Viviane et Baba Hamdy, c’est, sans conteste, le couple le plus glamour du show biz sénégalais. Sans doute aussi le plus épié à l’heure actuelle. La collaboration des deux suscite toutes sortes de bruits et rumeurs. Mais ils n’ont jamais voulu répondre aux supputations, préférant se concentrer et se consacrer à leurs tâches urgentes. Nous les avons rencontrés en exclusivité pour échanger sur cette collaboration qui fait tant jaser et sur la vraie nature de leur relation.
Viviane
"J’ai suffisamment d’atouts pour relever tous les défis"
Vous venez de sortir votre premier album sous le label "Mille Mélodies" Qu’est- ce qui a changé ?
Viviane - Pas beaucoup de choses ! Il faut retenir que j’ai quand même un vécu dans ce milieu de la musique. Avoir fréquenté Youssou Ndour et le Super Etoile durant plus d’une décennie est assez révélateur et formateur. Il est vrai que j’ai pu acquérir une bonne base, depuis ce temps. Ajoutez à cela le fait que j’ai fourbi mes armes à Saly au sein des groupes de variétés avant que Michael Soumah ne me repère. Tout cela pour dire que j’ai suffisamment d’atouts en main pour relever tous les défis. Je ne suis pas une novice et le fait de travailler avec un nouveau label n’en est que plus motivant pour moi. Entre Baba et moi, c’est juste une nouvelle étape et un challenge que nous voulons gagnant-gagnant à tous les coups.
Concrètement, comment s’est passée cette collaboration ? Autrement dit, pouvez- vous revenir sur l’élaboration de cet album ?
Cela s’est fait de manière très détendue dans une atmosphère joyeuse et sans aucun stress. Comme j’ai eu à le dire, le jour du lancement de l’album, c’est un travail d’équipe et je remercie vivement Baba Hamdy, le patron du label, mais aussi mes musiciens du Jolof Band et tous ceux qui ont participé à la réalisation de cet album. Les résultats ont été à la hauteur de l’attente et je pense que ce produit sera très bien accueilli et consommé par le public.
Les textes ont été écrits et mis en musique par votre producteur. Quel a été votre apport personnel ?
Même si je ne suis pas auteur, j’ai mes idées que je défends. C’est un travail collégial et tout s’est fait dans une parfaite entente et dans un bel esprit. Je ne peux pas faire tout ce temps dans la musique sans avoir mon mot à dire. C’est ainsi que vous remarquerez que j’ai abordé de vrais thèmes de société. J’ai incité les jeunes à se consacrer aux études. J’ai donné des conseils aux jeunes filles et j’ai parlé de la situation difficile du pays sans oublier de lancer des appels à plus de gaieté et de joie. J’ai remarqué que les gens sont stressés et c’est pourquoi je leur demande de sourire et ne pas se laisser abattre. C’est ce qui explique le titre donné à l’album "Rétaane» (Sourire ndlr) C’est vrai que l’amour est important mais on ne peut toujours se contenter de le clamer dans toutes nos chansons.
Comment avez-vous travaillé alors ?
Je pense que j’ai déjà dit que tout se passait de manière collégiale et dans une ambiance joyeuse. En réalité, il n’y avait pas de quoi se mettre la pression.
Avez-vous toujours travaillé de la sorte avec vos producteurs ?
Je n’ai plus rien à prouver dans la musique et ce n’est pas mon premier produit. Ce qui signifie que cela n’avait rien d’extraordinaire. C’est juste une nouvelle expérience que je souhaite fructueuse.
Comment êtes-vous sortie de cette collaboration ? Que ressentez-vous après tant de travail intense ?
Une belle ambiance ! Baba est très rigoureux et on s’est comportés en grands professionnels. Et cela n’a pas été de tout repos. On ne peut pas sortir intacts d’une telle expérience. Il est tatillon et perfectionniste et cela peut entrainer parfois quelques frictions et des désaccords. Mais tout cela est normal dans une situation de cette nature. Cela se passe ainsi dans tous tous les studios du monde.
De cette complicité, les gens supputent que des liens se sont tissés entre vous et votre producteur. Vous confirmez ?
Je n’ai jamais parlé de ma vie privée et ce n’est pas aujourd’hui que cela va commencer.
Qu’en est-il de votre parcours à l’international ?
En ma qualité d’artiste, je ne saurais jamais cracher sur une collaboration au niveau international. Dans ce milieu, on prêche souvent le faux pour connaitre le vrai. Moi, je me suis toujours concentrée sur le volet international de ma carrière. C’est une autre manière de faire. Une autre vison et les choses vont prendre le temps qu’il faut. Je me concentre sur la promotion de mon nouvel album. C’est ma priorité pour l’instant.
Baba Hamdy
"Viviane est une icône, elle est ma priorité, pour l’instant"
Vous avez mis en place un procédé pour contourner la piraterie. Mais vous ne risquez pas de perdre des clients ? Tout le monde ne maitrise pas les Ntic…
Il s’agit d’une vraie révolution et d’une innovation de taille que le public gagnerait à soutenir. De nos jours, la musique rencontre d’énormes difficultés partout à travers le monde et particulièrement en Afrique. Cette crise profonde et avérée a considérablement plombé les ventes de CD et de tous les produits dérivés. Sous nos cieux, nous avions longtemps choisi la facilité en essayant de copier avec plus ou moins de bonheur tout ce qui se faisait aux USA, en Europe, en Chine ou encore au Japon etc.
C’est donc à partir de ce postulat et en usant de mes nombreuses casquettes de musicien, compositeur, arrangeur et patron de label que j’ai décidé d’apporter ma pierre à l’édifice. Ayant bien cerné les difficultés rencontrées par les Africains pour accéder à la musique et à tous ces produits dérivés, j’ai créé une application téléphonique révolutionnaire à plus d’un titre. Ce n’est pas une idée de plus, mais bien une application conforme accessible et adaptable à la réalité africaine, mondiale et surtout sénégalaise. Cette simple "strong application" peut facilement aider à booster et faire progresser très rapidement les ventes de chansons, d’images et de vidéos de tous les artistes. Peu importe l’endroit où se trouvera l’usager au Sénégal, en Afrique et dans le monde, il nous sera possible de lui faire parvenir, les morceaux, la vidéo. Et, cerise sur le gâteau, quelques photos et vidéos du Making off (étapes de création et de confection ndlr) d’un album par l’envoi d’un simple message téléphonique. Ce qui signifie que l’acheteur n’aura même pas besoin de disposer d’une connexion Internet. Cette innovation vise à contourner l’écueil de la carte bancaire car elle peut bien se faire sans ce sésame. Il faut dire qu’aujourd’hui, les plateformes de téléchargements arrangent beaucoup plus l'Europe et l’Amérique. Et si on pousse la réflexion, on se rend compte que tout le monde ne dispose pas de carte bancaire dans le monde à plus forte raison en Afrique, particulièrement au Sénégal et dans la diaspora. Cette trouvaille va considérablement améliorer notre niveau de vie. Il suffit d’imaginer que l’on puisse vous transférer l’album de Viviane, Thione Seck ou Youssou Ndour ou même Beyonce, comme on le fait tous les jours par le biais de "Wari" ou Seddo et autres systèmes de transfert d’argent et de crédit téléphonique. A première vue, cela peut paraitre bizarre mais il s’agit bien d’une manière originale et hardie d’éviter la piraterie. Et aussi de contrôler chaque vente par le canal d’un simple appareil téléphonique. Il est évident que, de nos jours, la plupart des personnes disposent d’un numéro de téléphone et cela partout à travers le monde. Comme vous pouvez le constater, il n’est pas nécessaire de maitriser les Tics pour disposer de cette belle opportunité. Cela permet aussi de lutter contre la piraterie car les sons et images ne sont pas transférables.
Travailler avec Viviane, est-ce un challenge ?
