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1 mai 2025
International
par Siré Sy
USA, AU-DELÀ DE ''JOE'' ET DE ''DO''
Le peuple américain a choisi son camp : Le basket-ball (politique de la main tendue de Biden) plutôt que le base-ball (politique du bâton prônée par Trump), la puissance d'un Etat fédéral interventionniste plutôt que l’utopie d'une Amérique isolationniste
L'élection présidentielle américaine du 3 Novembre 2020, mettait aux prises au-delà des personnes de Joe Biden (Joe) et de Donald Trump (Do), deux visions (antinomiques) des USA, entre les Démocrates et les Républicains, entre les ''Rouges'' et les ''Bleus'', entre ''Joe'' et ''Do''.
Une vision républicaine, nostalgique de la toute-puissance militaire et hégémonique d'une Amérique d'hier (du temps de la seconde guerre mondiale et de la guerre froide) qu'il faudra ressusciter, pour mieux contenir les nouveaux enjeux géostratégiques d'aujourd'hui, notamment depuis les événements du 11 Septembre 2001, la montée en puissance des nouvelles économies émergentes d'Asie (la Chine et l'Inde), la crise de l'Union européenne, la poudrière au Moyen-orient avec Israël, un contre tous, et les prémisses d'un reclassement économique de l'Afrique. Une Amérique, unilatéraliste, isolationniste, omnipotente et puissante sur et contre le reste du monde.
Une vision démocrate qui croit qu'il faut partir des enjeux d'aujourd'hui pour construire les USA de demain, pour une Amérique plus stratège et plus pragmatique, pour sortir son épingle du jeu face à l'assaut de la Chine et de l’Inde. Une Amérique plus tournée vers la conquête des parts de marché qu’une Amérique belliqueuse et guerrière. Une Amérique qui a compris qu'elle n'est plus la seule superpuissance économique et militaire d'aujourd'hui, mais qu'elle est une puissance économique et militaire parmi les autres. Une Amérique qui a compris que le monde n'est pas et ne peut plus être unipolaire encore moins bipolaire, mais multipolaire. Une Amérique au cœur du multilatéralisme.
D'un côté, une Droite (Parti Républicain) qui était en train de basculer, avec Donald Trump, très à droite - Droite extrémiste - avec un Tea Party «mouvement politique» et Donald Trump lui-même ainsi que son administration, qui ont fini par radicaliser une bonne frange même du Parti Républicain et irriter tous ses modérés (centristes). Un Parti Républicain soucieux de marquer nettement la suprématie et la domination de cette «Amérique blanche d'origine anglo-saxonne» sur le reste d'une «Amérique hispanique, asiatique et noire». Comme au temps de la Guerre de sécession entre le Nord et le Sud.
De l'autre, une Gauche (Parti Démocrate) de plus en plus socialiste et progressiste, massifiée par les minorités visibles (Asiatiques, Noirs et Hispaniques) dont manifestement les préoccupations premières éminemment économiques, sont de loin pour cette idée d'une Amérique superpuissance militaro-sécuritaire et politico-diplomatique, vivant en paix et en harmonie avec le reste du monde, dans une globalisation de compétition, certes, mais aussi de solidarité et de partage, en lieu et place d'une vision américaine du monde sur la base d'exclusion et d'accaparement.
La ligne Maginot
Jusqu’à Obama, la ligne de démarcation entre les visions, les programmes et les politiques entre Républicains et Démocrates étaient comme les mailles d'un filet de pêche (fondamentalement, les deux camps sont d'accord sur le fait qu'il ne faut pas trop changer les choses). Mais, depuis l'avènement de Donald Trump à la Maison blanche, il semble se dessiner une sorte de ligne Maginot entre une Droite de plus en plus conservatrice et radicale et une Gauche de plus en plus progressiste et interventionniste.
D'un côté, un fort électorat au Parti Républicain nourrit le rêve de restaurer une certaine grandeur hégémonique des USA sur la scène internationale, comme à l'époque de la bipolarisation du monde en pro-Est ou pro-Ouest. Selon la vision idéologique du mouvement Tea Party, la Chine est la «nouvelle menace» des USA, après la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide, faute de combattant (URSS). Au Parti Républicain, on croit dur comme fer que les USA doivent être, s'il le faut, sur le pied de guerre, pour régenter le nouvel ordre mondial. Bref, le retour d'une Amérique «rouge», comme la couleur du Parti Républicain.
D'un autre côté, la vision idéologique du Parti Démocrate épouse l'idée que le temps de la guerre est derrière les USA, que la guerre froide est un passé irrémédiablement dépassé. Le Parti Démocrate estime que les USA ne doivent plus se poser en s'opposant ni contre l'Est (la Russie) ni contre le reste du monde, mais en coopérant dans une parfaite intelligence, avec les pays émergents d'Asie, tout en gardant les meilleures relations possibles avec les pays de l'Union européenne et en ayant l’Afrique, dans son collimateur et en ligne de mire. Bref, la perspective d'une Amérique de demain, «bleu», comme la couleur du Parti Démocratique.
«America The Beautiful»
Comme l’immense musicien Ray Charles qui a fait découvrir l’Amérique à elle-même à travers ses mélodies «America the beautiful» ou «Georgia», le peuple américain a choisi son camp : l’espoir. Le basket-ball (la politique de la main tendue de Joe Biden) plutôt que le base-ball (la politique du bâton prônée par Donald Trump), la puissance d'un Etat fédéral fort et interventionniste plutôt que l’utopie d'une Amérique isolationniste et unilatéraliste, une «Amérique généreuse, compatissante et tolérante» plutôt qu’une Amérique arrogante, belliqueuse, raciste et intolérante.
Le peuple américain a voté pour une répartition plus juste des richesses de la nation plutôt que la fuite du billet vert vers les paradis fiscaux ; une relance de l'économie utile plutôt que l’économie des armes ; pour une économie plus productive dans les respect de l'environnement et une société plus solidaire plutôt qu’une économie destructrice des écosystèmes et une société basée sur de très fortes inégalités sociales et racistes, nourries aux mamelles de l’éthique protestante ; le trickle down (l'émergence d'une forte classe moyenne et économie de ruissellement) plutôt que le trickle up (enrichissement vers le haut et appauvrissement vers le bas).
Bref, les USA, avec l'élection de Joe Biden, semble inviter «le génie et la grandeur de son peuple» à aller de l'avant. Obama disait, ''Yes we can''. Et Joe Biden l'a fait. 'Yes we did''.
