Née au Bénin, la chorégraphe Germaine Acogny est franco-sénégalaise. La danse, chez elle, a quelque chose d’inné, un naturel façonné par un apprentissage technique qui lui donne un cachet académique. Avec à la clé de nombreux succès et distinctions. La chorégraphe forme aussi d’autres danseurs, d’ici ou d’ailleurs, la relève dirait-on.
C’est au Bénin que la danseuse et chorégraphe Germaine Acogny voit le jour, et c’est de sa grand-mère, prêtresse yoruba, qu’elle tient toute sa gestuelle. Sa technique quant à elle, la Danse africaine moderne, lui viendra, en toute cohérence, de son apprentissage de la danse traditionnelle, et de la danse occidentale. Pendant trois années, de 1962 à 1965, la voilà d’abord pensionnaire de l’Ecole Simon Siegel, dont elle sort diplômée d’éducation physique et sportive, et de gymnastique harmonique. Trois ans plus tard, elle met sur pied son propre studio consacré à la danse africaine.
On la retrouvera ensuite comme Directrice artistique de Mudra Afrique, l’école de danse fondée par Maurice Béjart et Léopold Sédar Senghor. Cet épisode de sa vie durera cinq ans : de 1977 à 1982. Entre-temps, Mudra ferme les portes. Germaine Acogny s’installe alors à Bruxelles en Belgique, avec la Compagnie de Maurice Béjart, et les stages internationaux de danse africaine qu’elle organise à ce moment-là, sont très populaires. Surtout auprès du public européen. Une expérience qu’elle étendra à d’autres zones géographiques : la Casamance par exemple, et le village de Fanghoumé où viennent des danseurs européens ou d’ailleurs, professionnels ou amateurs. Germaine Acogny devient une icône de la danse africaine.
Puis elle s’éclipse de la scène, mais de façon provisoire…Son come-back en 1987, est un succès. Une collaboration avec Peter Gabriel, un premier solo (Sahel), puis un deuxième en 1988 intitulé «Ye’ou» qui se distinguera en 1991. Le « London Contemporary Dance and Performance Award » est dans la poche.
Quatre ans plus tard, Germaine Acogny rentre au Sénégal où elle se lance dans un autre projet. Celui de créer un Centre International de Danses Traditionnelles et Contemporaines d’Afrique. La construction de L’Ecole des Sables, comme on l’appelle aussi, s’achève en 2004. On y apprend la chorégraphie, comme on y enseigne le vivre-ensemble et le respect de l’autre. Au début des années 2000, sa collaboration avec la japonaise Kota Yamakazi donne naissance à « Fagaala », une production sur le génocide au Rwanda qui lui devra une autre récompense.
Au Sénégal, la chorégraphe Germaine Acogny est « Chevalier de l’Ordre National du Lion », «Officier des Arts et des Lettres». Depuis 2009, elle est aussi« Commandeur des Arts et des Lettres » de la République française, son autre patrie. Et idem au Sénégal, depuis 2012.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, SALIOU GUÈYE
JE NE SUIS PAS CHARLIE
Charb et ses acolytes n’étaient pas exempts de reproche dans leur façon de jouir de leur liberté d’expression ; ils transgressaient certaines limites et offusquaient impunément la communauté musulmane
La France, voire l’Europe, vit aujourd’hui un drame collectif et une tragédie d'une ampleur démesurée. Son peuple n’en finit pas d’être traumatisé par l’assassinat sordide du gratin de la rédaction du journal satirique français Charlie Hebdo dont le directeur de la rédaction et dessinateur, Charb, le directeur artistique et dessinateur, Cabu, les dessinateurs Tignous et Wolinsky et le journaliste antilibéral Bernard Maris et par l’exécution froide de quatre juifs dans une épicerie casher.
Ceux qui ont perpétré ces tueries prétendent avoir agi au nom du prophète Mahomet (PSL), tourné systématiquement en dérision par Charlie Hebdo. Après presque deux jours de traque, les frères Kouachi et Amedi Coulibaly ont été abattus les armes à la main par les éléments du Raid (Recherche, assistance, intervention, dissuasion) et du Gign (Groupe d'intervention de la Gendarmerie nationale).
Les messages de soutien pour compatir à la douleur des Français venant du monde entier n’ont cessé d’affluer vers l’Elysée. Et le point d’orgue a été le rassemblement des centaines de milliers de Français et de plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement ce 11 janvier à la place de République à Paris dans le but de faire un front uni contre le terrorisme et de défendre la liberté d’expression.
Avant de balayer devant la porte de l’Elysée…
Ainsi tout le monde était Charlie même si parmi ces personnalités étatiques, il y en a qui continuent de mettre des journalistes ou des opposants en prison dont le seul tort est de ne pas partager leurs schémas de pensée.
Mais avant d’aller balayer devant la porte de l’Élysée, certains de ces personnalités très controversées en l’occurrence le Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, le président de la République gabonaise, Ali Bongo, le président béninois, Yayi Boni, le roi et la reine de Jordanie Abdallah II et Rania, le chef du gouvernement hongrois, Viktor Orban, le ministre des Affaires étrangères égyptien, Sameh Choukryou, encore Naftali Bennett, ministre de l'Economie israélien, doivent regarder les siennes.
Ces derniers feraient mieux de s’auto-appliquer chez eux les principes et valeurs qu’ils sont allés défendre à Marianne. Yayi Boni n’a-t-il pas interdit de parution le journal "Le Béninois libéré", moins virulent que Charlie Hebdo ? Même ses directeurs, Aboubacar Takou et Eric Tchiakpè, se sont par ailleurs vu interdire, jusqu’à nouvel ordre, l’exercice de la profession de journaliste ainsi que la création d’un organe de presse au Bénin. Leur crime de lèse-majesté, c’est d’avoir distillé des écrits incendiaires, des propos discourtois qui visent à détruire la République et mettre à mal les relations entre le Bénin et les pays membres du Conseil de l’Entente (organisation de coopération sous-régionale regroupant le Bénin, Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Niger et le Togo).
En décembre 2011, le journal avait, en effet, tourné en dérision la réunion à Cotonou des chefs d’Etat de l’organisation régionale dans un article intitulé "Conseil de l’Entente : Du vent !" en disant que "Cotonou a servi de cadre à un club d’amis mal élus qui se sont retrouvés pour se féliciter chacun pour sa brillante élection".
Ali Bongo-Ondimba, qui condamne larme à l’œil la mise en charpie de Charlie, est le premier fossoyeur de la liberté d'expression et de la presse au Gabon. Alors que la liberté de la presse gabonaise est menacée, la liberté des opinions interdite, les opposants sont bâillonnés par une confiscation des médias d'Etat. Les journalistes Jonas Moulenda, directeur de publication des journaux hebdomadaires Echos du nord et Faits divers et Désiré Ename, le directeur de la rédaction, sont pourchassés et contraints à l’exil forcé en France, pendant que Francis Edou Eyene, ancien présentateur des journaux à la radio panafricaine Africa n°1, croupit en prison.
En Hongrie, le Président Viktor Orban a fait voter en 2010, une loi restrictive sur les médias qui donne au gouvernement un contrôle étendu sur l'information. En Turquie, le président Recep Tayyip Erdogan s'est récemment illustré par une kyrielle d’arrestations contre les médias opposants.
La Jordanie a bâti sa réputation dans l’arrestation des journalistes jugés dissidents. La censure est devenue la règle en Russie. En Egypte, Mohamed Fadel Fahmy, Peter Greste et Baher Mohamed, trois journalistes de la chaîne qatarie Al-Jazira, accusés de soutien aux frères musulmans ont été condamnés en juin 2014 à des peines carcérales allant de sept à dix ans. Et le mieux placé de ces pays susnommés au classement mondial de la liberté de la presse publié par Reporters Sans Frontières occupe la 148e place sur 180.
Ce serait un truisme de dire que l’Etat hébreu fait de l’extermination quotidienne du peuple palestinien son jeu favori. D’ailleurs dans la délégation israélienne, il y a annoncée dans le cortège le sanguinaire ministre de l'Economie, Naftali Bennett, par ailleurs chef du parti de la droite sioniste religieuse "Foyer juif", qui avait défrayé la chronique en 2013 en déclarant : "j’ai déclaré beaucoup d’Arabe dans ma vie. Et il n’y a aucun problème avec ça".
Oui, c’est cela la logique de l’Occident, quand on zigouille quatre juifs, c’est l’émoi total, c’est un deuil national mais quand on écrabouille des milliers de palestiniens, c’est normal puisque leur vie ne vaut pas plus qu’une roupie de sansonnet. Quand on raille les juifs, les politiques français avec leurs suppôts juifs, terroristes de la plume, se déchainent. L’humoriste Dieudonné, lui qui a été interdit de spectacle jugé antisémite par le ministre de l’Intérieur de l’époque Manuel Valls et appuyé ses amis du Conseil constitutionnel, en sait quelque chose. Quand leurs synagogues ou leurs nécropoles sont profanés, toute la République s’indigne ou se rend sur lesdits lieux.