Pas du tout. C’est juste une expérience de plus car il ne faut pas oublier que j’ai eu à travailler avec de nombreux artistes d’ici et d’ailleurs. Je citerai dans ce lot Sean Paul qui est une référence mondiale. Au niveau local, je ne vous ferai pas l’injure de citer les artistes avec lesquels j’ai eu à collaborer et qui sont connus de tous.
Elle a toujours travaillé avec son ex- mari et tous ses albums ont été des succès. A partir de ce moment, la tâche ne vous apparaissait pas difficile ?
Comme je l’ai dit tantôt, j’ai aussi acquis une certaine expérience et cela est indéniable. Viviane est un talent reconnu et notre collaboration constitue en soi une jonction de deux profils intéressants. Il n’y a rien à prouver ou encore moins de challenge à relever. C’est juste une collaboration franche et sincère entre deux grands artistes. Nous avons combiné nos forces pour sortir ce produit. Mais, comme je l’ai dit tantôt, Viviane est ma priorité pour l’instant, même si j’ai dans mon portefeuille d’autres artistes que je compte produire dans un avenir assez proche.
Avez-vous jamais douté ?
Encore une fois, ce n’est pas un challenge et j’ai déjà travaillé avec beaucoup de grands artistes. C’est juste une nouvelle avancée dans mon travail. Il est vrai que Viviane n’est pas n’importe qui dans ce milieu et que c’est très intéressant de travailler avec elle. Mais encore une fois, je suis un producteur à la recherche d’un bon produit et la collaboration n’en sera que plus bénéfique si je travaille avec une icône de sa trempe.
Dans quelles conditions s’est déroulé le travail ?
Il faut fréquenter les studios pour savoir que rien ne se fait dans la facilité. Il faut travailler dur durant des jours et nuits avant d’en arriver à un résultat plus ou moins probant. On n’est jamais satisfaits et cela peut se ressentir quelquefois au niveau des nerfs et c’est tout à fait normal. Mais cela reste toujours dans le cadre du travail. Comme nous avons tous le même objectif, nous finissons toujours par nous retrouver autour de l’essentiel.
Qu’est-ce que vous avez fait de plus par rapport aux autres opus de Viviane ?
Vous conviendrez avec moi que la bienséance ne voudrait pas que je me permette de répondre à cette question. Je ne peux pas cracher sur ce qu’elle a déjà fait. Il s’agit juste de réunir nos efforts pour obtenir un résultat satisfaisant. C’est ma seule ambition et rien d’autre.
Quid d’une promotion que l’on ne sent pas ?
C’est vrai que, depuis la sortie de l’album, nous avions beaucoup de contrats à honorer. Aussitôt après l’enregistrement, nous avions effectué une tournée européenne. A notre retour, on a embrayé sur la Gambie et des prestations ponctuelles à Dakar. Ce qui nous a quand même pénalisés et nous avions pris du retard. Comme nous ne voulons pas faire les choses à moitié, nous avons mûrement réfléchi à une bonne stratégie à mettre en place. Cependant, la campagne médiatique va annoncer les différentes sorties de l’artiste pour la promotion. Nous procéderons, bientôt, à une cérémonie de dédicaces. Avant cela, une campagne d’affichage sera déployée à travers toute la ville. Il y aura aussi des sorties et des spectacles.
Il se raconte beaucoup de choses sur votre couple, qu’en dites-vous ?
Je travaille et je n’ai pas de temps à consacrer à ce genre de détails. Je ne commente jamais tout ce qui se dit sur moi. Je n’ai que mon travail et je m’y consacre entièrement. Cela ne me laisse pas le temps de m’intéresser à des rumeurs. Je n’en dirai pas plus et je suis désolé que dans ce pays les gens aiment radoter.
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CES COUPLES ET DUOS CÉLÈBRES QUI ONT MARQUÉ LA MUSIQUE SÉNÉGALAISE
Baba Hamdy et Viviane ne sont pas les premiers à ouvrir cette forme de collaboration poussée entre hommes et femmes au Sénégal.
Fatou Talla Ndiaye et feu Laye Mboup ont longtemps partagé le micro. La même Fatou Talla Ndiaye a eu à intégrer le Super Diamono aux côtés de son alors nouveau mari, Omar Pène, au milieu des années quatre-vingt. Elle reprenait souvent avec le leader du Super Diamono le titre fétiche de Kiné Lam "Mame Bamba".
Abdoulaye Bamba Seck et sa femme Fatou Kiné Mbaye, les parents de Coumba Gawlo, ont souvent partagé le même micro et leur titre fétiche dédié à Mame Bamba a fini par charmer tous les mélomanes au milieu des années 90.
Ouza Diallo qui a souvent travaillé avec des femmes a partagé le micro et la scène avec sa femme Coumba Sidibé qui est aussi la mère d’Adjouza. Feu Soundioulou Cissokho a fait le tour du monde avec sa femme Mahawa Kouyaté à ses cotés.
Même s’il a cessé de jouer du tamtam depuis belle lurette, le tambour major Mame Less Thioune a vécu avec Ndéye Mbaye "Djine ma Djinema" avant de convoler avec Daro Mbaye qu’il soutient beaucoup dans sa carrière. Ndiouga Dieng a aussi eu à travailler avec Ndèye Mbaye Djinema Djienema qui a eu à lui assurer des chœurs.
Le parolier Birame Ndeck Ndiaye a écrit presque toutes les chansons de son ex-femme Adja Sy qui est actuellement à la tête de la Place du Souvenir. A Thiès, le couple composé de Djally Bou Nioul Ablaye Seck et Fatou Mbaye a connu son heure de gloire. Ce qui lui avait permis d’être repéré et produit par Youssou Ndour himself.
Viviane a beaucoup travaillé avec Boubacar Ndour avant leur rupture. Ils ont même continué un instant avant de se tourner vers Baba Hamdy. Cheikh Tidiane Tall a beaucoup travaillé avec les femmes mais son duo avec Kiné Lam (avec qui il n’était pas marié) a été des plus aboutis. Ensemble ils ont sillonné le monde et commis de nombreux albums au sein du groupe "Kaggou".
Il y a eu aussi la diva Fatou Guéwel et son ex-mari Mbaye Guèye "Petit Là" et aussi Fatou Guéwel et Mapenda Seck. Ami Collé Dieng a longtemps cheminé avec son ex –mari, le danseur Ndiaw Samb, avant leur rupture.
Comme il est loisible de le constater, Baba et Viviane ne constituent pas une exception. Sur le plan international, on peut citer des exemples comme Ike and Tina Turner, Johnny Halliday et Sylvie Vartan, Stone et Charden ou encore Bob et Rita Marley…
Près de 10 mois après sa sortie de prison, Cheikh Yérim Seck, journaliste condamné pour viol, est un homme neuf : morale de pur bigot, foi chevillée au corps, volonté intacte, ambitions majuscules, regard lucide et discours aseptisé. Chez lui à Ngor, il accueille avec petit protocole, poignée de mains sympa et l’empressement d’un maître d’hôtel. L’hôte respire la forme et n’a peur de rien dans son salon sur la terrasse de sa résidence. Pas même pour causer des sommes colossales investies dans la série Un café avec, ni pour agiter bien haut ses appétences politiques, encore moins pour passer à la moulinette l’actualité politique. Et quand le feu roulant de l’interrogatoire le ramène aux souvenirs glauques de son récent passé carcéral, Cheikh Yérim Seck accepte toujours, sans ciller, de poser pour Le Quotidien. Entretien.
Cheikh Yérim Seck, vous êtes juriste de formation, journaliste de profession, aujourd’hui dans la production. Pourquoi ce choix ?
J’ai fait ce choix parce qu’en 2009, Boubacar Diallo m’a contacté pour me dire qu’il avait un projet de télé- réalité. Et comme c’est un garçon pour lequel j’ai beaucoup d’estime, comme c’est un quelqu’un avec qui j’envisageais de travailler depuis longtemps, je l’ai suivi dans son idée en tant que producteur. Donc, on a commencé à faire Un café avec, saison 1.