Siré SY, Fondateur du Think Tank Africa WorldWide Group
par Scandre Hachem
MACRON ET SA GUERRE CONTRE LES SÉPARATISMES
La lutte contre le terrorisme est en train d'enfanter un nouveau monstre, à savoir une loi contre toute étude critique sur le terrorisme, non plus pour contrer l'extrême-droite, mais bien pour la servir cette fois
Embourbé dans sa gestion calamiteuse de l'épidémie du Covid-19 entre mensonges, mépris de l'Asie et autosuffisance de l'entre-soi du monde civilisé d'une part, et conséquences d'une politique de détricotage des services de santé publique, en particulier des hôpitaux publics entrepris depuis plus de vingt ans et qu'il continue de mettre en œuvre de plus belle d'autre part, Macron n'a trouvé de mieux que de reprendre à son compte la bonne vieille recette du bouc émissaire pour orienter la colère populaire et lui trouver un exutoire à sa hauteur.
Les Gilets jaunes avaient généré les accusations systématiques, en long, en large et en travers, à longueur d'émissions, de jours, de semaines et de mois durant, d'antisémitisme, d'homophobie et autres insanités.
La conjugaison des crises sanitaire, économique, politique nécessitait un exutoire à la hauteur de l'enjeu, et pas encore éculé, à savoir les séparatismes. Et en l'occurrence, le premier d'entre eux, bien plus facile à nommer et porteur à tous les coups, le séparatisme islamique.
Macron a été entendu, tant au niveau de la célérité de réaction qu'au niveau de son ampleur, au-delà de toute espérance. À peine son discours prononcé qu'un professeur de collège, paré de qualités réelles et supposées, s'est cru bien avisé de ressortir des caricatures de Charlie Hebdo, pour donner une leçon civilisationnelle (contenu des caricatures mais aussi action de distinction des élèves musulmans de leurs camarades de classe), sous prétexte de liberté d'expression, à ses jeunes élèves pré-adolescents.
Peut-être suffisamment ingénu, peut-être amnésique ou étourdi à la façon Pierre Richard dans "La moutarde me monte au nez", mais certainement de toute bonne foi, il devait ignorer que ces caricatures ont été, dès leur première publication et systématiquement par la suite, à tort ou à raison, une source de colère et de sentiments d'humiliation chez une partie significative de ses compatriotes, mais aussi au niveau des populations musulmanes à l'échelle mondiale. En clair, on ne pouvait pas mieux trouver pour mettre le feu aux poudres. L'exutoire rêvé de Macron s'est ainsi mis en marche, à pleins tubes, trouvant immédiatement un esprit aussi criminel qu'immature pour établir et exécuter une sentence de mort, avec une mise en scène aussi abjecte pour la culture de la victime que ne le sont les caricatures pour la sienne propre. Cette mise à mort, dans sa forme comme dans son fond, empêchera tout débat sur les caricatures en cause comme sur leur utilisation pour un cours à des élèves de treize ans, caricatures relevant plus de la pornographie de caniveau, voire d'égouts que d'autre chose. Caricatures qui disent, non la réalité de l'islam, n'en déplaise leurs auteurs, mais le fantasme d'une élite vautrée dans un tel niveau de putréfaction qu'elle en arrive à brandir des images pornographiques (n'en rêverait-elle pas pour elle-même ?) pour illustrer les valeurs de la République. Pire, en servant ces images à des élèves à peine entrés dans la pré-adolescence, et au rythme avec lequel la société évolue, devrions-nous assister à leur utilisation en cours d'instruction civique à des élèves de primaire dans un horizon de quelques années à peine et finir ainsi dans une pédopornograhie qui ne dirait pas son nom ? On en viendrait à en rire n'eût été une perspective aussi dramatique que consternante. La réaction salutaire d'un établissement scolaire belge face à des faits identiques quelques jours plus tard, sanctionnant immédiatement le professeur, le protégeant du même coup et coupant l'herbe sous les pieds à tout éventuel prétexte à protestations et autres éventuelles réactions violentes, dit tout le fossé entre une réaction saine, avisée et proportionnée et la guerre outrancière de Macron dans le seul but d'offrir à la population française un exutoire aussi malsain que destructeur pour sauver son pouvoir et continuer à mettre en œuvre sa politique au service des quelques ultra riches.
D'une campagne malsaine à l'autre
La mise en scène de l'assassinat de Samuel Paty est-elle plus abjecte que celle de Théo van Gogh il y a une quinzaine d'années ? Le port du voile recèle-t-il un caractère plus hideux qu'il ne l'était lorsqu'il a été projeté sous les feux de l'actualité avec l'affaire des collégiennes voilées il y a une trentaine d'années ? Que nenni ! Ce qui a changé est le degré de haine et de rejet contre l'islam et les musulmans qui s'accentue au fil des campagnes contre l'islamisme, une haine et un rejet qui s'élargissent à des couches de plus en plus larges de la population, une haine et un rejet qui gangrènent les esprits jusqu'à enrayer tout esprit critique, et aujourd'hui toute velléité même d'esprit critique quand ce sont jusqu'aux chercheurs et jusqu'aux universités qui sont accusés de promouvoir et de protéger le terrorisme islamique parce qu'ils ne se contentent pas de produire des analyses et des études à charge. Développer une recherche critique sur les conditions de production de la radicalisation et du terrorisme islamistes, c'est le justifier décrètent aujourd'hui nos pouvoirs établis. Ce n'est pas faute d'avoir préparé les conditions de cette sentence, cela fait déjà plusieurs années que ces accusations sont proférées à chaque occasion dans les médias, préparant et maturant ainsi les esprits pour, le moment venu, les instituer en règle ou, à tout le moins, une épée de Damoclès pour les obliger à l'auto censure et à se tenir bien dans les rangs. Il semble bien que le moment soit enfin venu. Et ce ne sont pas les quelques protestations dans certains journaux mainstream pour se donner bonne conscience qui y changeront quelque chose. Protestations timides et au-dessus de la mêlée du genre "Ce qui est vrai", "Ce qui est faux", "Ce qui est exagéré", suivez mon regard...
La lutte contre l'antisémitisme, pour légitime qu'elle soit, avait enfanté un monstre sous prétexte de lutter contre l'extrême-droite, à savoir la loi interdisant toute étude critique sur la shoah. La lutte contre le terrorisme est en train d'enfanter un nouveau monstre de même nature, à savoir une loi contre toute étude critique sur le terrorisme, non plus pour contrer l'extrême-droite, mais bien pour la servir cette fois. Ironie de l'histoire qui bégaie de nouveau.
