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3 mai 2025
International
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LA RUSE PERMANENTE CHEZ LES RÉPUBLICAINS
Point USA aborde cette semaine : l'opposition du parti républicain à la création d'une commission d'enquête indépendante sur l'insurrection du Capitole, la question du droit de vote des minorités au Texas et la visite historique de Biden à Tusla
Les républicains, voulant effacer de la mémoire des Américains de mauvais souvenirs, enterre la loi portant création d’une commission indépendante sur l’insurrection du 6 janvier. Mais l’enquête n’est pas morte.
Le Texas s’ajoute à la liste déjà longue des Etats qui veulent rendre plus difficile aux minorités de voter. Mais les démocrates se sont rebellés, quittant l’hémicycle au moment du vote, bloquant ainsi l’adoption de la loi faute du quorum nécessaire. Victoire symbolique, mais de courte durée.
Joe Biden s’est rendu à Tulsa, dans l’Oklahoma, à l’occasion du centième anniversaire du massacre du quartier noir, le 31 mai et le 1er juin 1921. Comment compenser les derniers survivants et les descendants des victimes ? Le président s’engage à tout faire pour que le Congrès adopte 2 importantes lois sur les droits civiques.
Nouvelle édition de Point USA, une émission hebdomadaire qui s’adresse plus particulièrement à un public francophone, avec pour objectif de discuter en français de l’actualité américaine en compagnie de René Lake, analyste politique et directeur de presse, Dennis Beaver, avocat et chroniqueur juridique à Bakersfield, en Californie et Herman Cohen, ancien secrétaire d’Etat adjoint américain. Présentation Claude Porsella. Le montage et la réalisation sont assurés par Serge Ndjemba.
"Point USA" est une émission de French Buzz TV, basée à San Francisco en Californie.
ACHILLE MBEMBE RELÈVE LE DÉFI DE MACRON
Il n'y a pas si longtemps, c'est lui qui reprochait à Emmanuel Macron une "absence d'imagination historique" dans sa politique africaine. Pourtant, il a accepté la tâche controversée de préparer les débats du prochain sommet Afrique-France
Taxé de naïveté ou d'opportunisme, mais ça lui est égal. Choisi par le président français Emmanuel Macron pour préparer le sommet Afrique-France en octobre, Achille Mbembe, penseur majeur du postcolonialisme, relève le défi avec appétit.
L'intellectuel camerounais est connu et reconnu.En Afrique et bien au-delà.Le professeur Mbembe, 63 ans, qui enseigne l'histoire et la politique à la prestigieuse université Witwatersrand de Johannesburg, est une des voix fortes des faits et méfaits du colonialisme.
Il n'y a pas si longtemps, c'est lui qui reprochait à Emmanuel Macron une "absence d'imagination historique" dans sa politique africaine, l'accusant d'ignorer "la vertigineuse perte d'influence" de la France en se contentant de mener des "opérations marketing" sur le continent.
Pourtant, il a accepté la tâche controversée confiée par le chef d'Etat de préparer les débats du prochain sommet Afrique-France, prévu à Montpellier (sud), critiqué à chaque édition par une grande part de l'intelligentsia africaine pour être une expression surannée de la "Françafrique".
Depuis près de quatre mois, M. Mbembe organise des débats à travers douze pays africains, une soixantaine en tout sont prévus, en "présentiel" quand c'est possible ou en ligne.
Abordant l'intervention militaire française, la francophonie, l'avenir du franc CFA ou encore la gouvernance des ressources naturelles, il interroge la société civile sur la place de la France en Afrique.
"Les grandes questions qui fâchent", résume lors d'un entretien à l'AFP l'auteur de "Critique de la raison nègre".
"Le président Macron m'a demandé de l'accompagner dans l'objectif qu'il s'est fixé de refonder les rapports entre l'Afrique et la France", dit-il d'une voix posée."Pourquoi dire non?"
Déjà reporté deux fois à cause du Covid, le sommet aura un format inédit: aucun chef d'Etat, une rencontre entre représentants de la société civile.
- Relation "endommagée" -
"Après trois mois et demi d'écoute, je crois que la principale question qui se pose a trait à ce que la jeune génération d'Africains perçoit comme le soutien de la France à des tyrannies", pointe M. Mbembe.
Le soutien à la junte militaire au Tchad ou la présence française au Mali sont les sujets récents qui suscitent beaucoup de passion au sein de l'opinion africaine et un fort sentiment anti-français, dépeint l'intellectuel.
"Beaucoup estiment que le moment est venu de mettre fin à ce genre d'attitude, d'investir dans les institutions, au lieu de penser que la stabilité et la sécurité seront maintenues par des hommes forts", décrit-il.
Est-ce qu'un 29e sommet réussira à révolutionner des pratiques héritées de l'époque coloniale?
"Ca ne va pas se faire du jour au lendemain", admet Achille Mbembe.Mais Montpellier pourrait être "le premier moment d'une très longue étape, sur une ou deux générations", pour dépoussiérer une relation "endommagée".
Quant à l'éventuel enjeu électoral pour M. Macron, qui ouvrira le sommet à un peu plus de six mois de la présidentielle en France, "ça ne me concerne pas", coupe-t-il court.
"Son engagement africain n'a pas commencé à la veille des élections", dit-il du chef d'Etat de retour d'un voyage historique au Rwanda, où il a reconnu les responsabilités de la France dans le génocide des Tutsi de 1994.
Balayant d'un geste toute idée de manipulation, il réplique: "On n'écrit pas l'histoire uniquement par le soupçon (...) Il faut se mettre en jeu".