A la fin de la première saison, ça a commencé à emballer les annonceurs. Ce qui nous a amenés à faire une deuxième saison. Au bout de la deuxième saison, des chaînes internationales se sont manifestées pour diffuser la série en anglais et en français.
Donc l’appétit venant en mangeant, nous étions obligés à un moment donné de mieux structurer la série, de la perfectionner.
Contrairement aux précédentes, on vit là une sur-médiatisation de votre image avec la troisième saison. Est-ce voulu ou est-ce plutôt le fruit du hasard ?
D’abord du début jusqu’à la fin de la première saison, personne ne connaissait mon rôle dans cette série. Et c’est comme ça que je l’avais voulu. Mais il se trouve qu’à la fin de la première saison, Boubacar Diallo, dans les making-off, a dit que c’est Cheikh Yérim Seck qui était derrière cette série. Par la force des choses, la presse est venue m’interroger et j’étais obligé de confirmer cette information.
Au cours de la deuxième saison, j’ai toujours observé le recul d’usage. Cette année, je me suis impliqué personnellement parce que c’est compte tenu de la dimension. Aujourd’hui, on ne parle plus qu’au Sénégal et aux Sénégalais, on parle à des chaînes d’un niveau international. On a affaire à une production qui coûte plusieurs centaines de millions.
Et l’enjeu est tellement important. Le spectre est tellement large. Le public auquel on parle est tellement important que j’étais obligé de m’impliquer dans la communication de la série.
Parce qu’on passait d’une dimension nationale à une dimension internationale, on est passé d’une petite série à une série de standing international. On est passé d’un niveau d’implication des sponsors assez moyen, à un niveau maximal d’implication. Donc tous ces enjeux-là font que j’étais obligé de m’impliquer.
Les moyens financiers qui ont été mobilisés sont colossaux. Où est-ce que vous avez tiré ces fonds ?
Il y a une partie qui est financée par des prêts bancaires et par des avoirs propres. Il faut aussi dire que j’ai mobilisé des deniers personnels plus les prêts bancaires.
Quand même il y a un matériel qui a été assez lourd à acquérir. Par exemple rien que le matériel avec lequel on va tourner la série a coûté plus de deux cents millions. Ce sont des moyens très importants.
Donc il fallait un préfinancement, heureusement que les banques nous ont accompagnés. Mais j’ai mis aussi mes deniers personnels.
Vous avez même fait la comparaison avec les moyens utilisés pour tourner la série américaine 24h chrono...
Je confirme que c’est le même matériel qui a tourné 24h chrono, qui a tourné la troisième saison de Un café avec. Et c’est exactement le même matériel.
Cela confirme-t-il la rumeur qui dit que Cheikh Yérim est un homme riche ?
Non, ça n’a rien à voir. Ce n’est pas l’argent de Cheikh Yérim Seck en fait. Ce sont des montages financiers avec mon argent personnel et l’argent des banques qui va être remboursé par le sponsoring. Ce n’est pas du mécénat.
C’est un investissement qu’on a fait. Et comme la série aujourd’hui, selon un sondage d’Orange, tous concepts et toutes émissions confondus, est la plateforme de communication la plus crédible et la plus efficace au Sénégal. On a beaucoup de sponsors qui viennent. Ils vont financer la série en fait. Cheikh Yérim Seck n’a fait qu’avancer de l’argent, en termes d’apport personnel avec l’aide des banques.
Quelles sont les innovations de la Saison 3 de Un café avec, sa démarcation avec les deux précédentes ?
Les deux premières saisons étaient strictement destinées à la consommation du public sénégalais. Cette troisième saison est destinée à une consommation universelle. Si vous voyez le premier épisode, vous vous rendrez compte que cela n’a rien à voir.
On est passé d’une sorte de feuilleton à un film qui respecte toutes les normes internationales en matière d’ergonomie, de niveau de jeu, de qualité de jeu, de qualité d’image, tout. Vraiment tout a changé. Aujourd’hui on a aligné Un Café avec sur les normes internationales.
Même par rapport à la langue utilisée ?
La langue, c’est le wolof pour le Sénégal, le français pour la chaîne internationale de langue française qui va le diffuser et c’est l’anglais pour la chaîne américaine avec laquelle on a travaillé.
Ce sera du sous-titrage ?
Non, ce sera de la traduction directe avec doublage de voix.
La réalisation a été confiée à Gelongal ?
Oui, elle a été faite par Gelongal. C’est un groupe de jeunes Sénégalais dynamiques qui ont été primés un peu partout en Afrique, qui ont fait beaucoup de résultats. Ce sont des gens sur qui on a misé cette année pour mettre le film à un certain niveau.
Nous avons une inquiétude. Cheikh Yérim Seck s’est toujours illustré à travers la pertinence de ses analyses politiques, mais aujourd’hui vous avez déserté la sphère médiatique.
Je ne peux pas déserter la sphère médiatique. Moi je suis analyste de façon acharnée. Je suis résolument journaliste, c’est évident. Mais la lourdeur de ce projet-là a nécessité beaucoup de déplacements à l’étranger, beaucoup de réunions avec les banques, beaucoup de réunions avec l’équipe de réalisation, beaucoup de réunions avec les scénaristes, beaucoup de réunions avec nos partenaires extérieurs. C’était vraiment un truc du type 20h/24h.
Mais Yerimpost au sein du site Dakaractu a disparu...
Ça c’est un choix personnel. C’est moi qui ai décidé, compte tenu que Dakaractu a fonctionné de façon correcte en mon absence, de laisser Dakaractu fonctionner en électron libre sans moi. Il faut dire que compte tenu de tous les chantiers que j’avais ouverts quand je suis sorti de prison, je ne pouvais intégrer Dakaractu dans mon planning.
Mais vous êtes toujours journaliste ?
Absolument ! (Rires)
Vous êtes également leader du mouvement C221. Ce mouvement a-t-il des appartenances politiques ?
C’est-à-dire ?
Si vous militez en faveur d’un parti politique...
Non, C221 est un mouvement citoyen qui cherche à instaurer dans ce pays-là une citoyenneté responsable et participative. C’est mouvement citoyen qui cherche à changer les choses par le biais d’une participation claire. Comme le dit notre slogan «xam li gnu beug défal ko sunu boop» (Savoir ce qu’on veut et nous donner les moyens de le réaliser).
C’est vraiment la citoyenneté active participative. Parce qu’on a besoin d’avoir une opinion publique dans ce pays, on a besoin d’une citoyenneté responsable et participative, d’une citoyenneté vigilante. C221 est entièrement dans son rôle, nous n’appartenons a aucune formation politique, ni affilié à une coalition.
Mais lors des élections locales, vous avez collaboré avec des partis politiques...
Mais l’élection locale est un enjeu local. A Tivaouane on a fait une coalition qui a gagné, à Pikine on a fait une coalition qui a gagné. C’est normal, l’élection locale est un enjeu local. Si on a un candidat local qui peut trouver une coalition pour gagner, pourquoi pas ?
On avait annoncé votre candidature à la mairie de Louga.
Je n’ai jamais été candidat. Ceux qui l’ont annoncée sont allés très vite en besogne. Moi je suis sorti de prison le 3 janvier 2014. A l’époque, les gens qui devaient être candidats là- bas avaient au moins une année de longueur d’avance sur moi. Je ne pouvais pas me permettre en quelques mois de préparer une candidature. Cela n’aurait même pas été crédible. Je n’ai jamais été candidat à quoi que ce soit.
Dans ce cas, jusqu’où vont vos ambitions avec C221 ?
Mon ambition avec C221 c’est de développer dans ce pays une citoyenneté responsable et participative. C’est-à-dire un mouvement qui ne soit pas complice des partis poli- tiques. Un mouvement citoyen qui va être une force de proposition. Aujourd’hui au moment où je vous parle, le mouvement se massifie partout au Sénégal.
