que les Français partiront, que les Russes ne viendront pas.
Le fait aujourd’hui que tout l’espoir du Mali se fonde non pas sur ses armées, mais sur une hypothétique intervention des Russes, après celle des Français, montre le degré de désespoir dans ce pays, mais aussi et surtout que plus personne ne compte sur l’Armée du Mali. Quand je discute avec des amis maliens, ils donnent l’exemple de la Syrie où le régime Assad a été sauvé par les Russes. En Syrie, l’intervention russe était principalement aérienne, pour appuyer l’Armée de Assad qui combattait au sol. En Syrie, l’Armée de Assad, composée presque exclusivement des Alaouites (le clan minoritaire au pouvoir), se battait pour la survie non seulement du régime, mais surtout de la minorité alaouite.
En Syrie, Bachar et son Armée ont très tôt appréhendé les conséquences désastreuses d’une chute du régime ; d’où cette énergie du désespoir qui a été à l’origine de la survie. Au Mali, c’est presque le contraire, avec le grand écart qu’il y a entre la gravité de la menace sur la survie du pays et l’insouciance qu’il y a à Bamako, où le retour du vieux routier politicien Choguel Maïga marque aussi le retour de la politique politicienne. Autant le premier coup d’Etat pouvait être considéré comme un sursaut face au naufrage du Mali, autant le coup d’Etat dans le coup d’Etat ferme la parenthèse de ce qui devait être le dernier sursaut et le retour de la politique politicienne.
L’urgence nationale pour le Mali, ce ne sont pas les combines politico-militaires et les révolutions de Palais ou de camp militaire, mais c’est de préparer son Armée face aux jihadistes qui vont reprendre leur marche vers Bamako dès que la parenthèse de la force expéditionnaire sera fermée, à moins que psychologiquement on ait déjà accepté la défaite et le règne des islamistes de Kayes à Kidal, car il est sûr que ces derniers, qui ont pris un ascendant sur l’Armée malienne, ne vont plus se contenter de la partition, mais voudront prendre tout le pays.
Et n’eut été le coup d’arrêt de l’opération Serval, ils l’auraient déjà fait. Le Mali, qui a déjà commis une erreur en soustraitant durablement sa sécurité, est en train d’en commettre une autre de plus en attendant les Russes qui seront comme le fameux «En attendant Godot» de Samuel Beckett, car les russes ne viendront pas. Ceux qui misent sur cette naïveté stratégique le paieront cash politiquement.
LES COMBATS DE FATIME RAYMONDE HABRÉ
La deuxième épouse d’Hissène Habré, condamné à la perpétuité pour des faits commis alors qu’il était à la tête du Tchad entre 1982 et 1990, a depuis longtemps fait sien le combat de son époux
Jeune Afrique |
Marième Soumaré |
Publication 08/06/2021
Fatime Raymonde Habré est le premier soutien de son mari, condamné à la prison à perpétuité au Sénégal pour crimes contre l’humanité. Portrait d’une femme influente et volontiers offensive, qui continue de se battre pour son époux.
Ça a été le cas dès leur arrivée au Sénégal lorsque, chassé par les hommes d’Idriss Déby, Hissène Habré se réfugie à Dakar. Et ça l’est encore davantage depuis qu’il a été incarcéré (en juin 2013) puis condamné (en mai 2016) pour « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité », « tortures » et « viols ». Aujourd’hui, c’est elle qui porte, devant les médias et auprès de ses avocats, la parole de son mari.
Ce 25 avril, devant les caméras du média sénégalais Dakar matin, elle revient longuement sur les conséquences, pour le Tchad et la sous-région, du décès d’Idriss Déby Itno, sans cacher sa joie de voir enfin mort celui qui provoqua la chute de son mari et qui fut sans doute, avec le Libyen Mouammar Kadhafi, son pire ennemi. Très en verve, Fatime Raymonde Habré poursuit en accusant le défunt – et une bonne partie de la classe politique sénégalaise – d’être des « pions » et des « valets » de la France, qui auraient ensemble comploté contre son époux.