Force est de constater que nous sommes arrivés aujourd'hui à un niveau de haine et de rejet qui fait accepter, justifier et même réclamer un durcissement toujours plus accentué des atteintes aux libertés. Cela fait cinq ans que la France vit en État d'urgence et au-delà de l'État d'urgence, l'essentiel de la première mouture en cours ces dernières décennies ayant été déjà intégré au droit commun. Ce sont plutôt des éléments de l'État d'exception qui sont aujourd'hui appliqués et qu'il faudrait se soucier de mettre en évidence, analyser pour en étudier la portée et la dynamique.
Car toutes ces campagnes successives contre l'islamisme, outre le racisme et les fractures sociales contre les citoyens musulmans de plus en plus douloureuses qu'elles alimentent, ont systématiquement renforcé les pratiques autoritaires de l'État, les violences répressives légales tant du point de vue des moyens mis en œuvre (certains relevant complètement de la guerre urbaine) que des pratiques légales ou acceptées car devenus d'un usage courant (hors dérives policières bien entendu). Autoritarisme de l'État intériorisé comme naturel par ceux qui l'exercent, réclamé par souci de se sentir en sécurité par ceux, de plus en plus nombreux, qui le subissent, devenant ainsi et progressivement le creuset d'un soft totalitarisme qui ne dit pas son nom mais qui n'en est pas moins réel. Et ce soft totalitarisme vise à de nouvelles ambitions, de nouvelles conquêtes.
De la guerre contre le séparatisme islamique à la guerre contre les séparatismes
Les campagnes anti-immigrés depuis les années mille neuf cent soixante-dix puis anti-islamistes à partir des années deux mille n'ont pas servi uniquement à restreindre les libertés, développer l'arsenal répressif et la mise en place du soft totalitarisme, elles ont aussi servi à parachever les réformes néolibérales tendant à casser des secteurs entiers de l'économie tout comme les secteurs publics comme l'école ou la santé. Pour chaque période qui a vu un trop plein de mécontentement devenu impossible à canaliser, les présidents successifs de ces deux dernières décennies ont su jouer opportunément la carte de l'islamisme et de ses dangers supposés ou réels pour y faire déverser la colère populaire. Et cela marche à tous les coups, quitte à calmer quelque peu le jeu une fois l'opération réalisée avec succès. Mais le fond de méfiance, de haine et/ou de rejet s'accumule et macéré avec les années, et de campagne en campagne, pour se réveiller et sévir encore et encore avec toujours plus de brutalité. Suffisamment pour ne plus se contenter de la seule imposition de la pensée unique, politiquement s'entend, mais pour cultiver cette fois une pensée qui ne souffrira d'aucune forme d'organisation autonome, à quelque niveau que ce soit.
L'accumulation des attaques sociales et idéologiques de ces dernières décennies ont fini en réalité par remettre en cause la cohésion nationale elle-même. Ayant progressivement renoncé à se battre dans le système à force d'échecs et de défaites face à un pouvoir devenu autiste, nombre de strates de la population ont construit à leur corps défendant des lieux de vie, d'oxygénation, d'expression hors des clous et chemins balisés. Des radios libres aux réseaux sociaux dont la puissance est démultipliée par l'Internet, des quartiers aux groupes communautaires qui ne cessent de s'élargir jusqu'à se doter de monnaies locales, et qui essaiment sur tout le territoire, une vie riche, foisonnante et porteuse d'espoir et de débouchés concrets et accessibles prend forme et tend à se passer des circuits traditionnels sous le joug du néolibéralisme et susceptibles d'offrir une profondeur stratégique à un basculement révolutionnaire à terme. Peu de personnes croient encore au grand soir, et à raison. Les processus révolutionnaires se fondent d'abord sur des ruptures sociales et économiques qui sapent les fondations du monde ancien et consolident et/ou restructurent la formation de poches et de circuits qui ouvrent la voie au monde nouveau qui se dessine. C'est un processus du temps long qu'occultent systématiquement les espoirs nés d'explosions sociales du temps cours. Cela fait un demi-siècle si l'on se réfère aux nouveaux mouvements sociaux nés dans les années soixante-dix, et près d'un siècle si l'on se réfère aux grandes avancées sociales, économiques et éducationnelles nées de la résistance et de la libération que ce processus du temps long est à l'œuvre, avec ses avancées et ses reculs. Ces deux dernières décennies de défaites successives ont en fait accéléré l'éclosion et l'essaimage de modes sociaux alternatifs. C'est ce processus en profondeur qui produit aujourd'hui, à travers les Gilets jaunes, la mise en réseaux de citoyens brisés, soumis, enfermés sur eux-mêmes, isolés les uns des autres, voire hostiles, la formation de nouvelles solidarités sociales tout comme les excroissances politiques que sont le RIC (référendum d'initiative citoyenne), les pratiques des Citoyens constituants et autres expressions politiques qui voient le jour ces quelques mois.
C'est cela le danger, c'est cela le sens et l'objectif affiché de Macron lorsqu'il déclare la guerre aux séparatismes. Le séparatisme islamique est l'arbre qui cache la forêt de cette immense offensive qui a par ailleurs commencé par la volonté de mise au pas des réseaux sociaux sous prétextes de Fake news, de dérives antisémites, d'appels à la haine ou d'apologie de la violence et du terrorisme, guerre déjà bien entamée. Tout doit être de nouveau sous contrôle et en adéquation avec les exigences du néolibéralisme et de l'enrichissement des plus riches. En attendant, bouffez du musulman tant que vous pouvez et au-delà, pour qu'enfin votre rage s'apaise de nouveau.
C'est cela la guerre de Macron. C'est contre celle-là qu'il s'agit de se lever. La guerre contre le séparatisme islamique n'est que l'arbre qui cache la forêt, à savoir la contre-offensive du néolibéralisme pour réduire la contre société qui se construit et qui cherche à s'en émanciper et la laissera se vider ainsi de sa sève pour n'en laisser qu'un visage devenu hideux et macabre.
