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25 avril 2025
Développement
par Abdoul Aziz Diop
SONKO AGGRAVE SON CAS MALGRÉ LA BAFFE REÇUE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
EXCLUSIF SENEPLUS - Tout commence par un viol - celui du couvre-feu en mars 2021-, et se poursuit par un viol - celui de la Constitution en avril 2025. Le multirécidiviste ne sait toujours pas que ladite opposition est surprotégée par le peuple du Sénégal
Le 2 mars 2020, le Sénégal enregistre son premier cas de Coronavirus. Le pays rentre alors dans le tourbillon de la pandémie de Covid-19. L'état d'urgence assorti d'un couvre-feu de 21h00 à 05h00 est instauré le 5 janvier 2021 pour les régions de Dakar et Thiès où se concentre la grande majorité des contaminations. La mesure est reconduite pour un mois le 20 janvier. Le samedi, 20 février 2021, le gouvernement du Sénégal annonce une prolongation pour un mois du couvre-feu. En clair, cela veut simplement dire qu’à compter du 20 février 2021, et ce jusqu’au 20 mars 2021, interdiction est faite aux populations des régions de Dakar et Thiès de circuler de 21h00 à 05h00. En droit facile, le but de la mesure avait été de permettre aux Forces de défense et de sécurité (FDS) de protéger les populations de la grave crise sanitaire à laquelle faisait face le monde entier. C’est le moment choisi par l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko pour sortir nuitamment de chez lui, violant le couvre-feu et attestant par là même d’un acte transgressif majeur d’où découlèrent les déferlements de violences sans précédent de mars 2021 et de juin 2023.
Le 14 juin 2023, des journalistes, avocats et défenseurs des droits de l’homme, Togolais pour la plupart, adressent une lettre ouverte à maître Sidiki Kaba, ministre des Forces armées du Sénégal, dans laquelle on peut lire le commentaire que leur inspirent les événements malheureux survenus chez nous 13, 12 et 11 jours plus tôt. En voici, pour l’essentiel, la teneur : « Nous sommes profondément indignés, préoccupés et très inquiets de la reculade à l’allure vertigineuse du niveau de la démocratie et des droits de l'homme en République du Sénégal, qui était considérée en la matière comme l'un des modèles en Afrique subsaharienne. »
À cela nous réagissons, dans une tribune datée du 20 juin 2023, en ces termes (extrait) : « La lettre ouverte des journalistes, des avocats et défenseurs des droits l’homme transcende la personne du ministre des Forces armées de la République du Sénégal, interpellant par la même occasion le gouvernement du Sénégal pour lui demander de tirer au clair les entorses gravissimes au maintien de l’ordre et au respect des droits de l’homme auquel le Sénégal ne saurait déroger sans perdre sa place enviable de locomotive politique dans une sous-région ouest africaine en proie à d’anciens et nouveaux phénomènes de déstabilisation. »
Pour celles et ceux dont l’intérêt pour notre modeste personne et nos modestes contributions au débat ne nous ont jamais fait défaut, notre désapprobation de la loi d’amnistie n° 2024-09, avant et après son vote le 6 mars 2024 par l’Assemblée nationale, n’était pas dictée par la fin de notre compagnonnage avec l’ancien président Macky Sall dont nous nous sommes séparé en démissionnant de son parti et de son cabinet le 19 juillet 2023.
Immobilisme bavard
Le changement de régime intervenu le 24 mars 2024 correspond à une séquence nouvelle dont les points saillants au terme d’une année d’immobilisme et de recul bavard sont la dissolution, le 12 septembre 2024, de l’Assemblée nationale par le président élu Bassirou D. D. Faye, la convocation du corps électoral et la tenue des élections législatives du 17 novembre 2024 couronnées par le succès électoral sans équivoque de la coalition Pastef dirigée par sa tête de liste Ousmane Sonko.
Le moment est enfin venu pour ce dernier de faire sa déclaration de politique générale. Le 27 décembre 2024, devant les députés de la majorité et de l’opposition réunis au grand complet, le Premier ministre Ousmane Sonko déclare : « Il sera proposé à votre auguste assemblée, dans les semaines à venir, un projet de loi rapportant la loi d’amnistie votée le 6 mars 2024 par la précédente législature ; pour que toute la lumière soit enfin faite et les responsabilités situées, de quelque bord qu’elles se situent. » En termes de législature, rapporter une loi signifie « retirer, révoquer, annuler une loi ». Au lieu de cela, la majorité se contente d’une proposition de loi interprétative de la loi d’amnistie faite par le député Pastef et 6ème vice-président de l’Assemblée nationale Amadou BA N° 2. En son article premier ladite dispose : « Au sens de l’article premier de la loi n° 2024-09 du 13 mars 2024 portant amnistie, sont exclus du champ de l’amnistie les faits survenus entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, tant au Sénégal qu’à l’étranger, sans lien avec l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit démocratique, et qualifiés notamment d’assassinats, de meurtres, de crimes de torture, d’actes de barbarie, de traitements inhumains, cruels ou dégradants, même si ces faits se rapportent à des manifestations, quelle qu’en soit la motivation, et indifféremment de leurs auteurs. » Cet énoncé porte amendement du même article dont la teneur initiale est : « Au sens de l'article 1 de la loi n° 2024-09 du 13 mars 2024, sont amnistiés, de plein droit, tous les faits susceptibles de qualification criminelle ou correctionnelle, ayant exclusivement une motivation politique y compris ceux commis par tous supports de communication, entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024 tant au Sénégal qu'à l'étranger. Ainsi, les faits se rapportant à des manifestations ne sont compris dans le champ de la loi que s'ils ont une motivation exclusivement politique. »
« Les faits sans lien avec l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit démocratique » se substituent alors aux « faits ayant exclusivement une motivation politique » pour éteindre le brasier de la polémique qui enfle partout dans le pays et sa Diaspora pour cause de discrimination des citoyens scindés en deux groupes dont le premier libre de tout mouvement épingle un second destiné aux bancs des accusés.