Mais si c’est une mosquée qui est attaquée ou des musulmanes qui sont dévoilées dans la rue, un simple communiqué condamnatoire est largement suffisant. Et ce traitement à géométrie variable des citoyens d’un même pays avec leurs différences culturelles et religieuses qui fait le lit des frustrations et des amertumes mortifères.
Il ne manquait à ce rendez-vous universel historique que les leaders coréen, Kim Jong-un, érythréen, Issayas Afewerki, gambien, Yaya Jammeh, syrien, Bachar El Assad, et les monarques arabes pour compléter cette belle brochette personnalités réunies pour sauver la liberté d’expression menacée par les terroristes djihadistes.
Je ne serai pas Charlie…
C’est ici le lieu d’affirmer sans circonlocution hypocrite que je ne suis pas Charlie si être Charlie, c’est verser dans la provocation ou la saillie des croyances religieuses. Charb et ses acolytes n’étaient pas exempts de reproche dans leur façon de jouir de leur liberté d’expression ; ils transgressaient certes certaines limites et offusquaient impunément la communauté musulmane.
La liberté d’expression ne va pas jusqu’à insulter le prophète d’Allah auquel croient des centaines de millions d’individus éparpillés dans tous les continents.
Contrairement aux médias français, certains journaux américains comme le Wall Street Journal ou encore le New York Times ont censuré les dessins de Charlie Hebdo parce que leurs règles éthiques leur interdisent de publier des images destinées à heurter les sensibilités religieuses. Même le Jyllands Posten, quotidien danois à l’origine des caricatures de Mahomet, n’a pas repris les dessins de Charlie Hebdo. Alors que l’hebdomadaire français n’avait pas hésité à reproduire, en 2005, celles qui avaient provoqué les menaces d’Al Qaeda à l’encontre du journal danois et qui avaient aussi valu un "wanted dead or alive" à Charb.
Beaucoup de personnalités politiques et intellectuelles françaises qui pleurent Charlie aujourd’hui l’avaient chapitré en 2005 pour les mêmes raisons. Eh oui, les morts n’ont jamais tort.
L’Islam, fonds de commerce de Charlie
Et pourtant les agnostiques de Charlie jouissant de leur liberté d’expression n’ont jamais tenu compte de la liberté de croyance des autres. Déficitaires et près de la faillite, ils ont fait de l’insulte au prophète Mahomet un fonds de commerce, puisque leurs numéros titrant railleusement sur Mahomet sont tirés à plus de 400 mille exemplaires pour un journal qui ne parvenait plus à vendre 30 mille dans un pays de 55 millions d’habitants.
En effet, dans son numéro du 8 février 2006, Charlie Hebdo publie effectivement la série des douze caricatures danoises. En 2011, le journal satirique impudent et imprudent réactive son dada en annonçant un numéro spécial intitulé "Charia Hebdo", dont le prophète de l’Islam, rédacteur en chef invité, est cette fois représenté avec morgue en couverture. La coupe était pleine pour que les locaux de Charlie Hebdo soient incendiés par ceux qui se sentent offensés par cette provocation enrobée dans la camisole de la liberté d’expression.
Le 19 septembre 2012, le numéro de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo va faire parler de lui en faisant sa "une" sur les violences liées au film islamophobe (Innocence of muslims) et publiant de nouvelles caricatures du prophète Mahomet.
C’est ainsi que le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, s’était prononcé dans une interview sur la publication de caricatures de Mahomet dans Charlie Hebdo en déclarant que "la liberté signifiait aussi la responsabilité". Il ajoutait que "parfois la question n'est pas de savoir si on a le droit de faire quelque chose, mais de savoir si on doit le faire. La liberté d'opinion ne signifie pas le droit d'insulter ceux qui ont une autre religion ou une autre opinion et de troubler ainsi sciemment la paix publique".
L’humoriste Guy Bedos interrogé à l’époque par la radio Var-Matin sur Charlie Hebdo avait sèchement déclaré : "Charlie Hebdo, ce n’est pas mes copains. Qu'ils crèvent ! Ils ont pris des risques sur la peau des autres."
Dans le même sillage, l'ancien Premier ministre UMP, Alain Juppé, a jugé "irresponsable" la publication de caricatures de Mahomet dans Charlie Hebdo. Et 47% des Français jugeaient que "la publication risquait de provoquer de nouvelles tensions dans le contexte d’alors et n'aurait pas dû avoir lieu".
Et après l’assassinat des journalistes de Charlie, le rédacteur en chef du journal économique britannique, Financial Times, Tony Barber, a écrit que la ligne éditoriale du journal satirique français, était stupide et irresponsable avant d’être poussé par sa rédaction à édulcorer ses propos compte tenu du contexte d’horreur que vit la France.
Cette flopée de critiques qui abhorraient naguère et à juste raison les journalistes de Charlie Hebdo se noie aujourd’hui dans le concert de lamentations qui les sacralise. Voilà comment fonctionnent et infléchissent hypocritement les principes de ceux-là qui prétendent donner des leçons de liberté à la communauté des croyants. Mais en jouant avec la liberté de culte des musulmans, chrétiens ou juifs, ils ont hypothéqué leur vie.
Il faut noter que la violence d’essence religieuse n’est pas seulement l’œuvre des islamistes. Quand "The last temptation of Christ", film américain, réalisé par Martin Scorsese, sorti sur les écrans en 1988 en France, terre de la liberté d’expression, un groupe fondamentaliste catholique incendia une salle du cinéma à Paris, Espace Saint-Michel, pour protester contre la projection du film blasphématoire. Cet attentat avait fait quatorze blessés dont quatre sévères. D'autres incendies seront perpétrés à la salle du Gaumont Opéra ainsi qu'à Besançon. Un autre attentat du même groupe avait causé le décès d'un spectateur. C’est donc dire que la liberté d’expression des uns au risque de générer une violence mortifère ne doit pas empiéter sur la liberté de croyance des autres.
Aussi tout journaliste se doit-il de méditer ces propos de l’historien latin Salluste qui sonne comme un aphorisme : "Vouloir s’imposer à ses concitoyens par la violence physique ou psychologique, c’est violer odieusement leur liberté en mettant en péril la sienne". Malheureusement Charb et ses compagnons ne l’ont jamais compris jusqu’à passer de vie à trépas.
Prends le pouvoir et joue avec les règles. Le terrorisme ne gagnera jamais. L’histoire est là pour le prouver. Et la belle image du martyr marche dans les deux sens
En réaction aux tueries de Paris, le réalisateur français Luc Besson ("Le Grand Bleu", "Nikita", "Lucy"...) a choisi de s’adresser aux musulmans. À travers une lettre que SenePlus vous propose in extenso.
Mon Frère,
Mon frère, si tu savais combien j’ai mal pour toi aujourd’hui, toi et ta belle religion ainsi souillée, humiliée, montrée du doigt. Oubliés ta force, ton énergie, ton humour, ton cœur, ta fraternité. C’est injuste et l’on va ensemble réparer cette injustice. On est des millions à t’aimer et on va tous t’aider. Commençons par le commencement. Quelle est la société que l’on te propose ?
Basée sur l’argent, le profit, la ségrégation, le racisme. Dans certaines banlieues, le chômage des moins de 25 ans atteint 50%. On t’écarte pour ta couleur ou ton prénom. On te contrôle dix fois par jour, on t’entasse dans des barres d’immeubles et personne ne te représente. Qui peut vivre et s’épanouir dans de telles conditions ? Attachez un enfant ou un animal, sans nourriture et sans affection pendant des mois, il finira par tuer n’importe qui.
On fait passer le profit avant toute chose. On coupe et vend le bois du pommier et après on s’étonne de ne plus avoir de fruit. Le vrai problème est là, et c’est à nous tous de le résoudre.
J’en appelle aux puissants, aux grands patrons, à tous les dirigeants. Aidez cette jeunesse, humiliée, atrophiée qui ne demande qu’à faire partie de la société. L’économie est au service de l’homme et non pas l’inverse. Faire du bien est le plus beau des profits. Chers puissants, vous avez des enfants ? Vous les aimez ? Que voulez-vous leur laisser ? Du pognon ? Pourquoi pas un monde plus juste ? C’est ce qui rendrait vos enfants les plus fiers de vous.
On ne peut pas construire son bonheur sur le malheur des autres. Ce n’est ni chrétien, ni juif, ni musulman. C’est juste égoïste, et ça entraîne notre société et notre planète droit dans le mur. Voilà le travail que nous avons à faire dès aujourd’hui pour honorer nos morts.
Et toi mon frère, tu as aussi du boulot. Comment changer cette société qu’on te propose ? En bossant, en étudiant, en prenant un crayon plutôt qu’une kalach’. La démocratie a ça de bien qu’elle t’offre des outils nobles pour te défendre. Prends ton destin en main, prends le pouvoir.