JOE BIDEN ENTAME SES CHANTIERS
Crise du coronavirus, relèvement de l'économie, pallier les divisions politiques... Les défis auxquels doit se confronter le prochain président américain sont immenses et même périlleux. Explications avec l'analyste politique, René Lake, au micro de VOA
René Lake lève le voile sur les priorités de Joe Biden, après sa victoire annoncée à la présidentielle américaine, dans un contexte de crise sanitaire aux conséquences multiformes. La nouvelle administration doit en outre panser les plaies d'un pays plus que jamais polarisé, éprouvé, par quatre ans de gouvernance Trump.
OUATTARA FÉLICITÉ EN AFRIQUE
L’Union africaine (UA), la Cédéao et plusieurs pays africains ont félicité mardi le chef de l’État ivoirien, Alassane Ouattara, pour sa réélection
L’Union africaine (UA), la Cédéao et plusieurs pays africains ont félicité mardi le chef de l’État ivoirien, Alassane Ouattara, pour sa réélection, bien que l'opposition conteste le résultat. De nouveaux affrontements ont eu lieu dans le centre-est du pays.
Alassane Ouattara a reçu, mardi 10 novembre, le renfort de ses pairs africains qui ont reconnu sa réélection à un troisième mandat controversé à la tête de la Côte d'Ivoire.
L'Union africaine (UA) et la Communauté des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) ont félicité le chef de l'État ivoirien, après la validation définitive lundi par le Conseil constitutionnel de la victoire d'Alassane Ouattara, au premier tour du scrutin présidentiel du 31 octobre avec 94,27 % des voix, pour un troisième mandat que l'opposition juge inconstitutionnel.
La présidence ivoirienne a aussi reçu, par courrier, des messages du Maroc, du Sénégal, du Togo et du Ghana, selon une source proche de la présidence.
L'opposition ivoirienne a boycotté l'élection et refuse de reconnaître sa validité. Alors que le pouvoir et l'opposition ivoiriens sont à couteaux tirés, l'UA "invite tous les acteurs politiques à privilégier le dialogue pour préserver la cohésion sociale et la paix", et la Cédéao "exhorte" le président Ouattara à "tout mettre en œuvre en faveur du rassemblement des Ivoiriens".
"Apaisement"
Les deux institutions panafricaines soulignent que le dialogue doit se faire dans le "respect des institutions" (UA) et des "voies du droit" (Cédéao), alors que l'opposition a annoncé la mise en place d'un "Conseil national de transition" (CNT) au lendemain du scrutin.
Par la voix de son ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, la France a estimé que l'offre de dialogue d'Alassane Ouattara allait "dans le bon sens", mais souhaité que "des actes contribuent à l'apaisement".
La situation politique et sécuritaire reste toutefois tendue avec des nouvelles violences dans le centre-est. Dans le sillage de troubles qui avaient fait neuf morts à Daoukro et Sikensi (centre-est) lundi, des affrontements intercommunautaires avaient lieu à M'Batto, à 200 km d'Abidjan.
Au moins trois personnes y sont mortes lundi et mardi et 26 blessées, selon un porte parole de la gendarmerie, alors que de nombreux habitants de la région parlent d'un bilan plus lourd lors de ces heurts entre des Agni, ethnie locale réputée pro-opposition, et des Dioula originaires du Nord, réputés pro-Ouattara.
Les troubles liés à l'élection ont fait une cinquantaine de morts depuis trois mois, dont une dizaine lundi, alors que l'opposition avait appelé à une journée de mobilisation.
Opposants poursuivis et emprisonnés
Lundi soir, lors d'une adresse télévisée à la Nation, le président Ouattara a invité son principal opposant Henri Konan Bédié à "une rencontre dans les tout prochains jours pour un dialogue franc et sincère en vue de rétablir la confiance".
Un signe d'apaisement après avoir usé de la manière forte face à l'opposition : à l'exception d'Henri Konan Bédié, ex-chef de l'État, tous ses leaders font l'objet de poursuites judiciaires et ont été emprisonnés, ou sont bloqués chez eux par les forces de l'ordre.
Ni Henri Konan Bédié ni son Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) n'ont encore réagi officiellement à l'offre du président Ouattara. Mais N'Goran Djiedri, directeur général de l'administration du PDCI, et dirigeant d'un de ses courants – Notre Héritage – a posé des conditions. "Oui au dialogue, mais avec la plateforme de l'opposition et avec un médiateur de l'ONU", a-t-il déclaré à l'AFP. "Même un bébé de 2 ans ne fait plus confiance à Alassane Ouattara."
"L’ex-président de la Côte d’Ivoire [Alassane Ouattara] appelle l’opposition ivoirienne au dialogue avec la même intention que le loup affamé appellerait l’agneau au dialogue", a réagi sur Twitter Guillaume Soro, l'ex-chef de la rébellion et ancien Premier ministre, devenu opposant farouche au régime et en exil à l'étranger.
DES MILLIERS D'ETHIOPIENS FUIENT LES COMBATS
Des milliers d'Éthiopiens, dont des soldats, fuient vers le Soudan pour échapper aux combats menés par Addis Abeba qui font rage dans la région dissidente du Tigré
Des milliers d'Éthiopiens, dont des soldats, fuient vers le Soudan pour échapper aux combats menés par Addis Abeba qui font rage dans la région dissidente du Tigré depuis le début du mois et qui ont fait plusieurs centaines de morts.
Des milliers d'Éthiopiens, dont des soldats fuyant les combats dans la région dissidente du Tigré, dans le nord du pays, ont traversé la frontière occidentale avec le Soudan, a annoncé mardi 10 novembre un responsable soudanais. "Les réfugiés continuent d'affluer, la situation change d'heure en heure", a indiqué à l'AFP Alsir Khaled, directeur de l'agence soudanaise pour les réfugiés dans la ville frontalière de Kassala.
Un témoin a également rapporté sous le couvert de l'anonymat que "des femmes et des enfants en bas âge tentaient la traversée" du Tekeze, l'un des affluents du Nil qui longe la frontière.
Depuis lundi, "mille Éthiopiens ont traversé la frontière et rejoint la région soudanaise de Hamdait, dans l'État de Kassala. Nous procédons actuellement à leur enregistrement", a précisé Alsir
"L'impact du conflit"
Dans "l'État de Gedaref, 500 personnes sont arrivées hier (lundi) parmi lesquelles des soldats", a indiqué ce responsable, sans préciser s'ils appartenaient à l'armée d'Addis Abeba ou s'ils étaient tigréens.