On est en train de préparer des séminaires de formation. J’attendais de lancer la série pour dérouler les programmes du mouvement. Vous voyez ce que je veux dire ? Nous voulons développer une opinion publique dans ce pays, une citoyenneté responsable. Nous voulons que les citoyens s’impliquent, qu’ils deviennent des garde- fous naturels de la République.
Mais nécessairement il faudra effectuer un maillage dans le territoire national et éventuellement poser vos pions pour commencer à dérouler une dynamique d’action...
Citoyenneté Sénégal est partout au Sénégal. Au moment où je vous parle (Lundi dernier), il n’y a aucune localité où nous n’avons pas une représentation. Les structures sont en train de fonctionner et sous la houlette du coordonnateur national Mouhamed Diop. Des actions sont en train d’être déroulées et le mouvement se massifie.
Mais par rapport à vos ambitions, quelles sont celles ponctuelles et prochaines. C’est la conquête du pouvoir ?
Non, la conquête du pouvoir n’est pas une obsession pour moi. Mon ambition à travers Citoyenneté Sénégal, c’est faire de sorte que nos sorts ne soient plus laissés entre les mains de politiciens professionnels qui font un peu de ce qu’ils veulent de nous. Je pense que cela doit changer. Et pour que ça change il faut que tous les citoyens s’impliquent.
Vous savez, les pays développés ont une force, c’est qu’il y a des garde-fous naturels créés par les citoyens. C’est l’opinion publique, ce sont les associations etc. Nous voulons développer cette culture au Sénégal.
Dans sa phase pratique, matérielle, lorsque vous allez mettre en œuvre cette citoyenneté, comment cela va se manifester ?
D’abord cela va commencer à se manifester avec les communes qu’on a gagnées, on va les gérer autrement. Au-delà des communes qu’on a gagnées, on a un plan d’action national qu’on va bientôt dérouler.
Qui peut accoucher sur une candidature à la Présidentielle de 2017...
Non absolument pas. Le défi pour nous c’est de consolider le mouvement. C’est de le massifier, de développer nos idées, de rallier le maximum de Sénégalais à cette dynamique-là.
Pour en venir à la position de C221 avec les questions politiques de l’heure, le débat sur les Accords de partenariat économique (Ape) est actuel. Que vous inspire cette question ?
Je pense que les Ape sont la preuve que quand il est question de gérer les intérêts stratégiques, tous les pays du monde savent s’organiser sauf les Africains. C’est aussi simple que ça. Les Européens, dans cette histoire d’Ape, ne gèrent que leurs intérêts stratégiques. La leçon qu’on devait tirer des Ape c’est justement ça, de nous réunir entre Africains, de créer un marché commun africain, de renforcer l’intégration économique africaine tout en sachant que nous Africains nous ne pouvons compter que sur nos forces.
Ça c’est fondamental. Mais au lieu de cela, les Ape ont eu l’effet inverse, ils ont divisé les Africains alors que les Européens devant leurs intérêts stratégiques se sont réunis et ont fait bloc contre les Africains. Voilà la leçon qu’on devait en tirer, on en a tiré une leçon inverse et c’est dommage. La moralité de l’histoire c’est qu’il faut que les Africains sachent que c’est eux et eux seuls qui peuvent prendre en charge leurs intérêts stratégiques.
Les Asiatiques quand ils ont voulu se développer, ils se sont déconnectés de tout le monde, ils ont créé leur marché intérieur, exigé aux Occidentaux chaque fois qu’ils leur vendaient de la technologie, de les former à ces technologies, ils ont perfectionné cette technologie et aujourd’hui se sont développés. Mais il n’y a aucune partie du monde qui doit compter sur une autre pour se développer.
Mais pensez-vous que la façon dont ces Ape sont conçus et par rapport aux offres qu’ils proposent qu’il y ait un juste équilibre entre la contrepartie africaine et celle européenne ?
Je pense que l’Europe fait du protectionnisme tout en déprotégeant l’Afrique. La Côte d’Ivoire fait des bananes et parce que les Antilles font aussi des bananes, la France dit que la banane n’entre pas dans l’Union européenne.
Pendant ce temps, la France peut introduire ses marchandises partout en Afrique sans aucune limitation. Je pense que c’est démesuré, c’est déséquilibré, c’est conçu de façon injuste, inéquitable vis-à-vis de l’Afrique.
Passons à la question du choix de développement proposé par le Président Macky Sall et qui est assis sur le Plan Sénégal émergeant (Pse). Aujourd’hui, certains de ses amis voient là une panacée et d’autres le critiquent. Pensez-vous vraiment qu’il réponde aux exigences de développement du Sénégal ?
Je n’ai pas lu tout le Pse, mais j’ai lu beaucoup de pans de ce plan. Je pense que c’est un projet cohérent et bien conçu. En tout cas sur le papier. On ne peut pas dire le contraire. Ce qu’ils ont conçu en matière agricole, en matière d’industrialisation, tout ça c’est bien. Mais là n’est pas la question. Depuis notre indépendance, on ne fait que concevoir des plans de développement.
Le Pse a remplacé le Pnds, un autre plan de développement qui jusqu’à présent n’a pas réussi à nous développer. Honnêtement sur le papier, le Pse est excellent. En tout cas sur les questions que je connais, celles liées à la communication, les nouvelles technologies de l’information, la civilisation numérique, la production, c’est excellent. Mais le problème n’est pas la conception théorique, mais la mise en œuvre pratique. Et c’est ça qui me pose problème au niveau du Pse.
Aujourd’hui tu veux industrialiser le pays, tu crées un fonds d’investissements prioritaires qui s’appelle le Fongip, tu ne peux lui donner que 5 milliards sur un budget de plus de 2 000 milliards. Ça c’est du concret pour montrer que le discours est en déphasage avec l’acte. Tu veux créer aujourd’hui l’autosuffisance alimentaire, tu ne peux même pas trouver 12 milliards pour subventionner l’agriculture.Vous voyez ce que je veux dire ?
C’est ça le problème de fond. Pendant ce temps, il y a une rallonge budgétaire de 19 milliards sur le budget de la Présidence. Ça c’est du concret. C’est cela mon problème, il se situe au niveau de la mise en œuvre pratique, mais du point de vue de la conception théorique, il n’y a aucun problème. Si on avait la capacité technique, la capacité politique, la volonté politique de mettre en œuvre le Pse, c’est clair qu’on s’en sortirait.
Que pensez-vous des milliards dépensés pour mettre sur pied le centre de conférence de Diamniadio ?
C’est beaucoup d’argent. 57 milliards, c’est énormément d’argent. Mais cela dit, dans un pays il faut des fleurons. Mais 57 milliards c’est trop, trop cher. C’est peut-être aussi parce qu’on l’a fait dans l’urgence, et qu’il fallait le faire en 11 mois qu’on n’a pas pu faire un appel d’offres.
D’où l’utilité d’une politique suivie, parce que gouverner c’est prévoir. Je pense que s’il y avait la planification nécessaire, on aurait pu avoir le temps pour passer un appel d’offres qui aurait à coup sûr réduit substantiellement le prix. Donc, tout se tient dans cette affaire- là.
Déjà deux ans à la tête du pouvoir pour Macky Sall. Quel bilan dresse le C221 ?
Moi je pense qu’il y a du positif comme du négatif. Je ne suis pas nihiliste. Il faut dire que la façon de gouverner a changé, c’est évident. La gouvernance de Macky Sall est beaucoup plus sobre que celle de Wade. Les mallettes d’argent ne sortent plus du Palais pour alimenter des lobbies religieux, syndicaux ou partisans, ça c’est un fait.
Deuxièmement, les dépenses de l’Etat ont été réduites. Par exemple rien que sur le téléphone, c’est plusieurs milliards qui ont été économisés, ça il faut le dire. Donc de ce point de vue, du point de vue de la qualité de la gouvernance, de la modernité du leadership, il y a des pas qui ont été franchis incontestablement.