Ça coûte 250 euros pour t’acheter une kalachnikov mais c’est à peine 3 euros pour t’acheter un stylo, et ta réponse peut avoir mille fois plus d’impact.
Prends le pouvoir et joue avec les règles. Prends le pouvoir démocratiquement, aide tous tes frères. Le terrorisme ne gagnera jamais. L’histoire est là pour le prouver. Et la belle image du martyr marche dans les deux sens. Aujourd’hui il y a mille Cabu et mille Wolinski qui viennent de naître. Prends le pouvoir, et ne laisse personne prendre le pouvoir sur toi. Sache que ces deux frères sanglants d’aujourd’hui ne sont pas les tiens, et nous le savons tous.
Ce n’étaient tout au plus que deux faibles d’esprit, abandonnés par la société puis abusés par un prédicateur qui leur a vendu l’éternité… Les prédicateurs radicaux qui font leur business et jouent de ton malheur n’ont aucune bonne intention. Ils se servent de ta religion à leur seul avantage. C’est leur business, leur petite entreprise. Demain, mon frère, nous serons plus forts, plus liés, plus solidaires. Je te le promets.
Mais aujourd’hui, mon frère, je pleure avec toi.
PAR NIOXOR TINE
AUCUNE ENVIE DE RIRE !
Les caricatures sur les religions, banales dans des pays aux traditions anticléricales, peuvent être ressenties de manière exacerbée par des musulmans traumatisés par le matraquage médiatique ourdi par des officines impérialistes
Il n’est tout simplement pas possible de cautionner ces actes barbares ciblant des défenseurs de la liberté de penser dans un pays aux vieilles traditions révolutionnaires, laïques voire anticléricales. Aucune idéologie ne peut justifier le lâche assassinat de citoyens désarmés, sans défense, quelles que puissent être leurs opinions, croyances et certitudes.
Ironie du sort, beaucoup parmi les victimes étaient de célèbres militants de causes progressistes, dont l’opposition farouche à la montée inquiétante des thèses du Front National et le soutien aux luttes de libération des peuples arabes.
C’est vrai que ces terroristes sans vergogne ne peuvent avoir agi en notre nom ! NOT IN OUR NAME !
Reconnaissons cependant qu’il est difficile de comprendre l'indignation sélective des dirigeants de certaines puissances occidentales, qui n’hésitent pas à bombarder d’innocents citoyens en Irak, en Afghanistan, au Pakistan, pour ensuite les qualifier pudiquement de “victimes collatérales”.
Ne portent-ils pas, ces pays occidentaux, avides de pétrole, la lourde responsabilité de stigmatiser la civilisation arabo-islamique, grossièrement caricaturée comme étant violente et terroriste ?
De ce point de vue, on peut considérer qu'ils portent une certaine part de culpabilité dans la genèse de ces mouvements terroristes, qu’ils n’hésitent pas à infiltrer, pour les manipuler à leur guise.
A cet égard, les récentes percées diplomatiques de l’Etat palestinien causent bien du souci aux lobbies sionistes et au complexe militaro-industriel états-unien.
Pour en revenir au massacre des journalistes de Charlie-Hebdo, il s’agit d’amener les opinions publiques des pays occidentaux à comprendre que les caricatures de journaux satiriques sur les religions, banales dans des pays aux solides traditions anticléricales, peuvent être ressenties de manière exacerbée par des citoyens musulmans traumatisés par le matraquage médiatique ourdi par des officines impérialistes, agrémenté par l’allègre pilonnage de modestes demeures arabes.
Et ce d’autant que le moindre incident concernant la communauté juive est montée en épingle et considérée comme la poursuite de la persécution, que le fascisme hitlérien lui a fait subir dans le passé, avec la complicité flagrante de certains secteurs des bourgeoisies occidentales.
Ce sont les descendants de ces élites occidentales, qui avaient des accointances avérées avec le régime anti-juif du troisième Reich, devenus des leaders autoproclamés d’un monde dit libre, qui détournent leurs regards quand Tsahal (armée israélienne) bombarde les maisons et les écoles à Gaza.
On peut dès lors se demander, si le terrorisme d’Etat israélien est plus tolérable que les crimes de jeunes militants ultranationalistes arabes.
Il n’est certes pas question de justifier des dérives terroristes de prétendus militants de la cause arabo-islamique, désorientés et désespérés, rencontrant des difficultés d’intégration dans leurs pays d’accueil et devenant ainsi des proies faciles pour des prédicateurs machiavéliques. Cela devrait plutôt les inciter à engager le combat pour la reconnaissance de tous leurs droits, mais ne devrait pas les conduire à assassiner froidement des journalistes, symboles de la liberté de penser et qui seraient morts non pas seulement pour de simples dessins, mais du fait des sombres desseins de lobbies impérialistes et sionistes !
Mais nul doute que les croisés occidentaux de la liberté d’opinion gagneraient en crédibilité s’ils dénonçaient la duplicité de leurs gouvernements complices de dictatures sanglantes et prétendument défenseurs des droits de l’Homme, partout où leurs intérêts économiques immédiats ne sont pas en jeu !
MACKY À LA MARCHE DE PARIS
Le chef de l’État quitte Dakar cette nuit pour prendre part à la manifestation organisée ce dimanche en réaction aux attaques survenues sur le territoire français entre mercredi et vendredi
Macky Sall quitte Dakar cette nuit pour Paris. Il prendra part à la marche qui y est prévue ce dimanche en réaction aux attaques survenues sur le sol français entre mercredi et vendredi. Il sera aux côtés de grands dirigeants de ce monde, qui ont décidé d’apporter leur soutien à la France.
Le Sénégal, à l’instar de la quasi-totalité des pays de la planète, est aux côtés de la France qui, entre mercredi et vendredi, a subi une série d’attaques terroristes qui a fait 20 morts dont les trois terroristes responsables présumés des tueries. Ce soutien sera matérialisé avec la participation du chef de l’État à la marche prévue ce dimanche à Paris en réaction aux attentats perpétrés sur le sol français.
À en croire un de ses proches, contacté par SenePlus, "Macky Sall quittera Dakar cette nuit, à une heure du matin, pour Paris. Il prendra part à la marche organisée par le gouvernement français". La même source d'indiquer que "ce déplacement du président de la République est une façon d’apporter le soutien du peuple sénégalais au peuple français, ami, et de condamner le terrorisme sous toutes ses formes".
Ce court séjour en France de Macky Sall, "qui rentre au Sénégal le même jour (dimanche)", entre en droite ligne de deux actes qu’il a posés suite à l’attaque du siège de Charlie Hebdo, mercredi dernier. D’abord, le même jour en conseil des ministres, le chef de l’État a "fermement condamné" l’attentat qui a fait 12 morts. Ensuite, hier, il s’est rendu à l’ambassade de France pour signer le livre des condoléances ouvert en hommage aux victimes des attaques.
Macky Sall ne sera pas le seul dirigeant étranger aux côtés du Président français. RFI annonce la participation de chefs d'État africains comme Ibrahima Boubacar Keïta (Mali), Mahamadou Issouffou (Niger), Yayi Boni (Bénin). La Chancelière allemande, Angela Merkel ainsi que les Premiers ministres britannique, italien et espagnol, David Cameron, Matteo Renzi et Mariano Rajoy, ont également promis d’effectuer le déplacement.
La manifestation devrait donc réunir de nombreux dirigeants politiques d’horizons divers, mais aussi des responsables syndicaux et religieux du monde entier. Elle se veut une réaction contre l’extrémisme et les atteintes à la liberté d’expression. Des fléaux symbolisés par la vague d’attentats qui a secoué la France entre mercredi et vendredi. Laquelle a décapité le journal Charlie Hebdo, coûté la vie à une policière municipale et quatre otages.
Les auteurs présumés de cette barbarie, trois jeunes français d’origines maghrébine et africaine, ont été tués lors des assauts du GIGN. Leurs actes ont déclenché un élan de sympathie qui se résume en trois mots, "Je suis Charlie", repris dans toutes les langues et sur toute la planète depuis mercredi dernier.
En mode décontracté, couché sur le dos, sur la moquette de son salon, les yeux rivés sur le petit écran, Carlou D, de son vrai nom Ibrahima Loucard, nous accueille chez lui, à la Cité Assemblée de Ouakam. Dans cet entretien accordé à Grand-Place, le bay fallde la musique sénégalaise se souvient de ses premiers pas dans la danse, de sa première femme, ses fans, ses relations. Carlou-D à coeur ouvert!
Grand-Place: Qui est Carlou-D?