Adoptée par l’Assemblée nationale le 2 avril 2025, ladite loi interprétative est aussitôt attaquée par l’opposition parlementaire dont l’unique groupe Takku Wallu Sénégal (« Mobilisons-nous pour sauver le Sénégal ») est présidé par l’avocate et ancienne ministre de la Justice Aïssata Tall Sall. Il s’agit, pour elle et 22 autres députés de l’opposition, d’un « recours en inconstitutionnalité contre la loi n° 08/25 de l’Assemblée nationale du 02/04 avril/2025 portant interprétation de la loi n° 2024-09 du 13 mars 2024 portant amnistie ».
Dans sa décision n° 1/C/2025, datée du 23 avril 2025, le Conseil constitutionnel, dont 5 des membres sur 7 ont délibéré, estime que « le législateur ne saurait, par une loi dite interprétative, ni faire obstacle à la répression de crimes imprescriptibles, ni priver de leur portée les principes relatifs à la sauvegarde de la dignité humaine, motif pris de ce que ces crimes seraient liés à l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit démocratique ». « Considérant qu’au sens de l’alinéa 2 de la loi attaquée, les faits tenus pour criminels d’après les règles du droit international, notamment l’assassinat, le meurtre, le crime de torture, les actes de barbarie, les traitements inhumains, cruels ou dégradants, sont inclus dans le champ de l’amnistie lorsqu’ils ont un lien avec l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit démocratique ; qu’en incluant ainsi dans le champ d’application de la loi portant amnistie des faits imprescriptibles au regard des engagements internationaux à valeur constitutionnelle du Sénégal, l’alinéa 2 de l’article premier de la loi n° 08/2025 du 02 avril 2025, viole la Constitution. »
« L’article premier de la loi nº 08/2025 adoptée par l’Assemblée nationale en sa séance du 2 avril 2025 est contraire à la Constitution », décide irrévocablement le Conseil constitutionnel.
Conclusion
Tout commence par un viol - celui du couvre-feu en mars 2021-, et se poursuit par un viol - celui de la Constitution en avril 2025. Dans les deux cas de viol, le même transgresseur - le chef politique de la majorité et Premier ministre du Sénégal Ousmane Sonko -, désigne un coupable dont l’identité échappe à toutes les grandes et moins grandes juridictions du pays. Et comme si cela ne suffisait pas, M. Sonko aggrave son cas en injuriant publiquement, par écrit, l’opposition démocratique et républicaine dont les membres sont qualifiés de « résidus d’opposition ». C’est que le multirécidiviste ne sait toujours pas que ladite opposition est surprotégée par le peuple du Sénégal souverain qui proclame, dans le préambule de la Constitution, « la volonté du Sénégal d'être un Etat moderne qui fonctionne selon le jeu loyal et équitable entre une majorité qui gouverne et une opposition démocratique, et un Etat qui reconnaît cette opposition comme un pilier fondamental de la démocratie et un rouage indispensable au bon fonctionnement du mécanisme démocratique ».
Inutile, pour notre part, d’en rajouter dès lors qu’une série de viols à laquelle un individu prend goût se termine toujours par le viol de trop qui vient.
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DU SOUVERAINISME À LA SÉNÉGALAISE
"C'est une manœuvre beaucoup plus habile que ce qui est fait dans d'autres pays de la région", analyse un spécialiste, tandis qu'un autre met en garde contre "les espoirs déçus". Le modèle sénégalais de souveraineté suscite des interprétations contrastées
(SenePlus) - Un vent de changement souffle sur l'Afrique de l'Ouest, particulièrement au Sénégal où le président Bassirou Diomaye Faye incarne cette nouvelle tendance souverainiste. À l'occasion de la fête de l'indépendance du 4 avril, le symbolisme n'a pas manqué lorsque le boulevard Général-de-Gaulle a été rebaptisé boulevard Mamadou-Dia, du nom d'un héros de l'indépendance.
Dans son discours à la nation, le président a clairement identifié la monnaie comme un enjeu de souveraineté : "Tous les pays du monde disposent de trois principaux moyens pour financer leur économie : la fiscalité, l'endettement et la monnaie. Or, avec le franc CFA, le Sénégal se prive d'un instrument essentiel", a-t-il déclaré en wolof, comme le rapporte Jeune Afrique.
Face à ce qu'il perçoit comme une inertie de la Cedeao concernant la création de l'eco, Bassirou Diomaye Faye propose que l'Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) prenne l'initiative "d'une monnaie souveraine avec un nom, un symbole et des billets distincts".
Élu dès le premier tour le 24 mars 2024, le président porte un discours de changement radical. Son parti, Pastef, défend "la nécessité de trouver de nouvelles voies de développement économique et social" pour mettre fin à la "dépendance-soumission à l'extérieur", avec une référence à peine voilée à l'ancienne puissance coloniale française.
Un financier actif dans la région, cité par JA, note que si "ces discours ne sont pas nouveaux", le contexte actuel marque une vraie différence : "Jusqu'à récemment, tous ces pays étaient gérés de manière post-coloniale, avec des dirigeants et des hauts fonctionnaires formés en Occident, qui cultivaient des liens avec les grandes institutions financières internationales. [...] Nous assistons donc à un changement profond de paradigme."