Quand "Nelson Mandela négocie avec le régime de l'apartheid, personne ne s'attend à ce que ça marche", rappelle-t-il. "C'est comme ça que l'histoire se fait, c'est pas de la sorcellerie".
Mbembe aurait-il été "mieux placé à conseiller les siens" pour "sortir de la postcolonie que de conseiller le maître de la postcolonie" ?, comme le suggère l'écrivain camerounais Gaston Kelman, qui lui reproche sa "naïveté".L'écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop trouve aussi que sa mission relève de la "mauvaise plaisanterie".
Mais l'intéressé ignore ces critiques pour relever le défi.Avec un "comité Mbembe" composé d'intellectuels, d'artistes ou d'économistes, chargés d'articuler des propositions concrètes: "Ce ne sera pas que des idées", assure le philosophe.
GRAND ORAL POUR ASSIMI GOÏTA LUNDI AU MALI
Le colonel doit être officiellement investi lundi président de la transition, l'occasion pour l'auteur de deux coups d'Etat en neuf mois de tenter de rassurer sur ses intentions, au-delà des frontières de son pays
La cérémonie d'investiture doit se dérouler au Centre international de conférence de Bamako (CICB) à partir de 10H00 (GMT et locales).
Le discours que devrait tenir à cette occasion Assimi Goïta, habituellement peu loquace, est "très attendu", a indiqué à l'AFP une source diplomatique à Bamako ayant requis l'anonymat.
"Ce sera le moment pour lui de rassurer et de solennellement prendre des engagements clairs sur le déroulement des huit mois restants de la transition", a-t-elle ajouté.
Les ambassades occidentales seront représentées, mais "généralement au niveau collaborateur", un rang inférieur à celui d'ambassadeur qui "traduit un signal politique", mais n'est "ni un boycott ni une sanction", selon la même source.
Le Mali, un pays crucial pour la stabilité du Sahel, vient d'être le théâtre d'un deuxième coup de force en neuf mois de la part d'Assimi Goïta et de son groupe de colonels.
Après son premier putsch le 18 août 2020 contre le président Ibrahim Boubacar Keïta, la junte s'était engagée, sous la pression internationale, à une période de transition limitée à 18 mois et conduite par des civils.
Le 24 mai, le colonel Goïta, resté le véritable homme fort de la transition, a foulé aux pieds cet engagement en faisant arrêter le président et le Premier ministre, deux civils.
L'officier de 37 ans s'est depuis fait déclarer président de la transition par la Cour constitutionnelle.
- Ex-rebelles attendus -
Depuis ce coup de force, la France et les autres partenaires du Mali réclament des garanties qu'un nouveau Premier ministre civil serra nommé et que des élections auront bien lieu en février 2022 en vue d'un retour des civils au pouvoir.
Pour le poste de Premier ministre, cela devrait être fait dans la foulée de l'investiture d'Assimi Goïta, selon les acteurs politiques maliens.
Sauf surprise, il s'agira de l'ex-ministre Choguel Kokalla Maïga, figure du collectif qui avait ébranlé la présidence Keïta, finalement emportée par le putsch du 18 août.
Lors d'un rassemblement vendredi, M. Maïga, 63 ans, a assuré que son pays tiendrait ses engagements internationaux.Il a rendu hommage aux soldats français tués au Mali mais a aussi estimé que "les invectives, les sanctions, les menaces ne feront que compliquer la situation".
Pour le Mali, pays pauvre dont les forces manquent de moyens, le maintien des partenariats internationaux est un enjeu crucial.
Echaudée par le nouveau coup d'Etat, la France a annoncé la suspension de ses opérations communes avec l'armée malienne, après huit ans de coopération étroite contre les jihadistes.
Jusqu'à nouvel ordre, sa force Barkhane, qui intervient dans plusieurs pays du Sahel, ne sortira plus de ses bases pour des opérations sur le terrain au Mali, même si elle continuera à frapper, si l'occasion s'en présente, les chefs jihadistes.
La situation dans la zone d'action de Barkhane reste pourtant préoccupante.
Cette semaine, au moins onze membres d'une communauté touareg ont été tués par des assaillants non identifiés près de Ménaka (Nord-Est), alors que plus de 150 civils ont été tués lors de deux attaques dans le Nord-Est du Burkina Faso voisin.
Les hommes au pouvoir à Bamako s'emploient dans le même temps à rassurer les ex-rebelles indépendantistes du Nord, réunis dans la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA), signataire d'un accord de paix en 2015.
Après avoir exprimé des réticences, ses dirigeants se sont dits prêts à accompagner ce nouveau chapitre de la transition et plusieurs d'entre eux assisteront à l'investiture, selon une source au sein de la CMA.
Le déroulement précis de la cérémonie n'a pas été annoncé.
Pour le constitutionnaliste Mamady Sissoko, tout le processus s'écarte d'ailleurs de la légalité."Nous sommes devant un coup de force et cette prestation (de serment) n'a pas de raison d'être.Goïta aurait pu continuer à gouverner illégalement", estime le juriste.
REPORT DU TIRAGE AU SORT DE LA CAN
Le Comité local d’organisation a accepté de reporter le tirage au sort de la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations 2021, initialement prévu le 25 juin, ’’pour des raisons logistiques liées à la pandémie de Covid-19’’
Le Comité local d’organisation a accepté de reporter le tirage au sort de la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations 2021, initialement prévu le 25 juin, ’’pour des raisons logistiques liées à la pandémie de Covid-19’’, annonce la CAF sur son site officiel.