Carlou D: Je m’appelle Ibrahima Loucard alias Carlou-D. Je suis artiste, auteur et compositeur. Je suis sénégalais et je suis né le 16 décembre 1979 à Dakar. Je suis Saloum-Saloum de père et ma mère était une petite fille de Lat Dior Ngoné Latyr Diop. J’ai arrêté les études en classe de 4e secondaire pour prendre mon destin en main, car j’avais l’obligation de gagner ma vie. Donc, il fallait que je quitte les bancs. J’ai vécu une enfance difficile au début, avec des moments de bonheur, parsemés d’embûches parfois. C’était une belle histoire aussi comme tout le monde. J’étais bien élevé comme tout enfant. Mon père était quelqu’un de très strict et je dirai que c’est franchement une chance. J’en parlais d’ailleurs avec lui, il n’y a pas longtemps. Cette histoire m’a ouvert beaucoup de portes et ça m’a toujours encouragé plutôt à me prendre déjà en charge et de ne jamais dépendre de quelqu’un, de me battre et d’essayer de m’en sortir seul. Je n’ai pas regretté.
Quelle a été votre vie avant la sortie de ton premier album?
Tout a été naturel chez moi. En fait, la danse fait partie de ma vie. Elle est juste l’expression du corps. J’ai commencé par la dance avec mes amis avec qui j’ai grandi. Cela s’est passé naturellement. J’ai vu mes aînés répéter chaque jour et ça m’a plus. Et j’ai intégré le groupe «Navajo NBA». Les membres m’ont accueilli à bras ouverts. Navajo était aussi une famille. J’ai beaucoup appris là-bas. Nous sommes toujours en contact. Il est vrai qu’on n’est plus ensemble en tant que danseurs, mais on est des frères maintenant. Nous avons chacun une famille et des responsabilités. C’est ce qui fait que nous ne pouvons plus nous voir comme quand nous étions célibataires avec zéro responsabilité.
Comment êtes-vous entré dans la musique?
C’est comme la danse. Il est arrivé à un moment où je voulais composer mon propre rythme et m’exprimer là-dessus. Il a fallu que j’apprenne un instrument. J’ai toujours adoré la guitare et depuis lors je n’arrête pas de gratter. J’ai sorti 5 albums dont 4 au Sénégal et 1 au niveau international. Le dernier est «Audiovisa». C’est sorti, il y a juste un an.
Pourquoi avez-vous quitté le Positive black soul (Pbs) Radikal ?
Non, je n’ai pas quitté le Pbs Radikal. On était arrivé à un moment que j’appelle le choc des ambitions. Chacun devait faire son chemin. J’ai intégré le groupe avec l’idée d’un travail de groupe. A un moment, Didier (Awadi) a voulu faire son chemin et je n’allais pas rester là-bas à attendre qu’il nous revienne. C’est pourquoi je suis parti pour faire le mien aussi.
Dans le groupe, on vous a toujours prêté une ressemblance avec Duggy-Tee…
Oui ! J’en ai souffert.
Comment avez-vous vécu cela ?
Naturellement. Mais, comme on dit, le chien aboie la caravane passe.
Etiez-vous recruté pour le remplacer ?
Ce n’était pas pour prendre la place de Duggy Tee. La ressemblance, ce n’était que physique, mais pas sur le plan musical. Je n’ai jamais chanté comme lui. On n’a pas le même timbre vocal, ni le même style de chant. Duggy, c’est Duggy et Carlou, c’est Carlou. Et jusqu’à présent, on m’appelle parfois Duggy-Tee et comme lui on l’appelle Carlou-D. Finalement, c’est devenu ironique. Des fois, quand on se croise, il me dit: «Carlou-J» et moi, je lui dis «Duggy-J».
Vous avez quitté le groupe Skablue et celui du Pbs Radikal. Estce que vous êtes digne de confiance?
On parle de confiance dans la musique ! J’aimerais bien comprendre cela !
Donc, il n’y a pas de confiance dans votre milieu ?
Quand on dit confiance, c’est entre des personnes. Dans la musique, il y a juste le talent. On fait, on ne peut pas, on se calme.
Mais qu’est-ce qui s’est réellement passé avec tes compagnons (Ass Malick et Seydimandoza) de Ska-blue ?
A Ska blue, on était parti pour faire une compilation. On n’avait pas l’argent pour produire l’album et on a décidé de former le groupe, tellement on chantait bien. A chaque fois qu’on chantait, on se complétait. C’est parti comme ça. On a fait pas mal de dates et un single que les gens aimaient beaucoup et qui s’intitulait Fire burn. Et j’ai été le premier à sortir du groupe, parce qu’on m’avait proposé d’intégrer le groupe Positive Black Soul (Pbs). Du coup, je n’ai pas hésité. Ass Malick est maintenant parti, de même que Seydiman. Nous sommes toujours en de bons termes.
N’est-il pas une trahison de votre part?
Ne m’ont-ils pas trahi, eux?
Vous êtes parti le premier, non?
Mais, ils ont suivi. Pourquoi Seydiman n’a pas attendu Ass Malick ou vice-versa? La musique est une histoire. Quand on est artiste, on a une mission et on la trace. On n’attend personne. C’est une histoire de talent. Aujourd’hui, regardez le public qui est derrière Carlou-D. Si j’avais décidé de rester dans Ska Blue ou Pbs.
Est-ce à dire que vous n’alliez pas avancer?
Vous avez vu. C’est une question de mission. Je suis en train de faire ma mission et l’histoire continue.
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées durant votre carrière?
Tout début est difficile, comme on dit. On commence par le manque de moyens, d’expérience. Et comme je l’ai dit dans une de mes chansons, c’est un vrai problème d’être talentueux dans ce pays. Quand on est talentueux, on est la cible à abattre. Et ça ne commence pas avec Carlou- D et ça ne doit pas finir avec lui. C’est la logique, c’est la vie et c’est normal.
Vous dérangez?
Je ne dérange personne.
Vous faites allusion à cela, non?
Non ! Et ça, c’est l’histoire de Carlou, l’éternel incompris. Quand on parle, on ne le fait pas juste pour nous faire comprendre. Moi, il y a des choses que je n’arrive pas à comprendre et j’aimerais bien les partager avec les personnes avec qui je discute souvent. C’est peut-être mon destin ou ma nature. Je n’aime pas parler simple. Cela ne sert à rien de dire ce qui existe déjà. Je veux toujours laisser mes traces en proposant autre chose. Je veux que mon histoire soit autrement comprise. Et c’est souvent difficile à comprendre.
Votre genre musical ne risque-til pas de créer un conflit dans le mouvement Hip-hop?
C’est la fameuse question qui va me suivre durant toute ma carrière musicale. Comme je l’ai dit tantôt, je n’aime pas faire ce qui existe déjà. Si ce n’était que faire du rap comme depuis 2004, je serais là à faire mieux tout le temps. Aujourd’hui, j’ai grandi musicalement. Je ne fais plus le même poids, j’ai changé. Le rap n’était pas un style pour moi. Le rap est le fait de chanter sur un rythme accéléré. C’est comme le Mbalax ou le Salsa. Les choses évoluent. Il y a des artistes parmi les artistes. Mais, ce qui est difficile c’est que, quand on est dans un groupe et qu’on essaie de faire la différence, on est la cible à abattre. Nous, on propose, donc je n’arrête pas de proposer. Au moins, j’essaie de proposer. Je ne peux rester là à ne faire que ce qui était déjà là. Ce n’est pas bien. Quoi que l’on puisse dire, raper, c’est très facile, les choses évoluent et je me dois de proposer autre chose. Je ne peux pas faire ce qui a été déjà fait. En deux semaines, je peux sortir un album rap. No problem. Cela ne va pas me déranger. Le Musikr est une philosophie. On y est déjà. C’est faire de la musique. Je donne l’exemple de Youssou Ndour et de sa génération. Avant, c’était les Salséros avec les Rockstars des années 60. C’était la musique, l’al cool, les femmes et la drogue. Mais, eux, ils sont venus avec la musique sans l’alcool et la drogue. Il y a toujours des effets négatifs et on essaye d’améliorer. Carlou-d est venu avec la Musikr, jeune. Et il veut être responsable et spirituel. C’est ça l’idée de Musikr et rien d’autre.
Pensez-vous que vos fans, qui sont de confessions différentes, puissent s’y retrouver avec les chants religieux surtout les Khassaïdes?
Je ne chante pas que des Khassaïdes (Panégyriques de la confrérie mouride de Cheikh Ahmadou Bamba). Il n’y a même pas des Khassaïdes. Si cette spiritualité dérange, il y a un problème. On peut être journaliste ou footballeur et très spirituel. Moi, j’ai choisi d’être musicien et d’être très spirituel. C’est un choix et un droit en tant qu’humain et musulman. Le catholique a le droit d’en faire pareil. Le Bayefallisme pour moi, ça dépasse la spiritualité. On peut être chrétien et être Baye Fall. Le Bayefallisme est une façon de vivre. C’est la simplicité et le droit chemin. Un homme carré. Cela n’a rien à avoir avec la spiritualité comme le Mouridisme, le Tidianisme entre autres.