Le Tigré est une région dissidente du nord de l'Éthiopie où Addis Abeba mène depuis le 4 novembre une opération militaire d'envergure. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019, a lancé cette opération contre les autorités du Tigré, qu'il avait accusées préalablement d'avoir attaqué deux bases de l'armée fédérale sur leur territoire, ce qu'elles démentent.
Se disant "inquiet de l'impact du conflit en cours", le porte-parole du Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), Babar Baloch, a également fait état mardi de la présence de "plusieurs centaines de demandeurs d'asile" à deux postes-frontières de la zone.
Par ailleurs, le HCR est "en train de mobiliser des ressources" pour leur apporter une "aide d'urgence".
Camps de réfugiés
Outre l'aide apportée collectivement par la population et les autorités locales, ces dernières ont également ouvert un centre près de la frontière pour accueillir les demandeurs d'asile, avant de "les envoyer dans le camp de réfugiés de Chajrab, dans la région de Kassala", a ajouté Alsir Khaled.
Mais "cela dépasse la capacité des autorités (...) et jusqu'à présent, les organisations internationales n'ont pas encore apporté leur soutien" aux efforts soudanais, a-t-il déclaré.
L'aviation éthiopienne a lancé plusieurs séries de raids sur des positions tigréennes tandis qu'au sol, des combats impliquant de l'artillerie lourde ont été rapportés entre les troupes fédérales et les forces de sécurité tigréennes, notamment à l'ouest.
LA CAF DIT NON A LA FSF
La Confédération africaine de football a refusé le huis clos partiel demandé par la Fédération sénégalaise de football (FSF) pour le match Sénégal-Guinée Bissau, prévu, ce mercredi, à Thiès.
La Confédération africaine de football a refusé le huis clos partiel demandé par la Fédération sénégalaise de football (FSF) pour le match Sénégal-Guinée Bissau, prévu, ce mercredi, à Thiès, dans le cadre de la 3e journée des éliminatoires de la CAN 2022.
Lions du Sénégal et Djurtus vont devoir s'affronter dans un stade sans spectateurs. En effet, la Confédération Africaine de football (FSF) n'a pas donné une suite favorable à la demande de la Fédération séngalaise de football (FSF) de tenir la rencontre en présence du public plus précisément quelques spectateurs. Une information confirmée par Samsidine Diatta, membre de la FSF. Selon lui, c'est une décision difficile mais la Fédération a fait ce qu'elle avait à faire. Maintenant, la CAF a pris sa décision et que le Sénégal doit la respecter. C'est pour le bien de tout le monde car le coronavirus est toujours présent, a-t-il expliqué au micro de IGFM, ce mardi, à Thies.
Seuls 200 invités vont assister à la rencontre
En revanche, seuls les invitations VIP (200 personnes) et les journalistes pourront avoir accès au stade.
Il a par ailleurs ajouté que des billets avaient déjà été vendus pour le huis clos partiel, mais l'instance va les rembourser.
Pour rappel, le Sénégal défie la Guinée Bissau, ce mercredi (16h00) au stade Lat Dior de Thies, pour le compte de la 3e journée des éliminatoires de la CAN 2022. Dimanche, les Lions iront à Bissau pour la manche retour. Deux victoires lors de cette double confrontation pourraient ouvrir aux Lions les portes de la qualification pour Cameroun 2022.
DAKAR, TERRE DE REFUGE DE PRÉSIDENTS DÉCHUS
L’ancien résident malien, Amidou Toumani Touré, décédé ce mardi, avait trouvé refuge au Sénégal suite au coup d’Etat qui l’avait renversé en 2012. Revenir sur l’histoire des chefs d’Etat africains qui ont eu à s’exiler dans la capitale sénégalaise
Il n’est pas le seul dans le lot des présidents africains qui ont choisi Dakar comme terre de refuge, mais certainement parmi les plus célèbres. Général à la retraite élu président en 2002, réélu en 2007, «ATT» avait été renversé le 22 mars 2012 par des militaires qui l’accusaient d’incurie face à la rébellion dans le nord du pays. Ce, après sa fuite précipitée du palais de Koulouba.
En avril 2012, il avait ensuite formellement démissionné, puis quitté le Mali pour Dakar avec sa famille. Ce départ a été rendu possible suite à un accord entre le chef de l’ex-junte, le capitaine Sanogo, et la médiation ouest-africaine. Exilé en terre sénégalaise, ATT a été menacé d’un procès pour « haute trahison » au Mali, à la suite notamment d’accusations du pouvoir en place en décembre 2013. Mais en décembre 2016, l’Assemblée nationale avait rejeté à une écrasante majorité, l’ouverture de poursuites contre lui.
Le 25 décembre 2017, soit 5 années plus tard, Amadou Toumani Touré retourne à Bamako, où il est accueilli par le gouvernement d’Ibrahima Boubacar Keita. Quelques mois plus tard, il reprendra le chemin de l’exil vers Dakar, avant un retour définitif au Mali en décembre 2019. Il a rendu l’âme, ce 10 novembre 2020, en Turquie.
Habré et le camp pénal de Dakar
Mais, avant ATT, l’ancien président tchadien, Hissène Habré (1982-1990) déposait ses valises dans la capitale sénégalaise. C’était fin 1990. Ce, après avoir été renversé le 1er décembre de la même année, par le général Idriss Déby Itno.
Mais contrairement à ATT, son exil ne sera pas de tout repos. Car, près de 15 années, plus tard, l’ancien homme fort de Ndjamena est placé en garde à vue dans le cadre d’une enquête sur les crimes contre l’humanité durant son magistère. Son procès s’est ouvert à Dakar conformément à un accord signé, le 19 décembre 2012, entre les autorités sénégalaises et l’Union Africaine (UA) permettant au Sénégal de prendre les mesures juridiques et judiciaires nécessaires pour cette procédure judiciaire. Les autorités sénégalaises avaient également signé un accord de coopération judiciaire avec le Tchad en vue de faciliter la circulation des magistrats et leur permettre de communiquer avec les parties concernées par le dossier.
En mai 2016, il est condamné à perpétuité par les Chambres africaines extraordinaires (CAE). Ce jugement sera finalement confirmé, en avril 2017, par la Chambre d’appel du Tribunal spécial africain siégeant à Dakar.
Amadou Ahidjo, de Yaoundé au cimetière de Yoff
Parmi les chefs d’Etat africains qui se sont réfugiés à Dakar, il y a également Amadou Ahidjo du Cameroun. Premier président de ce pays dès l’indépendance, en 1960, il annonça, le 4 novembre 1982, contre toute attente, sa démission pour raison de santé. Suivant les dispositions constitutionnelles, le Premier ministre Paul Biya, âgé alors de 49 ans, lui succéda.