Une nouvelle date sera annoncée en temps opportun, a ajouté la même source.
Le Comité local d’organisation a accepté ce report à la demande de la Confédération africaine de football (CAF).
’’La CAF continue de travailler avec ses partenaires, le gouvernement camerounais et le Comité local d’organisation dans l’optique de faire de la Coupe d’Afrique des Nations 2021, un événement réussi et une grande célébration du football africain’’, assure t-on dans le communiqué.
Initialement prévue en 2021, la CAN a été reportée en janvier prochain pour cause de pandémie du coronavirus.
Le Cameroun, en dépit du Covid, avait réussi, en janvier-février dernier, l’organisation du Championnat d’Afrique des Nations, une compétition mettant aux prises les joueurs évoluant sur le continent.
BEAUCOUP D'HYPOTHÈSES ET PEU DE CERTITUDES SUR LES ORIGINES DU COVID
Même s'il n'y a pas eu de nouveaux éléments probants, les appels à considérer plus sérieusement l'hypothèse d'un accident de laboratoire à Wuhan se multiplient On fait le point sur ce que l'on sait à ce jour, et, surtout, sur ce que l'on ne sait pas
Depuis le début de la pandémie de Sars-Cov-2, virus du Covid-19, nombre de théories et hypothèses autour de ses origines ont fleuri. De nombreux experts ont livré leurs analyses et beaucoup de responsables politiques ont donné leur avis. Le rapport publié fin mars 2021 par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) n'a pas percé définitivement le mystère des origines, posant finalement plus de questions qu'il n'en a résolues. Et même s'il n'y a pas eu de nouveaux éléments probants, les appels à considérer plus sérieusement l'hypothèse d'un accident de laboratoire à Wuhan se multiplient aujourd'hui.
A ce jour, de nombreuses inconnues subsistent, exploitées par le complotisme et la désinformation, et encore compliquées par les enjeux géopolitiques majeurs qui opposent les Etats-Unis et la Chine autour de cette question.
De la chauve-souris au pangolin, de l'accident de laboratoire à la théorie d'un virus fabriqué, l'AFP Factuel fait le point sur ce que l'on sait à ce jour, et, surtout, sur ce que l'on ne sait pas (et que l'on ne saura peut-être jamais) sur les origines d'un virus qui a tué plus de 3,5 millions de personnes dans le monde en près de 18 mois.
Les animaux
Déterminer comment le virus est passé à l'homme est jugé crucial pour tenter d'empêcher la prochaine pandémie.
Dès son émergence, les scientifiques ont pointé du doigt la chauve-souris: le 21 janvier 2020, une étude génétique dans la revue de l'Académie chinoise des sciences la désigne comme "le réservoir" probable du virus. Rien d'étonnant, tant la chauve-souris est un réservoir majeur pour les coronavirus en général. Mais d'emblée ils ajoutent que le Sars-CoV-2 a dû passer par une autre espèce, un "hôte intermédiaire" pas encore connu, avant d'atteindre l'homme.
Le 7 février 2020, des chercheurs de l'Université d'agriculture du sud de la Chine vont désigner un autre animal, qu'ils vont sortir du même coup de l'anonymat : le pangolin.
Selon ces scientifiques, c'est ce petit mammifère à écailles, menacé d'extinction, qui pourrait être l'intermédiaire ayant facilité la transmission du virus à l'humain. Cet insectivore nocturne fait en effet partie des animaux sauvages qui étaient vendus au marché de Huanan de Wuhan, auquel la plupart des premiers cas connus de Covid-19 étaient liés.
Une enquête conjointe d'experts de l'OMS et de scientifiques chinois envoyée à Wuhan en janvier 2021 était chargée d'éclaircir la question des origines et de la transmission à l'homme mais ses conclusions publiées fin mars et disponibles ici (en anglais) ne tranchent pas, plaidant en faveur d'une origine naturelle, probablement la chauve-souris mais sans déterminer l'éventuel "hôte intermédiaire". Ont aussi été évoqués le vison ou le blaireau- furet.
Les experts n'ont par ailleurs pas exclu une autre hypothèse, celle d'une transmission par de la viande surgelée.
Laboratoires, accident, fabrication
Dès les premières semaines de la pandémie début 2020, ont fait surface des théories selon lesquelles le Sars-CoV-2 ne serait pas naturellement passé de l'animal à l'homme mais aurait été fabriqué et/ou se serait échappé accidentellement d'un laboratoire de haute sécurité de Wuhan, connu pour travailler sur des agents pathogènes.
Cette théorie a été relayée très largement sur les réseaux sociaux et même par l'ancien président des Etats-Unis Donald Trump et son administration, en place jusqu'à janvier 2021 et son remplacement par Joe Biden. Cette thèse a donné lieu à des variantes, voulant que le virus aurait même été fabriqué par l'homme et diffusé volontairement, par exemple à des fins de dépopulation.
Avant le Sars-CoV-2, le SRAS de 2003 ou encore Ebola avait aussi fait l'objet de théories similaires.
Un virus fabriqué ?
Le réseau de fact-checking de l'AFP a consacré des dizaines d'articles par exemple (1, 2,3) à des publications qui, sur les réseaux sociaux, affirmaient avoir des "preuves" montrant que le Sars-CoV-2 avait été fabriqué en laboratoire et même breveté par des Américains ou des scientifiques français. Comme expliqué par exemple dans cet article, ces publications présentaient des brevets antérieurs à fin 2019 portant la mention "coronavirus", oubliant qu'il s'agit d'une famille de virus et qu'il existe d'ailleurs de nombreux coronavirus animaux.