Cela dit, les problèmes des Sénégalais restent intacts. On ne mange pas mieux à sa faim au Sénégal, on n’est pas mieux traité quand on est malade au Sénégal, l’éducation ne se porte pas mieux. La preuve on sort d’une année blanche ou on est en train de s’acheminer vers une année blanche. Donc les problèmes de fond encore intacts. Donc la symbolique, la forme a changé, mais le fond reste inchangé. De mon point de vue c’est un bilan plus que mitigé.
Cheikh Yérim Seck, comment vous sentez-vous, plusieurs mois après être sorti de prison ?
Je me sens bien honnêtement. Par la grâce de Dieu tout marche bien. Je me suis recentré sur l’essentiel parce que la prison a cette vertu de recentrer sur l’essentiel.
C’est-à-dire quoi exactement ?
L’essentiel pour moi c’est la famille, c’est la foi en Dieu. L’essentiel c’est de savoir qui t’aime et qui ne t’aime pas. Ça c’est important parce que des épreuves comme celle-là t’éclaircissent l’horizon, te donnent une idée sur les uns et les autres. Elles permettent de distinguer tes amis de tes compagnons, donc de te recentrer sur l’essentiel.
L’essentiel pour moi c’est surtout la foi en Dieu. C’est important pour moi parce que la prison a été une sorte de retraite spirituelle, une redécouverte de Dieu, de la religion musulmane. Cela m’a permis de rafraîchir ma connaissance dans le Coran, d’apprendre plus profondément le Coran, de rechercher dans la connaissance du Livre saint et des hadiths du Prophète Mohamet (Psl).
Honnêtement de ce point de vue, la prison m’a beaucoup apporté et ça permis de réfléchir sur beaucoup de choses. Par exemple tout ce que je suis en train de dérouler dans le cadre d’Un café avec, je l’ai pensé et conçu en prison. J’ai fait aussi un livre de réflexion sur le Sénégal qui me semble avoir tracé des pistes de réflexion intéressantes. Au moins je me sens bien.
Sous ce rapport, vous pensez que votre séjour carcéral a été tout à fait bénéfique ?
Absolument. Moi je pense qu’à un moment donné de ma vie c’était un moment de rectification, de réorientation, de remise en cause qui était fondamental, honnêtement. Je remercie Dieu de m’avoir donné cette opportunité extraordinaire.
Vous parlez de rectification, est-ce parce que vous vous êtes rendu compte que vous aviez dévié du chemin que vous vous étiez tracé initialement ?
Non, non, c’est qu’il arrive des moments dans la vie d’un homme où tout s’emballe. Vous savez, il arrive à tout un chacun de s’emballer avec le temps, mais quand on se retrouve seul entre quatre murs... Moi je suis resté quinze ans où je n’ai jamais eu de pause.
Pendant les années que je travaillais à Jeune Afrique j’étais dans les avions tous les jours. Quand je suis venu au Sénégal, je me suis attaqué à plusieurs projets qui me prenaient beaucoup de temps. Je n’avais pas le temps de réfléchir sur moi- même, sur mon rapport à Dieu, sur ce que je dois faire, sur ce que je ne dois pas faire. La prison m’a permis de me recentrer sur ça.
Y avez-vous repensé à vos rapports avec les autres ?
Absolument. Ça c’est le premier enseignement qu’on tire.
Et quelles sont les leçons fondamentales que vous avez tirées ?
La première leçon est que le destin est tragique et que tout est possible dans la vie d’un être humain. Ça c’est une leçon fondamentale. La deuxième leçon c’est que dans la vie il faut s’habituer à tout. Tous ceux qui ont fait la prison dans les conditions du Sénégal savent ce que signifie la prison en termes d’insalubrité, de rudesse, de dureté des conditions de vie.
Quand on a eu à la chance dehors de vivre dans un certain confort et de se retrouver en prison, rien que ce contraste est source d’enseignements. La prison permet de beaucoup comprendre sur la nature humaine. Quand on sort de prison on peut trier dans son entourage, on peut savoir quels sont les vrais amis, qui sont les compagnons de circonstances.
Mais aussi et surtout, comme disait Nelson Mandela, s’il y a un seul avantage en prison c’est que ça confère le temps de réfléchir et ça m’a permis énormément de réfléchir. Et je crois que ce que j’ai fait depuis que je suis sorti de prison montre quand même que j’ai réfléchi en prison.
Et comment avez-vous vécu ce passage du luxe auquel vous étiez habitué à l’inconfort de la prison ?
Mais je me suis dit que dans le Coran, Dieu lui-même dit : «Je suis le Maître de l’être humain, je décide de son destin comme je veux, comme je l’entends, quand je veux.»
C’est une vérité fondamentale à laquelle je suis revenu. La meilleure façon de vivre c’est de se dire qu’on est un esclave entre les mains de Dieu qui peut faire de nous ce qu’il veut et quel que soit notre destin on doit l’assumer avec la foi. Et franchement cela m’a permis de raffermir ma foi. Il y a des gens qui me disent : «Toi on dirait que tu n’as jamais été en prison, vu la façon dont tu es sorti de prison.»
Je dis toujours que ma seule arme est que Dieu m’a aidé à avoir la foi. Aujourd’hui il y a beaucoup de détenus politiques que je suis allé voir. Je leur ai dit : «L’unique façon de résister en prison, c’est d’avoir foi en Dieu.» Il n’y a en pas une autre. C’est une épreuve tellement dure.
Mais il n’a pas manqué des soirs de pur cafard comme on dit...
Ah bien sûr. Ça arrive à tout le monde en prison. Cela aurait été mentir que de vous dire le contraire.
Et comment est-ce que vous les viviez ? Toujours bardé de votre foi initiale ?
Oui, mais il y avait des moments qui sont durs, où je me levais et restais toute la journée dans ma cellule parce que je n’étais pas bien. Je prenais mon chapelet, je l’égrenais toute la journée et le lendemain ça allait mieux.
Avez-vous rendu visite à Karim Wade ?
Je ne l’ai pas encore fait. Mais je suis en train de le faire parce que j’avais un problème d’autorisation au niveau de la Cour de répression de l’enrichissement illicite, mais là je crois que ça va se décanter cette semaine et je vais aller lui rendre visite.
Il y a 25 ans, la Francophonie épousait une forme plus politique. Aujourd’hui, certains pensent que cette ossature lui donne le droit et surtout le devoir de s’impliquer davantage dès qu’il s’agit du non-respect de principes démocratiques, la violation de la Constitution par exemple. Dans des situations pareilles, elle ne devrait pas se taire. C’était là l’un des sous-thèmes du Colloque sur la Francophonie qui prend fin ce jour, vendredi 31 octobre.
C’est le 1er Sommet de Dakar, en 1989, qui «scelle la vocation politique de la Francophonie (…) c’est son acte de naissance politique». Même si, selon le président des cinéastes sénégalais associés, Cheikh Ngaïdo Bâ, les acteurs culturels, eux, n’ont jamais pensé qu’il puisse en être autrement, parce que ce sont des chefs d’Etat qui ont signé le traité de Niamey en 1970. Pour Christine Dessouche, Maître de Conférences Honoraire de l’Université de Paris I, Senghor lui-même l’avait compris, «le projet initial de la Francophonie était d’envergure politique ».
En 1997, à Hanoi au Vietnam, l’organisation se dote même d’une nouvelle Charte et élit un Secrétaire général, en la personne de l'Égyptien Boutros Boutros-Ghali. La Déclaration de Bamako (2000) qui suit, est un «texte normatif et de référence» sur la démocratie, les droits et les libertés dans l’espace francophone. Pour y parvenir, explique l’avocat Robert Dossou, ancien président de la Cour Constitutionnelle au Bénin, il aura fallu travailler pendant 10 ans.