Au lendemain de sa prestation de serment en avril 2024, Bassirou Diomaye Faye a lancé une série d'audits sur les contrats pétroliers et gaziers conclus par le Sénégal, notamment ceux du champ de Sangomar, géré par l'australien Woodside, et du projet gazier offshore Grand Tortue Ahmeyim (GTA), partagé avec la Mauritanie et exploité par British Petroleum.
Contrairement à l'approche plus frontale adoptée par certains pays voisins comme le Mali dans le secteur minier, la démarche sénégalaise se veut plus nuancée. "Les audits lancés par les autorités sont très spécifiques et concernent essentiellement la réalité des dépenses engagées par les multinationales. C'est une manœuvre beaucoup plus habile, moins frontale que ce qui est fait dans d'autres pays de la région", analyse Joël Té-Lessia Assoko, auteur de l'ouvrage "Enterrer Sankara".
Plus d'un an après les annonces du successeur de Macky Sall, les résultats de ces audits se font encore attendre. Pour l'économiste togolais Kako Nubukpo, "ces dernières décennies, les alternances politiques n'ont pas proposé de politiques économiques alternatives. Il y a une donc une forte demande de souveraineté de la part de la jeunesse ouest-africaine. Les promesses faites par les nouvelles autorités du Sénégal tardent à produire des effets. Attention aux espoirs déçus."
Le souverainisme économique pourrait-il donc n'être qu'un discours sans conséquences concrètes ? Joël Té-Lessia Assoko suggère que "c'est parfois beaucoup de bruit pour, finalement, des conséquences économiques très limitées". Il fait remarquer que malgré la rhétorique anti-institutions occidentales, les pays qui se réclament du souverainisme continuent de s'adresser au FMI et à la Banque mondiale dès qu'ils en ont besoin.
Si la vraie recette du souverainisme économique restait à inventer ? Kako Nubukpo, malgré ses réserves, voit une opportunité : "Cette opportunité peut être saisie pour proposer des modèles différents, conquérir le marché intérieur en accélérant la transformation locale des matières premières que nous produisons."
Le Sénégal, avec son approche plus mesurée que celle des juntes militaires voisines, pourrait-il tracer une voie médiane, alliant aspiration à plus de souveraineté et pragmatisme économique ? L'histoire est en train de s'écrire, mais les enjeux sont immenses pour une jeunesse sénégalaise qui attend des résultats concrets au-delà des symboles et des discours.
LA CHUTE DES BARONS DU RIZ
Le dossier du Fonds de riposte contre les effets de la Covid 19 n’a pas fini de parler de lui. De gros calibres du milieu des affaires sénégalaises sont sur la corde raide. Les enquêteurs de la Dic ont été chargés de les arrêter
Le dossier du Fonds de riposte et de solidarité contre les effets de la Covid 19 (Force Covid) n’a pas fini de parler de lui. De gros calibres du milieu des affaires sénégalaises sont sur la corde raide. Les enquêteurs de la Division des investigations criminelles (Dic) ont été chargés de les arrêter.
Certains noms sont méconnus des Sénégalais.
Les nommés Moustapha Ndiaye, Hachem Rayam, Mouhamed Dieng, Mariata Basse, Ibrahima Macodou Fall, Mouhamed Ady San et Abdoulaye Diallo sont passés, hier mercredi 23 avril 2025, dans les locaux de la Division des investigations criminelles (Dic) pour y être interrogés avant d’être déférés. Et s’ils ne mettent pas de caution de garantie sur la table, nul doute que les portes de la prison risquent de leur être grandement ouvertes.
Les poursuites engagées contre ces personnes sont la conséquence du rapport d’audit de la Cour des comptes, intitulé ‘’Contrôle de la gestion du Fonds de riposte et de solidarité contre les effets de la Covid-19 (Force Covid) – Gestion 2020-2021. Initié sous l’ancien régime, le rapport définitif n’a été rendu public que le 19 août 2022, sans connaître de suites judiciaires. Dépoussiéré par le nouveau pouvoir, il a déjà permis l’arrestation de plusieurs dizaines de personnes, dont des agents de l’État.
Au cœur de la mafia du riz
Nos sources renseignent que l’œil du cyclone dans cette affaire, à cette étape de la procédure, est le dossier du riz et des gels hydroalcooliques qui aurait fait l’objet de grosses surfacturations. Le rapport définitif de la Cour des comptes indiquait bien que ‘’le montant du surplus facturé par les fournisseurs qui s’établit à 2 749 927 498 F CFA’’. Et comment ? ‘’Les prix facturés pour l’acquisition des gels hydroalcooliques et des denrées doivent être conformes à ceux prévus par les arrêtés susvisés portant homologation des prix. La cour constate que les prix d’acquisition sont supérieurs à ceux fixés par les arrêtés précités’’ et décortique plus clairement les termes de la présumée surfacturation en ces termes : ‘’Concernant les acquisitions de riz, l’arrêté n°007111 précité fixe le prix de la tonne chez le grossiste à 245 000 F CFA la tonne ; les frais de manutention sont fixés à 5 001 F CFA la tonne par le ministère du Commerce, soit un prix global de 250 001 F CFA. Or, il a été fixé par le MDCEST à 275 000 F CFA la tonne, soit un manque à gagner de 24 999 F CFA par tonne’’.
C’est sur ce dossier précis que Hachem Rayam, en sa qualité de directeur général de la société Avanti et Afri&Co, Moustapha Ndiaye de CCMN et Mouhamed Dieng de Bambouck ont été entendus. Les enquêteurs, nous indique-t-on, ont interrogé ces derniers sur le surplus facturé pour les achats de riz, en insistant sur le pourquoi du différentiel. Sur les 2,7 milliards indexés, Avanti, spécialisée dans la distribution du riz, même si elle ratisse dans d’autres domaines, se taille la part du lion avec 1,1 milliard, suivi par Afri&Co 749,989 millions, CCMN 749,970 millions F CFA.