Mais, suite à deux condamnations à mort par contumace pour atteinte à la sûreté de l’État, alors qu’il séjournait entre la France, l’Espagne et le Sénégal pendant ces événements, il ne rentra jamais au Cameroun et s’installa définitivement au Sénégal où il est décédé d’une crise cardiaque, le 30 novembre 1989. Il repose, depuis lors, au cimetière musulman de Yoff. Si un retour sur ses terres de Garoua avait été évoqué en 2010, une telle éventualité ne semble plus d’actualité. En cause, la demande de sa veuve, Germaine : souhaitant des funérailles officielles, elle s’est heurtée à une fin de non-recevoir de la part de l’actuel président camerounais.
D’autres ont profité de la Téranga
A signaler que hormis les chefs d’Etat déchus, d’autres personnalités politiques africaines ont, durant une partie de leur vie, séjourné au Sénégal. Il s’agit notamment de Ibrahima Ly, opposant politique malien au pouvoir militaire du Général Moussa Traoré, Alpha Oumar Konaré, ancien Président malien, Alpha Condé, opposant, il avait élu domicile au Sénégal. Il en est de même que son principal challenger depuis 10 ans: Cellou Dalein Diallo.
D’autres, par contre, y sont venus pour poursuivre leurs études. C’est le cas de Roch Marc Christian Kaboré, Simone Gbagbo, Yayi Boni, Patrice Talon, Abdel Aziz de la Mauritanie, entre autres.
Sénégal, «terre d’accueil et de respect des droits de l’homme»
Selon le professeur Ibou Sané, si beaucoup de chefs d’Etat déchus choisissent le Sénégal, c’est parce qu’il est une terre d’accueil et d’ouverture qui respecte les droits de l’Homme. «Au Sénégal, les étrangers sont bien intégrés, ils sont bien traités sauf pour ceux-là qui s’activent dans des pratiques illicites» dit-il estimant que notre pays est l’Union Africaine, l’Uemo et la Cedeao en miniature. «Le Sénégal accepte l’intégration», ajoute le spécialiste de la sociologie politique. A en croire le Pr. Ibou Sané, ce «rayonnement sur le plan international» est réussi grâce à la politique du premier président Leopold Sédar Senghor qui prônait « enracinement et ouverture».
Toutefois, le revers de la médaille est que cette décision «audacieuse» d’accueillir des présidents déchus peut susciter des heurts du point de vue diplomatique, selon toujours notre interlocuteur. «C’est le cas avec la Gambie ou la Mauritanie mais après tout, les gens ont compris que nous ne sommes pas une Nation où l’on doit systématiquement expulser les autres», souligne-t-il. L’essentiel, selon l’universitaire, «c’est de montrer notre souveraineté internationale, notre position en matière de droits de l’homme et notre position en tant qu’Africain qui ne décline jamais les sollicitations».
DÉCÈS DE L'EX-PRÉSIDENT MALIEN AMADOU TOUMANI TOURÉ
Celui qui a dirigé le pays sahélien de 2002 à 2012 avant d'être renversé par un coup d'Etat militaire, est mort dans la nuit de lundi à mardi à l'âge de 72 ans en Turquie où il avait été transféré pour des raisons de santé
L'ancien président malien Amadou Toumani Touré, qui a dirigé le pays sahélien de 2002 à 2012 avant d'être renversé par un coup d'Etat militaire, est décédé dans la nuit de lundi à mardi à l'âge de 72 ans en Turquie où il avait été transféré pour de raisons de santé.
"Amadou Toumani Touré est décédé dans la nuit de lundi à mardi en Turquie où il avait été évacué pour des raisons sanitaires", a annoncé à l’AFP son neveu, Oumar Touré.
Amadou Toumani Touré avait subi récemment "une opération du cœur à l’hôpital du Luxembourg de Bamako qu’il a créé.Tout semblait aller bien", a indiqué sous couvert d'anonymat un médecin de l'hôpital.
"On a décidé ensuite de l’évacuer sanitairement.Il a voyagé vers la Turquie très récemment par un vol régulier.Malheureusement il est décédé dans la nuit de lundi à mardi", a-t-il ajouté.
Le nom d'Amadou Toumani Touré, ancien militaire entré en politique, était associé à la transition démocratique du Mali du débaut des années 1990.
Devenu président en 2002, il avait été renversé en mars 2012 par un putsch de soldats entrés en mutinerie contre l'incapacité du gouvernement à arrêter l'offensive, dans le nord du pays, de rebelles touareg et l'afflux de jihadistes en provenance des pays voisins.
Le pays a sombré depuis dans une spirale de violences jihadistes et intercommunautaires qui se sont propagées au centre du pays et au Burkina Faso et au Niger voisins.
- Coup d'Etat -
Amadou Toumani Touré avait lui-même pris part en mars 1991, après des manifestations populaires durement réprimées par le pouvoir, à un coup d'Etat qui avait eu raison du régime de Moussa Traoré, en place depuis 1968.
Il avait pris la tête d'un comité de transition, exercé les fonctions de chef de l'Etat et dirigé l'organisation d'élections.La transition avait débouché en 1992 à l'avènement d'Alpha Oumar Konaré, premier président démocratiquement élu depuis l'indépendance.
Surnommé familièrement ATT, Amadou Toumani Touré avait à son tour été élu président en 2002 et réélu en 2007.
Loin de stopper l'avancée des indépendantistes et des jihadistes, le coup d'Etat de 2012 avait au contraire précipité la déroute de l'armée.Le nord était alors rapidement tombé sous la coupe des jihadistes avant l'intervention des forces françaises.
Les deux tiers du territoire malien échappent aujourd'hui à l'autorité centrale.
Amadou Toumani Touré disparaît alors que le Mali est à nouveau dans une période de transition, consécutive à un nouveau coup d'Etat militaire, qui a fait tomber le 18 août l'ancien président élu Ibrahim Boubacar Keïta.
Certains des officiers impliqués dans le putsch du 18 août, dont leur numéro deux, le colonel Malick Diaw, figuraient sur la photo de groupe des putschistes de 2012.
Les putschistes ont mis en place une présidence et un gouvernement de transition et se sont engagés à remettre le pouvoir à des civils élus sous 18 mois.