Professeur de Droit public, Albert Bourgi, qui interroge le concept de démocratie, se demande si celle-ci se limiterait uniquement à la tenue d’élections. Sans vouloir citer aucun pays, ni aucun contexte politique, il affirme pourtant que dans ce domaine, la Francophonie «n’a jamais été un modèle», elle qui a parfois «labellisé des élections qui n’ont été que des farces».
Ce que dénonce aussi Cheikh Ngaïdo Bâ, c’est la politisation d’une institution qui souffre d’un manque de solidarité francophone, avec un silence parfois complice, pendant que dans certains pays, on touche à la Constitution pour se maintenir au pouvoir. Robert Dossou pense également que la Francophonie ne devrait pas se tenir éloignée de la «vague démocratique», ne serait-ce qu’en insistant davantage sur le respect de la durée des mandats présidentiels.
Les pays francophones toujours, devraient avoir une vision commune en matière de paix et de sécurité, d’immigration aussi. La Francophonie devrait ainsi parvenir à franchir les obstacles liés à l’harmonisation et à l’application des conventions internationales. C’est l’avis du président du Conseil sénégalais des droits de l’Homme, Alioune Tine, dont la communication a été lue, en son absence, par Moussa Daff, directeur de l’Ecole Doctorale Arts, Cultures et Civilisations (ARCIV).
Le Colloque sur la Francophonie a aussi été l’occasion, pour certains, de témoigner de la relation, qu’elle soit personnelle ou professionnelle (ou les deux) qu’ils ont entretenue ou entretiennent encore avec le Secrétaire général sortant de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), Abdou Diouf. Un homme dit-on, à la fois humble et courtois, d’une grande générosité et d’une intelligence humaine. Un homme aussi avec une certaine volonté de consensus, qui «aura mieux fait connaître la Francophonie».
Ce que prouve ce Colloque sur la Francophonie qui prend fin ce jour, vendredi 31 octobre, c’est que c’est bien un sujet transversal, que l’on peut associer à des questions comme la diversité culturelle, l’éducation ou la linguistique. Et pendant que l’on parle de Francophonie, la langue française doit se battre pour ne pas se faire éclipser par l’anglais. Et aussi pour que les jeunes se sentent plus proches du français qu’ils auraient parfois tendance à avoir honte de parler, de peur de se tromper.
Imaginez-vous la maman de deux enfants assistant scrupuleusement à un Colloque sur la Francophonie, et qui se désole que, lorsque ses adolescentes font des recherches sur Internet, qu’elles ne tombent malheureusement que sur des articles en anglais, parce qu’ils bénéficient d’un meilleur référencement que les sources documentaires en français. Elle qui se dit «fanatique du président Senghor», voudrait que ses deux filles aiment la langue de Molière «comme on (lui) a appris à le faire, avec liberté et sans contrainte».
Lorsqu’elle compare le français à une langue comme l’anglais, elle se dit que chez Shakespeare, on est plus tolérant et plus accessible. Ce qui fait que l’on a un peu moins de complexes à s’exprimer, à pratiquer, et moins peur de commettre quelque faute impardonnable.
Dans la salle, le professeur agrégé de lettres classiques, Alain Houlou, suivait sans doute cette intervention avec intérêt, lui qui disait, quelques minutes auparavant, que la Francophonie ne pouvait plus seulement se contenter de parler de culture et de lettres, mais qu’elle devait aussi vivre avec son temps et s’intéresser à des domaines tels que la technique, la médecine ou la chimie, mais dans le respect de l’humain.
L’humain, c’est aussi les jeunes auxquels est dédié le 15e Sommet de la Francophonie. D’eux, on dit par exemple qu’ils ont plutôt tendance à avoir d’autres références que francophones. Idem pour leur connaissance parfois superficielle de la Francophonie institutionnelle, un concept qui leur paraît sans doute lointain. Dans les salles de classe et les amphithéâtres, certains élèves ou étudiants, c’est le témoignage d’une enseignante, éprouvent une certaine honte à parler français, pendant que la langue d’enseignement elle-même-chez nous, le français- n’est pas toujours maîtrisée par ceux qui ont été formés pour la transmettre.
Il faut dire aussi que les anciennes colonies entretiennent avec la langue «du maître» une relation parfois complexe ou ambiguë. A la manière d’un homme amoureux de deux femmes, se sentant coupable d’aimer l’une plus que l’autre, ou la seconde pas comme la première. Avec le sentiment, lorsqu’il s’agit des langues, de trahir l’une lorsque l’on s’exprime convenablement dans l’autre, et vice-versa.
Le conteur et professeur de lettres Massamba Guèye donnait justement l’exemple de ces personnes qui se vexent facilement quand on leur reproche quelque maladresse en français, mais qui assument parfaitement-ou revendiquent ?- que la connaissance qu’ils ont de leurs langues nationales est plutôt médiocre. Aujourd’hui, disait l’ancienne ministre de la Culture au Burkina Faso, Alimata Salambéré, «le français doit se battre en permanence pour affirmer sa place et sa spécificité».
Dans l’audiovisuel, comme elle dit, «certains médias participent à promouvoir la langue française», et avec la bénédiction de la Francophonie : TV5 Monde et la Télévision suisse romande (TSR) entre autres.
Pour ce qui est de la formation, l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) regroupe 739 établissements d’enseignement supérieur. Le principal défi reste celui de la mobilité des chercheurs au niveau de l’espace francophone, une meilleure circulation des personnes et des biens.
"LE SOMMET DE L'OIF EST UN GRAND MOMENT INTELLECTUEL"
PENDA MBOW, REPRÉSENTANTE DU CHEF DE L’ÉTAT AUPRÈS DE LA FRANCOPHONIE
Mme Penda Mbow, représentante personnelle du chef de l’Etat auprès de la Francophonie, a qualifié les interventions du forum de « très grands moments intellectuels ». Elle a mis en exergue l’expertise des intervenants qui « ont une expérience du développement de l’institution ».
Depuis avant-hier, vous suivez les interventions sur le colloque, quelle appréciation faites vous sur la qualité des débats ?
C’est un très grand moment intellectuel, un moment d’échanges entre sommités qui ont surtout une expérience de la Francophonie, une expérience du développement de l’institution. Et, je crois que c’est cela qui est intéressant au- delà de la réflexion intellectuelle. L’apport des uns et des autres, a porté sur ce que chacun a vécu.
Parce que cette organisation, on la voit, s’est formée. Elle s’est forgée, développée grâce à la capacité, à la générosité mais surtout à l’imagination de personnalités qui ont voulu faire de cette organisation ce qu’elle est aujourd’hui.
L’histoire de la Francophonie, c’est la rencontre d’individualités qui ont voulu créer un espace de dialogue, d’échanges, d’expertises mais surtout un espace de solidarités entre peuples qui ont eu un vécu historique, ont été liés par l’histoire à travers cette langue commune.
Et, c’est cette volonté individuelle, la rencontre de ces individualités, qui a fait ce destin collectif de la Francophonie jusqu’à ce qu’on ait l’organisation incarnée dans sa volonté politique actuelle par Abdou Diouf. Cette organisation est en train de prendre une autre orientation parce qu’on va avoir un rôle économique avec de nouveaux acteurs, les jeunes, les femmes et cela me parait fondamental.
Aujourd’hui, on a rendu hommage au président Abdou Diouf surtout par rapport à son action dans l’institution et la manière dont il l’a élevée au point de lui donner cette stature.
Ce que j’ai le plus retenu, c’est que si le président n’avait pas un vécu au Sénégal, il n’allait peut-être pas donner à l’organisation cette dimension et tout le monde l’a souligné. Les qualités exceptionnelles de l’individu aussi ont fait qu’il a pu surmonter tous les obstacles et œuvrer avec beaucoup d’humanisme pour faire de l’organisation ce qu’elle est. Aujourd’hui, la grande question qui se pose est qui après Diouf, et comment perpétuer l’héritage.