Ces publications oubliaient aussi le double sens du mot "inventeur", qui ne veut pas forcément dire "créateur" au sens commun du terme. Même si le terme de brevet évoque le concept d'invention et porte le nom de "l'inventeur" de ce pour quoi on sollicite un brevet, le mot "inventeur" à deux sens.
Selon le Larousse, un "inventeur" est la "personne qui par son ingéniosité invente, imagine, créé quelque chose d'original, (comme) l'inventeur du téléphone" mais aussi celle "qui découvre un trésor, un objet, etc".
Ainsi, quand on parle des "inventeurs" de la grotte de Lascaux, on parle bien des quatre jeunes gens qui l'ont découverte en 1940 et non pas des hommes préhistoriques qui en ont orné les parois. Dans le secteur des brevets et de la propriété intellectuelle, le terme "inventeur" désigne celui qui demande le brevet, par exemple pour protéger une technique de diagnostic à propos d'un virus existant. Le site de l'Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) explique ici ce qu'est un brevet et à quoi il sert.
En mars 2020, une vidéo extrêmement virale avait attribué, avec là encore des brevets mal interprétés, la fabrication du Sars-Cov-2 à l'Institut Pasteur.
Souleymane Bachir Diagne est l’un des plus grands philosophes de notre temps. Que pense-t-il du mouvement décolonial, de la condition noire, de l’islam ? Comment voit-il l’avenir de l’Afrique et sa relation avec la France et le monde ? Entretien
Il est considéré, aux États-Unis et en France, comme l’un des plus grands penseurs contemporains. Professeur de philosophie à l’université Columbia, spécialiste de l’islam des Lumières et de l’histoire des sciences, Souleymane Bachir Diagne publie Le Fagot de ma mémoire (éd. Philippe Rey), un livre personnel et subjectif, qui retrace son itinéraire intellectuel et spirituel entre Dakar, Paris, Boston et Chicago.
Spectateur attentif de son temps, il raconte des mondes où se reflète le moment du postcolonial (dont l’un des aspects est le mouvement de décolonisation de la philosophie par la prise en compte de son histoire islamique). Conseiller à l’éducation et à la culture du président sénégalais Abdou Diouf, Souleymane Bachir Diagne participe aujourd’hui au « Comité Mbembe », chargé par le président Macron de formuler des propositions en vue de refonder la relation Afrique France.
Mais l’enfant des indépendances – il est né à Saint-Louis il y a soixante-cinq ans –, qui vit et habite différentes langues et cultures, exhorte aussi le continent à sortir de son face-à-face avec l’ancienne puissance coloniale pour s’inscrire dans la pluralité du monde.
Islamo-gauchisme, condition noire, montée des fondamentalismes en Afrique de l’Ouest, Covid-19… L’auteur de Bergson postcolonial (publié pour la première fois en anglais en 2020) et de L’Encre des savants. Réflexions sur la philosophie en Afrique pose un regard lucide mais optimiste sur une humanité fragilisée dans son essence.
Jeune Afrique : Vous dites avoir été éduqué dans l’idée d’un islam rationnel et soufi. Que recoupent ces notions ?
Souleymane Bachir Diagne : Le soufisme est, au sein de l’islam, cette voie de l’éducation spirituelle qui implique un travail sur soi pour devenir pleinement l’humain accompli que l’on doit être. Il n’est donc pas autre chose que la religion elle-même, dans son aspect le plus intérieur. Il se traduit, en général, par des exercices spirituels qui visent à raffermir la foi du croyant en des vérités, au-delà du seul témoignage des sens ou des constructions de la raison. Différentes voies soufies, qui prennent la forme de confréries, sont présentes partout dans le monde islamique, et l’on sait quelle est leur importance dans l’Ouest africain. J’ai grandi et j’ai été élevé dans cette tradition.
Est-ce pour cette raison que vous appelez à un islam des Lumières ?
Je n’appelle à rien, je me contente d’enseigner. Ma discipline, l’histoire de la philosophie islamique, est un autre visage de cette tradition soufie. Elle montre en effet ce que l’on pourrait appeler un « islam des Lumières », représenté par des penseurs comme Avicenne, Averroès ou Ibn Tufayl.
La philosophie d’Ibn Tufayl [1105-1185], par exemple, explique parfaitement cet « islam des lumières ». Elle s’exprime dans L’éveillé, un « roman » qui raconte comment un enfant abandonné dans une île déserte, élevé par une gazelle, réinvente, seul, en dehors de toute société humaine, non seulement les moyens techniques et rationnels de sa survie, mais aussi les idées philosophiques sur la nature du monde et l’existence d’un être qui en est la cause. Ce roman est une « robinsonnade ». Il est d’ailleurs réputé avoir inspiré Robinson Crusoë, de Daniel Defoe. C’est un hymne, philosophique, à la puissance de l’esprit humain.
On peut citer aussi l’insistance d’Averroès quant à la nécessité d’un pluralisme des interprétations des vérités religieuses, qu’il ne faut pas transformer en des factions guerroyant les unes contre les autres. Vous avez là la signification de la tolérance, qui est compréhension et acceptation du pluralisme.
Comment expliquer la montée des fondamentalismes en Afrique de l’Ouest, où l’islam est essentiellement soufi ?