La société Avanti, qui a son siège à l’avenue Lamine Guèye, était restée discrète dans cette affaire depuis que le dossier a été agité, malgré les charges lourdes retenues contre elle. Et si Rayan Hachem, dont le nom est associé à la boîte Planet Kebab, est bien connu à Dakar, celui qui se cache derrière lui, qui est le vrai patron d’Avanti, est quant à lui d’une extrême discrétion. Il s’agit de Ramez Samir Bourgi. Les investigations entamées remonteront-elles jusqu’au cerveau ? Mystère et boule de gomme !
Ce qui est clair, c’est qu’il y a des anguilles sous beaucoup de dossiers et qu’à force de creuser, les enquêteurs pourraient tomber sur d’autres affaires plus sulfureuses.
Moustapha Ndiaye et Rayam Hachem ne sont pas les seules personnes entendues sur le riz. Selon nos sources, Mouhamed Dieng de la société Bambouck est aussi sous la menace de la prison. Il est politique et membre de l’Alliance pour la République (APR) dans le département de Koungheul. Il fut membre du Conseil économique, social et environnemental (Cese).
À noter qu’avant ces gros calibres de l’agrobusiness sénégalais, l’ex-directeur de l’Administration générale et de l’équipement du ministère du Développement communautaire, de l’Équité sociale et territoriale, Aziz Sow avait été arrêté pour surfacturation sur le riz. Aux dernières nouvelles, certains ont bel et bien accepté le principe de cautionner à coups de montants faramineux.
Nous y reviendrons dans notre prochaine édition.
TEMPÊTE SUR L'ITA
Des cadres de l'Institut de technologie alimentaire (ITA) tirent la sonnette d'alarme face à ce qu'ils qualifient de "gouvernance scandaleuse" du nouveau DG. Ils dénoncent un climat délétère qui risque de mener la structure droit dans le mur
Mécontents de la gestion “cavalière” de leur outil de travail, des cadres de l'Institut de technologie alimentaire (ITA) ont contacté ‘’EnQuête’’ pour fustiger ce qu'ils considèrent comme une gouvernance scandaleuse qui mène la structure droit vers le mur.
Rien ne va plus à l'Institut de technologie alimentaire (ITA). Depuis quelques jours, voire des semaines, la direction et les personnels se regardent en chiens de faïence. Les travailleurs, n'en pouvant plus d'évoluer dans ce climat délétère, ont décidé de sortir de leur mutisme et prennent à témoin l'opinion sur des dysfonctionnements graves qui risquent d'impacter négativement la structure. Des dysfonctionnements qu'ils imputent au nouveau directeur général. “Sa gouvernance est pire que ce que nous avons connu avec l'ancien directeur et que le personnel dénonçait”, accuse d'emblée un des représentants du personnel qui s'est confié à "EnQuête".
Notre interlocuteur rappelle d'ailleurs que la semaine dernière, les travailleurs avaient alerté avec le port de brassards rouges, mais le directeur n'a rien voulu entendre ; ce qui les pousse à vouloir passer à la vitesse supérieure. “Une réunion d'évaluation est d'ailleurs prévue aujourd'hui', rapporte la source.
Mais quels sont donc les griefs contre la nouvelle administration ? Ils sont de plusieurs ordres. Depuis quelque temps, les activités de recherche sont au ralenti au niveau de certains services. Le directeur, selon les représentants des travailleurs, fait tout pour empêcher certains chefs de service de faire leur job.
“Comme il ne peut pas grand-chose contre certains chefs de service qui sont statutairement protégés, il fait tout pour les bloquer dans leur fonctionnement. Par exemple, avant, il y avait des réunions auxquelles participaient tous les chefs de service ; il ne les tient plus. Il se réunit juste avec son staff et après nous transmet ses décisions. Il n'y a presque plus de véritables activités de recherche”, dénonce notre interlocuteur.
Copinage dans la gestion des personnels
Les impacts sont déjà palpables au niveau de la plupart des services de l'ITA. C'est le cas, par exemple, avec le projet agropole. Lequel aurait été enlevé au cadre qui jusque-là s'en occupait et qui y a fait d'excellents résultats. “On l'a enlevé juste parce qu'il était nommé à ce poste par son prédécesseur. Aujourd'hui, le projet marche au ralenti, parce qu'au niveau supérieur on connait l'ancien responsable”, renseigne notre source.
La direction a également pris des mesures qui risquent d'entraver le projet de l'institut relativement au développement des pôles territoires. “Comme vous le savez, l'État veut mettre en place des pôles territoriaux, avec une volonté de développer des filières dans chaque pôle. L'ITA doit jouer un rôle important dans cette perspective, avec notamment la mise en place d’antennes. Pour empêcher certains d'avoir des responsabilités, le directeur a supprimé une zone, dans le seul but de combattre un des responsables”, regrette notre source.
Faible plateau technique, absence de motivation
Pour lutter contre ces dérives et sortir l'ITA de l'impasse dans laquelle il se trouve depuis des semaines, les travailleurs ont engagé le bras de fer et somment la direction de revenir à l'orthodoxie et au respect des partenaires sociaux. Dans un document reçu à ‘’EnQuête’’, ils reviennent sur leurs différentes revendications.
En ce qui concerne les recrutements et la gestion de la carrière des agents, ils exigent une plus grande implication des partenaires sociaux ; plus de justice et de transparence dans la gestion de la carrière. Les travailleurs demandent aussi la finalisation de certains textes réglementaires et de tous les points d'accord du protocole conclu avec l'ancienne administration.