Théorie du complot
« Comme d’habitude, elle a la bouche qui crache du feu », résume El Hadj Diouf. Lui-même réputé pour avoir le verbe haut, l’avocat sénégalais connaît bien Fatime Raymonde Habré pour l’avoir côtoyée pendant plusieurs années, alors qu’il défendait son époux. « Elle se dit sans doute que la meilleure des défenses, c’est l’attaque, poursuit l’avocat qui a aujourd’hui pris ses distances avec le couple. C’est sa stratégie : diaboliser les autorités et dire qu’elles sont inféodées à la France. Cette théorie du complot, selon laquelle le monde entier conspire contre son mari, c’est elle tout craché. Elle vit dans une sorte de psychose permanente. »
À l’aise devant les médias, prompte à lancer des piques à ses ennemis dès qu’elle en a l’occasion, cette juriste de formation est décrite comme intelligente et cultivée, et pas uniquement par ses proches. « Elle est aussi très informée et bien introduite, notamment auprès des rebelles tchadiens », assure le défenseur des droits humains, Reed Brody. Le « chasseur de dictateurs » américain est l’un de ceux qui ont porté le combat pour que Hissène Habré soit jugé et Fatime Raymonde Habré, qui l’a d’ailleurs surnommé « Reed Bloody » (Reed le Sanglant), lui voue une haine tenace.
Fatime Raymonde Habré et son époux n’ont jamais reconnu la légitimité du tribunal qui jugea et condamna l’ancien président. Tout au long de son procès, Hissène Habré s’est d’ailleurs muré dans le silence. Et si sa première épouse se rendait fréquemment aux audiences, Fatime Raymonde Habré n’y allait pour ainsi dire jamais. Du procès de son mari, qu’elle qualifia « d’inique », elle ne reconnut pas non plus le verdict. Et lorsqu’elle critiqua la justice sénégalaise, le garde des Sceaux d’alors, Sidiki Kaba, rétorqua qu’elle était tout simplement « une bonne épouse qui défend bien son mari ».
Comment peut-on détenir le tiers des réserves mondiales tout minerais confondu et rester le continent le plus pauvre du monde ? Pourquoi le pétrole serait-il une bénédiction pour les pays du Golfe, et une malédiction pour l'Angola, le Nigeria, le Tchad ?
Elles ont bénéficié à la fois de l’ignorance de nos aînés, de leur naïveté, mais également de la cupidité de certains d’entre eux, pour s’accaparer l’immense patrimoine minier dont l’Afrique est dotée, elles ont abusé de leur faiblesse pour leur faire signer des contrats léonins et s’accaparer cette richesse naturelle. Cuivre, cobalt, coltan de RDC, bauxite, or de Guinée, pétrole du Gabon....
L’heure est venue de récupérer ces biens. C’est une urgence. Mais comment ? Quelle est la stratégie ?
VIDEO
EMMANUEL MACRON GIFLÉ PAR UN HOMME LORS D'UN DÉPLACEMENT DANS LA DRÔME
Emmanuel Macron a reçu une gifle de la part d'un homme mardi, alors qu'il était en déplacement dans la Drôme, pour la deuxième étape de son "tour de France des territoires"
Emmanuel Macron a reçu une gifle de la part d'un homme mardi, alors qu'il était en déplacement dans la Drôme, pour la deuxième étape de son "tour de France des territoires".
Emmanuel Macron a été giflé par un homme lors d'un déplacement à Tain-l'Hermitage, dans la Drôme, mardi 8 juin, à la mi-journée, a confirmé l'entourage du chef de l'État, en attestant auprès de l'AFP de l'authenticité d'une vidéo circulant sur les réseaux sociaux. Deux personnes ont été interpellées, a annoncé la préfecture peu après les faits.
Dans l'extrait diffusé sur Twitter, Emmanuel Macron est vu s'approchant d'un groupe de personnes massées derrière des barrières, puis échanger brièvement avec un homme. Saisissant l'avant-bras du président, l'individu semble lui porter ensuite un coup sur la joue, l'entourage d'Emmanuel Macron évoquant une "tentative de gifle". Le chef de l'État a poursuivi sa visite, a indiqué l'Élysée.