«CONFIER LES EVENEMENTS DU 28 SEPTEMBRE 2009 A LA CPI SERAIT SYNONYME D’ABANDON DE NOTRE SOUVERAINETE»
Sud Quotidien est allé à la rencontre du tout nouveau Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Me Mory Doumbouya, qui affiche sa détermination à ce que la justice soit rendue
CONAKRY, Guinée) – 28 septembre 2009 ! Un lundi noir à Conakry où un meeting politique organisé par le Forum des forces vives de la Guinée dans le stade qui porte le même nom, tourne au drame. L’armée aurait tiré sur la foule et commis des viols publics. Le bilan est estimé à 157 morts et plus de 1000 blessés. 11 ans après, la communauté internationale attend toujours la tenue du procès. Sud Quotidien est allé à la rencontre du tout nouveau Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Me Mory Doumbouya, qui affiche sa détermination à ce que la justice soit rendue. Entretien.
Monsieur le ministre, à quand le procès des évènements du 28 septembre 2009 ?
Je suis Garde des Sceaux, il y a quelques mois. C’est parce que j’ai été investi dans mes actuelles fonctions le 19 juin passé. J’ai pris contact avec les juges qui sont saisis de ce dossier, notamment les juges du Tribunal territorial compétent. J’ai échangé avec les cadres du département. J’ai échangé avec les associations des victimes. J’ai eu des échanges également avec le collectif d’avocats chargé d’assurer la défense des personnes poursuivies dans le cadre de ces évènements. Je suis allé plus loin. Peut-être que ça pourrait vous paraitre saugrenu. Je suis allé à la maison d’arrêt échanger directement avec les personnes poursuivies dans le cadre de cette affaire et ça m’a permis d’avoir une impression d’ensemble. C’est parce qu’au point de vue procédural, j’ai aperçu en réalité que la procédure des instructions était achevée. J’ai compris que pratiquement, il ne restait plus rien à faire au titre de l’instruction du dossier, l’ordonnance de renvoi ayant été rendue, les voies de recours qui auraient dû être exercées, sont toutes épuisées. J’étais curieux de savoir pourquoi jusqu’à mon arrivée, ce procès n’était pas organisé et bien sûr sans avoir la prétention de remettre en cause les actes posés par mes prédécesseurs. En raison de la continuité de l’Etat, j’ai quand même décidé de marquer certaines ruptures sur beaucoup de points.
Lesquels ?
Premièrement, la construction d’un tribunal ad hoc posée comme condition préalable pour la tenue et l’organisation du procès. Puisqu’à l’image de l’Etat du Sénégal chargé d’organiser le procès du président Hissen Habré, les autorités guinéennes s’étaient inspirées des conditions d’organisation de ce procès en mettant en place un comité ad hoc chargé d’examiner et de gérer toutes les questions liées à l’organisation de ce procès. Ayant donc compris avec l’ordonnance de renvoi qui était rendu dans ce dossier qu’il ne restait plus rien à faire, j’ai pris la décision de prendre nos responsabilités et de quitter le cadre des interférences du département dans les procédures éventuelles de jugement. Et j’ai dit aux associations des victimes, au collectif d’avocats, aux représentants des Nations Unies, un expert basé à Nouakchott, Me Baal qui est avocat de profession, ancien président de la Cour Suprême, ancien Garde des Sceaux de la République de Mauritanie, que j’étais décidé à prendre mes responsabilités en allant tout droit à l’organisation de ce procès et que les partenaires de la Guinée pouvaient nous prêter main forte si c’était nécessaire en terme d’organisation, de conditions matérielles du procès et que la Cour d’Appel de Conakry sécurisée et même réaménagée pouvait nous permettre d’ouvrir ce procès-là et faire comparaitre les personnes poursuivies et déjà mettre les juges devant leur responsabilité. Parce qu’en réalité, on a trop dramatisé ces évènements et la dramatisation a donné l’impression que la justice guinéenne n’était pas en mesure de tenir ce procès. Ce qui était d’une fausse impression au point qu’à un moment donné, il y avait une terrible pression de la Cour pénale internationale qui a déclaré : «depuis 2009, vous ne faites rien et nous, si rien n’est obtenu en terme de justice, nous allons nous saisir de cette affaire». Beaucoup de missions conduites par des experts de la Cedeao ont eu lieu en territoire guinéen avec des échanges multiples sur ce dossier. Je dis qu’en raison du principe de subsidiarité (un principe selon lequel une autorité centrale ne peut effectuer que les tâches qui ne peuvent pas être réalisées à l’échelon inférieur, Ndlr), qui fait que la compétence de la CPI serait synonyme d’un abandon de souveraineté pour l’Etat de Guinée de ne pas pouvoir organiser et faire juger ces évènements. Et pratiquement, un mois avant la tenue de l’élection présidentielle, j’étais décidé à demander au tribunal compétent de proposer une date d’ouverture de ce procès. Mais, il faut noter qu’il n’appartient pas au ministère de la Justice, à la Chancellerie, à un Garde des Sceaux de fixer la date d’ouverture d’un procès quelconque. Cette question relève de la compétence des juges Des propositions d’ouverture de date avaient été faites et en raison quelque peu de la sensibilité de ce dossier, pour des raisons sécuritaires, nous avions estimé que l’ouverture ne pouvait pas aller dans un contexte d’élection présidentielle. Donc, voilà pratiquement là où nous en sommes. Je vous donne ma ferme assurance que dès après la proclamation des résultats définitifs de l’élection du Président de la République, nous allons reprendre les choses pour que très rapidement, nous puissions montrer à la face du monde que nous sommes déterminés à faire la lumière sur ces évènements. Parce qu’en réalité, on n’organise pas un procès pour trouver forcément des coupables. On organise un procès pour qu’à la suite d’un débat contradictoire, des responsabilités sur des faits précis soient déterminées. Des sanctions si bien sûr des responsabilités ont été situées, soient prononcées et que des réparations soient accordées.
Est-ce vous pouvez nous donner un échéancier, un deadline pour la tenue de ce procès ?