En sus de ces revendications, les agents réclament également de meilleures conditions de travail et plus de motivation. Dans le même sillage, ils demandent des mesures pour renforcer le plateau technique, indispensable pour permettre aux chercheurs de faire leur travail. La plateforme parle également de l'amélioration de l’environnement de travail “pour la sécurité du personnel, conformément à la réglementation en vigueur”.
Les travailleurs exigent, en outre, “la réparation des toilettes défectueuses, l'aménagement d’un système de drainage de l’eau de pluie, etc.”. Pour eux, il est indispensable que la direction traite les agents et les services avec la même dignité, le même respect. “Aujourd'hui, tous les projets sont orientés vers son domaine : phyto, lutte contre les nuisibles au détriment de l'agroalimentaire. Aussi, il y a trop de copinage dans la gouvernance”, dénoncent les délégués des travailleurs.
Après plusieurs tentatives restées infructueuses, ‘’EnQuête’’ a réussi à entrer en contact, hier, avec le directeur, M. Guèye, vers les coups de 18 h. Ce dernier a, dans un premier temps, sollicité de notre part de rappeler vers 20 h, puisqu'il était en route. Comme convenu, nous avons essayé à plusieurs reprises de le rappeler, en vain. Tantôt les appels tombaient dans la boite vocale, tantôt ça sonnait dans le vide. Nous lui avons alors laissé un message auquel il a réagi vers les coups de 21 h 30. C'était pour voir si l’on peut sursoir à la publication, parce qu'il était toujours en route pour Saint-Louis, a-t-il précisé.
Nos colonnes lui sont ouvertes pour donner sa version des faits quand il le souhaitera.
ISMAILA MADIOR FALL, LA SURPRISE DU PROCUREUR
Contrairement à ses anciens collègues du gouvernement poursuivis pour la gestion des fonds Covid, l'ancien ministre de la Justice fait face à des accusations d'une tout autre nature : des faits présumés de corruption qui surprennent les observateurs
Alors que la plupart de ses anciens collègues sont poursuivis pour des faits relatifs à la gestion des fonds Covid, l'ancien ministre Ismaila Madior Fall est poursuivi pour des faits de corruption.
On en parlait depuis quelques jours, depuis la sortie des procureurs sur la reddition des comptes. Sans donner de noms, le procureur général, Mbacké Fall, révélait qu'une procédure de mise en accusation par l'Assemblée nationale a été déclenchée. “Le moment venu, vous serez informés sur l'identité de ces cinq ministres, parce que les résolutions de mise en accusation seront débutées à l'Assemblée”, soulignait le chef du parquet du ressort de la Cour d'appel de Dakar, tout en précisant que la liste n'est pas exhaustive.
Depuis, la chronique a beaucoup épilogué sur les noms des ministres concernés. Pour certains, il n'y avait pas de suspense. C'est le cas en particulier des ministres Mansour Faye et Moustapha Diop dont les noms reviennent très souvent dans le dossier Covid-19. Hier, la Conférence des présidents de l'Assemblée nationale s'est réunie à l'effet d'examiner la lettre du ministre de la Justice portant demande de levée de l'immunité parlementaire des députés Salimata Diop et Moustapha Diop, préalablement à leur mise en accusation.
Le compte rendu de la réunion a levé le voile qui couvrait jusque-là le reste des ministres concernés. Outre la confirmation des ministres Mansour Faye et Moustapha Diop, la Conférence des présidents cite également Aissatou Sophie Gladima et Salimata Diop. Mais la grande surprise, c'est l'ancien ministre de la Justice, ancien ministre des Affaires étrangères Ismaila Madior Fall. Que fait-il donc dans cette liste, vu que son nom ne semble pas ressortir dans le dossier Covid ?
Selon nos informations, l'ancien ministre est effectivement poursuivi pour une affaire de corruption le concernant. Nos sources n'ont pas voulu donner plus de détails sur la question.
Le calendrier de l'Assemblée dévoilée au public
Les prochains jours seront donc très mouvementés à l'hémicycle. D'abord, en ce qui concerne la levée de l'immunité parlementaire de Salimata Diop et Moustapha Diop, le calendrier se décline comme suit : mise en place de la commission ad hoc le vendredi 25 avril 2025 à 10 h ; plénière de ratification le lundi 28 à 10 h et enfin la plénière de levée le vendredi 2 mai à 10 h.
Relativement à la résolution de mise en accusation, la Conférence des présidents a fixé la réunion de la Commission des lois le vendredi 2 mai à 15 h. La plénière est prévue le jeudi 8 à 10 h, selon les services de communication de l'institution parlementaire.
L'acte de mise en accusation devant l'Assemblée nationale est donc la première étape d'une longue procédure. Elle sera suivie de la phase cruciale de l'instruction qui, elle, est mise en œuvre par une commission exclusivement composée de magistrats. La loi relative à la Haute cour de justice précise : “Il est créé auprès de la Haute cour une commission d'instruction présidée par le premier président de la Cour d'appel de Dakar suppléé, en cas d'empêchement, par le président de la Chambre d'accusation de la même cour et comprenant quatre membres titulaires et quatre suppléants.” Ces derniers, prévoit la loi, sont désignés au début de chaque année judiciaire parmi les magistrats du siège de la Cour d'appel de Dakar par l'assemblée générale de la cour, hors la présence des magistrats du parquet.
“Le ministère public est, quant à lui, assuré par le procureur général près la Cour suprême. Et le service du greffe par le greffier en chef près la Cour suprême. Dans les 24 heures qui vont suivre la transmission de la résolution, le procureur général notifie la mise en accusation au président de la cour et au président de la commission d'instruction”, rappelait-on dans nos précédentes éditions.