Comment voyez-vous le milieu de la musique actuellement?
Ce qui se passe dans la musique sénégalaise est pareil à ce qui se passe dans le football, la lutte. Il y a des coups bas comme partout au Sénégal malheureusement, je dirai même en Afrique. Il y a un vrai manque de professionnalisme. Le milieu musical est difficile.
Avez-vous, une fois, fait l’objet d’attaques d’un collègue artiste?
Moi, je ne prête pas beaucoup d’attention à ce que font les artistes. Jamais. Mon temps ne me le permet pas. Je me réveille chaque jour à 6 heures du matin pour amener mes enfants à l’école, revenir avant d’aller prendre mon épouse à sa pause et je vais au lit à 22 heures. Je n’ai pas le temps pour ça.
Avez-vous des amis dans la musique ?
Oui, mais je ne vais pas citer de noms parce que ce n’est jamais sûr. J’ai des potes dans la musique et j’ai aussi mes amis d’enfance.
Comment faites-vous pour gérez le public qui est au Sénégal et à l’étranger?
Au Sénégal, j’ai un public qui m’est propre. Ceux qui sont ici et ceux qui sont en dehors de ce pays sont en link. Sur Facebook, ils seront bientôt 27000 personnes. Ils sont tout le temps connectés avec Carlou-D et je pense que ça c’est bien.
A travers votre style vestimentaire, avez-vous un message particulier à lancer?
Je m’habille comme tout le monde. Des fois, j’ai envie de porter des boubous traditionnels. Sur scène, je m’habille autrement, parce que j’ai des amis stylistes qui me proposent des tenues. Je suis africaniste et j’aime bien le rester. Lors de la dernière édition «Tube de l’année», je m’étais habillé comme ça, parce que c’était aussi pour être libre. Je n’aime pas que les gens me fassent des calomnies un peu ou m’imposent des choses. Je veux être libre dans tout.
Parlons du Tube de l’année. Le sacre de Boubs de Sen Kumpë a suscité beaucoup de critiques chez les rappeurs. Certains disent qu’il ne mérite pas ce titre. Quel en est votre avis?
Boubs mérite plus que cela. Il est quelqu’un de très pieux et, moi, je respecte les gens qui sont comme ça. Il est très discipliné. A chaque fois qu’il me voit, il me salue tranquillement dans le respect. C’était avec son grand frère Bourba Djolof. Que Dieu l’accueille au Paradis. Maintenant, il est là et il trace son chemin et il est bien en rap.
Comment avez-vous connu votre épouse?
Nous nous sommes connus sur le Net. Bon, c’est comme les go (Ndlr : filles). Elle avait des projets dont je ne sais plus ... Donc elle a appelé un de mes managers , Passy, à l’époque. Ce dernier m’a d o n n é son numéro De téléphone . Lorsqu’elle est venue au Sénégal, je l’ai appelée. Puis, nous nous sommes vus et depuis lors, c’est parti. Nous nous sommes mariés six mois après.
Le fait que vous soyez adulés par les femmes ne crée pas une jalousie chez elle?
C’est comme les hommes aussi, ils sont mes fans. Peut-être qu’ils agissent autrement. Mais, ils sont bien présents, franchement. Les femmes sont comme les mômes. Elles réagissent naturellement, elles ne peuvent rien cacher. Quand aux mecs, ils sont tout le temps en train de se réserver et de se contrôler parce qu’ils sont comme ça. C’est la nature.
Dans Mbeugeul, vous dites que c’est une histoire vécue. C’est avec Madame Loucard?
Tout ce que chante, c’est de l’histoire vécue. Tout est vécu ici. Pour le son Mbeuguel, c’était juste une façon pour dire à ma femme: «Ma chérie, mane mbeugeul lou thiakhane takhouma diok, mbeuguel fo takhouma diok, mbeuguel yermandé ma takha diok» (Ndlr: Je ne joue pas avec l’amour). Je veux qu’elle écoute cette chanson. Elle l’a dans son téléphone portable et elle répond avec. Mieux, elle l’écoute tout le temps. Mane vrai hindou là(Ndlr : Je suis un vrai hindou). Si j’aime, c’est vrai pour de vrai. Mais si je hais, c’est fini! Donc, avant qu’on arrive à un quelque obstacle que ce soit, je lui donne quelque chose à écouter et à méditer.
Si vous n’étiez pas musicien, qu’allez-vous devenir?
J’aurais été psychiatre o u psychologue. Je pouvais continuer les études, parce que je n’étais bête et je n’étais pas nul aussi.
C’est quoi votre instrument préféré?
La guitare. Même si je m’amuse de temps à autre avec les autres instruments. La guitare, c’est ma première femme. Personne ne m’a enseigné à manier cet outil. Je me suis débrouillé tout seul pour le maitriser.
Comment avez-vous vécu votre adolescence aux Parcelles Assainies au moment où c’était une zone de grand banditisme?
C’est vrai que les Parcelles étaient tendues à l’époque. Avant, il n’y avait pas cette ampleur dans la lutte sénégalaise. Ce qui veut dire qu’il y avait plein d’agressions et de banditisme chez nous. Moi, j’étais là-bas avec les potes sans d’occupations majeures. Mais, j’étais figé à ce qui était devant moi pour dire que j’allais m’en sortir, de même que pour ma famille. Cela m’a beaucoup motivé. Il fallait quelqu’un pour tirer tout le monde et j’ai fait de mon mieux. Mais, ces jeunes n’étaient même pas des bandits. Ils étaient un peu perdus et délaissés. Aujourd’hui, ils ont changé et sont devenus des responsables. Ils ont dû faire comme moi, comme les leaders dans tous les secteurs.
Quel est votre caractère?
Je n’aime pas les histoires. Il ne faut j’aimais m’humilier c’està- dire que je ne blesse personne, mais quand on me blesse, je peux blesser grave. On ne m’humilie pas. Ce que j’aime le plus c’est l’être humain, c’est le respect. Depuis l’âge de 10 ans, je suis parti de chez moi. Je suis allé à l’aventure. J’ai choisi d’aller dans la brousse pour apprendre, de rencontrer la nature. J’ai tout appris presque seul. Depuis 20 ans, je suis au devant de la famille. J’ai fait tout à la place de mon père. Je n’ai presque pas de vie. Et jusqu’à cet instant, je suis chef de famille pour dire que je n’ai pas une vie de jeune. On doit toujours se préparer d’être responsable et de se prendre en charge. Il ne faut pas perdre de temps. Je subvenais à mes besoins et à ceux de ma famille grâce à la musique avec les modiques sommes que je gagnais dans la banlieue. J’ai vendu de la glace pour ma maman, presque cinq ans au marché des Parcelles Assainies. Les vendeuses de poissons étaient mes clientes après ma descente de l’école à 12 heures, j’y allais. Ensuite, je me débrouillais par-ci et parlà.
Avec du recul, regretteriezvous le son Ganster?
Non. Avant de composer et de sortir ce morceau, je savais qu’on allait en arriver là. C’est loin d’être fini. Je ne regrette absolument rien, parce que tout ce que j’ai dit dans cette chanson c’est des vérités indélébiles. Cela m’a, au contraire, aidé à améliorer, changer, à tel point que mes proches, en tout cas, me comprennent. Et c’est ce qui se passe actuellement. Mon père et moi, on est devenu très proche. Il m’a appelé hier. (Ndrl : l’entretien s’est déroulé le 11 avril dernier). On est tranquille. Il était chez moi, il y a de cela quelques semaines.
Mais, les gens vous ont traité de tous les noms à cause de ce morceau?
Je le savais, mais cela n’est pas important. Ce qui est important, c’est la fin. On entend du tout au Sénégal, mais si c’est du vrai, cela ne peut avoir qu’une issue heureuse et tel est le cas.
Votre prochain opus sera-t-il spirituel encore?
La spiritualité ne va jamais me quitter. Cela n’a rien à voir avec le style de Carlou. Il faut que les gens arrêtent de dire que Carlou est baye fall à tout va. Tout le monde sait que je suis un baye fall et ça, je l’ai voulu. C’est acquis et on passe. Je ne fais pas du bayefallisme, je fais de la musique. C’est un baye fall qui fait de la musique. Il faut qu’on parle de Carlou et de sa musique. Dans mon prochain opus, il y aura toujours un plus. L’histoire continue. On a démarré avec la musicalité depuis 2004 avec l’album Seedé (Ndlr: Témoin). Après le Ndèye Dior, c’était l’originalité car avec Musikr, les instruments traditionnels, c’était original. On va faire plus.
Que l’on soit d’ici ou d’ailleurs, l’attentat contre les locaux de l’hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, de ce mercredi 7 janvier, fait la Une de nombreux journaux. Quatre des dessinateurs de la rédaction ont trouvé la mort dans cette attaque. Mais Cabu, Charb, Wolinski et Tignous n’étaient pas les premiers. Quand on fouille un peu dans l’histoire plus ou moins récente de la caricature, on trouve quelques faits plus ou moins similaires. Des « crayons » brisés, déformés, il y en a eu. Que ce soit pour des motifs religieux ou pour des raisons politiques. Et par la menace, l’exil, la torture, l’assassinat etc.