Plusieurs facteurs peuvent l’expliquer, parmi lesquels les fonds que le wahhabisme met au service de son prosélytisme. On a vu, dans le nord du Nigeria, profondément et traditionnellement soufi, croître une version fondamentaliste de l’islam, avant que se manifestent les formes violentes que l’on connaît aujourd’hui.
C’est le deuxième ramadan marqué par la crise du Covid-19. Cette pandémie change-t-elle la manière dont les musulmans vivent leur foi ?
Comme tous les croyants, ils s’adaptent. Le Covid-19 a provoqué un retour sur soi et une réflexion renouvelée sur la signification même des formes sociales de la religion. Ne pas pouvoir se retrouver pour les longues prières traditionnelles du vendredi ou pour la rupture du jeûne en période de ramadan a conduit les musulmans à une double réflexion. La première : sur le sens des rassemblements et des rituels religieux. La deuxième : sur le fait que la spiritualité et la rationalité de la religion ont apporté des réponses à cette crise sanitaire. Comme l’a dit le prophète Mohammed, « si la peste se déclare dans une contrée n’y allez pas, mais si vous vous y trouvez déjà, n’en sortez pas. »
Pour vous, historien des sciences, cette crise place-t-elle les continents sur un pied d’égalité, dans la mesure où tous cherchent des solutions ?
Cette période est importante et intéressante. La science se forme sous nos yeux. On avait l’habitude d’une science triomphante, avec une médecine établie sur des fondements sûrs. Or, celle-ci a été mise au défi d’accomplir une prouesse inédite : trouver un vaccin en moins d’un an. Il lui a fallu avancer des hypothèses, les réfuter, tester des procédures, les abandonner…
Même sur des aspects aussi banals que le niveau de protection des masques, on a tâtonné. Cela nous rappelle que les sciences de la nature sont profondément empiriques, et que nous sommes contraints d’attendre les leçons et les réponses tirées de l’expérience.
Les vaccins sont efficaces, mais nous ignorons pour combien de temps. C’est seulement quand on pourra mesurer le niveau d’anticorps chez les personnes vaccinées que nous le saurons.
Dans cette quête de solutions, l’Afrique n’a pas été en reste…
Elle s’est engagée activement. Les épistémologies africaines ont été mobilisées : l’artemisia malgache a été testée ; des recherches sur le vaccin ont été menées dans des instituts Pasteur dirigés par des Africains. On annonce la fabrication prochaine de vaccins à Dakar. C’est un symbole de ce que l’intelligence humaine peut créer en se mobilisant.
Au sortir de cette pandémie, les Africains auront des motifs de fierté. Dont celui d’avoir su déjouer tous les pronostics en se révélant capables de prendre des décisions impopulaires, telles que le confinement, alors que leurs pays ont des économies fragiles, qui reposent souvent sur le secteur informel.
En dépit des conséquences sociales désastreuses de cette pandémie, le continent a fait montre d’une résilience de bon augure pour son avenir. Reste à pérenniser cette résilience de manière positive.
Au moins 114 civils ont été tués en quelques heures dans la nuit de vendredi à samedi, lors de deux attaques dans le Nord du Burkina Faso, dont l'une a fait une centaine de morts, la plus meurtrière dans ce pays depuis 2015
Au moins 114 civils ont été tués en quelques heures dans la nuit de vendredi à samedi, lors de deux attaques dans le Nord du Burkina Faso, dont l'une a fait une centaine de morts, la plus meurtrière dans ce pays depuis le début des violences jihadistes en 2015.
Ces attaques ont été commises dans la zone dite "des trois frontières" entre Burkina, Mali et Niger, régulièrement ciblée par des assauts meurtriers de jihadistes présumés liés à Al-Qaïda et à l'Etat islamique contre des civils et des militaires.
"Dans la nuit de vendredi à samedi, des individus armés ont mené une incursion meurtrière à Solhan, dans la province du Yagha.Le bilan, toujours provisoire, est d'une centaine de personnes tuées, des hommes et femmes", a indiqué à l'AFP une source sécuritaire.
L'attaque et le bilan "provisoire" ont très vite été confirmés par le gouvernement qui précise dans un communiqué que les victimes sont des "civils sans distinction d'âge, tués par les terroristes" et que "plusieurs habitations et le marché (de Solhan) ont été incendiés".
"Face à cette tragédie des forces obscures, un deuil national de 72 heures, à compter de ce jour 5 juin à 00H00 au lundi 7 juin à 23H59, est décrété", ajoute le gouvernement qui affirme que "les forces de défense et de sécurité sont à pied d'œuvre pour neutraliser ces terroristes et ramener la quiétude au sein des populations".
Dans un message de condoléances aux familles des victimes, le président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré a dénoncé "cette attaque barbare" et "ignoble"."Nous devons rester unis et soudés contre ces forces obscurantistes", a-t-l-il ajouté.
Selon une source locale, "l'attaque, qui été signalée aux environs de 002H00 (locales et GMT), a d'abord visé le poste des Volontaires pour la défense de la Patrie", les VDP, des supplétifs civils de l'armée, et "les assaillants ont ensuite visité les concessions (maisons) et procédé à des exécutions".
Solhan est une petite localité située à une quinzaine de kilomètres de Sebba, chef-lieu de la province du Yagha qui a enregistré de nombreuses attaques attribuées à jihadistes ces dernières années.
Le 14 mai, le ministre de la Défense Chériff Sy, et des membres de la hiérarchie militaire s'étaient rendus à Sebba, assurant que la situation était revenue à la normale, après de nombreuses opérations militaires.