Dans cette même vidéo, juste avant la gifle, est hurlé le cri de guerre royaliste "Montjoie Saint-Denis !", ainsi que "À bas la macronie".
Deux personnes interpellées
Deux personnes, dont l'auteur de la gifle, ont immédiatement été interpellées et étaient entendues "par la brigade de gendarmerie de Tain-L'Hermitage", a indiqué la préfecture de la Drôme.
"Les deux hommes interpellés sont deux Drômois âgés de 28 ans, inconnus de la justice", précise Alex Perrin, procureur de la République à Valence. "À ce stade des gardes à vue, leurs motivations ne sont pas connues", a ajouté le magistrat, sans préciser davantage le profil des suspects.
Selon cette source, l'incident s'est produit "vers 13 h 15" après qu'Emmanuel Macron a visité le lycée hôtelier de Tain-l'Hermitage, où il a échangé avec des acteurs de la restauration sur le grave manque de main d'œuvre dans le secteur, à la veille de la réouverture des restaurants en salle.
S'il est parfois pris à partie verbalement durant ses sorties, voire hué et insulté avec virulence comme en 2018 par des Gilets jaunes au Puy-en-Velay, Emmanuel Macron n'avait jamais été agressé physiquement depuis son arrivée à l'Élysée.
Jean Castex appelle "à un sursaut républicain"
Rapidement, les réactions politiques se sont multipliées. Dès le début des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, le Premier ministre, Jean Castex, a pris la parole pour dénoncer cette agression. "La politique ça ne peut en aucun cas être la violence, l'agression verbale, et encore moins l'agression physique. J'en appelle à un sursaut républicain, nous sommes tous concernés, il en va des fondements de notre démocratie", a-t-il déclaré."Cette fois-ci vous commencez à comprendre que les violents passent à l'acte ? Je suis solidaire du Président", a réagi sur TwitterJean-Luc Mélenchon. Lundi, le leader de la France insoumise avait dénoncé un appel au meurtre à son encontre après la publication, sur YouTube, d'une vidéo d'un militant d'extrême droite dans laquelle il s'en prend avec armes à feu et arme blanche à un mannequin qui symboliserait un militant de la France Insoumise.
"J'exprime toute ma solidarité avec le président de la République", a poursuivi le député Insoumis Eric Coquerel, rappelant avoir "été agressé en 2018 par des gens qui disaient 'Montjoie Saint-Denis', de l'Action française".
"Je considère ce genre de comportement comme inadmissible", et "profondément condamnable dans une démocratie", a pour sa part déclaré la dirigeante du Rassemblement national, Marine Le Pen. "Il est inadmissible de s'attaquer physiquement au président de la République, à des responsables politiques, mais plus encore au président qui est le Président", a-t-elle insisté, en déplacement à Laxou, en Meurthe-et-Moselle.
"Gifler le Président, c'est gifler la République. Intolérable, inacceptable", a de son côté estimé le patron des députés Les Républicains, Damien Abad.
par Hamidou Anne
GÉNÉRATION CÉSAIRE
Les énarques ont choisi Aimé Césaire comme nom de leur promotion alors que le racisme, la xénophobie et l’islamophobie sont de plus en plus décomplexés en France
L’École nationale d’administration française a une vieille tradition, qui est d’organiser un séminaire d’intégration pour les nouveaux élèves de chaque promotion. Celui-ci se déroule dans la station de ski de Ventron, dans le massif des Vosges. Durant quelques jours, entre pratique de sport et autres activités festives, les impétrants apprennent à faire connaissance. Le clou de ce séjour est le choix du nom de la promotion. Durant toute une nuit, des centaines de noms sont proposés, et à la fin un seul est retenu à l’issue de débats houleux, de discours enflammés et d’un vote pour départager les élèves. Ma promotion avait choisi le nom de Marie Curie, au terme de joutes oratoires épiques qui ont commencé à 22h pour s’achever à 6h le lendemain.
Cette année, les énarques ont choisi Aimé Césaire comme nom de leur promotion. Selon le communiqué de l’école, «en choisissant Aimé Césaire, les élèves souhaitent se placer sous le patronage de ce combattant infatigable de l’égalité, défenseur des invisibles et des sans-voix. Homme de lettres, il s’est battu avec les ‘’armes miraculeuses’’ des mots, et une croyance indéfectible dans les pouvoirs de la parole politique et poétique».