Par ailleurs, il convient de noter que les arrêts de la cour ne sont susceptibles “ni d'appel ni de pourvoi”. Il en est de même des actes de la commission d'instruction qui “ne sont susceptibles d'aucun recours”, aux termes de l'article 21 al 2 de la loi sur cette haute juridiction. C'est d'ailleurs une des principales critiques, au-delà de sa composition essentiellement politique. Contrairement à une idée répandue qui estime que les politiques ne participent pas à la délibération, il faut noter que devant cette juridiction, les décisions sont prises de manière collégiale comme dans n'importe quelle juridiction. L'article 33 de la loi 2002-10 du 22 février 2022 est formel à ce propos. Il dispose : “La Haute cour, après clôture des débats, statue sur la culpabilité des accusés. Il est voté séparément pour chaque accusé sur chef d'accusation et sur la question de savoir s'il y a des circonstances atténuantes. Le vote a lieu par bulletin secret à la majorité absolue.”
L'ACCUSATION FANTÔME CONTRE MACKY SALL
Le Pastef veut juger l'ex-président pour "haute trahison", une infraction invisible dans les codes. Sans définition légale, sans jurisprudence, sans précédent au Sénégal : jamais procédure judiciaire n'aura reposé sur des fondations aussi fragiles
(SenePlus) - La confrontation entre le nouveau pouvoir et Macky Sall a pris un tournant judiciaire inédit. L'ex-président est visé par une procédure pour "haute trahison", une première dans le pays. Mais cette accusation, qui repose sur de présumées manipulations des chiffres de la dette publique, navigue en eaux troubles : aucun texte au Sénégal ne définit ce crime constitutionnel.
La proposition s'appuie sur un rapport explosif de la Cour des comptes qui a "mis le pays en émoi", comme le rapporte Jeune Afrique. Ce document accuse l'administration précédente d'avoir "minoré frauduleusement le montant de la dette publique" et, inversement, d'avoir "surévalué celui du PIB".
Pour Guy Marius Sagna, député de la majorité présidentielle qui a déposé la résolution le 11 avril dernier, ces manœuvres constituent "une politique de dissimulation systématique, de manipulation des chiffres publics et de mise en péril de la souveraineté financière de l'État", ce qu'il qualifie de "manquement d'une exceptionnelle gravité pouvant être qualifié de haute trahison au sens de l'article 101 de la Constitution", comme le cite JA.
Cette initiative n'a rien de surprenant. Selon le magazine panafricain, "plusieurs semaines" avant le dépôt de cette résolution, "le porte-parole du gouvernement, Moustapha Njëkk Sarré, n'avait-il pas prophétisé qu'« inévitablement, Macky Sall fera face à la justice » ?"
Des obstacles juridiques majeurs
Si l'adoption de la résolution semble acquise d'avance, compte tenu de la "majorité écrasante" dont dispose le parti Pastef à l'Assemblée nationale, son application se heurterait à plusieurs difficultés juridiques majeures, souligne Jeune Afrique.
Premier écueil, et non des moindres : "ni la Constitution, ni la loi organique sur la Haute Cour de justice, ni le code pénal ne fournissent la moindre définition de la 'haute trahison'". Cette absence de définition contrevient au principe fondamental de légalité des délits et des peines, selon lequel nul ne peut être condamné pour un crime qui n'aurait pas été préalablement défini par la loi.
Autre difficulté relevée par Jeune Afrique : dans les 56 pages du rapport de la Cour des comptes, "ce corps de contrôle ne mentionne nulle part le nom de l'ex-chef de l'État", ce qui fragilise considérablement la procédure.
Un concept rarissime sur le continent africain
L'infraction de "haute trahison" reste exceptionnelle dans la jurisprudence internationale, particulièrement en Afrique. Historiquement, ce chef d'accusation a plutôt été utilisé dans des contextes de collaboration avec l'ennemi, comme lors de la condamnation du maréchal Pétain en France en 1945, ou plus récemment celle de l'ex-président ukrainien Viktor Ianoukovitch en 2019, rappelle le magazine.
Dans un article de 2022 sur "le statut judiciaire de l'ancien président de la République" dans les pays francophones d'Afrique subsaharienne, Jean-Michel Olaka, enseignant-chercheur à l'Université Marien-Ngouabi de Brazzaville, cité par Jeune Afrique, précise que seulement une poignée de pays du continent définit cette infraction dans leur Constitution.
Au Tchad, elle inclut "tout acte portant atteinte à la forme républicaine, à l'unicité et à la laïcité de l'État", tandis qu'au Bénin, la définition reste "partiellement vague", englobant la violation du serment présidentiel ou "d'acte attentatoire au maintien d'un environnement sain".
Selon l'analyse de Jeune Afrique, la situation au Sénégal s'apparenterait davantage au cas brésilien de Dilma Rousseff, destituée en 2016 pour "maquillage des comptes publics". Toutefois, contrairement à l'affaire brésilienne, Macky Sall n'est plus en fonction, et la procédure d'impeachment n'avait pas débouché sur une condamnation pénale de l'ex-présidente.
Une "distraction massive" selon les proches de Macky Sall
Les partisans de l'ancien président dénoncent une manœuvre politique. Yoro Dia, ancien porte-parole de la présidence sous Macky Sall, fustige "une nouvelle tentative de distraction massive de Pastef, dont le Projet a pour moteur le 'détestisme'", selon ses propos recueillis par JA.
Il ironise en comparant la situation à celle d'autres pays : "Si Macky Sall devait être poursuivi pour haute trahison, que dire de la France où l'endettement public atteignait 113% du PIB à la fin de 2024, ou aux États-Unis où il était de 125% ? Emmanuel Macron va-t-il être condamné à la prison à perpétuité et Joe Biden à la chaise électrique ?"