Il a beaucoup été question des défis à relever à l’occasion de ce forum. Quels sont les plus importants ?
Le défi le plus important est d’abord économique. Comment créer une plus-value à l’intérieur de cet espace francophone fondé sur une volonté réelle de développement et de solidarité ?
C’est un premier défi. Le deuxième a trait aux acteurs qui se renouvellent par les femmes et les jeunes. Il y a également les défis qui fondent même les valeurs de la Francophonie, à savoir la démocratie, les Droits de l’Homme. Tout le monde sait que les pays n’évoluent pas de la même manière, par rapport à ces valeurs. Il est donc important de tout faire pour que celles-ci soient des valeurs communes qui puissent être vécues de la même manière.
Il y a aussi le défi de la circulation dans cet espace francophone. Tout le monde se pose des questions: comment développer cette solidarité s’il n’y a pas une circulation facile à l’intérieur de cet espace ? Un autre défi que nous rencontrons, c’est par rapport à la mondialisation. Comment faire en sorte que la voix de la Francophonie puisse exister dans cet espace mondialisé où la diversité culturelle n’est pas toujours valorisée.
Je crois que nous devons valoriser cette diversité à l’intérieur de l’espace francophone et on l’a rappelé avec les discussions sur les langues nationales, la question linguistique. Tout cela doit être repensé et le renouvellement des idées doit continuer à l’intérieur de la Francophonie. L’avenir de la Francophonie, c’est un avenir très important dans l’évolution de nos sociétés.
Etes-vous rassurée et optimiste à un mois de la tenue du 15ème Sommet ?
Je suis absolument optimiste notamment quand on voit déjà tout ce que le Sénégal a fait, l’engagement du président Macky Sall, pour accueillir le sommet. Cela est le reflet même de ce que représente cette institution. Je l’ai dit, le destin de la Francophonie est intimement lié au destin du Sénégal quand on voit le rôle que notre pays a joué pour la bonne marche de la Francophonie.
On l’a dit, le Sommet de Dakar en 1989, a marqué un tournant dans l’histoire de cette institution. Beaucoup d’instruments sont issus de cette rencontre. Dans un mois, le sommet reviendra à Dakar et va encore opérer un tournant décisif dans l’organisation.
Nul doute que le Sénégal continuera à jouer un rôle important pour promouvoir le message d’espoir aux peuples de la Francophonie.
''ABDOU DIOUF A HABILLÉ L’OIF DE SA PERSONNE ET DE SON EXPÉRIENCE''
En tant qu’ami et proche collaborateur de Abdou Diouf, quel regard portez-vous sur l’homme ?
Je me contenterai de parler de l’homme avec lequel je travaille au quotidien depuis 12 ans. Je vois un homme courtois, qui sait mettre ses collaborateurs à l’aise pour pouvoir tirer le meilleur d’eux. C’est un fin pédagogue, lui-même passé entre les mains d’un fin pédagogue. Il est donc dans la transmission, parce que moi qui n’étais pas fonctionnaire formé à ses arcanes, il a su m’encadrer, m’accompagner et me faire profiter de son expérience.
Ensuite, il y a que l’homme a une certaine stature, il a des états de service faits d’expériences, de hauteur et de sagesse qui lui ont permis d’habiller de sa personne et de son expérience cette organisation qui était une petite institution invisible qui, aujourd’hui, a une audibilité et une crédibilité.
Aujourd’hui, sans avoir les moyens des grandes organisations internationales, la Francophonie joue dans la cour des grands. Et cela, c’est à Abdou Diouf qu’on le doit.
Est-ce à dire que son successeur aura du pain sur la planche?
Certainement. Son successeur a du pain sur la planche, parce que tout le monde l’a dit, Abdou Diouf a mis la barre très haut. Il faudrait donc que son successeur puisse se hisser à sa hauteur. Maintenant, on ne dit pas tout de suite qu’il faut arriver à ce niveau, mais il faut tendre vers.
Parce que même la Francophonie est un idéal, quelque chose à reconstruire, à rebâtir, à perfectionner. Donc, il est important que le futur secrétaire général s’inspire de l’intelligence humaine de Abdou Diouf pour aller de l’avant et maintenir les acquis.
Quelles actions de Abdou Diouf à la tête de la Francophonie vous ont marqué ?
Toutes ses actions m’ont marqué. Son combat pour la démocratie, le respect des cultures, la dimension humaine, le respect des peuples, des mémoires, toutes les actions de Abdou Diouf sont marquantes.
Quelque part, il est à l’image de son maître. C’est quelqu’un de protéiforme, qui s’intéresse à plusieurs aspects. Mais, je suis très sensible à son combat pour le respect de la diversité culturelle, également pour l’ancrage de l’irréversibilité des processus démocratiques.
Il est rare de voir un film africain primé alors qu’il n’est pas financé par des étrangers. Pourtant, c’est ce qui vient d’arriver à "Mbeubeuss, terreau de l’espoir", réalisé par le Sénégalais Nicolas Sawalo Cissé. Ce film a reçu deux prix au festival Ciné’Eco tenu au Portugal du 11 au 18 octobre courant.
En réalisant son premier film sur l’environnement "Mbeubeuss, terreau de l’espoir", Nicolas Sawalo Cissé ne s’attendait pas à une quelconque distinction. Il a fait son film tout seul, en s’affranchissant des réseaux et circuits habituels.
"Ce film est fait par nous et pour nous. Mbeubeuss n’est pas dans le cadre conforme des réseaux internationaux, qui mettent leur argent et exigent le passage du film dans les festivals", a revendiqué son auteur. Il faisait face à la presse, hier, à l’espace Vema de l’embarcadère Dakar-Gorée. Ainsi, ce film d’une heure 15 minutes, réalisé dans le plus grand dépotoir d’ordures du Sénégal, ne devait être diffusé dans aucun festival du monde. Car, comme le dit le cinéaste doublé d’un architecte, "quand on n’est pas dans le circuit, on n’a pas de visibilité".
Cependant, le travail bien fait peut toujours espérer une récompense. Et Mbeubeuss n’a pas dérogé à la règle. Visionné par hasard par le chargé de la sélection des films devant passer au festival Ciné Eco du Portugal, José Mendez, il est retenu, malgré quelques réticences. "José Mendez a dit que ce film va être diffusé, qu’on le veuille ou non, parce qu’il le mérite", a rapporté Nicolas Cissé. A juste raison. Il est la seule production en compétition qui a reçu deux distinctions. Pourtant, de grandes nations du cinéma comme les Usa ou encore la France figuraient parmi les pays en concours. "Mbeubeuss" était donc comme un outsider qui a su surprendre et plaire.
Le Prix de la jeunesse de ville de Seia au Portugal lui a été attribué ainsi que celui du long métrage pour l’environnement. "J’étais très fier de représenter l’Afrique. Je ne m’attendais pas à avoir ces prix-là", a-t-il dit. Pourtant, le film a été bien accueilli par le public qui a pris part à ces rencontres cinématographiques. "Après la diffusion de mon film, j’ai eu le même sentiment que celui qui a suivi la première diffusion au Grand-théâtre. Les gens ont pleuré par moments et applaudi aussi", a témoigné Nicolas Cissé. Pour qui, le fait de participer à cet évènement lui a permis de s’immiscer dans une famille de défenseurs de l’environnement éparpillés à travers le monde.
Si au début "Mbeubeuss" ne s’était pas fixé des objectifs quant à la participation à des festivals, Ciné Eco lui donne une autre tournure. Son réalisateur espère qu’il sera diffusé dans d’autres rencontres. Déjà que les dix directeurs de festivals ayant pris à Ciné Eco veulent l’avoir dans leurs manifestations. Et le réalisateur lui-même prévoit de l’envoyer à la sélection du Festival panafricain d’audiovisuel et de cinéma de Ouagadougou (FESPACO). "Ce film peut figurer dans la sélection du FESPACO au même titre que tous les films qu’on y projette. Maintenant, reste à savoir s’il sera retenu, parce que je ne suis pas dans le circuit des financiers étrangers. De toute façon, je vais envoyer et attendre", a-t-il dit.