Pour rappel, Emmanuel Macron, lui-même ancien élève de l’Ena, est issu de la promotion Léopold Sédar Senghor. Nous assistons à un clin d’œil de l’histoire. Sous la présidence Macron et après sa décision de fermer l’école, les élèves actuellement en formation s’honorent de la figure de Aimé Césaire, compagnon de Senghor.
Il s’agit aussi d’un choix important en ces temps incertains, où partout la parole raciste, xénophobe et identitaire prend de l’ampleur, où l’autre est déshumanisé et réduit à sa couleur de peau ou à sa foi, où les frontières sont des mouroirs, symboles d’une humanité amputée de la raison, du cœur et de ce que Orwell appelait la «common decency».
Les élites actuellement en formation à l’Ena, malgré les procès d’intention, les raccourcis et les approximations sur le supposé conservatisme de l’école, lancent un message clair qu’il faut savoir décoder. Ils ont choisi Aimé Césaire alors que la France, dans une Europe qui se soumet aux sirènes du nationalisme, surfe sur un climat d’intolérance et d’indexation de l’autre, qui rappelle les tristes années 30. Ils ont choisi Aimé Césaire alors que Eric Zemmour parade quotidiennement à la télé, que les digues politiques entre les partis républicains et l’extrême-droite ont sauté, que Marine Le Pen marche vers l’Elysée, que le racisme, la xénophobie et l’islamophobie sont de plus en plus décomplexés dans le pays. Ce choix des futures élites politiques et économiques rappelle qu’il y a encore un espoir sur la capacité, par le haut, de structurer une réponse à l’intolérance, à la bêtise humaine.
Nos jeunes camarades mesurent la personnalité de Césaire. Ils connaissent l’immensité de ses combats pour la dignité des hommes, notamment les Noirs et toutes les victimes de l’oppression. Militant communiste, poète humaniste, artisan de la Négritude, Césaire peut inspirer un réarmement moral européen, cette Europe dont il disait qu’elle était, par rapport à la colonisation, «moralement, spirituellement indéfendable».
Macron a décidé de faire disparaître l’Ena. Décision aussi curieuse qu’impertinente qui répond davantage à des considérations populistes que rationnelles ; d’où le caractère encore plus historique du choix des élèves qui rendent cet hommage à la figure universelle qu’est Césaire. Le rôle des élites est de se saisir des tumultes de leur époque pour proposer une poétique de l’humanité, qui sacralise, comme le faisait Césaire, l’éthique de l’engagement aux côtés des plus précaires. Cette «Génération Césaire» devra repenser à cette phrase de Césaire, dont elle se réclame de l’héritage : «Je suis de la race de ceux qu’on opprime.»
Demain en responsabilité, pour bâtir un monde plus juste, les élèves de la promotion Césaire ne doivent pas non plus oublier ces mots du poète martiniquais dans le Discours sur le colonialisme : «Une civilisation qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde.»
UN ANIMAL POLITIQUE POUR DIRIGER LE GOUVERNEMENT MALIEN
Le nouveau Premier ministre de transition, Choguel Kokalla Maïga, est un personnage au parcours sinueux, appelé par le chef d'une junte qu'il critiquait encore récemment à diriger le gouvernement d'un pays meurtri
M. Maïga, 63 ans, a été nommé lundi par décret présidentiel par le colonel Assimi Goïta, lui-même investi chef de l'Etat quelques heures plus tôt, deux semaines après son deuxième coup d'Etat en neuf mois.
Avec un groupe de colonels, Assimi Goïta a d'abord renversé le 18 août 2020 le président Ibrahim Boubacar Keïta, puis il a écarté le 24 mai le président et le Premier ministre de la transition censée ramener les civils au pouvoir début 2022.
M. Maïga aura dans un premier temps la délicate tâche de former une nouvelle équipe gouvernementale aussi consensuelle que possible, lui qui était plutôt versé ces dernières années dans les petites phrases assassines envers le pouvoir.