LE SYSTÈME BRETTON WOODS À L'ÉPREUVE DE TRUMP
Après avoir claqué la porte de plusieurs organisations internationales, le président américain fait retenir son souffle au FMI et à la Banque mondiale. Premier contributeur, Washington pourrait bouleverser ces piliers de la stabilité financière mondiale
(SenePlus) - Dans un contexte économique mondial tendu, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale tiennent cette semaine à Washington leurs premières réunions depuis le retour de Donald Trump à la présidence américaine. Ces deux piliers du système économique international, nés des accords de Bretton Woods en 1944, font face à des remises en question sans précédent de la part de l'administration Trump, comme le rapporte Le Monde.
"Nous vivons dans un monde de revirements soudains et radicaux", a déclaré Kristalina Georgieva, directrice générale du FMI, le 17 avril dernier, précisant que cette situation "nous impose de réagir avec sagesse". Une déclaration qui intervient alors que Donald Trump a demandé une revue complète, d'ici le mois d'août, de toutes les participations américaines dans les organisations internationales.
Cette remise en question intervient dans un contexte où le FMI vient de revoir à la baisse ses prévisions de croissance mondiale pour 2025, à 2,8%, soit une réduction de 0,5 point de pourcentage par rapport à janvier. Cette révision est directement liée à l'offensive protectionniste de l'administration Trump.
Le FMI, qui a traditionnellement évité d'aborder frontalement la question des déséquilibres commerciaux, semble désormais prendre en compte les préoccupations de Donald Trump. L'institution pointe du doigt "une consommation trop faible en Chine, qui pousse cette dernière à écouler sa production vers le reste du monde et, a contrario, d'une demande américaine si élevée qu'elle creuse son déficit commercial et augmente sa dette", comme le souligne Le Monde.
Cette nouvelle approche paraît être une réponse au "principal grief de Donald Trump, à savoir que les Etats-Unis financent les excédents commerciaux du reste du monde en creusant leurs propres déficits."
Premier contributeur du FMI avec 16,1% des droits de vote (contre 6,1% pour la Chine), les États-Unis disposent d'un droit de veto sur les décisions importantes de l'institution. Si un retrait complet des États-Unis semble peu probable, certains analystes envisagent des scénarios où "les États-Unis pourraient contraindre le FMI à restreindre ses prêts en direction de certains pays rivaux ou alignés sur la Chine", selon William Jackson, économiste chez Capital Economics, cité par le quotidien français.
Elizabeth Shortino, ancienne directrice exécutive du FMI, souligne dans une note publiée mi-avril par l'Atlantic Council que "le coût de sa participation est faible alors que son rôle dans la lutte contre les crises financières est inestimable pour l'économie américaine". Elle ajoute qu'un retrait américain permettrait à la Chine, qui "se pose en nouvelle gardienne d'un ordre économique mondial fondé sur des règles, de jouer un rôle de premier plan dans l'institution."
Le FMI, dont la mission principale est d'assurer la stabilité du système financier international, dispose de réserves s'élevant à 1 000 milliards de dollars (environ 872 milliards d'euros) pour venir en aide aux pays en difficulté comme l'Égypte, le Pakistan ou l'Argentine. L'institution joue également un rôle central dans la restructuration de la dette des pays pauvres.
Dans ce contexte de tensions géopolitiques accrues et de guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, les discussions qui se tiennent cette semaine à Washington revêtent une importance particulière pour l'avenir du système économique mondial tel que nous le connaissons depuis près de 80 ans.
LE FIASCO JURIDIQUE DE PASTEF
"Un comble de narcissisme et de bêtise populiste" : c'est en ces termes que la République des valeurs dénonce la communication du régime suite à la décision du Conseil constitutionnel. Il fustige le parti au pouvoir pour sa "déraison"
Dans un communiqué acerbe, la République des valeurs/Réewum Ngor fustige le régime Pastef pour sa "déraison" et son "incompétence", pointant notamment le considérant 31 de la décision qui interdit explicitement l'amnistie de crimes graves comme l'assassinat, le meurtre ou la torture, même lorsqu'ils sont liés à l'exercice d'une liberté publique.
"La décision du Conseil constitutionnel n° 1/C/2025, déclarant contraire à la Constitution la loi portant interprétation de l’amnistie, constitue un camouflet pour le régime Pastef et ses juristes autoproclamés. Il est pour le moins curieux de constater qu’ils persistent dans la manipulation, tentant de faire passer une décision censurant leur loi pour une décision qui leur donnerait raison. Le comble du narcissisme et de la bêtise populiste.
Voici ce qu’il convient de retenir de cette décision du Conseil constitutionnel :
1. Les arguments soulevés dans les mémoires de l’Agent judiciaire de l’État et du Président de l’Assemblée nationale pour faire déclarer irrecevable la requête des députés de l’opposition n’ont pas convaincu le juge constitutionnel.
2. La loi dite interprétative modifie en réalité substantiellement la loi portant amnistie. À ce titre, elle doit être considérée, au regard de son contenu, comme une loi pénale plus sévère, insusceptible de rétroactivité. Contrairement au discours tenu par Pastef, cette loi n’était interprétative que dans son intitulé : sur le fond, elle constituait une modification de la loi d’amnistie.
3. L’article 1er, alinéa 2, de cette loi prétendument interprétative, qui permettait l’amnistie de crimes imprescriptibles (assassinat, meurtre, torture, actes de barbarie, etc.) dès lors qu’ils sont liés à l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit démocratique, viole la Constitution (voir considérant 31).