- 14 morts dans un autre village -
Cette attaque massive en a suivi de près une autre, menée tard vendredi soir, sur un village de la même région, Tadaryat, au cours de laquelle au moins 14 personnes, dont un supplétif civil, ont été tuées.
Ces attaques surviennent une semaine après deux autres attaques dans la même zone, au cours desquelles quatre personnes, dont deux membres des VDP, avaient péri.
Créés en décembre 2019, les VDP interviennent aux côtés des forces armées pour des missions de surveillance, d'information et de protection, après une formation militaire de 14 jours.
Ils font également office de pisteurs et combattent souvent avec l'armée, au prix de lourdes pertes, avec plus de 200 morts dans leurs rangs depuis 2020, selon un décompte de l'AFP.
Les 17 et 18 mai, quinze villageois et un soldat avaient déjà été tués lors de deux assauts contre un village et une patrouille dans le Nord-Est du pays, selon le gouverneur de la région burkinabè du Sahel.
Depuis le 5 mai, face à la recrudescence des attaques jihadistes, les forces armées ont lancé une opération d'envergure dans les régions du Nord et du Sahel.
Malgré l'annonce de nombreuses opérations de ce type, les forces de sécurité peinent à enrayer la spirale de violences jihadistes qui ont fait depuis 2015 plus de 1.400 morts et déplacé plus d'un million de personnes, fuyant les zones de violences.
LA FRANCE RISQUE-T-ELLE DE PERDRE LE MALI?
Boubacar Haidara, professeur à l’université de Ségou et chercheur associé au laboratoire Les Afriques dans le monde (LAM), décrypte pour Apa news les conséquences éventuelles de la suspension par la France de sa coopération militaire avec le Mali
Boubacar Haidara, professeur à l’université de Ségou (Centre du Mali) et chercheur associé au laboratoire Les Afriques dans le monde (LAM) à l'université Bordeaux-Montaigne, décrypte pour Apa news les conséquences éventuelles de la suspension, annoncée jeudi, par la France de sa coopération militaire avec le Mali.
La décision française, annoncée jeudi 3 juin par un communiqué du ministère des Affaires étrangères, de suspendre sa coopération militaire avec le Mali est-elle une surprise?
On savait que la France n’avait pas apprécié ce que le président Emmanuel Macron a qualifié dans un entretien publié dans la dernière édition du Journal du Dimanche de « coup d’état dans le coup d’état ». Il faisait allusion au renversement le 24 mai du président de la transition Bah Ndaw et son premier ministre Moctar Ouane qui étaient censés conduire le Mali vers des élections générales destinées à normaliser la vie politique après le renversement en août dernier, par le même groupe d'officiers, du président Ibrahim Boubacar Keïta dit IBK. Dans le même entretien, le chef de l’Etat français a certes menacé de retirer ses troupes, si jamais les putschistes ne respectent leur promesse d'organiser une transition démocratique conformément au calendrier déjà fixé, ou s’ils étaient tentés par un glissement vers "l’islamisme radical", selon ses propres mots. Cependant, depuis les décisions prises par la Communauté des Etats Économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et l’Union africaine (UA) de suspendre le Mali de toute activité au sein de leurs instances, les autorités françaises avaient affirmé qu’elles se rangeaient derrière les positions de ces deux organisations africaines. L’annonce faite jeudi, 3 juin, dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères français de la suspension de la coopération entre les armées des deux pays, qui combattent les groupes jihadistes dans le nord du Mali depuis 2013, n’était donc pas attendue, malgré les propos musclés tenus par le président français le weekend dernier. A Bamako, ces propos avaient été perçus davantage comme un coup de pression supplémentaire sur les putschistes pour remettre le pouvoir aux civils au plus vite que comme une idée sérieusement envisagée par les autorités françaises. Cette décision est, donc, une vraie surprise.
Quelles seraient les conséquences éventuelles d’une telle décision sur le terrain.?
Même si la France se garde pour l’instant d’annoncer un retrait prochain de ses 5100 soldats engagés contre les jihadistes au Mali et dans le reste du Sahel, elle coupe toute coopération sur le terrain avec l’armée malienne. Cette décision qui signifie que l'opération Barkhane agira désormais en solitaire sur le terrain, est accompagnée par l’arrêt immédiat de toute aide aux forces armées et de sécurité maliennes, y compris dans le cadre de Takuba, la «task force» composée de forces spéciales dédiées à l'accompagnement au combat les unités maliennes Qui est aussi suspendue. Une décision qui risque d’avoir un impact lourd sur les militaires maliens sur le terrain. Ils se retrouvent désormais démunis face à des combattants jihadistes de plus en plus nombreux et violents. Autant dire que cette décision française est pleine de risque pour le Mali et le Sahel. Elle risque d’ouvrir un grand boulevard pour les jihadistes qui n’ont toujours pas renoncé à leur projet initial de prendre le contrôle de tout le pays.
Que peuvent faire les militaires maliens après une telle suspension de la coopération française?
Leurs choix sont limités. Un des scénarios extrêmes mais pas impossible est que les putschistes, qui ont toujours affirmé être disposés à discuter avec les jihadistes, s'engagent dans la voie d’un rapprochement avec ces derniers. A défaut d’un accord de paix en bonne et due forme, ils pourraient envisager de faire des concessions majeures pour obtenir au moins un cessez-lefeu. Des contacts existent entre les deux parties. Des membres du Haut Conseil islamique, qui est un organe étatique, sont en relations avec des leaders maliens du Groupe pour le soutien de l’Islam et des Musulman, plus connu par son acronyme en langue arabe Jnim. Les putschistes pourraient aussi vouloir remplacer l’armée française par celle d’une autre puissance comme la Russie ou la Turquie, dont les ambitions en Afrique sont de plus en plus affichées. Ces deux scénarios ne s’excluent pas mutuellement. S’ils venaient à être traduits dans les faits, ce serait non seulement dangereux pour le Mali et la sous-région sahélienne. Cela signifierait aussi l’échec pur et simple de l’intervention militaire française au Mali.