Le nouveau chef du gouvernement est une figure du Mouvement du 5-Juin/Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), coalition hétéroclite d'opposants politiques, de chefs religieux et de membres de la société civile, qui a orchestré en 2020 la contestation contre le président Keïta, parachevée par le putsch.
Marginalisé par la junte et tenu à l'écart des organes de la transition pendant des mois, le M5-RFP, Choguel Maïga en tête, a alors dirigé ses flèches contre le colonel Goïta et son groupe d'officiers, véritables détenteurs du pouvoir.
En décembre, il qualifiait les institutions de la transition de "régime militaire déguisé".
Mais cinq mois plus tard, la proposition d'Assimi Goïta d'octroyer le poste de Premier ministre au M5-RFP lui est allée "droit au coeur", a-t-il confié après le second coup d'Etat.
M. Maïga a su convaincre certains membres du M5-RFP qu'il fallait s'engager dans la transition.D'autres, sceptiques sur les intentions de la junte, ont préféré s'éloigner du mouvement.
- Clivant et fin stratège -
Fort d'une carrière de plus de 30 ans, M. Maïga est un "animal politique", une personnalité "clivante", mais aussi, "qu'on le veuille ou non, un stratège", estime le rédacteur en chef du site d'information malien Benbere, Bokar Sangaré,
D'ancien supporteur du dictateur Moussa Traoré (1968-1991), à l'allié des militaires aujourd'hui, M. Maïga aura aussi soutenu et été le ministre du président Keïta avant d'en devenir un détracteur virulent.
Après avoir étudié les télécommunications en Union soviétique dans les années 1970, il a occupé divers postes à la Société des télécommunications du Mali (Sotelma).
Il débute en politique au sein de la formation de Moussa Traoré et, après le renversement du dictateur par un mouvement populaire en 1991, il se réclame --à l'inverse d'une immense majorité de la classe politique d'aujourd'hui-- de son héritage.
Depuis 20 ans, Choguel Maïga a été de toutes les luttes de pouvoir, souvent à la marge: candidat aux présidentielles de 2002, 2013 et 2018, il ne recueille qu'entre 2 et 3% des voix.
Entre-temps, il a soutenu le président Amadou Toumani Touré (2002-2012), dont il a été ministre de l'Industrie. En 2013, il se rallie au second tour à Ibrahim Boubacar Keïta ("IBK"), dont il sera le ministre de la Communication de 2015 à 2016, avant de s'ancrer dans l'opposition.
"Il n'a jamais digéré le fait d'avoir été mis sur la touche par IBK", estime un diplomate africain.
Ces dernières années, M. Maïga a aussi régulièrement critiqué l'accord de paix signé en 2015 entre l'ex-rébellion du Nord et le camp pro-Bamako, dont l'application reste très partielle.
Avant même d'accéder à ses nouvelles fonctions, il a cherché à rassurer les signataires de cet accord et les partenaires du Mali, affirmant que son pays respecterait ses engagements internationaux, tout en avertissant que "les invectives, les sanctions, les menaces ne feront que compliquer la situation".
Comme opposant, M. Maïga appelait à un "changement total du système" et à une "refondation de l'Etat".
Il va enfin pouvoir "se mettre à l'ouvrage", mais il reste à voir s'il "aura les coudées franches" face aux militaires, estime le politologue Boubacar Haidara.
ÉCLAIRAGE SUR LES CIRCONSTANCES DE LA MORT DU CHEF DE BOKO HARAM
Abubakar Shekau s'est suicidé lors de combats contre le groupe jihadiste rival de l'Iswap, a affirmé le chef de ce groupe dans un enregistrement audio publié deux semaines après de premières informations faisant état de sa mort
Le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, est mort lors de combats contre le groupe jihadiste rival de l'organisation État islamique en Afrique de l'Ouest (Iswap), a affirmé le chef de ce groupe dans un enregistrement audio. Il aurait trouvé la mort autour du 18 mai après avoir déclenché un explosif lorsqu'il était poursuivi par des combattants d'Iswap à la suite de combats.