Le graffiti n’est pas seulement un art de rue, pour l’artiste Docta. Il est également un vecteur de sensibilisation. C’est pourquoi, il a initié depuis cinq ans un festival de graffiti avec comme soubassement une campagne de sensibilisation sur des questions de santé. Cette année, Ébola est au centre des préoccupations.
S'investir dans le social, c’est l’une des vocations de la structure "doxandem squad" dirigée par l’artiste graffeur Amadou Lamine Ngom dit Docta. Comme chaque année, il met son art au service de la population, à travers une rencontre baptisée "graff et santé".
La présente édition est la cinquième du genre et vise à rendre salubres certains quartiers de la banlieue dakaroise. Ce, en repeignant les murs, mais aussi et également en organisant des séances de consultations médicales gratuites, en collaboration avec des médecins.
L’actualité aidant, les organisateurs n’ont pas cherché loin, cette année, la maladie sur laquelle communiquer. "Ébola est en train de faire des ravages en Afrique et a même commencé à faire peur en Occident. Jusque-là, le Sénégal a pu se préserver du mieux qu’il peut. On n’a connu au Sénégal qu’un cas importé qui a été bien géré. Actuellement, nos autorités mènent une bataille contre la maladie et il était de notre devoir d’apporter notre pierre à l’édifice et de contribuer à notre manière", a expliqué à EnQuête Docta.
Ainsi, en plus des fresques murales réalisées dans des quartiers de Guédiawaye et Thiaroye, Doxandem Squad a procédé à des dons en savon et eau de javel, afin de donner à ces populations les moyens de se protéger contre la maladie.
"Il est bien de sensibiliser sur la question. Mais en plus de cela, il faut que des gestes concrets accompagnent les choses. Des messages transparaissent sur les fresques murales réalisées, c’est vrai. Cependant, autant faire plus quand on le peut. C’est pourquoi on a décidé de donner du savon et de l’eau de javel à ces populations", a déclaré notre interlocuteur.
Guédiawaye et Thiaroye n’ont pas été choisis au hasard. Ce sont des quartiers à forte concentration humaine et où la pauvreté règne. La caravane de Graff et santé y était respectivement les 17 et 18 novembre ainsi que les 24 et 25 du même mois. Keur Massar reçoit la dernière étape, le 31 octobre et le 1er novembre.
En collaboration avec l’association "casa di Ibrahima" et le soutien des volontaires des Nations unies, de l’association "life", d’Eiffage et de Dakar women group, la caravane menée par Docta posera ses bombes aérosols pendant 48h au foyer des jeunes de l’unité 3 des Parcelles Assainies de Keur Massar, non loin du terminus de la ligne 71.
On le connaît pour son franc-parler. Et Ouza Diallo n’a raté aucune occasion pour dire ses vérités. Rencontré, hier, à la sortie d’une audience avec le ministre Mbagnick Ndiaye, il déplore que le chef de l’Etat «ne croit pas à la culture».
«Même chanson d’Orphée …»
«Je suis venu voir pour échanger avec le ministre Mbagnick Ndiaye et partager un peu mon expérience et mon expertise. Je ne lui jette pas des fleurs, ce n’est pas dans mes habitudes. Mais il a été très simple. Depuis l’avènement de Macky Sall, c’est le ministre humble, simple et ouvert que j’ai rencontré. Je suis là pour l’écouter». «La musique sénégalaise n’est pas du tout mal, mais il faut qu’on diversifie. Comme l’a si bien dit M. Le ministre. Je lui ai dit ça, lors de l’inauguration du pôle de la Francophonie. J’étais sidéré, franchement. J’ai vu qu’on refait la même chanson. On réécoute la même chanson d’Orphée, depuis 60 ans. D’où il faut diversifier avec d’autres ethnies, les Bassaris, les Mankagnes, etc.
Bref, on est en phase avec le nouveau ministre. C’est pourquoi, quand je suis venu je lui ai exprimé ma sympathie. C’est comme ça que je vois les choses. Parce que moi, je n’ai rien encore à attendre de cette musique. J’ai tout donné (il se répète). Ce qui me reste, c’est de donner des conseils à ce genre de ministre, qui sont tellement humbles et bien ouverts.
Mbagnick, un «roots»
«Je suis là pour apporter une touche sur le plan culturel. Mais concernant la gestion de la culture, je l’ai dit devant tout le monde, à l’avis de beaucoup de musiciens, Macky Sall ne croit pas à la culture. Je demande au ministre de faire tout son possible pour que Macky Sall revienne sur le plateau pour respecter un tout petit peu la culture. Parce que tout le monde parle de ça. J’en fais partie et je l’ai dit devant le ministre».
«Mbagnick a de très bonnes idées. Je sais que c’est un ‘roots’. C’est très important un ministre ‘roots’. Je ne lui jette pas de fleurs, je n’ai pas l’habitude. Je ne suis pas venu chercher ici quoi que ce soit. C’est parce que je sais qu’il peut nous apporter quelque chose, il est simple et ouvert. Et c’est un ‘roots’ qui croit à la culture africaine. Je ne parle pas de culture sénégalaise».
«Donc c’est possible de discuter avec lui et d’amener notre expertise. Je profite de l’occasion pour demander au Président de tous les Sénégalais de nous laisser, encore une fois, ce ministre- là continuer et terminer ses idées. Ce n’est pas parce qu’il est parent à moi que je le dis. Mais moi j’aime les gens simple».
«Yahya Jammeh m’écoute»
«Depuis Coura Ba Thiam et l’ancien feu Alioune Sène, je n’ai pas vu un ministre pareil dans le département de la Culture. Voilà un ministre avec qui on peut faire beaucoup de choses au niveau de la culture sénégalaise. Il écoute les musiciens et il est ouvert. Ce qui me fait dire qu’il peut apporter à la culture sénégalaise».
«Il faut vraiment qu’on l’aide, qu’on l’appuie et qu’on demande au Président Macky Sall de nous le laisser encore. Qu’on essaie d’ici deux ans encore et qu’il ne faut tout changer, à chaque fois». «En tant que doyen de la musique, ce qui m’intéresse chez Mbagnick, c’est son sens de l’écoute. Je suis en phase avec lui et je l’encourage. Si on dit qu’Ouza est un ami de Yahya Jammeh, c’est parce qu’il m’écoute. Il écoute ce que je dis. Ma vie, c’est comme ça. J’aime les gens ouverts et qui écoutent. Mbagnick est simple et ne se considère même comme un ministre, quand vous êtes ensemble (…)»
Le problème du «mbalax»
«Le ‘mbalax’ n’est pas tellement connu sur le plan international (….) Il n’a pas de rythme international. Peut-être avec les grands qui sont là, avec le temps et l’appui du ministre de la Culture, on va trouver une alternative en ce qui concerne le ‘mbalax’. Il n’y a que les Sénégalais et les Sénégambiens qui apprécient le ‘mbalax’. C’est pourquoi, il faut appuyer les autres ethnies. Parce qu’elles ont un rythme universel arrivent à s’épanouir sur le plan international ».
Différend You-Thione
«Je n’ai pas aimé. Ce se sont des grands de la musique sénégalaise. Il faut rester sur l’arbre à palabre et discuter. Quand je suis revenu du Burkina et que j’ai entendu cet imbroglio, je n’ai pas aimé. J’ai même dit que je vais appeler Thione pour qu’il mette de l’eau dans son thé et voir Youssou. Ce sont de grands griots modernes. Il faut une réconciliation. Il faut qu’on se calme. En tant que vieux, on n’a pas ce droit. Ce sont des vétérans, des doyens de la musique».