LA DÉCISION FRANÇAISE AFFECTE DUREMENT LE MALI
Les soldats maliens, notoirement mal formés et mal équipés, dépendent largement des partenaires du Mali pour tenir des camps isolés dans un vaste pays
La décision française de suspendre les opérations conjointes avec l'armée malienne impacte sévèrement les déjà faibles capacités d'un partenaire crucial dans la lutte antijihadiste, avec l'objectif d'obtenir des engagements solides de leurs dirigeants, disent les analystes.
Dans les brousses du Nord et du centre du Mali, les soldats français de l'opération Barkhane, qui a pris en 2014 la relève de Serval déployée l'année précédente, opéraient jusqu'alors dans une large mesure main dans la main avec les soldats maliens.
C'était le cas en particulier lors d'opérations de plusieurs semaines engageant des milliers d'hommes, de Barkhane, de l'armée malienne ou de l'armée nationale selon le théâtre, et de la force régionale du G5 Sahel, contre les groupes armés affiliés à Al-Qaïda ou à l'organisation Etat islamique.
Ces opérations ne se traduisaient pas forcément par de lourdes pertes dans les rangs jihadistes.Mais elles permettaient de "mettre un coup de pied dans la fourmilière et de désorganiser l'ennemi qui doit bouger et prête alors le flanc" à des actions ciblées, explique une source militaire malienne.
La coopération allait bien au-delà, avec le soutien aérien à une armée malienne cruellement dépourvue, l'échange de renseignement et l'entraînement et le conseil, avec l'objectif constamment rappelé par Paris de faire monter en puissance l'armée malienne pour qu'elle puisse assumer seule la sécurité du pays.
Depuis jeudi soir, de grande lignes de cette coopération sont remises en cause, pour la première fois de manière aussi nette en huit années de collaboration.
- large dépendance -
Dix jours après un deuxième putsch en neuf mois, qui a fait du colonel Assimi Goïta le chef de cet Etat crucial pour la stabilité au Sahel, Paris a annoncé jeudi soir suspendre les opérations conjointes avec les forces maliennes.
Concrètement, les soldats de Barkhane "ne sortent plus de leurs bases" dans le Nord du Mali, dit un diplomate français à Bamako.
Les activités de la Task Force Takuba, composée d'unités de forces spéciales européennes et censée aider l'armée malienne à s'aguerrir, sont suspendues, a indiqué à l'AFP l'état-major français.Idem pour la coopération avec les éléments maliens de la force du G5 Sahel, et les actions de formation des soldats maliens, au tir ou à la lutte contre les mines artisanales.
Les soldats maliens, notoirement mal formés et mal équipés, dépendent largement des partenaires du Mali pour tenir des camps isolés dans un vaste pays.Des centaines d'entre eux ont été tués dans les offensives éclairs des jihadistes.
Au quotidien, le soutien français se traduit, dans les domaines logistique, par l'escorte aux relèves ou l'approvisionnement en eau, et militaire, par l'appui lors d'attaques et l'évacuation des blessés.
Sans la France, les opérations maliennes seront vraisemblablement "extrêmement réduites: protection de base, patrouilles en périphérie immédiate des camps, convoi logistique", dit Raphaël Bernard, ancien officier de Barkhane, "ils savent que c'est compliqué de manœuvrer contre les GAT (groupes armés terroristes) loin de leurs bases sans Barkhane ou Takuba".
- groupes insurrectionnels renforcés?-
En décembre, les soldats du camp isolé de Boulkessi avaient sollicité l'appui terrestre et aérien de Barkhane afin d'être relevés.
Dorénavant, ce soutien ne sera plus automatique et le soutien français dans des circonstances particulières sera examiné au cas par cas, dit un responsable français sous le couvert de l'anonymat.
Les mesures sont "temporaires" dans l'attente de "garanties" de la part des colonels maliens qu'ils rendront le pouvoir aux civils après des élections prévues en février 2022, a dit le ministère français des Armées.
Le chercheur malien Boubacar Ba envisage que, dans le camp des jihadistes, l'espace ouvert "donne des ailes aux groupes insurrectionnels qui se sentiraient renforcés par les différentes crises répétitives à Bamako et un éventuel abandon temporaire ou définitif de l'appui des forces Barkhane et Takuba".
L'hypothèse d'un retrait définitif de la France paraît pour l'heure "improbable", estime un ancien haut fonctionnaire retraité malien pour qui "l'annonce française est un message clair et direct" à l'adresse des militaires maliens pour obtenir des garanties.
Celles-ci, avance un chercheur sous couvert d'anonymat, pourraient porter autant sur la nomination d'un Premier ministre civil, qui semble acquise, que sur les décisions politiques bamakoises.
Les Français chercheraient à faire "pression pour que soit mis un terme à tout processus de négociation avec les jihadistes" et pour que la nomination pressentie de Choguel Kokalla Maïga au poste de Premier ministre "ne signifie pas le retour de (l'imam) Dicko", dit-il.