Le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, s'est suicidé lors de combats contre le groupe jihadiste rival de l'organisation État islamique en Afrique de l'Ouest (Iswap), a affirmé le chef de ce groupe dans un enregistrement audio publié deux semaines après de premières informations faisant état de sa mort.
Il aurait trouvé la mort autour du 18 mai après avoir déclenché un explosif lorsqu'il était poursuivi par des combattants d'Iswap à la suite de combats.
"Shekau a préféré l'humiliation dans l'au-delà à l'humiliation sur Terre. Il s'est donné la mort en déclenchant un explosif", déclare en langue kanuri une voix semblant être celle du chef de l'Iswap, Abu Musab Al-Barnawi, dans cet enregistrement remis à l'AFP par une source relayant habituellement les messages du groupe.
Boko Haram ne s'est pas exprimé sur la mort annoncée de son chef et l'armée nigériane dit enquêter.
"Coupable d'un terrorisme et d'atrocités inimaginables"
Dans son enregistrement, Iswap décrit comment ses troupes, envoyées dans l'enclave de Boko Haram, dans la forêt de Sambisa, ont découvert Shekau assis dans sa maison et ont engagé le combat.
"Il a battu en retraite et s'est échappé, errant à travers la brousse pendant cinq jours. Néanmoins les combattants (de l'Iswap) ont continué à le chercher et à le traquer jusqu'à ce qu'ils soient capables de le localiser", raconte la voix.
Après l'avoir débusqué dans la brousse, les combattants d'Iswap l'ont sommé, lui et ses partisans, de se repentir, mais Shekau a refusé et s'est donné la mort, poursuit-elle.
"Nous sommes tellement heureux", souligne la voix, ajoutant que Shekau est "quelqu'un qui s'est rendu coupable d'un terrorisme et d'atrocités inimaginables".
L'Iswap, reconnu par l'organisation État islamique, est né en 2016 d'une scission avec Boko Haram. Après être monté en puissance, il est désormais le groupe jihadiste dominant dans le Nord-Est du Nigeria.
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LA RUSE PERMANENTE CHEZ LES RÉPUBLICAINS
Point USA aborde cette semaine : l'opposition du parti républicain à la création d'une commission d'enquête indépendante sur l'insurrection du Capitole, la question du droit de vote des minorités au Texas et la visite historique de Biden à Tusla
Les républicains, voulant effacer de la mémoire des Américains de mauvais souvenirs, enterre la loi portant création d’une commission indépendante sur l’insurrection du 6 janvier. Mais l’enquête n’est pas morte.
Le Texas s’ajoute à la liste déjà longue des Etats qui veulent rendre plus difficile aux minorités de voter. Mais les démocrates se sont rebellés, quittant l’hémicycle au moment du vote, bloquant ainsi l’adoption de la loi faute du quorum nécessaire. Victoire symbolique, mais de courte durée.
Joe Biden s’est rendu à Tulsa, dans l’Oklahoma, à l’occasion du centième anniversaire du massacre du quartier noir, le 31 mai et le 1er juin 1921. Comment compenser les derniers survivants et les descendants des victimes ? Le président s’engage à tout faire pour que le Congrès adopte 2 importantes lois sur les droits civiques.
Nouvelle édition de Point USA, une émission hebdomadaire qui s’adresse plus particulièrement à un public francophone, avec pour objectif de discuter en français de l’actualité américaine en compagnie de René Lake, analyste politique et directeur de presse, Dennis Beaver, avocat et chroniqueur juridique à Bakersfield, en Californie et Herman Cohen, ancien secrétaire d’Etat adjoint américain. Présentation Claude Porsella. Le montage et la réalisation sont assurés par Serge Ndjemba.
"Point USA" est une émission de French Buzz TV, basée à San Francisco en Californie.
ACHILLE MBEMBE RELÈVE LE DÉFI DE MACRON
Il n'y a pas si longtemps, c'est lui qui reprochait à Emmanuel Macron une "absence d'imagination historique" dans sa politique africaine. Pourtant, il a accepté la tâche controversée de préparer les débats du prochain sommet Afrique-France
Taxé de naïveté ou d'opportunisme, mais ça lui est égal. Choisi par le président français Emmanuel Macron pour préparer le sommet Afrique-France en octobre, Achille Mbembe, penseur majeur du postcolonialisme, relève le défi avec appétit.