Contrairement à la communication de PAstef, fondée sur la manipulation, le considérant 31 de la décision du Conseil constitutionnel rejette fermement cette tentative de contournement juridique. Le juge constitutionnel rappelle clairement que ces crimes imprescriptibles ne peuvent faire l’objet d’une amnistie, même lorsqu’ils sont liés à l’exercice d’une liberté publique ou d’un droit démocratique.
C’est à se demander s’il ne règne pas au sein de Pastef une épidémie de déraison entretenue par un gourou comme dans certaines sectes apocalyptiques. Après avoir trouvé matière à interpréter une loi d’amnistie d’une clarté manifeste, les voilà récidiver en se glorifiant d’une décision qui étale toute leur incompétence."
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MANSOUR FAYE FACE À LA TEMPÊTE
Sur les 750 milliards du fonds Covid, il n'en a géré qu'une infime partie, et affirme même avoir économisé 5 milliards à l'État. L'ancien ministre, menacé de comparaître devant la Haute Cour de Justice, s'est longuement expliqué sur sa gestion de la crise
Alors que le ministre de la Justice vient de transmettre une demande de mise en accusation devant la Haute Cour de Justice pour cinq anciens ministres, dont Mansour Faye, dans le cadre du scandale présumé des fonds Covid, l'ancien ministre s'est exprimé sur le plateau de l'émission "Faram Facce" sur TFM pour défendre sa gestion.
Face à l'animateur Chérif Dia, il a fermement contesté les accusations portées contre lui concernant la gestion des fonds alloués pendant la crise sanitaire. "Dans un contexte spécial comme celui du Covid, nous avons pourtant fait preuve de transparence en lançant un appel d'offres malgré l'urgence de la situation", a-t-il affirmé.
L'ancien ministre a détaillé le processus d'achat de 1100 tonnes de riz destinées à être distribuées aux populations vulnérables. Selon lui, la procédure a été rigoureusement suivie : publication de l'avis d'appel d'offres dans les journaux nationaux le 1er avril 2020, attribution transparente par la commission des marchés au prix de 275 francs le kilo, et publication de l'avis d'attribution.
Mansour Faye rejette catégoriquement l'argument central du rapport qui fonde les accusations, à savoir le non-respect d'un arrêté de 2013 fixant les prix. "Cet arrêté était devenu caduc après quatre mois selon l'article 43 de la loi 94-63. Il ne pouvait donc pas être en vigueur en 2020", explique-t-il, estimant que cette base juridique erronée invalide toutes les conclusions du rapport.
L'ancien ministre souligne également l'ampleur de l'opération logistique menée avec succès : "C'était 1100 tonnes de riz, plus de 2000 camions pour livrer dans toutes les communes du Sénégal." Il ajoute que sur un budget global de 69 milliards, moins de 1% a été consacré à cette opération, et que son équipe a même "économisé quasiment 5 milliards pour l'État" en restituant des fonds non dépensés.
Face à ce qu'il considère comme une "manipulation politique", Mansour Faye dénonce un rapport émis par "une seule chambre de la Cour des comptes, même pas signé par le président de l'institution". Il voit dans cette procédure une tentative de "détourner l'attention des Sénégalais par rapport aux problèmes réels qui se posent" dans le pays.
"Ma conscience est tranquille", conclut l'ancien ministre, qui affirme avoir agi dans l'intérêt des populations durant cette période exceptionnelle, tout en respectant les procédures administratives.
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POUR AMADOU BA, CEUX QUI PARLENT DE REJET DE LA LOI INTERPRÉTATIVE DE L’AMNISTIE SE TROMPENT
Le député dénonce une "désinformation" autour de la décision du Conseil constitutionnel. "Je ne comprends pas l'agitation de certaines à aller dire au public que la loi d'amnistie a été censurée, c'est faux", défend-il
Le Conseil constitutionnel vient de rendre une décision majeure concernant la loi interprétative 08-2025, déposée par les députés de Pastef et votée le 2 avril dernier. Cette décision, loin de constituer un rejet total comme certains l'affirment, établit un principe fondamental concernant les limites de l'amnistie au Sénégal, selon Amadou Ba, initiateur du texte.
D'après les explications du député, invité de l'émission "Soir d'infos" sur TFM mercredi 23 avril, le Conseil constitutionnel a confirmé que "les crimes de sang, assassinats, meurtres et tortures ne peuvent être couverts par une loi d'amnistie", conformément aux engagements internationaux du pays. Le considérant 31 de la décision marque ainsi, selon lui, une évolution notable par rapport à la jurisprudence antérieure de 2005, qui accordait au législateur un pouvoir quasiment illimité en matière d'amnistie.
Cette clarification juridique ouvre désormais la voie aux victimes et aux familles des personnes assassinées ou torturées pour saisir les tribunaux et faire valoir leurs droits, dès la publication de la décision au Journal officiel, à en croire le parlementaire. "Toutes les victimes vont pouvoir brandir ce considérant 31 et se présenter devant les procureurs des différentes juridictions de ce pays", souligne-t-il.
À l'en croire, le Conseil a certes censuré une partie du texte concernant l'exclusion du bénéfice de l'amnistie pour ceux qui "exerçaient une liberté publique ou démocratique", mais cette censure partielle ne remet pas en cause l'objectif principal visé par les auteurs de la loi.
Le député a également justifié le choix d'une loi interprétative plutôt qu'une abrogation totale, qui aurait pu entraîner le retour en prison de toutes les personnes libérées et provoquer une désorganisation judiciaire conséquente.
Cette décision du Conseil constitutionnel intervient dans un contexte politique tendu, alors que l'Assemblée nationale s'apprête également à examiner la mise en accusation de cinq anciens ministres devant la Haute Cour de Justice, pour des faits qui concerneraient notamment la gestion des fonds Covid.