De tous les caricaturistes, le palestinien Naji al-Ali est l’un des premiers à avoir creusé sa tombe, à coups de crayon, victime d’une balle en pleine tête qui lui sera fatale. Il mourra un mois après cette agression. Nous sommes en 1987, et Naji al-Ali se trouve alors à Londres où il s’est installé, après son expulsion du Koweït. Il faut dire que ses dessins n’étaient pas du goût de tout le monde. Mais Handala (que traduit le mot « amertume »), le personnage qu’il avait créé, était devenu le symbole de son combat pour la résistance à l’occupation israélienne.
En Iran, au début des années 1990, les caricaturistes sont loin d’être en danger. C’est à l’époque du Président de la République islamique d’Iran Mohammad Khatami. Il souffle dans le pays un vent d’audace, parce que Khatami accorde un certain nombre de licences de presse. Moins de 10 ans plus tard, l’ayatollah Ali Khamenei fait appliquer un certain nombre de mesures contre la liberté d’expression. Les caricaturistes sont concernés. Nikahang Kowsar en fera les frais. Dans ses dessins, Mullah Mesbah, un leader religieux ultra-conservateur, apparaît sous les traits d’un alligator. Nikahang Kowsar est arrêté.
La prison, puis l’exil
Au cours de ces dernières années, ceux qui ont eu la malchance de tourner en dérision les hommes politiques, les hommes au pouvoir, se sont fait « sermonner ». Certains d’entre eux se sont très vite retrouvés en prison. D’autres se résignent à devoir partir, partir loin de l’Iran. Le cas du dessinateur Mana Neyestani est assez particulier, parce que lui a dû subir ces deux épreuves. En 2006, son dessin humoristique où il met en scène un cafard, passe difficilement. Ce personnage de son cartoon*, qui s’exprime en dialecte azéri, celui d’une minorité du nord du pays, est très mal perçu, et on l’accuse de vouloir envenimer les relations entre l’Etat iranien et cette partie du pays où son dessin passe pour une insulte. Son séjour carcéral-il n’échappera pas à la prison- durera deux mois. 2009 est l’année de l’exil. Un exil avec plusieurs escales : la Turquie et la Malaisie entre autres, avant de se rendre en France où il vit aujourd’hui.
En 2007, Lars Vilks, dessinateur suédois, avait vu sa tête mise à prix (100.000 dollars) par un groupe irakien proche d’al-Qaïda, après une caricature du Prophète Mohammed (PSL). L’ambassadeur de Suède en Arabie Saoudite avait d’ailleurs dû présenter ses plates excuses à l’Organisation de la Conférence islamique (OCI), pour tenter de dissiper le malaise.
Le dessinateur algérien Ayoub Kader évoque lui aussi les menaces dont il fait l’objet de la part d’une « mafia religieuse ». Ses dessins dénoncent ceux qui se servent de l’Islam comme d’un « fonds de commerce » ou comme d’une « arme ». Dans certains milieux extrémistes, on appelle publiquement à son « assassinat ». Lui, pour sauver sa peau, se montre peu et rase les murs.
Dessinateur contre Sniper
Kaïs al-Hilali, dessinateur libyen, est plutôt connu pour dessiner sur les murs ou sur le sol, en gros sur les places publiques, ce qui donne à son travail un cachet bien plus populaire que sur une page de journal. Conjuguons à l’imparfait, puisque Kaïs n’avait que 34 ans lorsqu’il trouva la mort en 2011 ; abattu par un sniper du régime de Mouammar Kadhafi qui n’appréciait pas son style, c’est le moins que l’on puisse dire.
Il y aura, la même année, le cas du dessinateur syrien Ali Ferzat, victime de représailles « symboliques », puisqu’il se fera taper sur les doigts, mais c’est un euphémisme parce qu’en fait, on les lui brisera, lui qui avait eu l’outrecuidance de défier le régime de Bachar El-Assad «Frappez-le aux mains pour qu’il arrête de dessiner et d’attaquer ses maîtres.», disaient ses agresseurs. Dès le lendemain de cette attaque, sa photo faisait la Une de plusieurs journaux du Proche-Orient : une photo de lui prise sur son lit d’hôpital, le visage tuméfié et les mains bandées. L’image sera d’ailleurs détournée ou tournée en dérision par le dessinateur israélien Michel Kichka qui prêtera ces propos au personnage de Ferzat, représenté sur son dessin : « J’ai mal quand je ris. Mais quand je pense qu’Assad a peur d’un crayon, j’ai du mal à m’en empêcher. »
Dans les pays du Golfe comme le Koweït, on se protège un peu comme on peut. La pratique veut que l’on ait plutôt recours à des dessins « muets » où les personnages ne s’expriment pas. Silence radio, ce qui permet d’éviter et la censure, et le piège d’une lecture orientée, et en fin de compte chacun peut penser ce qu’il veut de ce cartoon nu.
Le cartooniste, lui, n’est « coupable » de rien.
Certains dessinateurs, toutes régions confondues, sont même rompus à la pratique quotidienne de l’autocensure ; quand leur crayon « dérape », ils le brident. Plus près de nous, au Cameroun, le caricaturiste Nyemb Popoli ne sera pas épargné par le régime du Président Paul Biya. En 2000, il s’exile en Afrique du Sud où il séjournera pendant 6 mois. Deux ans plus tard, voilà qu’une douzaine de policiers, membres du Groupement mobile d’intervention (GMI) de Douala s’en prennent à lui, le tabassent. Le dessinateur sud-africain Jonathan Shapiro (il signe Zapiro), qui a d’abord commencé par militer contre l’apartheid, avant de toucher au dessin de presse, « sera détenu par les autorités » de son pays en 1988. Il s’envolera ensuite aux Etats-Unis, avant de rentrer au bercail en 1991. Fin 1980 au Bénin, Hector Sonon se faisait régulièrement censurer, pour ses dessins qui paraissaient dans l’hebdomadaire « La Gazette du golfe ».
Certains par contre prennent plutôt bien les caricatures que l’on fait d’eux, l’ancien président tanzanien par exemple, Benjamin Mkapa. Voilà ce qu’il disait avec beaucoup d’autodérision : « Je n’arrive même pas à me souvenir de mon propre visage ! » A force de s’être vu caricaturé, déformé, « croqué » comme on dit dans le jargon…
Mais c’est le propre de la caricature que d’être volontairement « chargée » ou à charge, et son étymologie italienne ne dit pas autre chose. Nous sommes dans la démesure, l’humour noir ou la blague acide, du poil à gratter, le trait excessif, l’exagération, le second degré, la dérision, l’esprit « mal tourné », beaucoup d’irrévérence et d’iconoclastie, et même parfois de la mauvaise foi qui s’assume. On aime, ou on n’aime pas…
Le secrétaire général de l’association des métiers de la musique du Sénégal (AMS) plaide pour la tenue de concertations nationales sur la culture. Un secteur en léthargie, selon lui, et sur tous les plans. Guissé Pène dénonce aussi dans cet entretien le retard noté dans le démarrage de la nouvelle société de gestion collective du droit d’auteur et la manière dont les infrastructures culturelles comme le Grand Théâtre sont gérées.
Les acteurs culturels émettent des inquiétudes par rapport à la nouvelle société de gestion collective du Droit d’auteur et des Droits voisins qui est censée insuffler un souffle nouveau dans l’industrie culturelle. Sur quoi se fondent-ils ?
Ces inquiétudes sont dues au fait que la loi sur cette nouvelle société de gestion a été votée et promulguée le 25 janvier 2008. Et jusqu’à présent, au moins de janvier 2015, c’est le statut quo. On se retrouve avec une dualité au niveau de deux institutions "légales" : le bureau sénégalais des droits d’auteur (Bsda) et la nouvelle société de gestion qui ont presque les mêmes objectifs. Mais la nouvelle société ne peut commencer ses activités car confrontée à un problème de décrets d’application et d’agrément. Ces décrets ne sont pas encore signés par le président de la République. Il ne reste que cette signature pour démarrer. Nous pensons que c’est le ministère de la Culture qui n’a pas fait son travail. Or ce blocage commence à faire souffrir les acteurs de la culture. Car cette société non seulement apporte une plus-value à la condition de vie des artistes mais aussi permet d’assainir cet environnement juridique opaque. Maintenir le statut quo, c’est enfoncer les acteurs culturels dans la précarité et les laisser mourir dans l’indifférence totale. Le conseil d’administration dont la mission devait arriver à terme le 16 décembre 2014 a réussi aujourd’hui à nommer un directeur en la personne de Bouna Manel Fall. Mais il est aujourd’hui dans l’expectative dans la mesure où il fait face au Bureau sénégalais des droits d’auteur (Bsda).