Mahmoud Dicko, imam au coeur de la lutte contre l'ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, n'a jamais caché sa volonté d'engager un dialogue avec les jihadistes pour le retour de la stabilité au Mali. MM.Maïga et Dicko sont réputés proches.
"L'annonce française pourrait permettre de clarifier les choses", d'un côté comme de l'autre sur "les réelles volontés de chacun", dit le haut fonctionnaire retraité.
par l'éditorialiste de seneplus, demba ndiaye
MALI, L’INSUPPORTABLE CHANTAGE FRANÇAIS
EXCLUSIF SENEPLUS - Les récentes sorties de Macron sur le Mali apparaissent pour ce qu’elles sont : les rapports modernes du maître et de l’esclave. Une preuve des chimères de la souveraineté des États africains
Les sorties du président français, Emmanuel Macron, notamment la dernière contre le Mali, apparaissent pour ce qu’elles sont : les rapports modernes du maître et de l’esclave. Une preuve irréfutable des chimères de la « souveraineté » des États africains. De l’absence de souveraineté malgré les hoquets ridicules de nos gouvernants à l’occasion.
« Des exigences et des lignes rouges ont été posées », murmure la CEDEAO vite reprise par le gouvernement français qui, on le subodore du reste, est derrière toutes les décisions et résolutions des « machins » africains que sont la CEDEAO et l’UA dans des situations pareilles. Le président français a donc la caution africaine (nègre), pour brandir le glaive, le sabre, de la soumission, de la dépendance. « Il revient aux autorités maliennes d’y répondre » sous peine de voir la France « suspendre, à titre conservatoire et temporaire, les opérations militaires conjointes avec les forces maliennes ainsi que les missions nationales de conseil à leur profit ».
Le locataire de l’Élysée se souvenant occasionnellement que son pays fut il y a une éternité, le pays de la Déclaration des droits de l’homme, «veut clairement exiger une transition inclusive qui doit s’achever dans neuf mois » et reste intransigeant quant au « caractère républicain de l’État malien ».
Évidemment, dans cette politique d’asservissement, les autorités françaises savent pouvoir compter sur leurs bras armés idéologiques : RFI et France 24. Surtout RFI qui de plus en plus se comporte comme l’infecte « radio des mille collines » rwandaise. À la différence qu’ici, au lieu d’appeler au meurtre, on appelle les peuples africains à se soumettre aux choix de Paris pour nos dirigeants, au nombre de mandats à faire, aux coups d’État acceptables et imposés, à ceux inacceptables aux yeux de la France. Pour ce faire, on lance sur les dirigeants l’artillerie lourde médiatique à longueur « d’éditions spéciales », d’« invités » et autres « Appels aux auditeurs ».
Mais en fait, la France et Macron ne sont aucunement responsables de la soumission et de l’asservissement volontaires de nos dirigeants. Il ne faut pas se tromper de cible encore moins d’adversaire : l’ennemi des peuples africains est intérieur d’abord, et seulement après, soutenu, entretenu, garrotté, par « Paris ». Parce que tout de même, ce sont les dirigeants africains qui sous-traitent la sécurité et l’intégrité de leur pays à l’ex-(toujours) puissance coloniale. Parce qu’à y regarder de près, on se rend compte que nos armées ont été formées principalement pour des guerres intérieures, contre leurs peuples. Au service des d’intrigues politiques : les coups d’État !
Oui, malgré la sainte colère qu’on peut nourrir contre les injonctions humiliantes des autorités françaises en direction de nos dirigeants, il est clair que ces derniers sont les principaux responsables. Il ne faut donc pas se tromper de cible.
Il me semble que les vrais panafricanistes, les vrais « souverainistes » sont ceux qui veulent que l’Afrique défende l’Afrique, qu’elle ne sous-traite plus sa sécurité ; qu’elle professionnalise ses armées pour faire face à toutes les menaces, que les ressources africaines servent d’abord aux peuples africains ; qu’il n’y ait plus de « précarrés » et autres « dépendances privilégiées » ; que les dettes ne soient plus des chaînes d’esclaves, que ceux qui les détournent paient pénalement et pécuniairement.
Oui, c’est insupportable de voir nos chefs d’État continuer à demeurer les "toutous" de Paris ; que le continent reste soixante ans après, le énième département de la France ; que nos régimes politiques, nos futurs dirigeants, soient le fait du choix de la France. Que ses médias, notamment « sa voix », RFI soit le média préféré de nos dirigeants.
Bref, y’en a marre de cette soumission volontaire de nos dirigeants, voire de la grande majorité de nos élites politiques et/ou intellectuelles.Mais répétons-le pour les gens de mauvaise foi et autres répondeurs automatiques : Il ne s’agit pas de la France comme pays et des Français comme peuple, mais bien de l’impérialisme français ; de la mainmise du capital français sur nos économies ; du chantage de la présence (ou non) militaire française au Mali ou ailleurs. Parce qu’on n’a quand même pas oublié la responsabilité de l’État français dans le dynamitage de l’État libyen et l’assassinat de Kadhafi. De l’implosion de l’Irak suite aux mensonges éhontés des Américains sur l’existence d’armes chimiques dans ce pays.
Oui, vous avez dynamité toutes les digues qui retenaient les illuminés de la terre. Vous avez permis que se répandent les mouvements obscurantistes, haineux et violents dans les pays fragiles. Et par ricochets, dans vos capitales. Voilà pourquoi vous êtes au Mali et au Sahel. Vous n’avez rien à cirer de la démocratie en Afrique. Vos intérêts et votre sécurité intérieure d’abord. Et surtout.