L'intellectuel camerounais est connu et reconnu.En Afrique et bien au-delà.Le professeur Mbembe, 63 ans, qui enseigne l'histoire et la politique à la prestigieuse université Witwatersrand de Johannesburg, est une des voix fortes des faits et méfaits du colonialisme.
Il n'y a pas si longtemps, c'est lui qui reprochait à Emmanuel Macron une "absence d'imagination historique" dans sa politique africaine, l'accusant d'ignorer "la vertigineuse perte d'influence" de la France en se contentant de mener des "opérations marketing" sur le continent.
Pourtant, il a accepté la tâche controversée confiée par le chef d'Etat de préparer les débats du prochain sommet Afrique-France, prévu à Montpellier (sud), critiqué à chaque édition par une grande part de l'intelligentsia africaine pour être une expression surannée de la "Françafrique".
Depuis près de quatre mois, M. Mbembe organise des débats à travers douze pays africains, une soixantaine en tout sont prévus, en "présentiel" quand c'est possible ou en ligne.
Abordant l'intervention militaire française, la francophonie, l'avenir du franc CFA ou encore la gouvernance des ressources naturelles, il interroge la société civile sur la place de la France en Afrique.
"Les grandes questions qui fâchent", résume lors d'un entretien à l'AFP l'auteur de "Critique de la raison nègre".
"Le président Macron m'a demandé de l'accompagner dans l'objectif qu'il s'est fixé de refonder les rapports entre l'Afrique et la France", dit-il d'une voix posée."Pourquoi dire non?"
Déjà reporté deux fois à cause du Covid, le sommet aura un format inédit: aucun chef d'Etat, une rencontre entre représentants de la société civile.
- Relation "endommagée" -
"Après trois mois et demi d'écoute, je crois que la principale question qui se pose a trait à ce que la jeune génération d'Africains perçoit comme le soutien de la France à des tyrannies", pointe M. Mbembe.
Le soutien à la junte militaire au Tchad ou la présence française au Mali sont les sujets récents qui suscitent beaucoup de passion au sein de l'opinion africaine et un fort sentiment anti-français, dépeint l'intellectuel.
"Beaucoup estiment que le moment est venu de mettre fin à ce genre d'attitude, d'investir dans les institutions, au lieu de penser que la stabilité et la sécurité seront maintenues par des hommes forts", décrit-il.
Est-ce qu'un 29e sommet réussira à révolutionner des pratiques héritées de l'époque coloniale?
"Ca ne va pas se faire du jour au lendemain", admet Achille Mbembe.Mais Montpellier pourrait être "le premier moment d'une très longue étape, sur une ou deux générations", pour dépoussiérer une relation "endommagée".
Quant à l'éventuel enjeu électoral pour M. Macron, qui ouvrira le sommet à un peu plus de six mois de la présidentielle en France, "ça ne me concerne pas", coupe-t-il court.
"Son engagement africain n'a pas commencé à la veille des élections", dit-il du chef d'Etat de retour d'un voyage historique au Rwanda, où il a reconnu les responsabilités de la France dans le génocide des Tutsi de 1994.
Balayant d'un geste toute idée de manipulation, il réplique: "On n'écrit pas l'histoire uniquement par le soupçon (...) Il faut se mettre en jeu".
Quand "Nelson Mandela négocie avec le régime de l'apartheid, personne ne s'attend à ce que ça marche", rappelle-t-il. "C'est comme ça que l'histoire se fait, c'est pas de la sorcellerie".
Mbembe aurait-il été "mieux placé à conseiller les siens" pour "sortir de la postcolonie que de conseiller le maître de la postcolonie" ?, comme le suggère l'écrivain camerounais Gaston Kelman, qui lui reproche sa "naïveté".L'écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop trouve aussi que sa mission relève de la "mauvaise plaisanterie".
Mais l'intéressé ignore ces critiques pour relever le défi.Avec un "comité Mbembe" composé d'intellectuels, d'artistes ou d'économistes, chargés d'articuler des propositions concrètes: "Ce ne sera pas que des idées", assure le philosophe.