Comment se passe la cohabitation entre le Bsda et cette nouvelle société de gestion qui est latente ?
Cette situation a placé le personnel du Bsda dans une situation très complexe. Cet établissement public a été mis en place par l’Etat, il est sous son contrôle. La nouvelle société de gestion est une structure privée. Elle est gérée par des privés. La question qu’on se pose jusqu’à présent, c’est si le personnel du Bsda va être reversé à la nouvelle société ou remis au ministère de la Culture. Donc la réflexion doit être engagée sur le sort du personnel qui ne pourra pas être repris. Le Bsda continue d’exister dans la mesure où la nouvelle société n’a pas d’agrément.
Quelle est la position des acteurs culturels ?
Les acteurs culturels ont assez attendu. Le Bsda est une structure obsolète. Les lois qui gèrent le Bsda ne tiennent pas compte de la nouvelle technologie et des aspects numériques. Par exemple, quelqu’un qui pirate sur les cd et ordinateurs ne peut être inquiété juridiquement par les lois du Bsda car elles remontent à l’époque de l’analogie. C’est la nouvelle société qui prend en compte tous les aspects qui contribuent à donner un environnement juridique très fiable et très moderne. Cette loi fait partie des meilleures lois au monde car même les Français nous l’envient.
Des observateurs estiment que cette situation résulte du fait que la culture est traitée en parent pauvre au Sénégal ?
Je pense que Macky Sall est très culturel mais qu’il ne dispose pas des bonnes informations. Le secteur a besoin de technocrates et des spécialistes et que les politiques regagnent les rangs des politiques. On retrouve à la présidence de la République une pléthore de conseillers culturels qui ignorent les réalités du monde de la culture. Ils ne savent pas, à titre d’exemple, ce qu’est une note de musique, la peinture, l’art, etc. C’est dire que la culture ne se règle pas sous les climatiseurs. Elle est une question de compétences. Le Sénégal n’a rien à envier aux autres pays. Il regorge de grands hommes de culture aussi bien dans le domaine de la sculpture, des arts plastiques, du cinéma, du théâtre. Ils ont porté haut le drapeau du pays. Si le chanteur Akon se signale par sa sénégalité dans le monde, c’est à l’avantage du Sénégal, car c’est plus d’un milliard de personnes qui s’intéressent à ce pays. Youssou Ndour, Doudou Ndiaye Rose, Douta Seck, Ousmane Sow, pour ne citer que ceux-là, sont de grands ambassadeurs du Sénégal. Et ce rayonnement, aucune autre activité politique, économique ou sociale ne l’a encore donné au Sénégal. Il faut que les autorités respectent la culture pour s’engager dans la voie de l’émergence.
L’impact économique est réel si l’on vous suit ?
Si je prends l’exemple du monument de la renaissance, du grand théâtre ou de la Place du souvenir, ce sont des infrastructures qui économiquement peuvent beaucoup apporter au Sénégal. Il faudra juste mettre des fonds d’aide à la création. Ce sont des fonds qui permettent à ce que la créativité sénégalaise puisse être exercée et qui donne l’opportunité aux Sénégalais de démontrer leur talent à l’étranger. Car aujourd’hui, la culture se vend. Il faut établir, dans cette dynamique, des coopérations fortes entre le Sénégal et tous les pays du monde, des coopérations de libre circulation des œuvres et des auteurs. Cela peut réduire par exemple le déficit du tourisme au Sénégal. Mais faudrait-il que la tutelle le comprenne ainsi. Mais s’il est plus porté par la politique, cela plombe l’envol du secteur.
Vous dénoncez aussi l’usage du matériel du Fesman à d’autres fins ?
Ce matériel fait partie des meilleurs matériels en Afrique. C’est l’un des plus performants. Au moment où il y a un déficit criard de matériel de sonorisation, nous ne pouvons accepter qu’il soit détourné à des fins autres que son objectif initial. Ce matériel est de plus en plus mis à la disposition des familles religieuses et de voyage de Touba à Tivaouane en passant par Kaolack et autre cité religieuse. Ce sont des religieux qui ne sont pas totalement en phase avec la musique qui utilisent le matériel de la musique pour faire leur communication. C’est incompréhensible. Autre chose, un problème de maintenance se pose car le matériel en souffre. La destination doit être spécifiquement culturelle car ce matériel doit inciter à ce que le Sénégal puisse disposer de grands événements à dimension mondiale dans le domaine du spectacle, pourquoi pas un festival mondial où toutes les expressions culturelles pourront s’exprimer.
Aujourd’hui, comment se porte la musique sénégalaise ?
Sa situation n’est pas des plus gaies aujourd’hui, elle est en train de sombrer de manière conséquente.
Pourtant, l’on a l’impression d’un dynamisme du secteur avec des clips diffusés à longueur de journée et de nouvelles têtes de chanteurs chaque jour ?
Mais si on découvre chaque fois de nouveaux chanteurs, on ne découvrira pas chaque fois de nouveaux albums, encore moins de nouveaux producteurs ou de nouvelles infrastructures performantes. Quels sont les chanteurs dynamiques ? On n’en retrouve plus. Ce sont les mêmes stars qu’on retrouve sur la scène : Waly Seck, Pape Diouf, Titi et Viviane ; dans les cabarets, c’est le duo Pape-Cheikh, Cheikh Lô, Souleymane Faye entre autres. Est-ce que c’est cela la musique sénégalaise ? Si on ne fait pas attention de la même manière que les producteurs ont fermé leurs portes, les chanteurs vont disparaître. La situation est critique et les artistes sont dans une précarité extrême. De grands artistes qui nous ont valu des satisfactions ont disparu de la scène. Où sont les Fallou Dieng, les Alioune Mbaye Nder, Assane Ndiaye ? On ne les voit plus sur la scène.
Ils se sont reconvertis…
Non ils sont pratiquement absents de la scène
Pourquoi ?
Il y a trop de problèmes dans ce secteur. Vous allez dans le monde du théâtre, la situation est encore plus alarmante. Est-ce qu’il y a une relève ? Le cinéma sénégalais est dans une léthargie, il va falloir réfléchir sous forme d’une concertation nationale sur la culture pour ne pas dire des états généraux. Il faut créer ce cadre d’échanges entre les différents acteurs et poser des actes réels qui ne soient pas des actes politiques pour attaquer le problème à la racine. L’Etat a l’habitude de nous donner de l’aspirine pour calmer nos maux alors que si on a mal à la cheville, c’est de pommade dont on a besoin.
Le Sénégal dispose pourtant de grandes infrastructures telles le Grand Théâtre, la Place du Souvenir, en charge de donner une nouvelle impulsion au secteur.
Mais le Grand Théâtre est devenu aujourd’hui le siège du Fouta, les acteurs culturels ne s’y retrouvent plus. Je suis originaire du Fouta, du village de Pété. Il ne manque au Grand-théâtre que les "Xaïma", des tentes pour prendre le thé. Il est très mal entretenu et connaît un délabrement qui ne dit pas son nom. Or une infrastructure de cette dimension qui est unique en Afrique doit avoir un service de maintenance cohérent. Le grand théâtre n’a pas encore dix ans d’existence et même à 100 ans, il devrait pouvoir être attrayant et accueillant. La situation n’est pas du tout aisée dans cet édifice qui devait être un carrefour de rencontre d’acteurs culturels et un carrefour d’émulation à la création. Mais il ressemble aujourd’hui à un village du Fouta. C’est un patrimoine qui appartient aux acteurs culturels qui doivent exploiter l’espace pour qu’ils soient plus créatifs dans le domaine du théâtre, du stylisme, de la musique, des arts plastiques.
Que sont devenus le monument de la Renaissance africaine et la Place du souvenir ?
Vous avez eu des spectacles ou des visites économiques sur ce site. Le monument de la renaissance n’a jamais eu de vie depuis qu’on l’a installé. Et c’est dommage pour un monument considéré comme l’un des plus grands du monde. Cet édifice n’appartient pas au Sénégal, c’est un monument de la renaissance africaine. Il devait avoir aujourd’hui une politique et une communication telle que toute l’Afrique devait se voir en ce monument ; Ce monument doit avoir une histoire qu’on devrait enseigner. Mais qui connaît le monument africain ? Il devait être un outil d’enseignement à une époque où le monde se recroqueville sur lui-même, l’Afrique a intérêt à se regrouper, que le dialogue soit sud-sud, beaucoup plus nord-sud. Une absence de programme de politique culturelle se pose. Si le Sénégal rayonne dans le monde, c’est grâce à la culture. Si cette culture aujourd’hui est mourante, il y a problème.
Partagez-vous l’avis selon lequel le nouveau régime ne s’est pas inscrit dans une logique de perpétuer l’héritage de Wade, avec des infrastructures à l’abandon ?