Si vous vous placez dans le contexte de la date de commission des infractions poursuivies, vous aurez l’impression que nous trainons les pas. Mais si vous tenez compte des particularités liées aux procédures judiciaires, vous comprendrez notre position. Voilà des faits au regard de la loi guinéenne constitutive de faits criminels et quand il s’agit des infractions érigées au rang des crimes, la procédure est complexe. D’abord, les enquêtes préliminaires ont dû prendre du temps mais surtout la procédure devant les cabinets d’instruction. Mais en réalité et comme je l’ai toujours dit, je crains que je ne fasse une ingérence dans la compétence des juges en vous disant voilà tel jour, ce procès se tiendra. Le rôle de l’Etat, parce que je représente le pouvoir exécutif, est de créer les conditions sécuritaires, matérielles d’organisation du procès. Mais il est de notre devoir d’interpeller le parquet du tribunal et je vous le disais que cela était déjà fait avant l’ouverture de la campagne de l’élection du Président de la République et je viens de vous dire que dès après la proclamation des résultats définitifs, cette démarche va se relancer pour que les juges nous fassent des propositions de date immédiate. J’ai eu des échanges avec des avocats qui m’ont dit : «Monsieur le ministre, si ce procès se tenait demain, vous nous verrez aux audiences avec nos moyens». J’ai reçu les avocats des associations de victimes qui m’ont tenu le même langage. J’ai dit au procureur, il ne reste plus qu’au juge de prendre les responsabilités et de prendre le taureau par les cornes.
Pourtant, on entend aussi parler de la construction d’un tribunal pour la tenue du procès. Qu’en est-il ?
Je ne lie pas forcément l’ouverture de ce procès à la construction d’un bâtiment. Je suis clair là-dessus. Nous avons la salle d’audience de la Cour d’appel de Conakry qui, sécurisée, réaménagée, peut valablement nous permettre d’organiser le procès.
Quel est le nombre de personnes qui sont poursuivies dans le cadre de cette affaire et quels sont les délits retenus contre elles ?
Pour la plupart, ce sont des cas de viol, de meurtre, des coups et blessures volontaires ayant entrainé la mort. En réalité, une kyrielle d’inculpations et bien sûr des personnes poursuivies dans le cadre de cette affaire en partie ont bénéficié des ordonnances de non lieu partielles, sauf erreur de ma part à vérifier dans les documents, je crois savoir qu’à date, au moins 15 personnes sont renvoyées devant la formation du jugement.
Revenons sur la présidentielle du 18 octobre dernier. Beaucoup de vos compatriotes, établis notamment au Sénégal et dans la diaspora, ont dénoncé le fait de n’avoir pas pu s’acquitter de leur devoir civique. Qu’est-ce qui explique ce dysfonctionnement ?
Je n’appellerais pas cela dysfonctionnement encore moins inégalité. Je crois que la Commission électorale nationale indépendante était bien placée pour nous expliquer les situations de ce genre. Mais, en réalité, le principe voudrait pour une élection que tous les Guinéens soient investis, de pouvoir s’exprimer. C’est ça le principe. Mais, si pour des raisons quelconques qui ne peuvent être expliquées que par la Ceni. Il est établi que par endroit, certains compatriotes n’ont pas pu prendre part à l’élection du Président de la République. Mais, je crois qu’à l’avenir si les conditions le permettaient, il serait beaucoup préférable de faire en sorte que les circonscriptions électorales soient beaucoup plus élargies. Mais, en réalité, et à part des contraintes certainement liées au travail de la Ceni, je ne vois derrière tout cela aucune volonté de discriminer qui que ce soit. Il n’y a aucune intention préalable d’écarter qui que ce soit parce que la communauté guinéenne vivant au Sénégal est composée de toutes les ethnies de la République de Guinée, de toutes les obédiences politiques, a priori. Il est difficile de savoir si quelqu’un s’appelle au Sénégal Doumbouya ou Mamadou, de quelle formation politique ou pour quel candidat, cet électeur-là va voter. Et donc pas seulement au Sénégal et nous ne sommes pas parvenus malheureusement à permettre à tous les compatriotes en dehors du pays de s’exprimer par endroit et le vote a eu lieu mais tout le monde n’a pas pu s’exprimer. Et je crois que le fichier qui a été présenté avant l’élection du Président de la République et qui a été validé par les experts de la Cedeao, est consensuel nonobstant les réserves infondées de l’opposition. En réalité, l’élection a eu lieu dans un contexte totalement apaisé avec un taux de participation record (plus de 78 %, selon la cour constitutionnelle, Ndlr). Nous sommes dans l’attente des résultats définitifs qui vont être proclamés par la Cour Constitutionnelle dans les délais légaux (entretien réalisé avant la confirmation des résultats définitifs-ndlr), la Ceni ayant déjà annoncé les résultats provisoires qui accordent un suffrage record avec ce Président de la République qui passe au premier tour. En tout cas, selon les chiffres donnés par la Ceni.
par Damien Glez
LE BYE-BYE DES "SHITHOLE COUNTRIES" À DONALD TRUMP
L’issue de l’élection américaine ne changera pas la face du continent mais pour autant, l’Afrique ne se désintéresse pas du sort du fantasque Donald Trump. Avec, toutefois, une certaine ambivalence
En meeting électoral le 16 octobre dernier, Donald Trump indiquait que perdre contre le « pire candidat de tous les temps » l’humilierait au point qu’il devrait peut-être quitter les États-Unis. Des pays africains seraient-il tentés d’accueillir le président déchu ? Censément pas les « pays de merde » (shithole countries) que le chef de l’État sortant montrait d’un doigt dédaigneux en janvier 2018. Quoique…
Les Africains ne condamnaient pas les sorties « trumpiennes » de manière systématique ou unanime. Pas plus que son ton franc et viriliste, que ne réprouvent pas nombre de citoyens africains chez leurs propres dirigeants, ni même le fond de la pensée trumpienne qui, dans le cas de la saillie contre les shithole countries, avait réjoui les plus martyrisés des opposants aux régimes du continent souffrant de mauvaise gouvernance.
Saluts protocolaires
Comme de bien entendu, les chefs d’État africains saluent protocolairement l’arrivée de Joe Biden, évoquant « sa vaste expérience » (Muhammadu Buhari), la promesse « d’unité, de sécurité et de prospérité » (Nana Akufo-Addo) ou encore la perspective d’un « accord commercial donnant aux nations africaines un accès en franchise de droits aux marchés américains » (Yoweri Museveni).
Les internautes les plus satiristes évoquent, eux, le grognon « Omar Trump Bongo, qui s’accroche au pouvoir comme un authentique dictateur africain » et dont l’obstination pourrait justifier « une force d’interposition menée par l’armée de mer du Tchad, pays enclavé ».