Ce serait une grosse erreur car l’Etat est une continuité. La préservation des acquis est une chose fondamentale et essentielle. Gaston Eiffel a construit la Tour Eiffel qui continue de vivre malgré les régimes et les gouvernements. Ce serait dommage si l’Etat ne saisit pas l’impact social et économique de la culture.
AVANT "CHARLIE HEBDO"…
Cabu, Charb, Wolinski et Tignous, tués dans l’attaque du siège du satirique français, ne sont pas les premiers caricaturistes à avoir été victimes de leur liberté de ton
Que l’on soit d’ici ou d’ailleurs, l’attentat contre les locaux de l’hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, de ce mercredi 7 janvier, fait la Une de nombreux journaux. Quatre des dessinateurs de la rédaction ont trouvé la mort dans cette attaque. Mais Cabu, Charb, Wolinski et Tignous n’étaient pas les premiers. Quand on fouille un peu dans l’histoire plus ou moins récente de la caricature, on trouve quelques faits plus ou moins similaires. Des "crayons" brisés, déformés, il y en a eu. Que ce soit pour des motifs religieux ou pour des raisons politiques. Et par la menace, l’exil, la torture, l’assassinat, etc.
De tous les caricaturistes, le palestinien Naji al-Ali est l’un des premiers à avoir creusé sa tombe, à coups de crayon, victime d’une balle en pleine tête qui lui sera fatale. Il mourra un mois après cette agression. Nous sommes en 1987, et Naji al-Ali se trouve alors à Londres où il s’est installé, après son expulsion du Koweït. Il faut dire que ses dessins n’étaient pas du goût de tout le monde. Mais Handala (que traduit le mot "amertume"), le personnage qu’il avait créé, était devenu le symbole de son combat pour la résistance à l’occupation israélienne.
En Iran, au début des années 1990, les caricaturistes sont loin d’être en danger. C’est à l’époque du Président de la République islamique d’Iran Mohammad Khatami. Il souffle dans le pays un vent d’audace, parce que Khatami accorde un certain nombre de licences de presse. Moins de 10 ans plus tard, l’ayatollah Ali Khamenei fait appliquer un certain nombre de mesures contre la liberté d’expression. Les caricaturistes sont concernés. Nikahang Kowsar en fera les frais. Dans ses dessins, Mullah Mesbah, un leader religieux ultra-conservateur, apparaît sous les traits d’un alligator. Nikahang Kowsar est arrêté.
La prison, puis l’exil
Au cours de ces dernières années, ceux qui ont eu la malchance de tourner en dérision les hommes politiques, les hommes au pouvoir, se sont fait "sermonner". Certains d’entre eux se sont très vite retrouvés en prison. D’autres se résignent à devoir partir, partir loin de l’Iran. Le cas du dessinateur Mana Neyestani est assez particulier, parce que lui a dû subir ces deux épreuves.
En 2006, son dessin humoristique où il met en scène un cafard, passe difficilement. Ce personnage de son cartoon (dessins de presse, en anglais), qui s’exprime en dialecte azéri, celui d’une minorité du nord du pays, est très mal perçu, et on l’accuse de vouloir envenimer les relations entre l’Etat iranien et cette partie du pays où son dessin passe pour une insulte. Son séjour carcéral- il n’échappera pas à la prison- durera deux mois.
2009 est l’année de l’exil. Un exil avec plusieurs escales : la Turquie et la Malaisie entre autres, avant de se rendre en France où il vit aujourd’hui. En 2007, Lars Vilks, dessinateur sué- dois, avait vu sa tête mise à prix (100.000 dollars, 50 millions de francs Cfa) par un groupe irakien proche d’al-Qaïda, après une caricature du Prophète Mohammed (PSL). L’ambassadeur de Suède en Arabie Saoudite avait d’ailleurs dû présenter ses plates excuses à l’Organisation de la Conférence islamique (OCI), pour tenter de dissiper le malaise.
Le dessinateur algérien Ayoub Kader évoque lui aussi les menaces dont il fait l’objet de la part d’une "mafia religieuse". Ses dessins dénoncent ceux qui se servent de l’Islam comme d’un "fonds de commerce" ou comme d’une "arme". Dans certains milieux extrémistes, on appelle publiquement à son "assassinat". Lui, pour sauver sa peau, se montre peu et rase les murs.
Dessinateur contre Sniper
Kaïs al-Hilali, dessinateur libyen, est plutôt connu pour dessiner sur les murs ou sur le sol, en gros sur les places publiques, ce qui donne à son travail un cachet bien plus populaire que sur une page de journal. Conjuguons à l’imparfait, puisque Kaïs n’avait que 34 ans lorsqu’il trouva la mort en 2011 ; abattu par un sniper du régime de Mouammar Kadhafi qui n’appréciait pas son style, c’est le moins que l’on puisse dire.
Il y aura, la même année, le cas du dessinateur syrien Ali Ferzat, victime de représailles "symboliques", puisqu’il se fera taper sur les doigts, mais c’est un euphémisme parce qu’en fait, on les lui brisera, lui qui avait eu l’outrecuidance de défier le régime de Bachar El-Assad "Frappez-le aux mains pour qu’il arrête de dessiner et d’attaquer ses maîtres", disaient ses agresseurs. Dès le lendemain de cette attaque, sa photo faisait la Une de plusieurs journaux du Proche-Orient : une photo de lui prise sur son lit d’hôpital, le visage tuméfié et les mains bandées. L’image sera d’ailleurs détournée ou tournée en dérision par le dessinateur israélien Michel Kichka qui prêtera ces propos au personnage de Ferzat, représenté sur son dessin : "J’ai mal quand je ris. Mais quand je pense qu’Assad a peur d’un crayon, j’ai du mal à m’en empêcher."
Dans les pays du Golfe comme le Koweït, on se protège un peu comme on peut. La pratique veut que l’on ait plutôt recours à des dessins "muets" où les personnages ne s’expriment pas. Silence radio, ce qui permet d’éviter et la censure, et le piège d’une lecture orientée, et en fin de compte chacun peut penser ce qu’il veut de ce cartoon nu. Le cartooniste, lui, n’est "coupable" de rien. Certains dessinateurs, toutes régions confondues, sont même rompus à la pratique quotidienne de l’autocensure ; quand leur crayon "dérape", ils le brident.
Plus près de nous, au Cameroun, le caricaturiste Nyemb Popoli ne sera pas épargné par le régime du Président Paul Biya. En 2000, il s’exile en Afrique du Sud où il séjournera pendant 6 mois. Deux ans plus tard, voilà qu’une douzaine de policiers, membres du Groupement mobile d’intervention (GMI) de Douala s’en prennent à lui, le tabassent.
Le dessinateur sud-africain Jonathan Shapiro (il signe Zapiro), qui a d’abord commencé par militer contre l’apartheid, avant de toucher au dessin de presse, "sera détenu par les autorités" de son pays en 1988. Il s’envolera ensuite aux Etats-Unis, avant de rentrer au bercail en 1991. Fin 1980 au Bénin, Hector Sonon se faisait régulièrement censurer, pour ses dessins qui paraissaient dans l’hebdomadaire "La Gazette du golfe".
Certains par contre prennent plutôt bien les caricatures que l’on fait d’eux, l’ancien président tanzanien par exemple, Benjamin Mkapa. Voilà ce qu’il disait avec beaucoup d’autodérision : "Je n’arrive même pas à me souvenir de mon propre visage !" A force de s’être vu caricaturé, déformé, "croqué" comme on dit dans le jargon...
Mais c’est le propre de la caricature que d’être volontairement "chargée" ou à charge, et son étymologie italienne ne dit pas autre chose. Nous sommes dans la démesure, l’humour noir ou la blague acide, du poil à gratter, le trait excessif, l’exagération, le second degré, la dérision, l’esprit "mal tourné", beaucoup d’irrévérence et d’iconoclastie, et même parfois de la mauvaise foi qui s’assume. On aime, ou on n’aime pas...
MACKY SALL EST "ÉMU"
Le chef de l’État s’est rendu à l’ambassade de France pour signer le registre de condoléances à la suite des attaques dans Paris
Le chef de l’État avait, en conseil des ministres, condamné les attentats contre Charlie Hebdo qui ont fait 12 morts. Ce vendredi, informe un communiqué de la Présidence, il "s’est rendu à l’ambassade de France pour signer le registre de condoléances et réaffirmer (au peuple français) toute la commisération et le soutien du peuple sénégalais".
Macky Sall "a réaffirmé l’engagement du Sénégal dans la lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme sous toutes ses formes". Avant de signer un texte que nous vous proposons in-extenso ci-dessous :
"Au nom du Peuple et du Gouvernement Sénégalais et en mon nom propre, je présente mes condoléances émues au Peuple ami et au Gouvernement Français suite aux attentats barbares contre Charlie Hebdo et les populations civiles innocentes à Paris.
Le Sénégal, par ma voix, réaffirme sa détermination sans failles dans la lutte contre le terrorisme international.